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Reconversion. De commercial à commerçant

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Ouvrir un commerce, quel manager n’en a jamais rêvé ? Pour réussir ce virage professionnel, mieux vaut peaufiner son projet et s’impliquer à 200 %.

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J’ai toujours su que j’ouvrirais mon propre commerce un jour. » Antoine Bénariac a donné raison à son instinct. En 1998, cet ancien responsable marketing chez Häagen-Dasz a inauguré, en plein cœur de Paris – rue Montorgueil –, une cave à vins baptisée “Tchin Tchin”. Une seconde boutique a vu le jour depuis, dans le ixe arrondissement de la Capitale. Ce virage professionnel à angle droit, l’amateur de vins du monde n’est pas le seul à l’avoir pris au cours de ces dernières années. Même s’ils ne dégagent pas de tendance nette dans ce domaine, les spécialistes de la reconversion professionnelle et de la création d’entreprise soulignent tout de même le penchant des managers commerciaux pour le commerce indépendant ou organisé. « Les directeurs commerciaux sont, par définition, des rebelles, sourit Henri-Claude Siméon, consultant en orientation professionnelle au sein de la société Agophore. Ils ont besoin de nouveauté et d’autonomie ; ils se disent que tout ce qu’ils font pour l’entreprise, ils pourraient très bien le faire pour eux. » Ce sentiment s’amplifie à l’approche de la quarantaine. À cet âge, les managers s’interrogent sur leur évolution au sein de leur entreprise et considèrent parfois être arrivés aux limites de leur carrière. Ils décident alors de voler de leurs propres ailes. « Les pros de la vente s’orientent naturellement vers le commerce car ils ont, pour la plupart, la fibre commerciale et savent travailler sous pression, poursuit l’expert. Ils ont, à première vue, les qualités requises pour prendre en main la gestion d’un magasin. »

Un changement de métier radical

En apparence seulement, car la journée type du commerçant se situe bien souvent à des années-lumière du quotidien du directeur régional, a fortiori, du directeur commercial d’une grosse PME. « Le manager est en quelque sorte un chef de bande, résume le porte-parole d’Agophore. Il conduit son équipe et met un place la stratégie commerciale de l’entreprise. » Le franchisé ou le détaillant indépendant est avant tout un gestionnaire. Passage des commandes, gestion des stocks, émission des factures, réception des chèques, suivi des impayés, etc. : le travail administratif monopolise Antoine Bénariac une journée entière par semaine. À tout cela s’ajoute, pour le caviste, une série de tâches multiples et variées, plus ou moins valorisantes, telles que le changement d’une ampoule électrique, l’impression des sachets plastique, la décoration des vitrines, le choix des vins et, bien sûr, l’accueil des clients. Ici, l’ancien manager a dû modifier son approche de la clientèle : « Dans un commerce, les rôles sont inversés, ce n’est plus le vendeur qui va vers le client, mais le client qui vient à lui », souligne Henri-Claude Siméon. Et parfois, il se fait désirer. Patrice Berger, ancien chef des ventes d’une société de location de vêtements professionnels tient, depuis six ans, une franchise Florence Accessoires. Selon lui, l’attente est parfois longue. « Je suis tenu aux horaires d’ouverture et de fermeture de la boutique et j’ai souvent l’impression de perdre mon temps. » D’autant qu’il répond présent six jours sur sept à raison de onze heures de travail par jour. Une cadence soutenue, qui sous-entend une implication maximale. « Les six premiers mois sont les plus stressants. On ne sait pas si le client va venir et si l’on va finir la journée avec 10 ou 1 000 euros en caisse », confie Antoine Bénariac. Une angoisse légitime, au regard de l’investissement financier personnel nécessaire au lancement d’un commerce, qu’il soit indépendant ou franchisé. Patrice Berger a ainsi investi 170 000 euros pour ouvrir sa boutique de maroquinerie.

Liberté d’action et réactivité maximale

Seulement voilà, répondront en chœur les anciens managers reconvertis en commerçants heureux, la liberté n’a pas de prix. L’indépendance, c’est d’ailleurs ce qu’ils apprécient le plus dans leur nouveau job.« Je n’ai plus de comptes à rendre à qui que ce soit », lance Patrice Berger. Et Antoine Bénariac d’ajouter : « Fini la lourdeur administrative, je fais ce que je veux avec les moyens dont je dispose. Et j’obtiens un résultat immédiat, qu’il soit bon ou mauvais. » Il organise ainsi régulièrement des dégustations dans ses deux boutiques, envoie aux dates anniversaires de ses clients des mailings assortis de bons d’achat et a mis en place un service de livraison à domicile. De quoi faire fructifier son business. Passées les trois ou quatre premières années de mise en route, le commerçant peut espérer rentrer dans ses frais, prétendre à des bénéfices et les réinvestir – pourquoi pas – dans une seconde affaire. Aujourd’hui à la tête d’un commerce employant quatre salariés, Antoine Bénariac compte bien poursuivre dans cette voie. Car la croissance est, selon les experts, le meilleur antidote contre l’ennui et la routine. « Pour s’épanouir pleinement dans leur nouveau métier, ces pros de la vente habitués à être au cœur des décisions stratégiques de l’entreprise devront se fixer, très régulièrement, des objectifs ambitieux », affirme Daniel Lecat, directeur du département création d’entreprise au sein du cabinet de ressources humaines Right Garon Bonvalon. Et opter pour un secteur “passion”. S’ils ont la main verte, qu’ils deviennent fleuristes ; s’ils adorent les vieux bibelots, qu’ils prennent une franchise Troc de l’Ile. « Le futur commerçant doit suivre son instinct et s’affranchir des règles édictées par le monde de l’entreprise », ajoute l’expert. Cela ne signifie pas pour autant signer avec le premier réseau de franchise qui se présente. Mûrir son projet et le bâtir pierre par pierre est impératif. Bénéficier des conseils d’un spécialiste en création d’entreprise est un plus. En quittant Häagen-Dasz, en 1997, le créateur de Tchin Tchin a réussi à négocier les services d’un coach. Sélection du réseau de distribution, montage financier, recherche du local commercial : le consultant l’a accompagné dans toutes ses démarches et l’a pleinement rassuré dans son choix.

Témoignage

Daniel Lecat, directeur du département création d’entreprise chez Right Garon Bonvalon « C’est un changement de vie » Une reconversionne se fait pas en un jour. Selon Daniel Lecat, devenir commerçant quandon est manager commercial salarié implique un long processus de mutation. « Le cadre doit faire le deuil de son salariat et accepter de changer de statut social, souligne l’expert. Deux ans sont nécessaires pour construire un tel projet. » Le manager doit réaliser une étude de marché, goûter au métier de commerçant en proposant ses services une ou deux semaines à un fleuriste ou à un brocanteur, choisir ses partenaires et son emplacement. « Durant cette période, l’ex-manager doit prendre la dimension de son rôle d’entrepreneur. Ce n’est plus un budget qu’il va devoir gérer au quotidien, mais les comptes d’une entreprise, qui plus est, la sienne ! »

À retenir

- À l’approche de la quarantaine, certains managers sont tentés de voler de leurs propres ailes. Dotés d’une fibre commerciale et d’un bon relationnel, ils s’orientent vers le commerce. - Le quotidien du commerçant est radicalement différent de celui d’un manager. C’est un chef d’entreprise en charge des commandes, de la facturation, de la manutention, du merchandising, etc. - Devenir commerçant permet de gagner en autonomie et de voir le résultat immédiat des actions mises en place. - Opter pour son domaine de prédilection est essentiel. Bénéficier des services d’un expert en création d’entreprise est un plus.

 
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Emmanuelle Sampers

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