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Niveaux et équilibres. Les systèmes de rémunération des forces de vente

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Pour guider le directeur commercial dans la construction du plan de rémunération des vendeurs, nous avons cherché à débroussailler trois questions de base : les niveaux de rémunération, la part potentielle de variable, le choix et la nature des critères de cette part variable. À ces interrogations fondamentales pour tous, nous avons voulu ajouter un chapitre : le plan de communication du nouveau système de rémunération, de l’amont (l’implication possible dans la construction) à l’aval (l’explication et la communication proprement dite). Rémunération et performance, rémunération et motivation : quatre mots étroitement imbriqués. Deux autres paraissent moins former un couple uni : rémunération et communication. Pourtant, l’explication du système de rémunération est indispensable pour qu’il ait une chance de produire les effets désirés. Les vendeurs, en particulier, doivent être persuadés de son équité. C’est pourquoi, lorsque les systèmes changent, les directeurs commerciaux doivent mettre la main à la pâte ou former les managers de première ligne. Chez Panametrics SA (cf page 46), Alain Chapus a tenu à mener des entretiens individuels pour emporter l’adhésion. “L’ancien système ne tirait plus les objectifs vers le haut et n’encourageait pas les meilleurs ou les jeunes prometteurs. Je voulais recentrer les vendeurs sur la prospection et la vente.” La part variable a été augmentée avec l’introduction d’un système de commissions sur les entrées en commande et une modification des primes sur objectifs. Au final, les salaires ont globalement augmenté de 15 %.Les récentes orientations se confirment : rétrogradation des commissions (hors vente directe aux particuliers) au profit des primes sur objectifs, fourchette de part variable allant de 10-15 % à 40 %. Selon l’enquête APEC, le fixe augmente dans les systèmes “fixe + commission” et “fixe + prime + commission”, et diminue dans le système “fixe + prime”. La périodicité des résultats pris en compte fait une large place aux objectifs annuels (plus de 50 % des entreprises), puis aux objectifs mensuels et trimestriels (25 % et 21 %). Reste une question : l’incidence sur les rémunérations des forces de vente des accords 35 heures. Sommaire 1. Les niveaux de rémunérationRedistribution des cartes : les différentes enquêtes marchés des spécialistes des systèmes de rémunération montrent des progressions. Logique, lorsque l’on observe également l’augmentation du niveau de formation moyen. Cela dit, il existe de grandes variations selon les secteurs d’activité et le niveau des responsabilités. Les vendeurs de l’univers des hautes technologies qui bénéficient d’une opportunité de l’offre et de la demande très favorable, tirent les salaires vers le haut. 2. L’équilibre fixe-variableLa nature du versement de la part variable de la rémunération est directement corrélée avec son importance : en effet, ce sont les systèmes à commission qui génèrent la plus forte variable, alors que les systèmes fondés sur des primes, elles-mêmes bâties autour d’objectifs, attestent d’un rapport plus marqué au profit du fixe. La durée du cycle et la complexité de la vente sont des critères très forts de “calibrage” du potentiel de variable. 3. Les critères de calcul de la part variableEst-ce enfin la montée en puissance – car ils sont annoncés depuis plusieurs années – des critères dits qualitatifs dans les plans de rémunération des vendeurs ? On assiste plutôt à un panachage des ingrédients, mais où dominent encore largement les éléments quantitatifs. En revanche, dans quelques secteurs d’activité où il devient très difficile de mesurer l’impact quantitatif de la performance des vendeurs, comme l’univers de la vente à la grande distribution ou dans les cycles de vente longs, le qualitatif s’est imposé. Reste un point délicat : l’appréciation des performances qualitatives, car l’encadrement direct, responsable de ce point, n’est pas forcément bien préparé, bien formé ou bien outillé pour pratiquer l’évalu

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Les niveaux de rémunération Outre le niveau de responsabilité, c’est désormais le secteur d’activité qui dicte sa loi sur le niveau de rémunération des commerciaux. Pour les commerciaux, l’heure de la vengeance a sonné. Fini les années 1993-1995 durant les- quelles, en raison d’une profusion des candidats – ou du moins d’une offre supérieure à ce que pouvait alors absorber le marché – ils devaient faire de larges concessions sur le plan de la rémunération. “Ils étaient souvent malmenés”, reconnaît Sébastien Hampartzoumian, manager force de vente chez Michael Page France, cabinet de conseil en recrutement. Depuis, les cartes ont été redistribuées. Et les candidatures qui foisonnaient se font désormais plus rares. La rémunération en a profité pour prendre un peu d’altitude. “En 1998, le salaire des 25-30 ans a augmenté de 5 %, tandis que celui des 50 ans grignotait 2,5 % (en médianes)”, relève David Hufnagel, directeur information rémunération de Hay, cabinet conseil en management et ressources humaines. Selon un sondage réalisé récemment par le cabinet auprès de 151 entreprises, la croissance du poste “rémunération” pour les forces de vente en 1999 serait de 2,1 % (à périmètre constant). Sébastien Hampartzoumian estime que le “rattrapage” de ces dernières années a surtout bénéficié aux petites structures. Conséquence ? Si la taille de l’entreprise avait dans le passé une forte influence sur le niveau de la rémunération, c’est désormais, outre le niveau de responsabilité, le secteur d’activité qui dicte sa loi. Les vraies responsabilités Le service chargé d’étudier la rémunération des commerciaux chez Michael Page distingue une première grande famille : le business to business (B to B). Dans ce premier secteur qui comprend l’industrie et les services, “le salaire d’un débutant de niveau bac + 2 minimum, ayant réalisé 100 % de ses objectifs, fluctue entre 170 000 et 220 000 francs par an”, indique Sébastien Hampartzoumian (la rémunération comprend le fixe plus le variable, la période de référence étant la première année d’activité). Hay a, de son côté, “disséqué” la rémunération de 30 000 titulaires plus expérimentés de la filière vente, dont 14 000 appartenant au secteur industriel. Hay qui s’applique à définir les “vraies responsabilités des vendeurs”, distingue entre autres les chefs de secteur (âge médian 40 ans), dont la rémunération médiane s’élève à 220 000 francs (fixe et bonus). Dans 60 % des cas, ils possèdent un niveau bac. Plus expérimenté et âgé de 42 ans en moyenne, l’ingénieur commercial perçoit une rémunération médiane de 310 000 francs. “Il peut être amené à développer un produit spécial pour un client”, note David Hufnage Des vendeurs ambassadeurs Dans le secteur des biens de grande consommation, les vendeurs sont davantage des “ambassadeurs”, et la notion de bon de commande n’est plus prédominante. Dans ce cas, la rémunération des débutants varie, selon le cabinet Michael Page, de 120 000 à 150 000 francs pour le bas de la fourchette, à 180 000 voire 220 000 francs pour les entreprises bénéficiant d’une forte notoriété. Hay, qui dispose pour ce secteur d’une base de données de 6 000 titulaires, a isolé les chefs de secteur et les vendeurs seniors. Les premiers, dont l’âge médian est de 31 ans, et le niveau d’étude équitablement réparti entre bac, bac + 2 et bac + 4, gagnent 200 000 francs (niveau médian, comprenant le fixe et le variable). La rémunération médiane des seconds, dont l’âge avoisine les 38 ans, s’élève à 265 000 francs. Uniformisation interne Le ton est donné par le secteur d’activité d’une part, et le niveau de responsabilité, d’autre part, laissant peu de place aux autres critères. La situation géographique – Paris ou province – influence assez peu le salaire “et surtout pas dans une même société, explique Sébastien Hampartzoumian. Trop de crises et trop de difficultés ont dû être gérées en interne à cause de cela, ce qui a conduit les entreprises à uniformiser les salaires”. De la discrimination sexuelle, le manager de chez Michael Page dit “qu’elle n’existe pas”. Et celui-ci d’argumenter : “On ne parle pas de femme ou d’homme mais de jeunes diplômés.” Les éditions PRAT se sont également penchées, dans leur Guide de tous les salaires 1999, sur les fonctions commerciales. Leur conclusion ? Entre 30 et 40 ans, le salaire d’un commercial progresse de 50 à 70 % sur le seul critère de l’expérience. C’est le premier motif d’augmentation. Les éditions Prat accordent également à la taille de l’entreprise un rôle déterminant. Un point qui la distingue de la majorité des spécialistes de la rémunération. Ainsi, le salaire d’un commer-cial d’une entreprise de plus de 500 salariés dépasserait de 20 à 40 % celui d’un commercial employé dans une PME. Le secteur d’activité, dont l’impact sur le niveau de rémunération est compris entre 10 et 30 %, n’arrive lui qu’en troisième position. Les grands comptes, une filière d’expertise Au-delà des nuances, un type de vendeur se distingue. Ce que d’aucuns considèrent comme la fine fleur de la profession : les commerciaux grands comptes. Particularités ? Ils sont mieux formés, et d’une manière générale, relativement jeunes. “Cette filière d’expertise qui a un fort impact sur le chiffre d’affaires”, rapporte David Hufnagel, caracole en tête en matière de rémunération à 400 000 francs (fixe plus variable, niveau médian). Le secteur d’activité a peu d’impact sur la rémunération de ces commerciaux, dont le niveau de formation se situe le plus souvent à bac + 4 ou bac + 5, et dont l’âge est compris entre 35 et 39 ans. ÉvolutionS s’est également penché sur leur cas. Ce cabinet de recrutement estime qu’en 1998, ces “super vendeurs” ont gagné en moyenne 471 000 francs, soit une progression de 4 % par rapport à 1997, et que la partie variable s’établit en moyenne à 15 %. Parmi les critères qui influencent le niveau de rémunération, l’étude ÉvolutionS identifie la taille de l’entreprise : le salaire varie de 430 000 francs en moyenne pour une société réalisant un chiffre d’affaires inférieur à 500 millions de francs, à 570 000 francs pour une entreprise dépassant 1 milliard de francs de chiffre d’affaires. Ainsi que l’expérience professionnelle : le commercial grands comptes gagne en moyenne 350 000 francs en début de carrière, puis 570 000 francs après 10 ans d’expérience. L’étude ÉvolutionS est, par ailleurs, la seule qui note une différence de rémunération entre les femmes et les hommes, près de 26 %. “Vendeur ? Ça ne veut rien dire !” Une autre étude, menée conjointement par Maesina International Search et Hewitt Associates sur la rémunération des cadres marketing, dépeint une situation moins rémunératrice. Elle évalue le salaire médian des commerciaux grands comptes français à “seulement” 375 000 francs (dont 12 % de bonus), 50 % des salaires étant compris entre 321 000 et 453 000 francs. Les deux cabinets qui publient chaque année ce baromètre européen, soulignent que “les dirigeants commerciaux français sont parmi les moins bien payés d’Europe”.Secteurs d’activité, expérience, taille d’entreprise… la rémunération des forces de ventes ressemble à un patchwork. David Hufnagel le rappelle d’ailleurs avec insistance : “Vendeur ? Ça ne veut rien dire ! Il faut savoir ce qu’il y a derrière.” Entendez derrière les étiquettes. D’aucuns considèrent qu’il convient également de s’intéresser à ce qui se cache derrière le chiffre qui apparaît en bas de la feuille de paie et de tenir compte de certains avantages (voiture de fonction utilisée le week-end, intéressement, etc.) pour évaluer la rémunération. Plus nouveau, Sébastien Hampartzoumian constate que les commerciaux accordent de plus en plus d’importance à la formation continue que l’entreprise va leur offrir, ainsi qu’à la notoriété du produit ou de l’entreprise “afin de se revendre plus facilement au bout de 2 ou 3 ans”. Fixe/variable : la quête de l’équilibre Le variable fait une percée dans des secteurs qui l’ignoraient. Ailleurs, suite aux évolutions des métiers, il perd du terrain. Etat des lieux. La part de la rémunération variable dans la rémunération globale des commerciaux marque aujourd’hui le pas. Le variable représente 25 % en moyenne, contre 27 % en 1991, selon une récente étude de l’APEC. Son poids est toutefois moins élevé (20 %), lorsqu’il est régi par des primes, et beaucoup plus important (34 %) dans les entreprises qui conservent un système de commissions, un système en lente régression depuis déjà plusieurs années. Ces moyennes dissimulent bien sûr d’importants écarts selon les entreprises et les secteurs d’activité. D’après les professionnels des systèmes de rémunération des vendeurs, la part “idéale” du variable se situe en général entre 10 % et 40 % de la rémunération. Pourquoi cette fourchette ? Simple question de logique. Si la part variable est inférieure à un mois de salaire, son impact sur la motivation des commerciaux est faible. Et, l’entreprise risque de perdre ses meilleurs vendeurs, facilement débauchés par ses concurrents, si ceux-ci leur offrent des variables plus élevés, et donc des rémunérations globales bien plus attractives. La fréquence de versement de la part variable a également un impact sur la motivation et l’orientation des efforts des commerciaux. En la distribuant fréquemment, l’entreprise rappelle aux commerciaux son existence, et renforce son impact sur la motivation. “Mais seulement si son montant est important. S’il est faible, il sera encore moins impressionnant – et motivant – avec un versement échelonné dans le temps”, avertit Jean-Robert Viguié, partner au cabinet Towers Perrin. Le rythme de versement (cf encadré) dépend de la périodicité du résultat pris en compte, lui-même largement déterminé par le cycle de vente du produit. Attention cependant à l’annualisation de la prime qui, trop éloignée dans le temps et assimilable à un treizième mois, pourrait perdre de son caractère motivant. Et compromettre de fait l’efficacité de la politique de rémunération. D’un autre côté, un variable supérieur à 40 % entraîne d’autres dérives. “Un variable trop fort a tendance à inciter les commerciaux à vendre à tout prix. Ils en oublient de protéger leur clientèle et d’assurer une certaine qualité de prestation”, souligne Jean-Marc Revereau, pdg de JMR Consulting. Les yeux rivés sur leurs chiffres, ils risquent de se montrer indifférents aux autres préoccupations de l’entreprise : fidélisation des clients, maîtrise des impayés, des délais de paiement, respect de la marge, etc. Une part variable élevée correspond souvent à un système de commission qui peut, par exemple, offrir à certains commerciaux une rente de situation, si l’exploitation d’un portefeuille de clients déjà constitué leur permet d’obtenir une rémunération satisfaisante, sans avoir à développer la prospection. Autant de dérives qui peuvent toutefois être maîtrisées, lorsque l’entreprise choisit judicieusement les critères sur lesquels sera calculé le variable (un sujet abordé dans l’article suivant). Mais il reste un autre danger : si le cycle de vente est long et le variable important, les commerciaux risquent de se décourager rapidement. Le turn-over, au sein de la force de vente, sera élevé. Concurrence et cycle de vente Déterminer la part de variable optimale, c’est donc naviguer entre ces différents écueils de motivation et de récompense de la performance. Mais pas seulement. Les conditions intrinsèques au métier de vente et à l’environnement concurrentiel ont aussi leur influence. “Si la vente est simple, rapide, le variable est en général élevé. Si le cycle de vente est long et complexe, le variable est limité”, résume Laurent Termignon, consultant en rémunération chez Hewitt Associates. “De même, si l’entreprise est implantée sur un marché très concurrentiel, si les investissements marketing et publicitaires ne sont pas très importants, le rôle du commercial sur les ventes est essentiel. Ce qui conduit à privilégier un variable fort”, ajoute-t-il. En revanche, lorsque l’entreprise est en position de force sur son marché, avec une forte notoriété, une politique de communication active, l’impact de la force de vente sur le chiffre d’affaires est moins crucial, et le variable plus modeste. Enfin, instituer un variable important est plus facile lorsque l’évaluation des performances repose sur des critères quantitatifs. Un variable fort, calculé sur des éléments jugés subjectifs ou peu fiables, risquerait au contraire de démotiver la force de vente. Des mouvements de fond Enfin, il faut noter que si les pratiques restent très différentes selon les secteurs, de moins en moins d’entreprises choisissent des politiques “extrêmes” en matière de part variable. Ainsi, selon l’enquête 1997 de l’APEC, on compte aujourd’hui moins de “petits fixes” qu’au début des années 90. Mais les salaires fixes élevés ont aussi cédé la place à plus de variable. “Le variable s’est répandu dans des secteurs d’activité d’où il était, il y a quelques années encore, quasiment absent. Dans l’industrie lourde, par exemple, les cycles de vente très longs – ils s’étalent parfois sur plusieurs années – ont longtemps rendu délicate l’introduction d’une rémunération variable. C’est chose faite aujourd’hui, souvent sur des objectifs qualitatifs plus que quantitatifs”, constate Bernard Marty, consultant en rémunération chez Hay Management Consultants. A contrario, le poids du variable a déjà diminué dans certains secteurs, comme la grande distribution. Le rôle croissant des centrales d’achat a réduit l’impact individuel du commercial sur les ventes de son secteur. Les ventes y sont plus difficiles à chiffrer de manière individuelle, car les livraisons sont désormais souvent centralisées sur quelques entrepôts. “Le rôle du vendeur devient plus qualitatif, et ne se mesure plus en termes de commandes ou de chiffre d’affaires. La part du variable qui a pu atteindre parfois 30 % dans la grande distribution, a aujourd’hui été ramenée entre 10 et 20 % en général”, précise Bernard Marty. Les pratiques selon les secteurs Selon l’APEC, dans le B to B, le variable représente en moyenne 12 % de la rémunération des technico-commerciaux (vente de matières premières de base et de produits semi-œuvrés), contre 22 à 35 % de celle des ingénieurs commerciaux (22 % pour les biens d’équipement, 35 % pour le matériel de bureau). Il atteint 31 à 32 % pour les attachés commerciaux techniques (petites fournitures, services ni intellectuels, ni financiers). Dans le high-tech, la part du variable est de 37 % selon une étude du cabinet Valeur SA (40 % d’après l’enquête réalisée en 1998 par Action Commerciale). Un chiffre qui tombe à 24 % pour les SSII et à 29 % pour les télécommunications, secteurs dans lesquels la durée des affaires est longue et le degré de complexité élevé. Elle monte, en revanche, à 61 % dans la bureautique. L’enquête 1998 d’Action Commerciale révélait également que, lorsque les clients sont des distributeurs, le variable s’élève à seulement 14 % pour les technico-commerciaux, ou à 23 % en moyenne dans la grande distribution (contre 15 % pour les produits alimentaires consommés hors foyer). La part variable est souvent plus importante quand le commercial travaille avec des distributeurs spécialisés : 27 % dans des secteurs comme la parfumerie, l’édition, l’habillement, ou 32 % dans l’équipement de la maison par exemple. Enfin, lorsque la force de vente s’adresse directement aux particuliers, la part variable reste forte : 50 % dans l’automobile, 32 % pour les services financiers, l’immobilier ou l’assurance. Elle représente, à elle seule, la totalité de la rémunération dans la vente directe (livres, linge, vin, etc.), en porte-à-porte, où la commission reste la pratique dominante. Enfin, pour les visiteurs médicaux – qui s’adressent, eux, à des prescripteurs – le variable représente en moyenne, selon l’APEC, 25 % de la rémunération. Variable : les clés du calcul Le variable panache objectifs personnalisés, d’équipe et résultat de l’entreprise. Fixe plus primes, commissions sur le chiffre d’affaires, primes sur le taux d’atteinte de l’objectif, bonus trimestriel : en dehors du salaire fixe qui rémunère le niveau de compétences et d’expertise du vendeur, le système de rémunération intègre, comme nous venons de le voir, des éléments variables pour motiver le commercial, pour vendre plus et mieux que les concurrents. Mais que rémunérer par le variable, et comment ?Premier constat : le système de rémunération doit traduire et soutenir la stratégie commerciale de l’entreprise qui, concurrence oblige, travaille de plus en plus sur le long terme. Présence maximale et durable des produits chez le distributeur, fidélisation d’un client, assistance et conseil auprès de l’acheteur constituent désormais ses priorités. Le rôle du vendeur n’est plus de faire du volume à tout prix en pratiquant la politique de la terre brûlée. “Les entreprises veulent sensibiliser leurs commerciaux à d’autres notions, comme celle de la marge ou des prestations complémentaires, dans le cadre d’une approche de service client”, explique Jean-Marc Revereau, président directeur général du groupe JMR Consulting. “Les vendeurs ne doivent pas faire du volume pur, mais du volume qualitatif.”Véritable outil de gestion de la performance, le variable joue le rôle d’incentive, “un levier majeur pour pousser les vendeurs à atteindre et à dépasser leurs objectifs”, précise David Hufnagel, directeur de la division information-rémunération du cabinet Hay Management. “Le variable agit un peu comme une carotte, c’est un élément de motivation qui, en récompensant la performance, doit contribuer à accroître l’effort, individuel ou collectif.” Concrètement, la partie variable est constituée de primes ou de commissions ou d’un panachage des deux. La commission qui correspond à un pourcentage fixe sur le chiffre d’affaires sans obligation de résultat minimal, a tendance à régresser au profit de la prime, contrepartie d’un résultat considéré comme conforme, voire supérieur à un objectif donné. Les ingrédients sont choisis en fonction de la nature du produit, du cycle de vente ou du niveau d’activité. Une seule règle : “Introduire le variable sur des objectifs sur lesquels le vendeur a une prise réelle, sur lesquels il peut agir, et qui peuvent être mesurés, sans contestation possible de la part du vendeur”, insiste Joël Arrouas, consultant en rémunération chez Dynagest. Objectifs et performance La rémunération variable peut être définie selon des objectifs qualitatifs ou quantitatifs, mais aussi selon la performance individuelle ou collective. Encore prédominants aujourd’hui, les critères quantita-tifs – objectifs de croissance du chiffre d’affaires, marges brutes essentiellement – sont concurrencés par des éléments qualitatifs. Récriés voilà encore trois ans, ceux-ci s’affinent : fiabilité des prévisions, fidélisation du client, créativité, réactivité sur les campagnes promotionnelles, etc. sont des points pris en compte. Leur introduction est notamment justifiée, lorsqu’un cycle de vente long, du matériel informatique de pointe notamment, ne permet pas de faire du chiffre de manière régulière, ou lorsque le vendeur n’est pas le preneur d’ordre. Dans le système de la vente à la grande distribution par exemple, une société d’agroalimentaire a des difficultés à évaluer quantitativement l’influence de son vendeur sur les commandes d’un magasin, dans la mesure où celles-ci sont passées directement auprès d’une plate-forme logistique régionale, et où les résultats sont remontés au siège par région. Elle préférera donc mesurer la qualité d’exposition des produits sur le linéaire du magasin. Le niveau d’activité conditionne aussi le choix et l’équilibre entre quantita-tif et qualitatif. “Une entreprise en phase de démarrage souhaite avant tout vendre pour prendre des parts de marché, et fondera donc largement le variable sur du volume, analyse David Hufnagel. En pleine maturité, elle voudra préserver son volume, mais aussi assurer un service client de qualité pour fidéliser les acheteurs acquis, d’où la nécessité d’introduire des objectifs qualitatifs. C’est encore plus le cas pour une entreprise sur le déclin qui va chercher à optimiser le niveau de satisfaction client”.Les schémas de rémunération intègrent également des notions collectives pour estimer l’impact réel du vendeur sur le volume des ventes et la fidélisation du client. Un certain volume du CA peut être le fruit d’un travail collectif que le management aura à cœur de reconnaître pour renforcer la cohésion de l’équipe et de la société. “Il faut récompenser la performance individuelle du vendeur qui a conclu la vente, et le travail de l’équipe qui a créé un environnement favorisant la transaction. Le système de rémunération doit en tenir compte via une part variable collective qui prend d’autant plus de sens qu’elle sera évaluée d’une manière qualitative”, estime Jean-Marc Revereau. L’art de communiquer Des principes à respecter pour faire passer en douceur un nouveau plan de rémunération. Un matin, les commerciaux d’une grande société d’agroalimentaire ont eu la surprise de découvrir que leur système de rémunération avait été modifié sans aucun préavis. Un simple courrier dans leur boîte aux lettres les informait de ce changement majeur. Dans les jours qui suivirent, tous les commerciaux refusèrent les nouvelles modalités qui leur étaient “imposées”. Résultat : six mois de travail perdus pour la direction générale qui avait oublié d’associer ses vendeurs à la refonte du plan de rémunération. Cet exemple malheureux souligne l’importance des actions de communication lors d’une réorganisation des systèmes de rémunération. “Le nouveau plan, qui définit le niveau et les modalités de rémunération de chacun, doit être compris et accepté par tous. Il y a donc matière et nécessité à communiquer”, explique Laurent Termignon, consultant associé de l’unité rémunération du cabinet Hewitt Associates. “Les vendeurs n’aiment pas qu’on les mette au pied du mur, et qu’on leur présente un système tout fait, sans avoir été informés que la direction cherchait à le modifier”, confirme Éric Schuler, consultant en rémunération. Utiliser les canaux de l’entreprise Plusieurs raisons motivent une modification des systèmes de rémunération : réorientation des activités de l’entreprise, fusion avec une autre, décalage avec la réalité économique du secteur, stagnation des performances. Autant de points que l’encadrement doit expliquer au préalable via un canal de communication approprié. “Tout dépend des habitudes de l’entreprise, poursuit Laurent Termignon. Le mode retenu doit être en phase avec ce que l’entreprise pratique. Cela peut être une communication orale via le management, écrite par un relais Intranet, ou plus simplement, des notes transmises aux services concernés.” Avant de communiquer, il faut avoir... de quoi communiquer : “Pas question d’aborder le problème dans le détail, tant qu’aucun projet n’a été clairement défini”, affirme Jean-Marc Revereau, P.-dg de JMR Consulting. “Une communication trop rapide aurait l’effet inverse de celui souhaité. Les commerciaux détecteraient les effets pervers et les dysfonctionnements pas encore éliminés, ce qui casserait le projet et obligerait à abandonner les pistes envisagées.” Fonder et animer un groupe de travail L’élaboration d’un groupe de travail va donc constituer la première étape. Son rôle : analyser les défauts du système en place, remettre à plat objectifs et stratégie et construire le nouveau plan. Composite pour refléter la réalité de l’entreprise, le groupe de travail est ouvert au directeur commercial, au directeur des res-sources humaines et au directeur financier, ainsi qu’à certains commerciaux représentatifs choisis par le directeur commercial ou les chefs des ventes. Ceux-ci peuvent d’ailleurs constituer un bon relais auprès des commerciaux pour maintenir une communication informelle. “Informelle et limitée, précise Laurent Termignon, car il ne faudrait pas créer une sorte de fébrilité parmi les forces de vente.” À l’inverse, la communication doit aller bon train dans le groupe. “Tous les membres doivent être pleinement associés à l’élaboration du nouveau système, car un manque de communication dans le groupe ou une rétention d’information serait perçu comme un piège de la direction”, insiste Éric Schuler.Une fois le nouveau plan construit, il faut le tester. Des simulations sur les années antérieures permettent de mesurer l’incidence du nouveau système sur les rémunérations, individuellement et collectivement. Peut-on associer les vendeurs à ces simulations, avant la présentation officielle ? “Oui, répond Éric Schuler. On peut le faire à différents niveaux, en leur présentant par exemple une simulation sur la masse salariale globale, puis en affinant par équipe de vendeurs. On peut même réaliser des simulations individuelles et envoyer à chacun les résultats qui le concernent.” Ce choix a l’avantage de susciter des remarques, souvent pertinentes, qui vont permettre de détecter d’éventuels dysfonctionnements et d’ajuster au mieux le nouveau plan de rémunération. D’autres repoussent cette solution. “Les discussions qui en résulteraient auraient surtout pour effet de compromettre la mise en œuvre du projet, affirme Jean-Marc Revereau. À mon sens, il est hors de question de soumettre le plan à discussion avant son application, car il est de toute façon fait avant tout dans l’intérêt général de l’entreprise et de sa stratégie, pas pour chaque commercial personnellement.”Quelle que soit l’option retenue, il faudra présenter officiellement le plan adopté au bout de six à douze mois de travail. Là encore, plusieurs possibilités à moduler en fonction de la taille et de la culture de l’entreprise. Grand-messe collective, réunion à taille humaine avec vidéo interactive, examen des situations au cas par cas, d’autant plus nécessaire que le vendeur a de l’expérience dans la société ou bénéficie d’un haut niveau de rémunération : à chacun de privilégier le mode de communication qui lui permettra au mieux de détailler la philosophie, le mécanisme et les avantages du nouveau système. Plusieurs piqûres de rappel peuvent même se révéler utiles, par exemple grâce à un support de communication visuelle, reprenant les critères désormais en vigueur, joint au bulletin de salaire tous les trois mois pendant dix-huit mois, comme le préconise le cabinet JMR Consulting.

Tapis rouge pour vendeurs high-tech Les commerciaux qui évoluent dans l’informatique, les télécoms, la bureautique et les SSII, sont “le top du top”, lance Marc Leclercq, directeur associé de Valeur SA, conseil aux entreprises, qui a étudié la rémunération des commerciaux dans des entreprises de haute technologie B to B. Un statut hors norme qui se traduit par un salaire (fixe + variable) compris entre 250 KF et 1 MF. La fourchette basse concerne les commerciaux junior et ceux qui évoluent sur le marché des “petits objets”, bureautiqueet télécoms (bac + 2). Sur ces secteurs, un commercial expert de niveau bac + 4 dépasse rarement les 400 000 F. Une analyse à tempérer, l’étude ignorant les start-up, entreprises qui fleurissent dans les télécoms, et “qui n’hésitent pas à débourser 40 % de plus pour attirer les bons commerciaux”. Ceux qui flirtent avec le million de francs évoluent sur des secteurs “complexes”, type grands comptes ou ingénieurs d’affaires, et sont souvent employés par des sociétés d’informatique, des SSII. Les critères de taille d’entreprise, de situation géographique et de sexe ne semblent pas influer sur la rémunération : “C’est un type de métier et une compétence que l’on paye”, résume Marc Leclercq. Quant à savoir pourquoi les rémunérations du secteur sont supérieures à la moyenne, il répond à la fois “compétence” et “raréfaction du nombre de candidats”. Cette tendance n’est pas, selon lui, “prête de s’arrêter” en raison de la “pompe aspirante” que constituent les télécoms et les nouvelles technologies. Un sentiment que devrait confirmer la prochaine étude du cabinet prévue pour la fin de l’année.

À quel rythme verser les primes ? Difficile d’optimiser le calendrier d’attribution de la part variable. Selon l’enquête APEC de 1997, 43 % des entreprises qui ont opté pour un système de primes, les règlent annuellement (contre 29 % de celles qui versent des commissions). L’explication est limpide : “Les objectifs et les budgets sont en général annuels : lorsqu’elle verse une partie de la prime en cours d’année, l’entreprise prend le risque de la payer sans savoir si l’objectif annuel sera réellement atteint”, souligne Jean-Robert Viguié, partner chez Towers Perrin. Le versement doit surtout être adapté au cycle de vente, et au rythme auquel le commercial suit ses résultats. “Si l’objectif et la prime sont mensuels, le commercial ne connaît ses résultats qu’a posteriori. Si l’objectif et la prime sont trimestriels, le vendeur, dont les résultats sont médiocres le premier mois, dispose de deux mois pour rectifier le tir et atteindre l’objectif”, note Laurent Termignon, d’Hewitt Associates.

Variable : les critères Une étude conduite par l’APEC * en 1997 sur la rémunération des commerciaux dégage quelques grandes tendances sur la part variable du salaire. 68 % des entreprises interrogées basent la partie variable de la rémunération sur le CA, mais 31 % d’entre elles la fondent également sur la marge. Autre base de calcul du variable : le volume ou les quantités pour 19 % des entreprises. Pour mesurer la performance, l’utilisation de plus en plus large du résultat basé sur l’objectif constitue désormais la pratique la plus courante, très liée aux systèmes incluant les primes. Ainsi, 50 % des entreprises utilisent l’atteinte de l’objectif comme résultat minimal pour la partie variable et 14 % l’accroissement du CA. Néanmoins, la pratique du variable sans résultat minimal, imposé et lié aux systèmes de commissions, concerne encore un tiers des entreprises. * Auprès de 735 cadres commerciaux et 382 entreprises représentatives de la structure des entreprises par secteurs d’activité.

Panametrics préfère le tête-à-tête L’ancien système, qui avait fait ses preuves pendant huit ans, ne fonctionnait plus. Il ne permettait plus de tirer les objectifs vers le haut et n’encourageait plus les meilleurs, ni les jeunes prometteurs. Je voulais aussi recentrer les vendeurs sur la prospection et la vente qu’ils avaient tendance à négliger au profit des aspects techniques de leur travail.” Depuis huit mois, les dix-huit vendeurs de Panametrics SA, un fournisseur d’analyseurs industriels, bénéficient d’un nouveau système de rémunération. Alain Chapus, directeur général de Panametrics, a soigneusement préparé l’opération. Il a mené une réflexion pendant trois mois, y associant son responsable administratif et financier, des commerciaux de confiance et des responsables produits. Ensemble, ils ont arrêté trois options, soumises à des simulations, pour finalement retenir la meilleure. “J’ai alors présenté le nouveau système aux commerciaux, au cours d’une réunion qui a duré trois heures, avec des diapos expliquant les grands principes. Ensuite, pendant un mois et demi, j’ai rencontré chaque commercial individuellement. Cette communication très personnelle a constitué une phase très importante, car il s’agissait de faire accepter un véritable changement de culture.”

 
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La rédaction, Anne Planté, M.-P. Vega

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