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Comment bien négocier son augmentation

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Pour voir votre demande d'augmentation aboutir, appuyez-vous sur votre performance et vos résultats.

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- C'est un paradoxe difficilement compréhensible: le marché de l'emploi des cadres est au beau fixe et ne cesse de progresser (lire l'interview de Pierre Lamblin ci-contre), alors que dans le même temps, leurs rémunérations, elles, n'augmentent quasiment pas! Ainsi, selon le spécialiste de la mobilité professionnelle Eca International, la progression réelle de la rémunération des managers est, aujourd'hui, compte tenu de l'inflation, de 0,8%, contre 1,6% l'an passé. Un constat qui a de quoi agacer les managers qui, dans un contexte économique morose, se battent tous les jours pour assurer le développement commercial de leur entreprise. Et qui se posent toutes les fins de mois la même question: peut-on demander une augmentation dans cette conjoncture compliquée?

Pour Daniel Porot, directeur général de l'Institut de gestion des carrières (IGC) et auteur de 101 secrets pour bien négocier son salaire... ou une augmentation (L'Express Editions), il n'y a aucun doute: «Le contexte économique global ne doit pas vous empêcher de demander une augmentation. Cet argument est souvent invoqué comme une excuse par la direction pour se soustraire à cette demande. Mais en réalité, ces deux données sont déconnectées l'une de l'autre, sauf cas exceptionnel. C'est de votre propre performance dont il est question. Pas du contexte économique mondial.»

Un avis partagé par tous les spécialistes en ressources humaines et notamment par Nathalie Dupas. Cette consultante senior chez Hudson, société de conseil en recrutement et en ressources humaines apporte quelques conseils supplémentaires aux cadres. «Pour espérer obtenir une augmentation de salaire, il faut pouvoir apporter sur la table des négociations des arguments et des preuves tangibles de votre performance.» Et Daniel Porot, de renchérir: «Vous ne pouvez pas raisonnablement espérer faire aboutir une demande d'augmentation si vous avez seulement atteint les objectifs qui vous avaient été fixés. Avant de vous lancer dans une telle démarche, assurez- vous que vous les avez largement dépassés.»

Identifez vos atouts

Bref, pensez à bien vous préparer avant la négociation pour prouver votre valeur ajoutée. Vous devez analyser vos réalisations passées et en mesurer, si possible, l'impact en termes de retombées, de gains supplémentaires, d'erreurs évitées... Notez les initiatives et autres bonnes idées et projets dont vous êtes à l'origine et qui ont contribué au bon développement de l'entreprise. De même, identifiez les progrès réalisés sur les «points à améliorer» qui avaient été pointés du doigt lors de l'entretien annuel d'évaluation. «Plus vous relevez des éléments factuels, quantitatifs et qualitatifs, plus vous êtes légitime dans votre démarche de demande d'augmentation, souligne Nathalie Dupas. Des éléments qui vont vous permettre de construire l'entretien que vous aurez avec votre supérieur.» Il est bon, aussi, d'identifier les «signaux positifs» que votre N + 1 a pu vous adresser au cours des mois passés. Il vous a mis en valeur lors d'une réunion? Il vous a félicité? Plus votre supérieur vous a adressé de «signaux positifs», plus votre demande d'augmentation peut lui paraître légitime. Ce travail d'analyse est essentiel, pointe la consultante de Hudson. «Un manager qui n'aurait pas atteint ses objectifs et qui n'aurait pas perçu de «signaux positifs» de la part de son N + 1 n'a aucune chance de faire aboutir une demande d'augmentation de salaire.» Pire, il se décrédibiliserait aux yeux de son supérieur par un manque de réalisme...

Daniel Porot, directeur de l'IGC

«Le contexte économique ne doit pas vous retenir de négocier votre salaire.»

Quelle augmentation demander?

Le moment-clé pour demander une revalorisation salariale n'est donc pas tant lié à l'entretien annuel d'évaluation ou au budget qu'à votre propre actualité, vos réalisations et vos performances. Mais avant de formuler officiellement votre requête, demandez-vous quel est réellement votre «moteur». Est-ce uniquement le salaire? Car vous pouvez également demander, par exemple, que l'entreprise participe ou finance un MBA dont vous savez qu'il vous sera utile pour le reste de votre carrière. S'il ne s'agit plus à proprement parler de négocier une augmentation de rémunération, cette alternative, coûteuse pour l'entreprise, doit s'envisager comme telle. A contrario, si votre demande porte juste sur le salaire, alors vous devez en définir précisément les contours. Celle-ci doit être réaliste. Pour cela, tenez compte d'éléments extérieurs. «Regardez le marché de l'emploi, conseille Daniel Porot, et notamment le nombre d'annonces correspondant à votre profil. Plus il y en a, plus vous êtes légitime dans votre démarche.»

Définissez ensuite le montant ou la progression de salaire que vous demandez. On parle en général en brut annuel. Et surtout pas de fourchette. «Votre supérieur serait bien trop tenté de retenir la fourchette basse. Il faut parler progression ou arrêter un montant», remarque Nathalie Dupas. Quant à savoir si le manager commercial doit se battre sur le fixe ou le variable, la consultante de Hudson répond sans hésiter: «Le fixe. Le bonus est, en général, défini selon un barème dont les règles sont figées.» Non seulement vous devez quantifier votre objectif, mais vous devez aussi arrêter une alternative acceptable. Les «classiques» sont une prime, un avantage en nature (voiture d'une classe supérieure), etc. Enfin, fixez un minimum sous lequel vous ne transigerez pas.

Une fois ce travail effectué, préparez-vous à l'entretien avec votre chef. Daniel Porot conseille de solliciter un rendez-vous en évitant, si possible, d'en fixer l'ordre du jour. «Restez vague: dites que votre demande a un caractère confidentiel et n'est pas urgente. Cela permet d'éviter que votre supérieur n'arrive avec des arguments trop affûtés.» Les idées? Les arguments? Vous les aurez en tête ou bien en aurez noté les grandes lignes. Attention, n'arrivez pas avec un dossier trop épais. Cela risque tout simplement de bloquer votre interlocuteur. Durant l'entretien, soyez constructif et réaliste. «Vous devez faire comprendre à votre interlocuteur qu'une augmentation serait plus qu'une reconnaissance: un engagement sur le futur», remarque Nathalie Dupas. Exposez, dans un premier temps, vos arguments, puis, faites votre demande avant d'entamer une phase d'échange. Sur la forme, soyez concis en évitant de répéter 10 fois les mêmes arguments; n'émettez aucune menace ou aucun chantage au départ; évoquez le caractère stratégique de la fonction que vous occupez; enfin, réaffirmez l'intérêt que vous portez à votre travail et montrez votre détermination: en un mot, soyez ferme sans être vindicatif.

Nathalie Dupas, consultante senior chez Hudson

«Vous devez apporter des arguments et des preuves tangibles de votre performance.»

Quelles perspectives après l'entretien?

La réponse de votre supérieur peut intervenir à l'issue de l'entretien ou bien plus tard, s'il demande une phase de réflexion. Dans ce cas, fixez un calendrier précis: c'est lui qui revient vers vous? A quelle date? Votre N + 1 doit vous donner de la visibilité sur sa réponse. Si votre démarche porte ses fruits, sachez dire merci. Sur un plan pratique, vous n'avez pas besoin d'un nouveau contrat, ni même d'un avenant. Votre supérieur peut vous adresser un courrier de confirmation, mais il suffit, dans les faits, que votre brut figurant sur votre bulletin de salaire soit réévalué pour que la démarche soit définitivement entérinée. Enfin, ne soyez pas trop gourmand. «Une telle demande d'augmentation ne peut intervenir plus d'une fois par an, C'est un maximum, sauf changement de fonction», conclut Nathalie Dupas.

Trois questions à...
Pierre Lamblin, directeur des études de l'Association pour l'emploi des cadres (Apec)

«Si l'économie est morose, le marché de l'emploi des cadres, lui, se porte bien»
Quel est l'impact de la conjoncture économique actuelle sur le marché de l'emploi des cadres? L'économie est morose. Les prévisions du taux de croissance en France pour 2008 et 2009 sont pessimistes. Et à la baisse... Mais il n'y a pas de véritable corrélation directe, à ce jour, entre l'économie et le marché de l'emploi des cadres. Sur les 12 derniers mois, les offres d'emploi de cadres toutes fonctions confondues, relevées par l'Apec, sont en hausse de 39%. Elles le sont de 40% pour les fonctions commerciales et marketing. Sur cette même période, il y a eu 58 000 offres d'emploi pour des postes de cadres dans l'univers commercial et marketing, contre 46 000, un an plus tôt (huit sur dix encadrent des hommes ou un projet). Faut-il le rappeler, le chômage des cadres est en France de 3,8% seulement. Nous sommes dans une situation de plein-emploi. Et ce, pour tous les profils de cadres, débutants ou expérimentés. Dans ce contexte, comment se comportent les entreprises face aux demandes d'augmentation de salaires? Avec le retour de l'inflation, certaines entreprises ont renoué avec les augmentations collectives. Est-ce à dire que c'est un frein pour les augmentations individuelles? Non. Cela n'empêchera jamais un salarié de faire une demande individuelle d'augmentation de salaire. A condition qu'elle soit légitime.
Quels conseils donneriez-vous à un cadre en poste pour qu'il optimise ses chances d'aboutir favorablement? Lorsque l'on formule une demande d'augmentation de salaire, il faut montrer que l'on est méritant et, pour cela, présenter des résultats tangibles: avez-vous excellé dans une mise en situation particulière? Vous a-t-on confié une nouvelle mission à enjeu? Vos compétences ont-elles augmenté? Et puis il faut faire un benchmark du niveau des rémunérations sur votre secteur. A ce titre, les données de l'Apec les plus consultées sur le portail internet dédié aux cadres confirmés sont les fiches salaires.

Ce qu'il ne faut surtout pas faire

Utiliser des arguments négatifs, faire du chantage «Si vous ne me donnez pas satisfaction, je vais perdre ma motivation, je vais démissionner...»
Se comparer aux autres cadres en avançant qu'ils ont une meilleure rémunération.
Justifer sa demande d'augmentation par des besoins personnels. Vous devez vous contenter d'arguments professionnels.

Pour négocier votre augmentation, développez votre visibilité

Votre supérieur et toute autre personne infuente dans l'entreprise doivent connaître votre valeur pour légitimer votre demande d'augmentation. Dans son ouvrage 101 secrets pour bien négocier son salaire... ou une augmentation, Daniel Porot conseille de:
- communiquer toutes vos réalisations à votre responsable, de façon verbale ou écrite;
- participer aux réunions ou meetings- excellents amplifcateurs d'information - et de savoir communiquer avec les personnes-clés;
- vous montrer actif dans les réunions de travail; n accepter de donner des conférences dans lesquelles vous représentez votre organisation;
- mettre en avant votre département ou votre société dans le magazine interne de l'entreprise;
- devenir expert: faites-vous agréer auprès d'un tribunal de commerce, d'un tribunal administratif...; obtenir une reconnaissance officielle pour le travail que vous avez réalisé en vous faisant interviewer dans des journaux; n donner des cours ou des conférences dans votre domaine.

 
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Anne-Françoise RABAUD

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