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Comment Champagne Jacquart monte en gamme

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A moins de deux ans du quarantième anniversaire de Jacquart, la maison de champagne rêve de se faire un nom aux côtés des plus grandes. Voilà pourquoi, depuis trois ans, la marque réoriente sa stratégie en cherchant à repositionner son image et ses produits. Entretien avec Jérôme Queige, qui s'est lancé dans cette quête de l'excellence.

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Action Commerciale: Vous êtes sur un marché dominé par d'illustres marques de champagne. Comment percer face à de tels acteurs?

Jérôme Queige: Pour développer l'entreprise et prendre des parts de marché aux autres acteurs, notre parti pris est de nous engager dans une stratégie de «premiumisation» de la marque: nous voulons faire de Jacquart un champagne très haut de gamme. Une stratégie qui est engagée depuis l'arrivée d'un nouveau directeur général, Laurent Reinteau, il y a trois ans. Je suis chargé de la décliner sur le marché français, et plus précisément auprès des circuits prescripteurs (cafés hôtels restaurants, cavistes, entreprises) avec une équipe de 55 commerciaux (dont 50 VRP multicartes et agents).

En premier lieu, nous avons fait évoluer notre gamme en la resserrant autour de cinq cuvées, contre dix auparavant. Il n'y a pas eu de création de produits mais un recentrage sur nos champagnes-phares. Conséquence directe: les commerciaux disposent d'une meilleure connaissance de chaque vin et proposent ainsi une expertise plus fine à leurs clients, ce qui permet de mieux les fidéliser. Ce repositionnement s'est accompagné, par ailleurs, d'une refonte du marketing avec, au printemps 2010, un nouvel habillage de nos bouteilles. Les étiquettes, mais aussi les coffrets et les éléments de PLV (chez les distributeurs) ont été modifiés pour coller davantage à la nouvelle image que souhaite véhiculer Jacquart.

Parcours

Originaire de Reims, diplômé d'une maîtrise de Droit des affaires, Jérôme Queige commence sa carrière professionnelle chez Nicolas Feuillatte, dans la région Sud. Fort de sa connaissance du monde du champagne, il entre chez Jacquart en 2001 pour développer la stratégie commerciale de la marque sur le B to B. Il dirige depuis 2008 les circuits prescripteurs en France.

Repères

Historiquement basée à Reims, la maison Jacquart rassemble une centaine de collaborateurs. Elle est à l'origine une coopérative créée par des vignerons champenois en 1962, désormais fondue dans le groupe Alliance Champagne. Elle a réalisé l'année dernière un chiffre d'affaires en progression de 10% par rapport à 2010. La marque Jacquart, quant à elle, date de 1964.

-Quels sont les premiers résultats de ces évolutions?

Entamée dès 2010, cette stratégie porte déjà ses fruits. La marque apparaît plus dynamique, tant en France qu'à l'export. Nous avons écoulé 2,6 millions de bouteilles dans le monde en 2011 (3 millions prévues en 2012), soit une croissance de plus de 10 % en volume. Sans compter que nous intéressons désormais de nouveaux clients, tels que des lieux haut de gamme parisiens récents.

Vous faites partie du groupe Alliance Champagne. Quels en sont les avantages?

Ce rassemblement de trois coopératives viticoles représente 1 800 vignerons, 2 400 hectares et 7 % des vins de l'appellation champagne. Cela nous permet de nous approvisionner en raisin de qualité et de maîtriser la vigne et la fabrication du vin (nous exploitons personnellement 400 hectares au total) grâce à des équipements de haute technologie classés ISO. Autrement dit, la marque Jacquart peut s'appuyer sur ce groupe pour monter en puissance et se «premiumiser». Alliance Champagne jouit d'une très bonne image dans la profession: pour nos clients, cette appartenance est un gage de crédibilité supplémentaire.

Quels moyens humains mobilisez-vous pour mettre en oeuvre votre stratégie?

Des commerciaux expérimentés ont été recrutés au sein de maisons de champagne concurrentes. Cinq au total, ces trois dernières années. Ils ont été débauchés pour leur grande connaissance du marché des champagnes haut de gamme, mais aussi pour leur carnet d'adresses. Cette stratégie a ainsi permis à Jacquart de s'appuyer sur des vendeurs qualifiés et opérationnels immédiatement. Laurent Reinteau, directeur général, est d'ailleurs lui-même un ancien de Veuve Clicquot...

Contrairement à certains de nos vendeurs, ces commerciaux ne sont pas des VRP multicartes, mais bel et bien intégrés au sein de la force de vente. Pour véhiculer notre message auprès de nos clients, il faut des commerciaux qui connaissent bien les produits et qui soient entièrement au service de la marque.

Ainsi, la maison s'appuie aujourd'hui sur une cinquantaine de commerciaux répartis en deux secteurs géographiques, Nord et Sud. Je manage en direct les 27 vendeurs du secteur Nord tandis que les 28 autres, dans le Sud, sont encadrés par un directeur régional placé sous ma responsabilité. En revanche, Jacquart ne dispose pas d'une force de vente à l'étranger, bien qu'elle y réalise 60 % de son chiffre d'affaires. C'est de France que notre directeur à l'export gère le business à l'international, en lien direct avec des distributeurs locaux des 50 pays où nous sommes distribués.

Quelles sont les missions de vos commerciaux?

Ils sont chargés de développer la visibilité de la marque auprès de nos clients. Ceux-ci se composent surtout de professionnels: les CHR (cafés hôtels restaurants), cavistes, épiceries fines et discothèques, avec lesquels nous réalisons 70 % de notre chiffre d'affaires. Parmi eux, les clients les plus prescripteurs sont les grands hôtels ou encore des points de vente situés à des endroits stratégiques de Paris et qui fonctionnent, pour nous, comme des vitrines.

Nos commerciaux ont pour mission de signer avec ces clients des accords de partenariat, portant sur un nombre de bouteilles à écouler, une visibilité au bar ou encore une mention de la marque sur la carte. En complément, des opérations ponctuelles de mise en avant sont organisées lors de moments stratégiques comme les fêtes de fin d'année ou les foires aux vins. Cet automne, nous avons ainsi mis en place une opération découverte sur l'extra-brut et le blanc de blanc, assortie de promotions sur la gamme. Les commerciaux mettent alors à disposition toute la PLV associée à nos marques.

Par ailleurs, nous réalisons le reste de notre chiffre d'affaires auprès d'une clientèle dite «particulière», essentiellement composée d'entreprises, d'associations et du grand public.

Comment affirmez-vous votre présence au sein de ce réseau de distributeurs?

Sur un produit comme le champagne, les distributeurs sont demandeurs d'une relation privilégiée. A nous de cultiver la réactivité, l'écoute et la proximité. Ainsi, nos commerciaux sont pour eux force de proposition afin d'animer un point de vente ou encore en leur rendant régulièrement visite. Ils organisent aussi des dégustations, notamment pour accompagner le lancement de nouveaux millésimes. Lorsqu'elles se tiennent chez leurs clients les plus stratégiques, les commerciaux peuvent faire appel à Floriane Eznack, l'oenologue de Jacquart, pour les accompagner.

Par ailleurs, pour renforcer cette relation de proximité, les commerciaux n'hésitent pas à organiser des visites au siège de la maison à Reims. Cela permet à leurs invités de sentir le pouls de la maison. Ces rendez-vous, organisés sur une journée, permettent de plonger dans l'univers si particulier des caves, de se promener au milieu des vignes et enfin, de visiter l'un de nos trois sites d'élaboration des vins. Nous veillons à ce que ces visites mêlent clients et prospects. L'idée est de faire de nos clients des prescripteurs, en les incitant à témoigner auprès des autres personnes présentes.

Comment développer votre notoriété auprès des consommateurs finaux?

Outre une présence dans les CHR et chez les cavistes, la marque mise sur le sponsoring d'événements sportifs. Jacquart sponsorise depuis trois ans l'Open de France de golf. C'est un événement grand public et le golf véhicule des valeurs (sport, nature, élégance contemporaine) en adéquation avec les nôtres et sur lesquelles nous souhaitons capitaliser. Notre service marketing a également lancé fin 2011 une campagne d'affichage basée sur le slogan «L'art de l'essentiel», une première dans l'histoire de la maison. De quoi appuyer nos commerciaux lorsqu'ils veulent faire connaître la marque à des prospects.

Cependant, notre stratégie est aussi et surtout d'atteindre les décideurs en entreprise. Pour cela, nous développons des partenariats avec des clubs d'affaires notamment régionaux, par exemple les DCF (Dirigeants commerciaux de France) au niveau local. Nous avons sponsorisé leur dernier congrès de Metz. Enfin, nous participons à des salons B to B. Si nous sommes, bien sûr, présents sur les salons dédiés aux cadeaux d'affaires, nous cherchons aussi à créer la surprise. Comme lorsque des commerciaux se sont rendus sur un salon du bâtiment afin de présenter notre offre aux professionnels du secteur.

Quelles sont vos autres principales pistes de développement?

Nous souhaitons continuer à consolider notre réseau commercial et renforcer notre présence auprès des CHR et cavistes. Nous voulons augmenter la part de notre chiffre d'affaires global sur ce segment de marché de 70 à 80 % d'ici deux à trois ans.

Par ailleurs, pour mieux toucher les restaurateurs, nous avons commencé à mettre en place des partenariats avec des associations professionnelles du secteur pour mieux nous faire connaître auprès de cette clientèle. En interne, afin de mieux identifier les actions à mener chez les clients, nous souhaitons nous doter d'un CRM dans les deux ans à venir. Actuellement, les commerciaux utilisent les outils de notre réseau interne pour leurs benchmarks périodiques et leurs reportings mensuels. Mais cela nous semble insuffisant pour assurer un suivi client pertinent.

 
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Amélie Moynot

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