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Comment refuser une prime sans démotiver

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Vous devez annoncer à votre commercial qu'il ne touchera pas, cette année, de prime. Pour que votre vendeur accepte cette mauvaise nouvelle et ne se démotive pas, basez-vous sur des faits concrets et ne portez, en aucun cas, des jugements de valeur.

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@ FOTOLIA/TOMASZ TROJANOWSKI

Marc, directeur commercial, rencontre cet après , midi l'un de ses commerciaux. Au programme de ce face-à-face: la question des primes annuelles. Et les nouvelles sont mauvaises. Le commercial ne touchera qu'une part minime de ce à quoi il pouvait prétendre. Marc sait qu'il va devoir mener cet entretien avec dextérité s'il ne veut pas que le commercial reparte totalement démotivé. D'autant que la prime représente une part importante de sa rémunération. Il s'agit le plus souvent - en fin d'année - du versement de primes qualitatives indexées sur des indicateurs autres que le chiffre d'affaires et la marge. Mais mesurables. Depuis quelques années, ces primes ont fait une percée dans les systèmes de rémunération.

Instaurer des règles précises

Mais mettre en place de tels bonus ne s'improvise pas. Il est nécessaire de définir des règles précises d'attribution et de mettre en place des grilles d'évaluation pour être crédible, le jour où tombent les résultats. Ces primes peuvent se rapporter, par exemple, au nombre de signatures sur devis, au pourcentage d'affaires sur une gamme que l'entreprise veut développer ou encore au nombre de rendez-vous pris dans tel type d'entreprise. «Si le principe même et les règles de calcul et d'attribution ont été clairement définis en début d'année et validées par les bénéficiaires, alors l'attribution, ou non, de la prime fait partie de la règle du jeu, analyse Thierry Magin, directeur associé de MCR Consultants, cabinet conseil en management et systèmes de rémunération. Et le manager ne devra surtout pas infléchir la position objective de calcul et d'attribution, fine faut en aucun cas discréditer la pertinence d'une prime.»

En tant que manager, vous pouvez attribuer deux types de prime: l'une basée sur des critères qualitatifs, l'autre sur des critères quantitatifs. Les primes qualitatives sont difficilement mesurables et quantifiables. C'est le cas, par exemple, de bonus attribués en fonction du comportement ou de l'attitude commerciale.

Pour cadrer ce type de prime, la direction doit avoir formalisé, en amont, les comportements et attitudes à adopter à travers un référentiel qu'elle aura communiqué aux commerciaux. «La mission du manager, lors de l'entretien au cours duquel sera évoqué le non-versement de cette prime, est, dans ce cas, délicate, reconnaît volontiers Thierry Magin. Le manager est, en effet, celui qui traduit ces valeurs par rapport au comportement du commercial. Par exemple, le vendeur a-t-il été aussi rigoureux dans l'application des processus de vente ou d'alimentation de la base de données que le préconisait le référentiel?» On peut considérer qu'il y a là une part de subjectivité. Pour faciliter le déroulement de l'entretien et s'assurer que la décision de la direction commerciale ne sera pas remise en cause, le manager doit donc être irréprochable du point de vue de la rigueur et de l'objectivité.

Les primes quantitatives sont, elles, en général collectives. «Dans la mesure où le mode de calcul a été présenté et validé en amont, le travail du manager va consister à commenter les chiffres. Une telle argumentation n'est pas contestable. Le travail du manager en est donc facilité, souligne Thierry Magin. Dans la mesure où cette prime est collective, il est souhaitable que le manager en fasse l'analyse lors d'une réunion d'équipe», ajoute l'expert. Si le message n'est pas perçu de la même façon partout le monde, au moins l'argumentation aura-t-elle été la même pour tous.

Le témoignage de Laurent Collignon, directeur commercial de PGS [fabricant de palettes en bois)

«Le commercial ne doit pas appendre, lors de l'entretien, qu'il n'aura pas sa prime»


Laurent Collignon, directeur commercial de PGS, sait par expérience qu'un entretien avec un commercial au cours duquel il doit aborder le sujet des primes est délicat. «Je me souviens d'un face-à-face qui s'est mal déroulé. Je voulais changer le comportement du commercial en question et du coup, j'ai insisté sur les aspects négatifs. J'ai mis deux mois pour le motiver à nouveau.» Une expérience dont le directeur commercial a retiré un certain nombre de règles: «Tout d'abord, le vendeur ne doit jamais découvrir qu'il a décroché ou non ses primes lors du face-à-face. Voilà pourquoi désormais, il reçoit chaque mois un relevé de ses résultats et sait donc exactement ce qui l'attend.» Ensuite, Laurent Collignon s'efforce, pendant l'entretien, de parler davantage de l'avenir que du présent. Une solution pour ouvrir la discussion et éviter de se crisper sur la mauvaise nouvelle.

Un vrai dialogue

Quelle que soit la nature de la prime, le manager doit entamer, lors de ce face-à-face, un vrai dialogue. Surtout lorsque les nouvelles sont mauvaises... Gilda Jantzen, directrice associée du cabinet en conseil, formation et accompagnement Agissens et consultante à l'IFG-CNOF, conseille de conduire l'entrevue comme un «entretien de critique constructive». Et de respecter quelques règles. La première? Préparer l'entretien. «C'est la seule façon de s'assurer que le moment venu, le manager exprimera les choses comme il faut, sans déraper. Il est indispensable, pour cela, d'avoir consigné les événements survenus tout au long de l'année, les réussites, les échecs, les imprévus... Et puis de se poser la question des responsabilités quant aux résultats obtenus.» Ce travail permet au manager d'arriver avec une vision claire de la ligne qu'il va tenir. Seconde règle: «Au moment du face-à-face, il faut commencer par évoquer les éléments positifs, conseille Gilda Jantzen. Et se baser sur des faits et non pas sur des jugements de valeurs.» Et puis, le manager doit amener son collaborateur à trouver lui-même les explications. Enfin, lorsque l'entretien touche à sa fin, «il ne faut pas conclure la discussion sur la non-atteinte des objectifs du commercial et les conséquences sur sa prime, mais sur les moyens à mettre en place à l'avenir pour les atteindre. Rester positif, donc».

A RETENIR

5 règles pour réussir votre entretien


(selon Philippe Sirault, professeur en ressources humaines, comportements et organisations à Reims Management School)


1. Que la prime soit attribuée ou non, le collaborateur ne doit pas être surpris. Cet entretien doit donc être la formalisation de ce qui s'est dit tout au long de l'année.
2. Le manager a intérêt à bien connaître son interlocuteur: avoir identifié ce qui le motive, ses attentes, ses probables réactions... Pour cela, il peut s'appuyer sur des techniques ou théories comportementales.
3. Il ne faut pas dramatiser l'entretien, mais au contraire, resituer la mauvaise nouvelle dans un contexte plus global. On ne peut pas éluder les questions qui fâchent. Mais la critique doit être constructive.
4. Dans tous les cas, le manager doit être exempt de tout jugement de valeur.
5. Enfin, il ne faut surtout pas être pressé ou être dérangé durant l'entretien.

 
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Rabaud Anne-François

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