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Centres d’appels : les trois stratégies pour bien traiter les contacts

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Côté rue, les centres d’appels semblent rapprocher facilement et chaleureusement l’entreprise de ses clients. Côté cour, peu imaginent la complexité de ce service, fruit d’une interaction poussée entre l’humain, les télécommunications et l’informatique. Les choix réalisés par l’entreprise à chacun de ces niveaux sont guidés par un seul et même impératif : le souci d’intégrer la clientèle comme moteur de l’activité, en pérennisant la relation client et en ouvrant de nouveaux marchés potentiels. La question est : comment ? Les centres d’appels sont aujourd’hui en pleine expansion et le marché n’a jamais été autant en effervescence. Placés au cœur de la relation client, ils concernent aujourd’hui tous les secteurs d’activités et sont étroitement liés à tous les services de l’entreprise. Selon une étude publiée par le cabinet CESMO en septembre 1999, le marché global concernant les centres d’appels est évalué en France à 3,7 milliards de francs pour l’année 1998. Ses acteurs sont de plus en plus nombreux : sociétés de conseil, constructeurs d’équipement, fournisseurs de solutions middleware, éditeurs de logiciels, intégrateurs, opérateurs de télécommunications, société d’outsourcing humain et technique. Historiquement centrées sur l’assistance et la vente par correspondance, les applications des centres d’appels sont par ailleurs de plus en plus multiples : prise de commande et réservation, renseignement, conseil, réclamations et hotlines, enquête et collecte d’informations, support interne et aide à la force de vente, etc. D’une entreprise à l’autre, les besoins technologiques, en équipement matériel et logiciel, les besoins en ressources humaines et les missions d’un centre d’appels varient. Ce dossier essaie de fournir quelques clés pour mener à bien la triple stratégie mise en œuvre dans la création d’un centre d’appels : la technologie, les ressources humaines et la (télé)communication. Car point n’est besoin de créer un centre d’appels et d’y consacrer des ressources technologiques et humaines bien proportionnées, encore faut-il le faire savoir. Sommaire La stratégie technologique Première étape avant même de débuter toute recherche d’équipement : mettre à plat votre stratégie relationnelle client en vous posant les bonnes questions pour définir avant tout la mission de votre futur centre d’appels. Cette démarche guidera votre progression vers la seconde étape, le choix des solutions technologiques adaptées à vos besoins. Ou comment maîtriser la réception d’appels grâce à un ACD (autocommutateur distributeur d’appels), disposer d’outils garantissant un pilotage efficace, gagner en productivité avec un serveur vocal interactif. Mais aussi associer couplage téléphonie-informatique et applicatifs progiciels et logiciels de la relation client, ou optimiser l’émission d’appels avec la numérotation automatique. La stratégie d’organisation De nombreuses questions se posent aux entreprises qui veulent construire une structure centre d’appels. Globalement, elle répond au besoin d’offrir un contact facilité à ses clients et à ses prospects, et doit garantir à ce titre une qualité d’accueil et de services irréprochables. Les investissements, tant humains que techniques, sont considérables et les solutions d’outsourcing total, partiel ou mixte, n’apparaissent pas dans ce cadre dénuées d’intérêt. La décision finale résulte essentiellement de la conjugaison du périmètre d’action de son centre d’appels, du niveau de qualification et de compétences humaines requis et des capacités internes à gérer les ressources humaines. Sans oublier les possibilités infinies d’hébergement technique... La stratégie de communication du numéro Le point d’entrée dans un centre d’appels est bien aujourd’hui un numéro de téléphone, plus encore un accès web demain. L’entreprise a le choix entre un numéro gratuit incitatif placardé sur des publicités, un service payant à différents degrés de tarification, ou encore une option click and

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La stratégie technologique Pour se frayer un chemin dans les méandres de la technologie et configurer de manière optimale son centre d’appels, une règle de base : mettre à plat sa stratégie relationnelle client. Les grandes messes technologiques réunissent mois après mois une multitude d’acteurs : constructeurs d’équipement, opérateurs de télécommunications, éditeurs de couplage téléphonie-informatique ou de progiciels de la relation client, conseil, intégrateurs. Dans les allées de ces salons déambulent des exposants curieux des innovations de leurs concurrents. Des visiteurs avertis. Et des prospects, envoyés par leur direction générale pour faire leur “marché”. Objectif : choisir la solution qui équipera le futur centre d’appels. “Mauvaise approche, lance Philippe Cavat, vice-président d’e-Loyalty, une société spécialisée dans le conseil en stratégie, en organisation et en intégration de technologies. Je vois souvent ce phénomène : on missionne une équipe, souvent des membres de la direction des systèmes d’information, pour acheter sur l’étagère d’un stand une solution qui semble convenir. Mais la démarche qui aboutit à la création ou à l’optimisation d’un centre de contacts est bien plus complexe que cela.” Avant de s’intéresser à la technologie, c’est sur elle-même que l’entreprise doit se retourner. Et se poser les bonnes questions : que veut-elle faire ? Quels sont ses segments de clients ? Les segments stratégiques, sur lesquels investir dans le futur, les segments qui lui font perdre de l’argent ? Quel est le degré d’intérêt stratégique de chaque segment de clientèle ? Son système de valeur personnel ? Des interrogations sur lesquelles le cabinet Ernst & Young Conseil a fondé sa méthodologie, baptisée Customer Connection. “La première étape consiste à définir sa stratégie relationnelle. On détermine quel produit proposer à quel segment de client avec quel niveau de service, ce qui revient à établir la valeur de chaque segment pour l’entreprise, explique Pierre Alard, responsable de la ligne de services CRM de Ernst & Young Conseil. Ensuite, on identifie les canaux d’accès au client adaptés à chaque stratégie relationnelle : on peut adresser un certain type de clients ou de besoins par le réseau de distributeurs, un autre par le réseau d’agences, un troisième par un centre de contacts. Pour fonctionner, ce dernier va devoir puiser dans le système d’information existant, qui de ce fait, doit devenir un système communiquant avec les positions téléphoniques placées en front line et reliées à une base de données relationnelles client. C’est la troisième étape.” L’entreprise doit aussi réfléchir au customer care, selon la terminologie employée par Pierre Alard : comment collecter et stocker toutes les données relatives au client, dans le but de mieux le connaître et le fidéliser ? L’entreprise peut à un stade ultérieur décider d’exploiter ces données (datamining) et être proactive, passant du même coup d’une configuration en appels entrants à une configuration en appels sortants. Quatre niveaux techniques Dans la pratique, ces phases de réflexion sont trop souvent négligées. “Les entreprises attendent trop de la technique. Il existe certes énormément d’outils, mais ils ne régleront aucun problème si au préalable l’entreprise ne mène pas une réflexion globale sur son futur centre d’appels : son organisation, sa place dans l’entreprise, ses engagements, la gestion des compétences et la gestion de la connaissance. Pour notre part, nous conseillons souvent de se faire la main en construisant d’abord un help desk interne”, indique Olivier Betton, consultant chez Coheris Atix. Le help desk interne essuie tous les plâtres : les mauvais calculs dans l’organisation technique et humaine, les nécessaires ajustements des différents engagements contenus dans la convention de services passée avec les utilisateurs, l’affinage des outils de contrôle et de reporting, etc. “Dans la construction du centre d’appels orienté client, la direction se trouvera aux prises avec des difficultés similaires qu’elle saura traiter en amont”, conclut Olivier Betton. Le choix des solutions technologiques se trouve alors grandement facilité. Globalement, on distingue quatre niveaux techniques, qui correspondent à la montée en puissance d’un centre d’appels. Le premier niveau est celui de la phase d’apprentissage. L’entreprise organise son accueil téléphonique des clients dans le but de transformer ce centre de coûts en centre de profits. Elle met en place un personnel dédié à cette fonction, dans le cadre d’un service client ou un service consommateur. Elle s’équipe d’un autocommutateur (PABX), une sorte de standard téléphonique amélioré qui agit comme un premier filtre entre l’appelant et le centre d’appels. Diverses technologies en matière de téléphonie peuvent se greffer sur ce PABX, et notamment un automatic call distributor (ACD). On considère l’ACD comme l’investissement de base pour répondre aux appels. Son rôle est de gérer et distribuer les flux d’appels. Dès ce niveau, il faut également disposer d’un logiciel de supervision. “On l’oublie souvent, mais dès le départ, il faut pouvoir mesurer en temps réel l’activité du centre d’appels pour progresser vers une meilleure efficacité”, rappelle Jean-Philippe Slovès, directeur marketing du constructeur Lucent Technologies BCS. Après l’apprentissage, l’organisation La phase d’organisation est la suivante. “L’entreprise commence à vouloir accroître l’efficacité de ses téléopérateurs, assurer un meilleur accueil du client et en augmenter sa connaissance. Elle dote son centre d’appels d’un module de couplage téléphonie-informatique (CTI) et éventuellement d’un serveur vocal interactif (SVI)”, poursuit Jean-Philippe Slovès. Le CTI assure le lien entre le réseau informatique et l’autocommutateur qui réceptionne les appels. Il permet la remontée en temps réel, sur l’écran du téléacteur, d’informations concernant le client qui appelle et la circulation de ces informations de poste à poste lorsque l’appel est orienté vers un deuxième niveau de traitement. Le CTI, qui dans les faits est encore relativement peu implémenté dans les centres d’appels en France, génère ainsi des gains de temps. Cofinoga par exemple, qui fait de la gestion de cartes de crédit, en a équipé les 600 positions de son centre d’appels. Résultat : 15 secondes gagnées par appel, dans un centre qui reçoit 1,2 million d’appels chaque mois ! Le SVI, lui, est utilisé pour identifier et authentifier les appelants, les aiguiller vers des services automatiques ou des interlocuteurs. Il permet ainsi de traiter un grand nombre de demandes basiques sans intervention humaine : consultations des horaires, des relevés bancaires, etc. Optimisation ensuite. Elle implique un bouleversement géographique du centre d’appels. L’entreprise décide de l’éclater sur plusieurs sites, mais le client continue à n’en voir qu’un seul grâce à l’utilisation d’un numéro de téléphone unique. Elle peut aussi choisir de déporter des agents à domicile, que le système d’information va continuer à considérer comme physiquement présents sur le site auquel ils sont rattachés. Le miracle technologique derrière ce tour de passe-passe : des petites boîtes noires raccordées au cœur de l’entreprise par un réseau de type FrameRelay, RNIS, ATM ou IP. Les agents voient également leur écran se doter d’applications logicielles ou de progiciels complexes dédiés à la gestion de toutes les interactions avec le client. Ces applications permettent d’homogénéiser les processus de la relation client et de capitaliser sur sa connaissance. Autre caractéristique de cette phase d’optimisation, le centre d’appels devient proactif et se lance dans l’émission d’appels. Un système prédictif – predictive dialer – compose automatiquement, par anticipation, les numéros de téléphone listés dans les fichiers du centre et dirige les appels décrochés au premier opérateur disponible. Vient enfin l’intégration, où le centre d’appels devient centre de relation client multimédia. “À ce niveau, il est le point d’entrée unique dans l’entreprise pour tous ses partenaires, clients, fournisseurs, revendeurs, prospects, le lieu où aboutit tout l’éventail des canaux de communication : téléphone toujours, mais aussi web, e-mail, fax”, explique Jean-Philippe Slovès, de Lucent Technologies BCS. L’ACD intègre alors un module de gestion et de routage des courriers électroniques et le protocole IP, qui permet le transport de la voix via internet, autorise le dialogue en direct sur le site web, à la demande de l’internaute. Le centre d’appels acquiert la capacité à gérer des objets multimédias variés, autorisant ainsi les utilisateurs à choisir le canal de communication qu’ils préfèrent pour interagir. Solution hétérogène ou intégrée ? Selon qu’il travaillera en émission ou en réception d’appels, le centre de contacts mettra l’accent sur l’une ou l’autre de ces briques technologiques. En réception d’appels, l’ACD constitue la brique fondamentale pour router l’appel vers l’agent le plus compétent par rapport au besoin et au profil du client. L’émission d’appels peut de son côté difficilement se passer de predictive dialer quand elle porte sur de gros volumes dans le cadre d’opérations de qualification de fichiers par exemple. La taille de l’entreprise aura également une incidence sur l’architecture choisie. Dominique Dufrasnes, directeur commercial des activités centre d’appels de l’intégrateur Datapoint, distingue deux architectures. “Au-delà de 100 positions, une architecture que nous qualifions d’hétérogène est tout à fait adaptée car elle sera capable de supporter des volumes d’appels importants. Les briques de base, qu’il va falloir faire dialoguer ensemble, sont choisies séparément parmi des équipementiers, comme Lucent, Nortel ou Alcatel, et les éditeurs de CTI et de logiciels paramétrables sur mesure. Ce sont des projets relativement lourds en temps et en coût – supérieur à un million de francs –, ils s’adressent plutôt aux grandes structures.” Trop chère pour des centres d’appels de taille plus modeste, cette architecture peut être remplacée par une solution PCBX, c’est-à-dire un PABX sur PC. Le PC, qui possède une matrice de communication, fonctionne comme un autocommutateur : toutes les fonctions téléphoniques sont intégrées sur un serveur unique, type Windows NT. “Le temps d’intégration est moindre et le budget est ramené à quelques centaines de milliers de francs, le retour sur investissement sera plus satisfaisant”, précise Dominique Dufrasnes. Les petites structures peuvent aussi trouver un intérêt à étudier le marché des outils intégrés, comme ceux de Vocalcom ou de Com6. Il s’agit de packages plus faciles à mettre en œuvre qui offrent ACD, serveur vocal et CTI tout en permettant de développer des scripts sur une architecture à base Windows NT. Grand inconvénient de ces solutions : la panne, plus fréquente que sur un PABX, et gênante puisqu’elle paralyse conjointement informatique et téléphonie. Tous les spécialistes du centre d’appels, constructeurs et éditeurs, sont d’ailleurs unanimes : rien ne remplace encore la fiabilité d’un bon vieux PABX. La stratégie d’organisation À l’heure où le centre d’appels devient l’instrument privilégié de la relation client, son développement en interne semble aller de soi. Stop ! Plusieurs facteurs peuvent plaider en faveur d’une externalisation, totale ou partielle. Le marché des centres d’appels est aujourd’hui en pleine effervescence. De nombreuses entreprises se posent encore la question de construire leur propre structure quand d’autres en sont déjà à la faire évoluer en centre de contacts, véritable carrefour de l’ensemble des médias de communication autorisant l’accès à l’entreprise : téléphone, fax, messagerie électronique, internet, visioconférence. À différents niveaux, les entreprises sont plus que jamais dans une phase d’observation et d’expérimentation. Dans ce contexte, de nombreux acteurs se positionnent sur le marché de l’externalisation d’un centre d’appels : des sociétés historiquement nichées dans le créneau du télémarketing, des sociétés de services ou plus récemment des opérateurs, voire des collectivités locales. L’éventail de leurs prestations est vaste, depuis l’outsourcing total de la relation client en passant par le dualsourcing – certaines fonctions du centre d’appels restent gérées en interne – jusqu’à la gestion de débordement d’appels lors de campagnes ponctuelles. Sur le terrain, les approches des entreprises ne sont pas uniformes. Certaines choisissent de sous-traiter l’acquisition de leurs clients et de conserver en interne le service client. D’autres confient à un prestataire extérieur le soin de répondre aux demandes basiques, mais considèrent comme la chasse gardée de l’interne le support technique de deuxième niveau – impliquant des réponses plus complexes, le déplacement d’un technicien ou adressant des clients haut de gamme. Et si le programme de fidélisation peut être conçu dans l’entreprise, la prise de rendez-vous avec la force de vente est réalisée par le personnel d’un sous-traitant délégué sur le plateau techniquement développé à l’intérieur de l’entreprise. Pour d’autres encore, la sous-traitance est le remède aux périodes de débordement ou de crise médiatique. Alors, internaliser ou externaliser ? “Les motifs les plus divers sont avancés pour vanter les mérites de l’un ou de l’autre, répond Fabrice Moreau, directeur associé du conseil Digiway. Pour défendre l’internalisation, certains disent que leur métier est trop complexe pour ne confier ne serait-ce qu’une partie de leur centre d’appels. D’autres se réfugient derrière "notre activité est trop stratégique", confondant allégrement stratégique avec important. D’autres encore favorisent l’externalisation parce qu’elle se révélerait moins chère. Or ce n’est pas toujours vrai. Il existe aussi des entreprises qui pensent pouvoir régler ainsi un problème qu’elles ne parviennent pas à traiter en interne. Or l’expérience montre que ce qui n’est pas "carré" au départ a toutes les chances d’échouer, en interne comme en externe. Tout cela n’est en fait qu’une suite d’a priori, le vrai débat n’est pas là”, assène Fabrice Moreau. Un centre d’appels pour quel service ? Pour bien comprendre l’enjeu de l’externalisation, il faut au préalable passer par une démarche fondamentale. “Déterminer le périmètre d’action de son centre d’appels, analyse Philippe Cassoulat, directeur du centre d’expertise CRM (customer relationship management) de la société de conseil et d’intégration Valoris. Cela revient à dire : quel service je veux fournir avec mon centre d’appels ? À partir de là, je peux identifier mes besoins en moyens humains et en moyens technologiques et leur coût.” Globalement, le centre d’appels répond à une volonté d’offrir un contact facilité à ses clients et prospects. À cet effet, il doit garantir des conditions d’accueil et de services irréprochables, puisqu’il est en quelque sorte la vitrine de l’entreprise. La première préoccupation de l’entreprise est donc de disposer d’un personnel qualifié, capable d’agir face au client comme une interface compétente. “La question qui se pose est : vais-je trouver ces compétences en interne ?”, interroge Dominique Berthelot, directeur général de la société de télémarketing Convergys. Considérer le niveau de service Pour un premier niveau de service basique, tel que répondre à des demandes de renseignements simples, qualifier des fichiers ou réaliser une opération de télémarketing ponctuelle, l’entreprise dispose d’une marge de manœuvre relativement large. Elle peut choisir de sous-traiter ces opérations ou, si elle dispose de ressources humaines suffisantes en nombre, de les affecter à cette mission. Il s’agit ni plus ni moins de redéploiement d’effectifs. Mais dans ce cas de figure, gare aux sensibilités. “C’est un changement de métier qui s’opère, il faut d’abord expliquer et rassurer”, insiste Sophie de Menthon, pdg de la société de télémarketing Multilignes Conseil, qui a travaillé avec le cabinet de conseil Andersen Consulting sur des projets de reclassement de personnel en centres d’appels internes comme EDF-GDF ou Vivendi. “Avant même de les former au téléphone, nous laissons les salariés s’exprimer dans le cadre de groupes de prise de parole. C’est indispensable quand on a en face de soi des gens qui ont vingt ans de métier, des habitudes de travail et de forts a priori négatifs sur les centres d’appels.” Tout comme les salariés du Crédit du Nord. Il y a trois ans, la banque s’est engagée dans une opération de reconversion d’une partie de son personnel. “Ces salariés, qui avaient déjà une grande ancienneté, ont montré une certaine résistance due à l’incertitude qui planait sur leur avenir, raconte Emmanuel Mignot, pdg de Télétech International qui a réalisé l’accompagnement au changement de métier. Le processus de reconversion s’est déroulé sur deux ans, ce qui leur a permis de rejoindre en douceur le réseau de commerciaux assis de la banque.” Communication interne intense, forte implication du management, politique de motivation intelligente, information sur les processus technologiques mis en œuvre sont indispensables pour une mutation en douceur. À ce stade, l’investissement est déjà considérable. Mais peut rester en deçà d’une sous-traitance et justifier l’internalisation du premier niveau du centre d’appels. Autre niveau de service, autre pratique. Plus la mission du centre d’appels touche au cœur même de métier de l’entreprise, plus celle-ci voudra conserver en son sein la structure car le niveau de compétences requis va se situer à un niveau élevé. “Dans ce cas, le niveau de compétences métier, qui va garantir la satisfaction du client plus que la rapidité du décroché de l’appel par exemple, doit être tel qu’il est difficile d’externaliser”, estime Philippe Cassoulat, de Valoris. Gérer les ressources humaines Mais le problème de la gestion des ressources humaines peut changer la donne, tant à un premier qu’à un second niveau de services. Car les effectifs des centres d’appels sont à la fois difficiles à planifier, difficiles à encadrer et difficiles à intégrer. Planifier les effectifs d’abord. L’activité d’un centre d’appels, selon la nature du service qu’il rend et la cible qu’il adresse, peut considérablement varier d’un mois à l’autre et entraîner des pics d’appels qu’il faut pouvoir administrer. “Certains centres d’appels doivent réviser leur dimensionnement demi-heure par demi-heure, s’exclame Fabrice Moreau. Même sans aller jusque-là, les variations doivent être anticipées au maximum. On peut distinguer quatre niveaux de planification. Une planification annuelle pour obtenir le budget adéquat, et mensuelle pour tenir compte de la saisonnalité, de la prise de congé ou du décalage induit par une formation ou un recrutement. Une planification hebdomadaire ensuite, à cause de l’obligation légale de communiquer à l’avance au salarié l’emploi du temps, et enfin à l’intérieur de la journée en mettant en œuvre des plans de repli ou en négociant des ajustements d’horaires. C’est un vrai métier.” Or aujourd’hui, le marché des centres d’appels cherche ses cadres et ceux-ci doivent accepter une certaine flexibilité. “Nous nous trouvons face à une pénurie sérieuse de ce côté”, indique Alain Added, qui organise les 30 novembre et 1er décembre prochains à Paris le premier salon de recrutement des centres d’appels. “Actuellement, il existe un déficit de formation au management des centres d’appels qui prendrait en compte trois composantes : savoir manager des équipes, avoir une compétence informatique et connaître les centres d’appels.” D’autres dimensions ressources humaines peuvent faire pencher la balance en faveur de l’externalisation, pour l’avantage de la flexibilité. Premier argument : le turn-over caractéristique des premiers niveaux de service qui se révèlent vite inintéressants pour les téléopérateurs. “Il suffit de relever le degré d’intérêt en étendant le champ d’intervention des conseillers : leur relation avec les clients est d’autant plus riche qu’ils disposent à l’écran en temps réel des informations utiles sur les clients et les produits”, contre Pierre Alard, responsable de la ligne de services CRM de Ernst & Young Conseil. Deuxième obstacle à l’internalisation, la volonté d’assurer un service 24 heures sur 24, plage de travail que refuserait la convention collective. “Mais ce genre de souhait émane souvent d’entreprises qui offrent déjà ce type de service dans le cadre d’une astreinte de techniciens par exemple. Il s’agit donc d’un simple redéploiement”, observe Philippe Cassoulat. Et comment traiter le problème du centre d’appels multilingues pour la vente à l’international ? Au final, c’est la somme de ces contraintes et de ces impératifs qui va peser dans la balance et peut aboutir à un fin dosage entre internalisation et outsourcing. Il ne faut pas oublier l’hébergement technique, qui représente tout de même 30 % du CA du marché de l’outsourcing. Deux raisons à ce phénomène : le coût et la rapidité d’évolution des technologies. En effet, le retour sur investissement d’un centre d’appels développé en interne par une PME peut s’avérer trop faible. Elle préférera alors avoir recours à une plate-forme mutualisée ou dédiée chez un prestataire extérieur. D’autre part, le marché bouge vite et il est difficile d’intégrer rapidement les nouveaux outils. Tous les six à douze mois, une nouvelle technologie apparaît et l’on voit même des entreprises du secteur automobile, du high-tech ou des télécoms ayant acquis une certaine maturité dans le centre d’appels externaliser leur centre de contacts multimédia. Rien ne les empêche de déléguer d’ailleurs leur propre personnel et de posséder le module de commande et de reporting du centre d’appels, qu’elles rapatrieront peut-être en interne dans un deuxième temps. “On peut développer son plateau en interne, mais utiliser un PABX et un ACD mutualisé hébergé chez un outsourcer. Aux États-Unis, on commence à le faire pour les logiciels de relation client. C’est de l’application hosting, précise Philippe Cavat, le vice-président d’e-Loyalty. Toutes les solutions sont envisageables, dans la mesure où on réussit bien sûr à interagir avec les systèmes informatiques de l’entreprise.” La stratégie de communication Le numéro de téléphone aujourd’hui et le canal web demain constituent le point d’entrée des consommateurs dans l’entreprise. À choisir, à communiquer et à marier avec subtilité. Peu connu il y a encore quelques mois, le centre d’appels est désormais projeté sous les feux de la rampe. On le trouve partout et ça commence à se savoir : dans les établissements bancaires et financiers, dans la vente par correspondance, derrière les services consommateurs des grandes entreprises et dans les coulisses des campagnes de communication. On y accède d’une manière diverse : par un numéro gratuit, donc incitatif, placardé sur des publicités, par un service payant à différents degrés de tarification ou encore via une option click and talk disponible sur le site web. Derrière ces numéros différents et ces canaux, pointent tout à la fois de la stratégie bien pensée, de la volonté de faire du profit et des expérimentations plus ou moins réussies. “Il existe, en général, plusieurs manières pour l’entreprise de communiquer sur son existence. Il y a la communication qu’on élabore soi-même, volontairement, et celle qu’on ne contrôle pas ou qu’on oublie de contrôler, s’amuse Fabrice Moreau, directeur associé du cabinet de conseil Digiway, qui confie cette petite histoire : une société que je connais réalise la moitié de son chiffre d’affaires par abonnement. Elle veut s’organiser en centre d’appels. En préalable, je visite sa liste de numéros de téléphone sur le Minitel. Le numéro de son service abonnements se trouvait à la fin, derrière celui du restaurant d’entreprise !” La magie du numéro unique Mettre sur pied sa structure centre d’appels, c’est aussi réfléchir au mode d’accès qui l’ouvrira à la cible adressée. L’entreprise peut attribuer au centre d’appels un numéro choisi dans son annuaire de numéros classiques, et placer derrière un ACD, éventuellement un lien serveur vocal interactif et un lien de couplage téléphonie-informatique. Avantage : aucune démarche complexe auprès des opérateurs de télécommunications et un sentiment de proximité pour les appelants de votre zone géographique. Inconvénient : votre fournisseur marseillais n’apprécie pas forcément de payer une communication nationale, contrairement à ses concurrents de la région parisienne où vous êtes implanté. La solution : un numéro unique pour tous, quelles que soient l’heure et la région, qu’on active ou désactive à souhait sans coût supplémentaire. Certains en dénoncent sans animosité “l’effet magique”, comme Pierre Alard, responsable de la ligne de services CRM du cabinet Ernst & Young Conseil. “La magie du numéro unique ne date pas d’hier. C’est celle du 525 25 25, numéro auprès duquel il y a 30 ans, on pouvait obtenir un crédit sans plus de formalité. C’était facile et immédiat.” Mais n’est-ce pas là exprimée la vraie attente du client, du partenaire ou du fournisseur ? “Les attentes du client sont de trois ordres, estime Fabrice Moreau. Il veut d’abord un guichet unique, valable quel que soit l’objet de l’appel. Ensuite, il veut un accès simple et aisé, depuis n’importe quel endroit, quel que soit le terminal téléphonique utilisé, avec un numéro de téléphone facile à mémoriser. Enfin, ses exigences portent sur un coût de télécommunications acceptable en regard du service apporté.” De la même manière, l’entreprise affiche un certain nombre de choix à effectuer : le choix du tarif de la communication, qui permettra de faire venir le client ou de lui faire payer le service apporté ; le choix du numéro d’accès et de la communication associée ; le choix du ou des lieux de réception des appels, un lieu qui doit rester dans une organisation “transparente” pour le client ; et enfin un faible coût d’utilisation. Le numéro unique surgit au confluent de ces souhaits. “Le numéro unique, c’est d’abord un numéro dépourvu de toute connotation géographique, facile à retenir et composé de manière identique par tous et partout”, analyse Thibaut de Robien, chef du marché des numéros spéciaux chez GTS Omnicom, l’opérateur détenteur du préfixe 5. La panoplie de numéros spéciaux Reste pour l’entreprise à faire son choix parmi les trois gammes de numéros spéciaux disponibles aujourd’hui sur le marché : les numéros de libre appel, entièrement à la charge de l’entreprise, les numéros à coût partagé entre l’appelant et l’appelé, et les numéros à revenus partagés, en moyenne facturés à l’appelant entre 1,50 F TTC et 2,23 F TTC – mais parfois bien plus. L’objectif assigné au centre d’appels est à cet égard très déterminant. “Globalement, tout dépend si on se situe dans une logique de fidélisation de la clientèle, de conquête ou d’actions commerciales pures comme la prise de commande”, résume Bertrand Pennequin, directeur marketing du pôle entreprises du 2, le préfixe de Siris. “Une action publicitaire dont le but est de générer des appels entrants pour récupérer des contacts de prospects se fait plutôt sur un numéro gratuit. Le service client coûte plus souvent le prix d’une communication locale et la prise de commande se fait par un numéro à coût partagé plus cher pour l’appelant. Quant aux hotlines, elles sont aujourd’hui de plus en plus payantes, comme par exemple chez les fournisseurs d’accès internet gratuit.” Visuellement, imaginez une galerie marchande dont les vitrines vous engagent plus ou moins à entrer. Certaines apposent en évidence la mention entrée libre, vous poussant ainsi à franchir le seuil. D’autres se font plus sélectives sur la clientèle et appliquent un droit d’entrée, estimant que le service apporté et la qualité de la prestation doivent être rémunérés. “Cette démarche, assez particulière à la France, est due à l’essor du Minitel. Les consommateurs ont montré qu’ils étaient prêts à payer cet outil pour entrer en relation avec l’entreprise, donc celle-ci n’hésite pas”, indique Fabrice Moreau. Le numéro à revenu partagé est aussi fréquent en situation de monopole, comme en témoigne la SNCF et son service de renseignements et de réservation à 2,23 F la minute ou les renseignements de France Télécom facturés 4,50 F la minute. Le choix du numéro relève donc d’une stratégie marketing. Le numéro gratuit, situé dans la tranche des 0800 et 0805 à ce jour, assure en général une grande notoriété et une image de service positive pour l’entreprise. Il permet par exemple d’informer ses clients sur de nouveaux produits ou des services, constitue un relais efficace sur des campagnes de publicité, de marketing direct ou de gestion de crise et permet d’élargir sa zone de chalandise à travers toute la France. À noter qu’il est plus répandu en vente aux particuliers qu’en vente aux entreprises, ces dernières s’avérant moins sensibles à la gratuité. Attention aussi aux effets pervers du numéro gratuit, qui existent incontestablement : ce sont les appels parasites, qui peuvent sérieusement mettre en péril votre retour sur investissement. Quelques remèdes peuvent limiter leur portée, comme la constitution de listes noires. L’opérateur 9 Télécom table sur une logique de plafonnement : “Nous avons mis en place un système d’alerte qui prévient le client lorsque sa facture dépasse le budget qu’il a fixé au préalable”, explique Philippe Cadoux, responsable du marketing entreprises. L’opérateur applique en outre une tarification à la seconde, ce qui n’est pas toujours le cas ailleurs. “Souvent un appel parasite ne dure que quelques secondes, moins qu’un crédit temps. Grâce à la facturation à la seconde dès la première seconde de l’appel, l’entreprise diminue l’impact financier de ces appels.” Quoi qu’il en soit, les spécialistes conseillent d’éviter l’affichage en quatre par trois à la sortie d’un lycée ou le passage TV le mercredi après-midi. Le secret de l’efficacité d’une campagne sur numéro gratuit passe par une communication très ciblée. L’entreprise a par ailleurs le choix entre plusieurs opérateurs, les alternatifs proposant des tarifs et des remises au volume très intéressants (cf. Action Commerciale numéro d’octobre 1999). Le coût partagé La stratégie marketing déployée derrière un numéro à coût partagé – tranche des 0801, 0802, 0803, 0810, 0820 et 0825 – ou revenu partagé – les 0836 – est moins évidente car la perception des tarifs associés à ces numéros par les clients s’avère pour le moins très approximative. Dans l’ensemble, les opérateurs alternatifs s’efforcent de simplifier leurs grilles tarifaires par rapport à l’offre complexe de France Télécom. Néanmoins, interrogez quelques personnes sur le coût d’un 0802 ou d’un 0825. La diversité fantaisiste des réponses reste éloquente. Difficile donc de dire si un numéro payant a un réel impact sur le consommateur. Il en a un en revanche sur l’entreprise qui fait de ces numéros des centres de profit (cf. tableau ci-dessus). Au-delà de ces considérations tarifaires et marketing, l’intérêt des numéros spéciaux réside aussi dans les services que les opérateurs y associent. Les offres des uns et des autres diffèrent, mais on peut distinguer quatre grands types de services : l’acheminement des appels vers plusieurs sites de réception, en fonction de leur origine géographique ou de leur nature ; le routage conditionnel, selon le zonage, le moment de l’appel, la règle de répartition choisie, l’état du trafic, qui permet donc de gérer à la carte le renvoi des appels ; une mesure précise des pics d’appels pour ajuster heure par heure et site par site le potentiel de réception ; enfin, et c’est un point important, la mesure des retombées des actions de communication réalisées. Le panorama des points d’entrée dans un centre d’appels ne serait pas complet si l’on négligeait un canal d’accès faisant aussi passer de la voix et promis à un bel avenir dans les centres de contact : le net. L’arrivée du web Petit à petit, les campagnes de communication sur numéro spécial commencent à offrir un accès web à l’entreprise. L’internaute a plusieurs possibilités : envoyer un e-mail et recevoir une réponse par le même biais, demander à être rappelé (le web call back) ou entrer directement en relation avec un téléopérateur grâce au système de voix sur IP (le web call through) sans quitter la page web consultée. “À certaines étapes de sa navigation sur le site de l’entreprise, l’internaute ne peut pas se passer d’une relation humaine, au moment de remplir le bon de commande ou pour faire un choix”, explique Thomas Loeb, chef de produit Net centre d’appels chez France Télécom. Mais le mariage d’un numéro spécial et d’un accès internet n’est pas sans accroc. “Face à un numéro spécial plus cher qu’une communication téléphonique locale, le client qui en a la possibilité se tournera vers le net, moins cher. Les entreprises vont devoir refondre leur stratégie en matière de contenu de service si elles ne veulent pas voir le téléphone, source de revenus, cannibalisé par le web”, analyse Pierre-Yves Rallet, directeur marketing des services voix de Cegetel Entreprises. Qui irait payer les informations délivrées par un serveur vocal payant quand il peut obtenir la même chose sur le net pour trois fois moins cher ? Les gourous des stratégies communication des centres d’appels n’ont pas fini de réviser leurs théories.

Ce qu’il faut retenir 1. Pour choisir les briques technologiques indispensables à votre activité centre d’appels, vous devez au préalable mettre à plat votre stratégie client et le système de valeur de vos différents segments de clientèle. Ces éléments détermineront le rôle assigné au centre d’appels, lequel rôle conditionnera vos investissements. 2. La taille du centre d’appels (nombre de positions) et sa mission (appels entrants ou sortants) ont un impact structurant sur le choix de l’architecture téléphonique et informatique, hétérogène ou intégrée. 3. Le PABX et l’ACD constituent les deux briques de base d’un centre d’appels, pour réceptionner les appels, les gérer et les distribuer. Greffé sur le PABX, un SVI peut traiter un certain nombre de demandes basiques. 4. Le CTI, encore peu implémenté dans les centres d’appels en France, assure le lien entre le réseau informatique et l’autocommutateur. La prise de contrôle des communications par l’informatique culmine dans le passage de la téléphonie sur le protocole internet (voix sur IP) qui autorise l’exploitation d’un même réseau pour faire transiter voix, image, internet et données.

Ce qu’il faut retenir 1 - En règle générale, les premiers niveaux de services sont facilement externalisables tandis que les services à forte valeur ajoutée, qui requièrent un niveau de compétences plus élevé, sont bien souvent traités en interne. 2 - Externaliser un centre d’appels n’entraîne pas une baisse des coûts. Il est nécessaire de prendre en compte tous les aspects : économiques, sociaux, juridiques, stratégiques, etc. 3 - L’hébergement technique constitue une réponse satisfaisante au problème de coût et d’intégration des dernières évolutions technologiques. 4 - La gestion des ressources humaines d’un centre d’appels est une tâche complexe. Le management doit à la fois faire preuve de capacités d’encadrement, mais également d’une compétence informatique et d’une connaissance des centres d’appels. 5 - Le redéploiement de ressources humaines internes sur le centre d’appels doit s’accompagner d’une politique de communication et de formation minutieuse.

 
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Dossier réalisé par Marie-Pierre Vega

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