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Externaliser son action

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Quand il faut frapper vite et fort, et qu’il devient évident que la seule force de vente interne n’y suffira pas, des directeurs commerciaux de plus en plus nombreux font appel à des renforts extérieurs. Pour quelques semaines ou quelques mois, une force de vente supplétive se met au service de l’entreprise. Stratégies.

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"Faire appel ponctuellement à des forces de vente supplétives ? L’idée fait son chemin dans les esprits des responsables commerciaux", confie Cyrille Prache, directeur conseil de CPM France, qui ne cache pas sa satisfaction d’être de plus en plus souvent interrogé par des directeurs des ventes tentés par le concept... mais toujours curieux d’en savoir plus avant d’oser franchir le pas. Pour travailler la grande distribution, qui reste le marché de prédilection, la méthode est entrée dans les mœurs. “Mais, désormais, nos clients nous sollicitent aussi pour d’autres réseaux, pour des points de vente traditionnels comme les bureaux de tabacs, boulangeries, etc. ou vis-à-vis des grossistes”, remarque Christian Beghyn, directeur général adjoint d’un autre spécialiste du marketing terrain, le groupe B & W. Après s’être imposée dans des secteurs à forte croissance tel que le high tech et plus spécialement la téléphonie, l’informatique, ou le multimédia par exemple, l’externalisation gagne aujourd’hui du terrain dans d’autres domaines. “Nous pénétrons de nouveaux marchés, comme la banque ou l’assurance”, raconte Gérard d’Espalungue, directeur commercial de Districom Sodep. D’autres acteurs disent conduire des opérations dans les écoles pour des journaux destinés aux enfants. Et nombre de prestataires lorgnent désormais sur le B to B. Surprenant ? Pas outre mesure. Car, quels que soient les secteurs d’action ou la cible visée, les objectifs des entreprises clientes se ressemblent. Pourquoi font-elles appel à un prestataire qui va devoir, en un temps record, recruter et mobiliser une équipe commerciale qui ne tournera souvent que quelques semaines ou quelques mois ? C’est parfois le “test” préalable à la mise en place d’une force de vente externe permanente. C’est plus souvent pour gagner une vraie “course contre la montre”. Conquérir chrono en main Lancement de produits, plan média, opération promotionnelle, référencement n’auront l’impact espéré que si les produits sont effectivement en place dans les points de vente. Qu’il faut donc visiter dans un délai vertigineusement bref. Même enjeu pour les produits à forte saisonnalité. Ou lorsque s’ouvre une occasion inespérée de conquérir des parts de marché... à condition d’agir vite. Si la force de vente interne ne suffit pas, il faut accepter de perdre du chiffre d’affaires... ou appeler des renforts. “La durée de vie d’un produit est de plus en plus courte. La visibilité d’une entreprise sur son marché ne dépasse plus guère six mois à un an. Conséquence : celle-ci doit être plus réactive, capable de mobiliser très vite des moyens importants sur le terrain”, résume Gérard d’Espalungue. Les industriels ont aussi appris à compter sur l’externalisation pour mieux couvrir le territoire. Rigueur budgétaire oblige, certains points de vente représentent un potentiel insuffisant pour justifier d’y consacrer une équipe commerciale permanente. Mais, en les délaissant, l’entreprise se prive aussi d’une partie de ses ventes. La solution ? Faire appel de façon ponctuelle – mais récurrente – à des forces de vente supplétives, et organiser une ou deux campagnes de visites chaque année par exemple. C’est le cas de Duracell dont le directeur des ventes témoigne ci-contre. Une option que certains industriels retiennent pour les supermarchés ou même parfois les réseaux de détail. Les conditions du partenariat Quelle que soit sa finalité, l’opération commando doit être guidée par deux principes. “Elle s’inscrit dans une stratégie de conquête : gagner de la diffusion, de la visibilité, accroître le volume des ventes, etc.”, insiste Cyrille Prache. Et distribue clairement les rôles. L’équipe commerciale interne se concentre sur les grands enjeux, les points de vente stratégiques. La force de vente supplétive prend en charge le reste. Au directeur commercial de faire passer clairement le message auprès de ses propres troupes, qui, à défaut, risquent parfois de voir, dans ce soutien temporaire, un désaveu ou une concurrence déplaisante. Mettre en place avec une société extérieure, même spécialisée, une opération “coup de poing” demandera d’ailleurs une forte implication de l’entreprise elle-même. Pour élaborer un plan d’action – et un devis –, le prestataire doit cerner les attentes réelles de son client. “Nous devons découvrir sa problématique, définir le contenu de la mission, les outils commerciaux à mettre en place, la logistique nécessaire, le reporting souhaité, etc. Notre rôle est aussi de conseiller le directeur commercial car nous pouvons lui apporter une valeur ajoutée à laquelle il n’a pas toujours pensé”, souligne Thierry Desnos, directeur du département marketing et développement de SEP. Au prestataire de recruter les commerciaux dont le profil correspond au réseau de distribution visé et au produit (il dispose souvent de fichiers qui permettent de gagner du temps). Mais aussi d’organiser les plans de tournée, de centraliser le reporting, de manager l’équipe. “Attention : nous avons besoin de l’aide de l’entreprise. Il nous faut connaître l’historique des points de vente, être averti d’éventuels litiges non réglés, avoir un correspondant permanent dans l’entreprise pour répondre, par exemple, à un commercial qui demande une information urgente pour un chef de rayon. Il faut aussi concevoir un argumentaire de vente ad hoc. Celui dont dispose la force de vente interne n’est pas toujours adapté à une opération de courte durée”, rappelle Pascal Noireaut, directeur du département Dip’Force de Promodip. À l’entreprise aussi de s’impliquer dans la formation de la nouvelle équipe. Et de participer à une formation éclair – de un à trois jours, sauf exception – dont l’objectif est de présenter le marché, l’entreprise, le produit, le contexte de l’opération, l’enjeu, l’objectif. “Mais c’est à nous de définir le contenu de cette formation, de sélectionner ce que le vendeur doit vraiment savoir pour atteindre les objectifs. Les clients sont enclins à vouloir multiplier les informations, au risque de nuire à la clarté du message”, met en garde Jean-Pierre Serre, directeur de l’intervenant extérieur Circular Pro-Vente. Les nouvelles recrues doivent déjà maîtriser les techniques de vente. Certains prestataires organisent même par ailleurs des “piqûres de rappel” pour leurs commerciaux. Donner des objectifs simples et réalistes La tentation peut être grande, pour l’entreprise, de pousser plus en avant sa participation, par exemple d’assurer en interne le management, surtout si l’opération s’étale sur plusieurs mois. Attention danger ! Car elle frôlerait alors le “prêt de main d’œuvre”, une pratique illégale, passible d’amendes et de condamnations pénales. Rien d’étonnant donc à ce que les prestataires soient particulièrement vigilants sur ce point. Autre écueil à éviter : fixer à cette nouvelle équipe les mêmes objectifs que ceux auxquels la force de vente interne est habituée. “Au contraire, il faut donner des objectifs simples et peu nombreux”, rappelle Jean-Pierre Serre (Circular Pro-Vente). Difficile de tout demander en même temps – prendre des commandes, poser de la PLV, travailler le linéaire, vendre une multitude de produits différents, etc. – à des commerciaux si vite “expédiés” sur le terrain. D’autant que la brièveté de la mission ne leur laisse guère le temps de se rôder. Même règle d’or pour la part variable de leur rémunération (ou pour les opérations de stimulation souvent mises en place), qui peut être calculée sur le chiffre d’affaires généré, ou, s’il est difficile à évaluer, sur le nombre de visites réalisées additionnées ou pas de critères qualitatifs par exemple. L’essentiel ? Des objectifs réalistes, qu’il est risqué de calquer sur ceux de l’équipe permanente, plus aguerrie, souvent concentrée sur une autre cible. Non que la force de vente supplétive soit nécessairement moins performante. “En général, les résultats de nos propres commerciaux sont meilleurs. Mais il y a des surprises, car la force de vente supplétive se voit confier des missions plus simples, des opérations plus faciles à vendre et est mobilisée sur un même sujet pour une courte durée”, souligne Philippe Cadiou, directeur des ventes de Duracell. De la réactivité Quant au coût final de l’opération, les prestataires avancent avec prudence des ordres de grandeur : environ 2 000 F par jour et par commercial, ou un prix moyen de 250 F à 350 F pour une visite en supermarché (500 F en hyper). Mais gare aux généralités. Le vrai tarif dépendra de la longueur des visites, des temps de déplacement entre les points de vente, du profil – plus ou moins onéreux – des effectifs recrutés, etc. La clé du succès ? La réactivité. Celle des prestataires, qui font parfois des prouesses pour monter en un mois une opération commando. Même si le délai peut être parfois plus long, lorsqu’ils doivent, par exemple, recruter des profils (ingénieurs, etc.) plus rares sur le marché de l’emploi. Celle de l’entreprise aussi, qui doit être disponible pour collaborer avec son prestataire. Celle des deux partenaires enfin, notamment pendant les premiers jours de l’opération. “Il faut pouvoir corriger très vite le tir, si une difficulté a été sous-estimée, par exemple si un concurrent a surstocké les points de vente”, souligne Christian Beghyn. D’où l’importance du reporting. Certains prestataires – comme B & W – dotent leurs équipes de PC de poche, pour accélérer la remontée de l’information. D’autres n’optent pour cette solution que si la durée de la mission justifie le coût supplémentaire pour le client, et si celui-ci le souhaite. Une question de sur mesure.

“Quand je doute de pouvoir couvrir à temps 100 % des points de vente, j’externalise une partie des visites.” Philippe Cadiou, directeur des ventes chez Duracell. Avec 33 commerciaux permanents, Duracell dispose d’un effectif suffisant pour couvrir en interne hypermarchés et supermarchés. Quatre à cinq fois par an, pourtant, des forces de ventes supplétives (de B & W) sont ponctuellement appelées. “Pour pallier aux départs et aux congés, mais aussi pendant les périodes d’intense activité : après Noël (pour les jouets), lors du lancement de nouveaux produits ou à des occasions particulières, comme en 1998, lorsque nous étions sponsors de la Coupe du Monde, explique Philippe Cadiou. Quand les délais sont trop courts, je préfère faire appel à un prestataire plutôt que de m’apercevoir au final que, malgré les efforts déployés en interne, 20 % des points de vente par exemple n’ont pas été visités. Mon objectif est de les couvrir en totalité.”

“Soyez précis sur la mission que vous confiez aux vendeurs supplétifs. Et misez sur la formation technique.” Jean-Antoine Badin, directeur des ventes distribution grand public d’Alcatel. Lancement de produits, marché à forte saisonnalité (Fête des mères, Noël, etc.) : à plusieurs reprises, Jean-Antoine Badin a fait appel à des forces de vente supplétives (gérées par Promodip). Dernière opération en date : une quinzaine de commerciaux mobilisés pendant 15 jours pour présenter dans la grande distribution une nouvelle gamme de téléphone sans fil (en photo). “Pour réussir ces opérations, il ne faut confier au vendeur qu’un seul travail, et non trente-six. Et lui donner une formation technique. Or nos produits sont de plus en plus sophistiqués et les points de vente de plus en plus soucieux d’obtenir de l’information. Faire appel à des forces de vente ponctuelles ne nous permet pas de capitaliser sur l’expertise du commercial. C’est pourquoi nous avons choisi aujourd’hui de renforcer notre équipe interne.”

“Deux fois par an, nous faisons appel à une force de vente complémentaire pour redresser notre score dans une enseigne ou une région en sous-pénétration.“ Patrick Grang, directeur commercial de TPS. Grâce à ce renfort, TPS peut visiter des points de vente que son équipe commerciale interne ne suffit pas à couvrir, et sur lesquels les performances sont jugées insuffisantes. Particularité : ces opérations ne mobilisent en général que deux à trois personnes, soigneusement formées. “Nous n’hésitons pas à les faire tourner pendant plusieurs semaines avec nos propres attachés commerciaux. La mission dure ensuite un à deux mois”, souligne Patrick Grang. Avec le même prestataire – SEP en l’occurence –, TPS organise également deux à trois fois par an des opérations de pose de PLV et d’animation en magasins.

Six règles d’or por réussir une opération 1. Dialoguer avec le prestataire, lui donner les informations qui lui permettront de bâtir un plan d’action réaliste. 2. Lister les points de vente à visiter, s’assurer que les commerciaux y accéderont sans problème (l’accord de l’enseigne est parfois nécessaire) et qu’ils n’auront pas à régler des litiges en cours. 3. Penser à offrir une formation, un argumentaire de vente, des outils commerciaux adaptés. Les vendeurs n’ont pas le temps d’assimiler les mêmes informations qu’une équipe permanente. 4. Démontrer à la force de vente interne les avantages qu’elle peut retirer de ce renfort. Elle va ainsi pouvoir faire porter ses efforts sur les clients à plus fort potentiel, etc. 5. Concentrer la force de vente supplétive sur un ou deux objectifs essentiels et sur une gamme de produits limitée. 6. Sauf déception majeure, rester fidèle à son prestataire pour gagner en efficacité. Au fil des opérations successives, se retrouvent des commerciaux qui ont déjà travaillé pour l’entreprise, et sont donc mieux préparés.

 
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Anne Planté

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