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Le variable pour les non-commerciaux

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Comment motiver sans augmenter les salaires ? En donnant une part de variable. Progressivement, ce mode de rémunération s’étend aux populations non-commerciales : responsables marketing, techniciens et experts peuvent désormais en bénéficier.

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Avec les 35 heures, nous nous sommes demandé comment mieux motiver nos salariés sans augmenter notre masse salariale. Et nous en avons conclu que la meilleure solution était d’adopter une part de rémunération variable pour des personnes qui, jusqu’à présent, n’en bénéficiaient pas. » Un an après la mise en place de ce système, Laurent Cardot, directeur général d’ETP Tetracom, une entreprise familiale de télécoms employant une centaine de personnes, est ravi de son choix. « Plutôt que de donner des augmentations, nous responsabilisons les individus. Ce sont eux qui créent leurs propres augmentations en travaillant mieux ! » À l’instar de cette grosse PME, de plus en plus d’entreprises françaises ont recours aujourd’hui au variable. « Il y a clairement une tendance à l’augmentation du variable dans les plans de rémunération, analyse Jean-Michel Azzi, p-dg de Maesina, conseil en rémunération. Alors qu’il y a encore quelques années, le variable était l’apanage des commerciaux, aujourd’hui – et c’est nouveau – d’autres fonctions sont rémunérées ainsi. » Des objectifs qualitatifs Première catégorie concernée : le service marketing. Chez Maesina, environ 80 % des directeurs marketing, 55 % des chefs de groupe et 50 % des chefs de produit touchent une partie de leur salaire en variable. Des proportions qui, d’année en année, ont tendance à augmenter. Pourquoi ? « Parce que, explique Thierry Magin, de MCR Consultants, toutes les personnes qui, au sein de l’entreprise, ont une action directe sur le chiffre d’affaires et le résultat, peuvent être payées en fonction de l’argent qu’elles rapportent. » Toutefois, les objectifs fixés aux populations marketing pour définir leur part de variable seront très différents de ceux que l’on assigne aux commerciaux. Ainsi, un chef de produit se verra fixer des objectifs quantitatifs d’amélioration de la marge ou de développement des parts de marché. Mais surtout, il sera jugé sur des critères qualitatifs. « Par exemple, raconte Jean-Michel Azzi, on pourra observer les gains de notoriété ou d’image de marque, le respect voire l’amélioration des délais des opérations. La direction pourra même mener des enquêtes afin de mesurer la qualité des relations entre le chef de produit et le service chargé du packaging, par exemple. Un critère qui sera alors pris en compte dans la fixation du montant du variable. » Et ce n’est pas la seule différence entre le variable d’un commercial et celui d’un responsable marketing. L’étude réalisée l’an dernier par le cabinet Évolutions montre ainsi que 20 % du salaire global d’un directeur commercial provient du variable, alors que celui-ci ne représente que 13 % du salaire d’un directeur marketing. Christel de Jessey, instigatrice de cette étude, estime que le variable demeure « difficile à mettre en place pour toutes les populations ». Et d’ajouter : « On ne peut pas donner une part identique à la personne qui génère directement du chiffre d’affaires et à celle qui n’a aucun contact direct avec le client. » Du variable pour un comptable ? Il n’empêche : même si les proportions ne sont pas les mêmes, le variable s’étend progressivement. Certains consultants, comme Thierry Magin, préconisent de l’étendre à toutes les fonctions d’encadrement et d’expertise. « Il est parfaitement possible, explique-t-il, de proposer du variable à un chef comptable parce qu’il a une compétence particulière essentielle au bon fonctionnement de l’entreprise. On le jugera sur son respect des délais, sur ses efforts afin d’éviter les erreurs, etc. » De manière générale, plus le poste est proche du management, plus il est souhaitable de privilégier le variable individuel. Dans un tel contexte, il n’est guère étonnant de voir des salariés d’un service qualité, après-vente ou d’une hot line bénéficier de ce système de rémunération. Cela paraît même logique, à l’heure où les entreprises s’engagent dans des processus de bonne gestion de la relation client. En effet, le variable présente un grand avantage : « Il permet, rappelle Jean-Michel Azzi, de faire coïncider les objectifs d’une personne avec ceux de l’entreprise. Rémunérer par le variable permet de focaliser l’attention des salariés, de les motiver. » Ce que Laurent Cardot a d’ailleurs constaté très clairement chez ETP Tetracom où les chargés de projet, les techniciens du service après-vente et ceux de la hot line reçoivent une partie de leur salaire en variable. « Un exemple ? Le SAV dégageait 600 000 francs (91 000 euros environ) de chiffre d’affaires en 1998, il en réalise aujourd’hui plus de 2 millions de francs (305 000 euros environ), argumente-t-il. Nous avions constaté que les techniciens en déplacement ne facturaient pas toujours leurs interventions parce qu’ils avaient tissé des liens de proximité avec leurs clients. Nous leur avons alors proposé d’indexer une partie de leur salaire sur leur chiffre d’affaires. Il n’y a pas de miracle... » Individuel ou collectif ? Toutefois, le variable ici mis en place diffère, dans son mode de calcul, de celui que connaissent les commerciaux. Il s’agit en fait d’un variable collectif – on divise par le nombre de salariés du service le chiffre d’affaires de l’année – mâtiné d’une petite part de variable individuel – une pondération en fonction du chiffre de chaque technicien. Et c’est là une autre tendance de ce type de rémunération : pour ces nouvelles fonctions concernées, le variable est généralement collectif. Selon Thierry Magin, le variable individuel appliqué aux populations non-commerciales présente en effet des risques d’effets pervers. « Si vous mettez en exergue un seul indicateur, cela risque de nuire à l’ensemble du poste. C’est vrai, par exemple, pour une assistante commerciale, dont la fonction est très large, ou pour un service après-vente, où les temps passés par les techniciens chez un client peuvent varier beaucoup selon le type de réparation à effectuer. Ici, un variable collectif est plus judicieux : on va juger le travail du service en général. » Attention aux réactions des commerciaux ! De plus – et c’est un autre risque majeur –, il faut veiller à ne pas froisser les susceptibilités des commerciaux. Apanage jusqu’ici des forces de vente, le variable est perçu comme une sorte de privilège. « Lorsque nous avons décidé de donner du variable à nos chargés de projet, les commerciaux l’ont plutôt mal vécu, avoue Laurent Cardot. Alors, nous avons décidé que le chiffre d’affaires généré par les chargés de projet serait englobé dans celui des commerciaux. » Une petite astuce qui ne coûte pas cher à l’entreprise (environ 100 francs par mois et par commercial !) et qui, surtout, a permis d’assainir les relations, de couper court à toute protestation. Chacun, désormais, y trouve son compte : l’entreprise, qui voit son chiffre progresser de tous côtés, les chargés de projet, plus motivés que jamais, et les commerciaux... qui ne perdent aucune de leurs prérogatives. On le constate avec l’exemple d’ETP Tetracom : la rémunération par le variable est une bonne solution de “management par objectifs”, y compris pour les PME. « Celles-ci s’y mettent de plus en plus, constate Jean-Michel Azzi, même si ce n’est pas très facile à gérer dans de petites équipes car le variable demande d’avoir le courage de fixer des objectifs, ce qui reste plus simple à faire dans un grand groupe. » Cela dit, la mise en place du variable pour une partie importante des salariés est à la portée de tous et certaines grandes sociétés d’ailleurs font le choix inverse. Chez Procter, exemple confirmant la règle, le variable n’existe pas : le résultat du groupe est perçu comme la somme du travail de chacun, et pas comme le fruit du talent de quelques individus en particulier.

Laurent Cardot, directeur général de ETP Tetracom « Du variable pour tous ! » À terme, notre idéal serait que la standardiste puisse être payée au variable », plaisante Laurent Cardot, ce jeune directeur général séduit par les avantages du variable. ETP Tetracom, société installée en Île-de-France, est prestataire de services télécoms et réseaux pour les entreprises et compte aujourd’hui une centaine de salariés, dont dix commerciaux et soixante-dix techniciens. Pour faire face à la pression de la masse salariale, il a décidé de mettre en place des rémunérations avec une partie de variable pour certaines catégories d’employés. Outre les commerciaux, qui en bénéficiaient déjà, les chargés de projet, les techniciens du service après-vente et les hot liners sont désormais payés ainsi. Et les résultats sont très encourageants ! Depuis cinq mois, les chargés de projet ramènent 50 000 francs (7 622 euros environ) de commandes supplémentaires par mois. En deux ans, le chiffre d’affaires réalisé par le service après-vente a triplé et la hot line a augmenté de huit points la proportion de clients dépannés par téléphone sans intervention d’un technicien de terrain. « Je suis absolument ravi des résultats, explique Laurent Cardot. Indéniablement, nous avons rendu nos équipes plus productives. Le variable les motive, même s’il ne s’agit que d’un variable collectif et pas individuel, comme celui des commerciaux. » L’expérience est tellement satisfaisante qu’ETP Tetracom a souhaité l’étendre à tous ses salariés, y compris ceux qui n’ont pas d’action directe sur le chiffre d’affaires : administratifs, comptables, etc. « Nous avons trouvé un système d’intéressement pour tous, en fonction de la moyenne des objectifs de toutes les équipes. » Un cas exemplaire dans les petites et moyennes entreprises...

 
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Frédéric Thibaud

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