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Copie non conforme pour les pros de l'impression

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Xerox et Ricoh s'affrontent aujourd'hui sur le marché de l'impression avec des produits et des stratégies de vente différents. Mais ils ont en commun une volonté de développer leur chiffre d'affaires sur l'activité services.

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En 1998, le marché de l'impression dépasse pour la première fois celui de la copie. «On n'a jamais autant imprimé que depuis l'émergence d'Internet et de la mise en réseau des informations», juge Jacques-Édouard Gueden, directeur de Xerox Office France. Une situation face à laquelle Ricoh, dont le cœur de métier était la copie, se devait de réagir pour ne pas disparaître. Son concurrent Xerox ne s'est pas réjoui pour autant, car le marché a très vite imposé une nouvelle donne: les appareils multifonctions. Des machines qui, une fois connectées au système d'information de l'entreprise, sont à la fois des imprimantes, des photocopieuses et des scanners capables d'envoyer des documents n'importe où dans le monde.

Offre produits: la couleur contre le noir et blanc

Avec l'arrivée des appareils multifonctions, les deux acteurs ont dû réorienter leur stratégie pour conquérir ce nouveau marché. À tel point que, pour Ricoh, 80 % de son chiffre d'affaires issu de la vente de matériel est réalisé aujourd'hui par ces appareils! Chez Xerox, les multifonctions représentent à eux seuls près de 60 % du chiffre d'affaires. Les deux sociétés n'abandonnent pas pour autant les imprimantes classiques, qui représentent encore entre 10 % et 15 % de leur business. Reste qu'elles ne s'affrontent pas sur une gamme de produits identiques. Alors que l'Américain Xerox délaisse le noir et blanc pour la couleur, Ricoh croit encore à ce marché. «La couleur est cinq fois plus chère que le noir et blanc, et beaucoup d'entreprises ne sont pas encore prêtes pour cette dépense supplémentaire qui ne se justifie pas toujours», estime Jean-Pierre Senemaud, vice-président du directoire en charge des opérations et des systèmes d'information de Ricoh France. De fait, 70 % des imprimantes Ricoh vendues proviennent de la gamme noir et blanc. Xerox, lui, préfère porter tous ses efforts sur la couleur, et notamment le haut de gamme avec des appareils laser. «La croissance sur ce marché est de 48 %, alors qu'elle est quasi atone pour le noir et blanc, affirme Jacques-Édouard Gueden. Nous préférons surfer sur la vague de la croissance plutôt que d'aller à contre-courant», insiste-t-il. De son côté, Ricoh tente de rattraper son retard en cherchant à se positionner sur des imprimantes capables de proposer à la fois du noir et blanc et de la couleur. Car le Japonais admet que les imprimantes proposant uniquement du noir et blanc disparaîtront dans les prochaines années.

Cible clients: PME contre grands comptes

Xerox et Ricoh s'affrontent donc directement sur le marché des multifonctions, mais leur cible clients n'est toutefois pas totalement identique. L'Américain vise davantage les PME que son rival nippon. Les petites et moyennes entreprises représentent ainsi 75 % du chiffre d'affaires de Xerox, contre 25 % pour Ricoh. Toutefois, ce dernier est davantage présent sur les grands comptes, où il réalise 75 % de son chiffre d'affaires, contre 25 % pour Xerox. Leur façon d'aborder ces marchés diffère également. Ricoh aborde celui des PME sur un modèle vertical, c'est-à-dire par cœur de métier. Un choix récent qui marque l'aboutissement d'une meilleure politique de connaissance du terrain et des spécificités métiers de ses clients, notamment grâce à la mise en place réussie d'un logiciel de CRM (gestion de la relation clients). «Grâce à notre base de données, les commerciaux sont plus à même de connaître les besoins de chaque client en fonction de leur métier. On ne s'adresse pas à un architecte comme à une SSII.» Les grands comptes sont, eux, traités de façon horizontale par les commerciaux de Ricoh. «Deux banques peuvent se développer de manières totalement différentes, et nous préférons les aborder par type de problèmes que par métier», confie Jean-Pierre Senemaud. Une vision que ne partage pas Xerox, qui applique exactement la stratégie contraire. Son modèle de distribution est, en effet, essentiellement horizontal, tant pour les grands comptes que pour les PME, à l'exception des régions très denses, notamment l'Île-de-France, où la démarche commerciale se fait sur un modèle vertical pour les grands comptes. Chaque commercial est ainsi spécialisé dans un secteur précis. Deux approches en complète opposition, à l'image de leur modèle de vente.

Distribution: vente directe contre indirecte

Pour ce qui est de leur stratégie de distribution, les deux sociétés, une fois encore, ont adopté des démarches opposées. Alors que Ricoh assure 85 % de son chiffre ­d'affaires en mode direct, avec une force de vente de 400 commerciaux, Xerox a fait le choix du modèle totalement indirect. Une décision depuis longtemps assumée par l'Américain sur les PME/PMI, mais étendue depuis trois ans et finalisée depuis neuf mois sur les grands comptes. «Face aux difficultés financières du groupe, il a fallu mettre en place un modèle plus profitable», relate Jacques-Édouard Gueden. Grâce à une meilleure adéquation des besoins des clients, Xerox a pu observer une croissance de 10 à 15 % des ventes de ses équipements. De son côté, Ricoh ne s'appuie que légèrement sur un réseau de revendeurs, à hauteur de 15 % de son chiffre d'affaires et essentiellement sur le marché des PME. Élie Choukroun, directeur du développement des ventes chez Ricoh, reconnaît toutefois qu'«il est impossible de couvrir toute la France avec des commerciaux. Les revendeurs nous permettent d'assurer un maillage complémentaire et efficace du territoire». Si le modèle n'est pas amené à changer, Ricoh avoue toutefois vouloir étendre son réseau de revendeurs, et notamment l'ouvrir aux revendeurs informatiques. Le but? Toucher une autre cible que sont les directeurs des services informatiques, et non plus seulement ses cibles traditionnelles comme les directions des achats. Reste que le modèle indirect retenu par Xerox ne veut pas dire une absence de commerciaux sur le terrain. La société s'appuie sur une force de vente de 350 personnes, mais seulement 140 officient sur les solutions bureautiques. «Ils ne vendent plus au sens propre du terme, mais sont davantage dans une phase de conseil», explique Jacques-Édouard Gueden. Vingt d'entre eux couvrent le secteur des PME et une centaine s'occupe des grands comptes. En face, Ricoh aligne 110 commerciaux sur les PME et 144 sur les grands comptes. Tous deux ont fait le choix de surveiller de près les très grands comptes, lesquels représentent 15 % du chiffre d'affaires chez l'Américain, contre 36 % chez le Japonais. Vingt personnes chez Ricoh et 25 chez Xerox sont chargées des liens particuliers entre ces très gros clients et leur société.

Les services: futur terrain de bataille

Les services seront, sans conteste, le prochain point de rencontre de ces professionnels de l'impression. Ricoh souhaite désormais migrer vers la gestion totale du document, qui inclut l'impression, l'archivage, la copie, la dématérialisation, la mobilité aux offres d'audit et de conseil. De son côté, Xerox se définit désormais comme une société de services et de technique de l'environnement du document. Face à l'évolution du marché et de la demande, les deux acteurs n'ont effectivement plus le choix, et le virage déjà amorcé ne fera que se durcir dans les années à venir. Ricoh a pris très tôt la mesure de l'évolution: aujourd'hui, 52 % de son chiffre d'affaires est réalisé par les services, contre environ 10 % pour Xerox. «C'était véritablement pour nous une question de survie», assure Jean-Pierre Senemaud. Et de poursuivre: «Auparavant, nous considérions le document comme un point de sortie; désormais, nous l'envisageons comme un point d'entrée. Il s'agit dorénavant d'avoir une offre globale sur l'ensemble des procédures qui concernent le document.» Si le Japonais affiche une belle avance sur son concurrent, il a encore fort à faire. Combien de sociétés savent, en effet, que Ricoh offre des solutions de dématérialisation de factures? Probablement peu… Ricoh avoue effectivement avoir un déficit d'image pour une entreprise qui est encore perçue par le grand public comme un constructeur d'appareils photos! Xerox aura, lui aussi, fort à faire pour migrer vers des offres de service, mais, à la différence de Ricoh, la société semble toujours bénéficier d'une image de pionnier. «Nous avons connu des années difficiles autour de l'an 2000. Pourtant, aux moments les plus sombres, très peu de clients nous ont quittés. Nous avons l'image d'une société capable de se réinventer, de rebondir, de créer. En parvenant à renouveler l'ensemble de notre gamme et à diviser par quatre le temps de mise sur le marché d'un nouveau produit, nous sommes parvenus à rester compétitifs et performants aux yeux des clients et des prospects», commente Jacques-Édouard Gueden. D'autant que si les deux sociétés sont positionnées uniquement sur une offre entreprise au travers d'appareils bureautiques, Xerox porte ses compétences B to B beaucoup plus loin que son rival en proposant une offre pour les professionnels de l'impression. Un volume d'affaires non négligeable, qui pèse pour près du tiers de son chiffre d'affaires total. Un élément qui lui permet de devancer Ricoh en termes de chiffre d'affaires et lui confère une forte image d'industriel.

Ricoh

Chiffre d'affaires France: 450 millions d'euros Effectif France: 1700 personnes

Xerox

Chiffre d'affaires France: 854,7 millions d'euros Chiffre d'affaires branche office: environ 410 millions d'euros Effectif France: 3000 personnes

 
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Laurent Bailliard

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