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Débat. Pour ou contre la graphologie ?

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L’analyse graphologique permet de mieux cerner la personnalité d’un candidat. Elle doit être maniée avec précaution, en complément d’entretiens en face à face ou de mises en situation.

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LE “POUR”

1 - Un révélateur des points forts

Difficile de percer totalement à jour un candidat lors d’un entretien d’embauche. Stressé par le jeu du recrutement, le futur vendeur, pourtant d’un naturel communicatif, peut paraître, ce jour-là, anormalement méfiant ou, au contraire, trop fougueux. « L’analyse graphologique permet d’aller plus loin et de mettre en valeur les forces et les faiblesses d’un candidat », indique Christian Dulcy, vice-président de la SFDG (Société française de graphologie). Le décryptage d’une lettre de motivation et de documents annexes manuscrits – notes de brouillon, dossier, etc. – permet à l’expert de brosser un portrait précis du candidat. « L’écriture est révélatrice de la personnalité – est-il flexible, emphatique, ouvert ? –, de l’intelligence – est-il porté sur l’analyse et la synthèse ? – et, enfin, de l’activité – affiche-t-il un goût pour le challenge, fait-il preuve d’esprit d’initiative ? », poursuit l’expert. Autant d’informations qui aideront le recruteur à mieux appréhender le comportement de tel ou tel candidat. « Et, le cas échéant, à repêcher une candidature au sujet de laquelle quelques réserves avaient été émises », confirme le porte-parole de la SFDG.

2 - Un détecteur d’arnaques

Curriculum vitæ sciemment enjolivés, lettres de candidature rédigées par un tiers (ami ou conjoint) : le recruteur doit savoir déjouer les arnaques parfois mises au point par certains candidats. En cas de doute sur une expérience professionnelle ou un diplôme, le recruteur peut recourir à la graphologie. « L’analyse de l’écriture permet de déceler un caractère sincère ou manipulateur, une personne sûre d’elle ou en proie à des doutes, observe le porte-parole de la SFDG. En recoupant les éléments mentionnés sur le CV, la perception du recruteur lors de l’entretien et les conclusions de l’analyse graphologique, il est aisé de déduire, par exemple, que l’auteur de la lettre et le candidat sont deux personnes distinctes, et de lever le masque. »

3 - Une technique souple et rapide

« Il est plus rapide, plus économique et plus simple, en termes d’organisation, de recourir à l’analyse graphologique que de faire passer des tests de personnalité à des candidats », constate Bruno Laforge, directeur des ressources humaines du groupe Office Dépôt. C’est notamment vrai pour les recruteurs spécialisés dans l’approche directe, qui auront du mal à obtenir un rendez-vous avec les candidats, pour cause d’agenda bien rempli. « De plus, en quarante-huit heures, vous pouvez avoir les résultats », souligne Christian Dulcy.

LE “CONTRE”

1 - Un descriptif laconique

Utilisée le plus souvent en phase finale de recrutement pour départager deux candidats, l’analyse graphologique peut également servir à effectuer, en amont, un premier tri des candidatures. « Avant même le déroulement d’entretiens en face-à-face, le graphologue intervient en préfiltrage superficiel et dresse ce que j’appelle des “portraits flashes” des postulants, indique Rami Kechteil, consultant senior au sein du cabinet de recrutement Mercuri Urval. C’est une utilisation de la graphologie extrêmement contestable d’un point de vue déontologique, et discriminante pour les candidats. » Selon Christian Dulcy, cette pratique ne se justifie que si le profil recherché est extrêmement pointu. « L’analyse graphologique va alors permettre de sélectionner les candidats dotés des qualités requises et éviter à l’entreprise recruteuse de recevoir trois cents postulants. »

2 - Un jugement subjectif

« L’analyse graphologique fournit des informations sur la personnalité d’un candidat ; elle ne dit pas si ce dernier est en adéquation avec le poste à pourvoir, précise le porte-parole de Mercuri Urval. Ainsi, le portrait brossé par le graphologue se révèle souvent juste, mais la conclusion tirée de l’analyse peut être erronée. » Selon l’expert, la graphologie est davantage un outil de compréhension que d’évaluation : « Or, le recrutement en lui-même est un processus de mesure. C’est la raison pour laquelle la graphologie ne doit pas être utilisée comme outil décisionnel lors d’une embauche. Quant à la recommandation qui en découle, elle sera considérée avec la plus grande prudence. » Le risque ? « Renforcer la dimension subjective du jugement et favoriser la réaction intuitive », renchérit Bruno Laforge.

3 - Une méthode incomplète

Les experts sont unanimes : une analyse graphologique n’est pas une fin en soi. « Les éléments fournis par l’expert doivent, tout au plus, nourrir la réflexion du recruteur, indique Christian Dulcy. Charge à ce dernier de revoir le candidat pour confronter les conclusions du graphologue à sa propre perception de la personne. » Et, en cas de doute sur la pertinence de l’analyse, l’entreprise peut tout à fait procéder à une contre-expertise. Les professionnels insistent également sur la mise en situation du candidat (jeux de rôle, assessment center, etc.), afin d’évaluer très concrètement son comportement au sein d’un groupe, face à une situation difficile, etc. En clair, afin de lui donner une seconde chance.

4 - Une vision trop théorique

Autre réserve émise par les experts en ressources humaines vis-à-vis de la graphologie : la vision théorique des graphologues, qui ne rencontrent quasiment jamais les candidats dont ils passent l’écriture au crible. « Certains de ces experts n’ont jamais mis un pied dans l’entreprise ; ils ont donc une vision caricaturale des métiers de la vente – un vendeur est forcément une personne extravertie, fonctionnant à l’affectif – et méconnaissent les fondamentaux qui différencient un bon professionnel d’un moins bon », argumente Rami Kechteil. Tous les graphologues, bien sûr, ne rentrent pas dans cette catégorie. D’où l’importance de choisir le bon expert. « C’est une méthode qui nécessite beaucoup de finesse et dont l’efficacité dépend exclusivement de la qualité de son praticien », poursuit l’expert en recrutement.

Alternative

La morphopsychologie, une méthode contestée Dans le lot des méthodes visant à cerner la personnalité d’un candidat, la morphopsychologie tient une place de choix. Cette technique repose sur un postulat : il existerait un lien entre les traits du visage et le caractère d’une personne. Le morphopsychologue peut mener son analyse lors d’un entretien en direct ou à partir d’une simple photo d’identité. Le visage est alors découpé en trois parties. La zone inférieure (le menton) représente l’instinct, la zone médiane (de la lèvre supérieure aux yeux) correspond à la vie affective du candidat et la zone supérieure (au-dessus des yeux) va symboliser la vie intellectuelle. Entrent également en ligne de compte le cadre osseux et les chairs. Sans oublier les yeux, le nez et la bouche, appelés les récepteurs. Comme la graphologie, cette science fait grincer des dents nombre d’experts en ressources humaines, qui jugent son application subjective et discriminante pour les candidats.

En savoir plus

- SFDG (Société française de graphologie), 5, rue Las-Cases, 75007 Paris, Tél. : 01 45 55 46 94 www.graphologie.asso.fr - GGCF (Groupement des graphologues conseils de France), 43, rue Godot-de-Mauroy, 75009 Paris, Tél. : 01 42 65 28 28 www.ggcf.fr

 
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Emmanuelle Sampers

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