Recherche
Magazine Action Commerciale
S'abonner à la newsletter S'abonner au magazine

L’essayer, c’est l’adopter

Publié par le

Convaincues qu’un test d’une semaine ou d’un mois renforce ou est plus efficace que des heures d’argumentation en face à face, de nombreuses marques n’hésitent pas à laisser leurs produits à l’essai chez leurs prospects. Une technique payante, à condition de respecter quelques règles.

Je m'abonne
  • Imprimer

Sur un marché très concurrentiel, la différence se fait rarement sur la qualité annoncée des produits. Le prospect demande à être convaincu par des éléments concrets et tangibles. Plaquettes pédagogiques, discours, démonstrations, primes, les outils ne manquent pas pour séduire et fidéliser. Parmi eux, l’essai prolongé du produit par le client, dans son environnement privé ou professionnel. Encore faut-il auparavant définir clairement l’objectif visé pour utiliser à bon escient cette technique de vente. “Le programme "Try and buy" que nous avons mis en place pour nos clients grands comptes n’est pas une démarche tous azimuts, explique Arnaud Dubar, directeur marketing de Lexmark, le fabricant d’imprimantes. Il correspond à une annonce produit, accompagnée par une visite en face à face. C’est une offre limitée dans le temps, proposée pendant les trois mois qui suivent la sortie du nouveau produit. Au-delà, elle n’a plus de raison d’être.” Les clients de Lexmark peuvent ainsi découvrir le dernier-né de la gamme, mis à leur disposition pendant deux à quatre semaines. Une période suffisante pour juger de l’utilité, de la performance de la machine en conditions de fonctionnement réel. La pertinence de l’offre d’essai est encore plus forte lorsque le produit est totalement novateur, voire hors du commun. Chez Fiat, le lancement du Multipla, un monospace de six places totalement atypique au profil de dauphin, a suscité des inquiétudes dans les services commerciaux. Des journées portes ouvertes à la mi-janvier les ont fait s’envoler. Le réseau national a enregistré plus de 5 500 essais de conduite en ville qui, affirme-t-on chez Fiat, ont largement contribué à booster les ventes. Certains concessionnaires sont même allés plus loin et ont joué la carte du test grandeur nature en prêtant la voiture pendant 24 heures. L’essai permet de se familiariser avec un produit, mais aussi avec une marque. C’est l’option retenue par MCC, le tout nouveau constructeur automobile producteur de la Smart. “Non seulement il s’agissait pour nous de lancer une nouvelle voiture, la Smart, très particulière avec ses deux places et son design ramassé, mais aussi une nouvelle marque automobile. Nous jouons sur deux niveaux”, rappelle Chrysostome Klein, responsable sales training MCC. L’offre d’essai, faite en décembre 1998 dans seize villes, était baptisée “Stop and go” : les voitures circulaient sur les axes fréquentés, décorées d’un macaron invitant les promeneurs à l’arrêter et à la conduire aussi longtemps qu’ils le souhaitaient. À leurs côtés, un “explainer” chargé de répondre aux questions du prospect et de contribuer à l’élaboration du fichier MCC en recueillant les coordonnées. En mai, le nouveau constructeur automobile a renouvelé l’opération, sous une forme quelque peu différente mais avec le même objectif. Régler la durée de l’essai Nouveauté, complexité, haute performance technologique : autant de raisons qui motivent l’élaboration d’une offre d’essai. Il n’est pas aussi aisé de déterminer les règles à suivre, loin s’en faut : combien de temps doit durer l’essai, à qui le proposer, comment transformer le test en vente ferme ? Dans la pratique, chaque marque réalise sa propre cuisine en fonction de la nature de son produit, de sa cible et de son canal de vente. “Nous considérons que le client ne peut pas se rendre compte de tout ce qu’offre le CD-Rom en trois minutes”, estime Michel Rose, directeur marketing du Club français du livre, distributeur par correspondance de la version CD-Rom de l’Encyclopédie Universalis. “Nous avons donc fixé la période d’essai à 15 jours, mais le client a tout à fait la possibilité de demander une rallonge.” Thierry Roussel, directeur marketing et commercial du fournisseur d’accès Club Internet, affirme pour sa part : “Ce qui compte, c’est que le client ait suffisamment de temps pour comprendre comment ça marche, quel est l’intérêt de notre produit par rapport aux autres et à quoi ça va lui servir. Après, peu importe que l’on propose un mois ou deux mois d’essai gratuit, ça n’a aucune incidence sur le taux de transformation.” De fait, l’essentiel est là : concrétiser l’essai par une vente. À cette fin, faut-il relancer le prospect au cours de la période de test par un courrier ou un appel ? Faut-il encore l’accompagner dans sa découverte du produit par une ou deux visites du vendeur ? Ce dernier point dépend souvent de la complexité technologique du produit. La présence du commercial permet plus facilement de démontrer au client l’étendue des possibilités de la machine. “Il est souhaitable que le vendeur réalise des démonstrations au cours de la semaine d’essai, défend Jean-Pierre Senemaud, directeur des opérations de Ricoh France, fabricant de copieurs et d’imprimantes. C’est encore plus nécessaire lorsque le prospect est déjà équipé chez un concurrent. Le secret consiste alors à placer le copieur près de la machine concurrente et à faire la comparaison.” Mieux vaut être sûr de la qualité de son produit. Plus généralement, le client est relancé au terme de l’essai par un courrier ou un appel téléphonique l’encourageant à donner suite. “À la fin de la semaine de test du percolateur, nous relançons le client”, indique Bruno Ferroli, chef des ventes de D8. L’exploitant de distributeurs automatiques réalise la moitié de ses ventes de percolateurs grâce aux dégustations et aux essais d’une semaine. “Et neuf fois sur dix, précise Bruno Ferroli, nous n’avons pas le temps de rappeler, nos prospects nous contactent d’eux-mêmes avant la fin de l’essai.” Même satisfaction du côté de Lexmark, qui affiche un taux de transformation de 100 % ! Ces bons résultats passent par une maîtrise maximale des risques inhérents à cette technique de vente. Ne pas tomber dans les pièges “Nous avons instauré quelques règles impératives pour éviter de se faire piéger, confirme Jean-Pierre Senemaud chez Ricoh France. Nous imposons une obligation de résultat aux directions commerciales régionales qui seules décident, en fonction des éléments collectés par le vendeur, de proposer ou non un essai. 80 % de ces essais doivent être transformés en vente ferme. En cas d’échec, le coût de l’essai, lié à la fourniture gratuite du papier, au transport du matériel et aux opérations techniques d’installation de la machine, est entièrement supporté par la direction régionale. Elle y réfléchit donc à deux fois. En contrôlant ainsi notre processus de vente et nos commerciaux, nous éliminons un maximum de risques.” “Il y a toujours un risque d’erreur dans un test”, renchérit Nicolas Clément, directeur diffusion et marketing des Échos. Fait rare dans l’univers de la presse, qui craint un mauvais retour sur investissement et préfère se rabattre vers des abonnements à prix réduit, le quotidien économique propose régulièrement huit semaines d’essai gratuit via des envois de mailings très ciblés. “On peut se tromper sur l’un ou l’autre des éléments du processus : le choix du fichier, le message d’offre, la durée de l’offre, le message de relance, l’offre finale. À chacun d’affiner sa technique au fur et à mesure qu’il acquiert de l’expérience. Ne comptez pas sur moi pour vous en dire plus, c’est confidentiel.” Forte de son efficacité, l’offre d’essai a acquis ses lettres de noblesse et accédé au rang de technique de vente reconnue. Elle n’est pas un gadget, mais bel et bien un élément fondamental de la stratégie marketing des marques qui la pratiquent.

“Pour transformer un essai en vente, il suffit de suivre quelques règles qui vont de soi mais qu’il n’est pas inutile de rappeler : présenter un bon produit, être honnête avec le client et réaliser un bon suivi tout au long de la période d’essai.” Michel Rose, directeur marketing du Club français du livre, distributeur par correspondance du CD-Rom Encyclopédia Universalis Chaque année, 30 à 40 000 CD-Roms de l’Encyclopédie Universalis sont vendus par correspondance après avoir été testés pendant environ quinze jours. “Nous proposons un produit d’une valeur de 1 980 F. Aussi pour minimiser les risques de perte ou de piratage du CD-Rom, nous réalisons nos mailings de prospection à partir de fichiers très bien renseignés et nous demandons un chèque de caution de 120 F qui responsabilise l’utilisateur.” Le Club français du livre possède une longue expérience de vente à l’essai. “Nos prospects pouvaient déjà examiner gratuitement le volume un de la collection papier. Le CD-Rom s’y prête encore mieux car le client peut le consulter dans son ensemble. Il dispose par ailleurs d’une hot line pour nous joindre.”

“Il existe une telle concurrence sur le marché des fournisseurs d’accès à internet que tous les clients veulent en tester deux ou trois avant de faire leur choix. Leurs critères : le niveau d’adéquation entre leurs besoins et les services proposés, et la qualité et la rapidité d’usage.” Sébastien Socchard, président de Worldnet En juin 1994, Worldnet est le premier fournisseur à commercialiser un kit de connexion comprenant dix jours de consultation gratuite. Aujourd’hui, il offre dix jours de connexion pour l’achat d’un ordinateur équipé de Windows 98 et jusqu’à trois mois en partenariat avec le fabricant de modems Olitec. Vingt-quatre heures ou quinze jours avant la fin de l’essai, le prospect reçoit un bon de commande. “Aujourd’hui, ces offres font partie du coût d’acquisition de l’abonné, que nous reportons sur les clients déjà acquis. Par ailleurs, elles s’adressent surtout au grand public. Les entreprises, elles, en font rarement usage, elles préfèrent comparer et traiter avec les commerciaux, documentation à l’appui.”

“En offrant à nos clients la possibilité de tester gratuitement un produit pendant deux à quatre semaines, nous leur donnons l’assurance qu’ils peuvent nous faire confiance et qu’ils prendront la bonne décision par rapport à leurs besoins.” Arnaud Dubar, directeur marketing de Lexmark Depuis deux ans, le fabricant d’imprimantes incite sa force de vente grands comptes à proposer des offres d’essai sur le lancement de produits haut de gamme. “Au début, nous avons également proposé ce programme "Try and buy" à notre canal de distributeurs pour leurs clients PME-PMI. Ce fut une catastrophe car la plupart des machines nous étaient finalement retournées. Nous l’avons donc rapidement remplacé par la formule "Quatre semaines pour convaincre" par laquelle nous nous engageons à reprendre la machine à un acheteur qui ne serait pas satisfait. À 97 %, les clients gardent l’imprimante.”

Quelques règles à retenir - L’offre d’essai est bien adaptée aux produits nouveaux, innovants, à forte complexité technologique, ou culturels. - La durée de l’offre varie d’une marque à l’autre, y compris au sein du même univers. Elle doit être fixée de manière à laisser au prospect le temps de se familiariser avec le produit et d’en tester toutes les possibilités. - L’essai peut être accompagné de démonstrations si le produit est complexe. Le prospect doit pouvoir joindre facilement un commercial si besoin est et, dans tous les cas, doit être relancé avant la fin de la période par un appel téléphonique ou un courrier couplé à un bon de commande. - Pour minimiser les risques de perte ou de détérioration, le prospect doit être bien ciblé. Une caution ou un relevé d’identité bancaire peuvent contribuer à le responsabiliser. Le vendeur doit lui aussi être impliqué dans le processus.

 
Je m'abonne

M.-P. Vega

NEWSLETTER | Abonnez-vous pour recevoir nos meilleurs articles

Retour haut de page