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L’intrépide Scoot affronte le géant des annuaires

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Quand un nouveau-né vient titiller un mastodonte historiquement implanté, il s’attelle à une œuvre colossale. Deux entreprises, deux stratégies commerciales.

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Le marché des annuaires en ligne est, décidément, fort convoité. Après avoir longtemps fait cavalier seul sur un créneau qu’il a investi dès 1996 – date à laquelle il inaugurait son site www.pageszoom.fr – le groupe Pages Jaunes, filiale de France Télécom, doit aujourd’hui faire face à la concurrence. Et, notamment, à celle que lui livre Scoot, son jeune challenger né au printemps 2001. S’ils ont choisi le même modèle économique, puisqu’ils puisent tous deux leurs recettes dans la vente d’espaces publicitaires, et s’ils s’adressent à une cible commune, essentiellement constituée de TPE et de PME, ces deux acteurs ont opéré des choix stratégiques bien distincts, et parfois même diamétralement opposés. Et s’il est trop tôt pour savoir si Scoot gagnera son pari – s’approprier une part du marché des annuaires – la filiale du groupe Vivendi Universal Net (à l’heure où nous mettons sous presse, aucun changement d’actionnariat n’a été confirmé de source officielle) a au moins réussi à se constituer, en moins de dix-huit mois, un important capital notoriété auprès des professionnels et du grand public.

1/ Sur mesure et prêt-à-porter

“ Notre offre est extrêmement vaste, explique Fabienne Rousselet, responsable marke- ting de l’annuaire Pages Jaunes en ligne. Elle comprend des centaines de produits et des milliers de tarifs. ” Une offre complexe et complète, qui va du papier au Wap, en passant par l’Internet et le Minitel, et dont le prix de vente varie selon l’audience, donc le département. Mais, surtout, une offre extrêmement variée, qui répond aux demandes les plus diverses. Par exemple, pour être repérée sur le site www.pagesjaunes.fr, la société Chauffage Plus a l’embarras du choix. Elle peut se contenter de multiplier les accès, de telle sorte qu’un internaute tapant “plombier” ou “climatisation” obtienne ses coordonnées, mais elle peut fournir bien plus que ses simples adresse et numéro de téléphone, en y adjoignant un module informatif de quelques lignes, voire un véritable catalogue de plusieurs pages. Elle peut même proposer un lien avec son propre site Web, créé et hébergé par Pages Jaunes ou encore, une séquence audio-visuelle d’une minute présentant son savoir-faire. “ Nos commerciaux sont multiproduits et multisupports, explique Éric Langlois, directeur marketing de l’annuaire imprimé. Au-delà de la vente, ils ont un rôle de conseil. Ils étudient les besoins de leurs clients et leur fournissent une véritable préconisation en matière de communication locale. ” Si Pages Jaunes a fait le choix du sur mesure, Scoot a opté, quant à lui pour le prêt-à-porter. Bien qu’elle tende à s’élargir, l’offre du challenger se veut courte et “packagée” : elle se limite à trois produits (Access Privilège, Access Standard et Access Declic) correspondant à trois tarifs (599, 399 et 149 euros hors taxes par an). “ Ces trois offres sont multisupports, souligne Xavier Savin, directeur commercial. En achetant l’un de ces produits, le client est présent sur les trois médias Scoot : téléphone, Minitel et Internet. ” Autre différence majeure avec Pages Jaunes : les tarifs des annonces Scoot ne dépendent pas de l’audience ; ils sont donc les mêmes, quelle que soit la région dans laquelle se situe l’annonceur. Enfin, s’il peut agrémenter le produit de son choix de quelques options (visite à 360°, mention de la ville la plus proche en milieu rural, etc.), l’annonceur achète une offre standardisée. “ Il n’a pas à se demander s’il a intérêt à investir cent euros de plus dans telle ou telle amélioration graphique, souligne Pierre Teil, responsable des partenariats. Il nous achète un bloc texte modulaire. Nous lui simplifions la vie ! ”

2/ Les gratuits de PA pour partenaires

800 commerciaux terrain chargés des ventes à forte valeur ajoutée ou des clients à haut potentiel ; 500 télévendeurs spécialisés dans la prospection et les prises d’ordres plus modestes ; 150 conseillers Internet. Pour nouer un lien de proximité avec les 4 millions de professionnels que compte l’Hexagone, le groupe Pages Jaunes a investi dans une véritable armada commerciale. Des bataillons qu’elle n’hésite pas à former : pour maîtriser l’offre et répondre au mieux aux besoins des professionnels, les vendeurs terrain passent cinq jours par an en formation continue. “ Cela représente des investissements importants, concède Fabienne Rousselet. Mais nous nous y retrouvons, grâce à la faiblesse de notre turn-over : 3,2 % en 2001. ” Un tel investissement étant le prix à payer pour proposer une offre quasi exhaustive et totalement adaptée au profil de chaque annonceur. “ Et puis, souligne Éric Langlois, la vente est au cœur de notre métier. Nous ne pouvons externaliser une fonction aussi stratégique ! ” De tels effectifs constituent un luxe inaccessible pour l’ex-start-up qu’est Scoot, qui a donc fait le choix de l’externalisation partielle – elle emploie tout de même une trentaine de vendeurs terrain et une quinzaine de télévendeurs – afin d’assurer un maillage territorial à moindres frais. Après avoir signé un partenariat commercial infructueux avec Comareg, bien connu pour son gratuit, Bonjour, Scoot vient d’en faire autant avec un autre spécialiste de la presse gratuite, S3G, implanté dans le “grand Sud-Ouest” de la France et propriétaire du site www.kitrouve.com. “ Dans ce type de support, la plupart des petites annonces proviennent de professionnels. Précisément, notre cible ! ”, argumente Xavier Savin. Dès septembre 2002, les 93 commerciaux d’S3G,“ très implantés dans le tissu local ”, proposeront donc l’offre Scoot, parmi les produits de leur catalogue. “ Les pros qui achètent une petite annonce sur le site Kitrouve pourront bénéficier d’un lien avec le site Scoot, et vice versa. ” Bien entendu, Scoot rémunèrera S3G à chaque nouveau contrat signé. En clair, Scoot compte réussir avec S3G ce qu’il a raté avec Comareg. “ Nous avons échoué, avec Comareg, pour de simples raisons techniques, affirme le directeur commercial. Notre plate-forme était déficiente, si bien que le temps d’attente, sur le Net comme au téléphone, était trop long. ” Le public s’est plaint, Comareg a eu des réclamations et entre les deux fiancés, le torchon a brûlé. “ Mais aujourd’hui, insiste le porte-parole de Scoot, tous ces problèmes ont été totalement réglés. La qualité de service est optimale. Nous sommes prêts à relever le challenge. ”

3/ Un partenaire par région

Deuxième mode d’externalisation commerciale choisi par Scoot : le partenariat avec les régies publicitaires. “ Nous avons signé avec Performance Médias, à Strasbourg, et nous sommes en pourparlers avec d’autres. ” Objectifs : dénicher un partenaire par région et bâtir une couverture hexagonale harmonieuse. “ Enfin, reprend Xavier Savin, nous avons parfois recours à des forces de vente supplétives, et notamment lors d’événements particuliers. Pour la fête des Mères, par exemple, nous mettons l’accent sur les fleuristes. ” D’où le recours aux forces de vente additionnelles. “ Pour l’heure, conclut le directeur commercial, les ventes générées par ces diverses catégories de forces de vente externes représentent le tiers de nos recettes publicitaires. Mais, à terme, nous souhaitons inverser la tendance et externaliser un maximum de chiffre d’affaires. ”

4/ Le nouveau-né affronte le géant

Lorsque Pages Jaunes fait état de 541 000 annonceurs, Scoot en aligne à peine 23 000… C’est dire si la partie s’annonce ardue pour le jeune challenger. De plus, ce dernier a dû faire face à un net recul de ses prises d’ordres depuis septembre 2001 (date à laquelle il faisait état de 75 000 annonceurs). “ Nous avons payé un lourd tribut à nos soucis de qualité ”, reconnaît Xavier Savin. Pourtant, Scoot avait connu des débuts prometteurs, notamment grâce à son offre “trois mois gratuits” qui lui avait valu de culminer à 75 000 annonceurs en septembre 2001. Désormais équipée d’une plate-forme intégrée et fiable, l’entreprise maintient toutefois ses objectifs. “ Nous atteindrons notre point d’équilibre, qui se situe autour de 35 000 annonceurs, à la fin 2003. ” Comment ? Tout d’abord, en consolidant son assise auprès du grand public. “ La notoriété nous apporte du trafic, qui nous apporte des annonceurs. CQFD. ” Pour se faire connaître, la marque déploie donc d’importants moyens en communication : TV, sponsoring, distribution aux péages, campagnes d’e-mailing, etc. Mais elle multiplie aussi les partenariats avec les portails Internet : sur les sites SFR, Lycos et MSN, par exemple, la fonction annuaire est assurée par Scoot. “ C’est un argument de vente hors pair aux yeux des professionnels ! ” Et demain ? “ Nous entendons signer d’autres partenariats susceptibles de nous aider à accroître notre visibilité et notre trafic, murmure Xavier Savin. Cela pourrait concerner, par exemple, d’autres opérateurs téléphoniques (le 222, annuaire express d’SFR, proposant le service Scoot à tous ses clients, ndlr). ” Quant aux professionnels, Scoot compte les toucher en intensifiant le travail de prospection qu’il mène depuis des mois. “ Nous avons tout essayé : publicité ciblée, mailing, opérations commando, etc. Mais notre meilleure recette reste le contact commercial. ” Un véritable travail de fourmi qui prendra du temps mais qui devrait donner un jour tous ses fruits.

REPERES

Annuaires et services de renseignements : un marché en pleine croissance

Pages Jaunes, le géant historique

Placé sous la tutelle de Wanadoo, filiale Internet France Télécom, Pages Jaunes est l’éditeur et la régie publicitaire des annuaires téléphoniques et spécialisés de France Télécom : l’Annuaire (ex-Pages Blanches), Les Pages Jaunes, Les Pages Jaunes 3611 (sur Minitel), www.pagesjaunes.fr (sur Internet), wap.pagesjaunes.fr (sur le Wap) et Les Pages Pro. En outre, Pages Jaunes dispose de son propre département “création de sites Web”, au service des professionnels. Son catalogue de produits et services est donc pléthorique ; il contient plusieurs centaines de produits et peut répondre aux demandes les plus diverses.

Scoot, le challenger

Scoot propose aux entreprises trois formules de référencement, qui offrent une présence sur Internet, sur Minitel et sur les serveurs téléphoniques 3200 et 222 (annuaire Express SFR). Access Privilège, vendu 599 euros HT par an, permet aux annonceurs de figurer en tête de liste des réponses, lors d’une requête, et de transmettre un grand nombre d’informations sur leur enseigne et leur savoir-faire : coordonnées complètes, logo, horaires, services, offres spéciales, photo du point de vente, etc. En outre, l’utilisateur peut appeler gratuitement l’entreprise. Scoot commercialise deux produits d’appel : Acess Standard (399 euros HT par an) et Access Déclic (149 euros HT par an), donnant aux annonceurs une priorité d’affichage lors des requêtes et la mise en ligne de quelques informations de base.

D’autres acteurs…

• La Poste a lancé, en 2000, son propre annuaire en ligne, l’@annuaire de La Poste. Un millier d’annonceurs y ont acheté une “mise en avant”. • L’Annuaire Soleil, annuaire papier diffusé en Île-de-France, a désormais son site qui a déjà séduit 850 annonceurs. Lors d’une requête, les annonceurs apparaissent en tête de la liste des réponses. Ils peuvent aussi mettre en ligne leur logo, du texte publicitaire, une page info et un minisite. • Le 12 est le service de renseignements téléphoniques de France Télécom. Il se complète du 3212, son équivalent pour les renseignements internationaux, et du 712, les renseignements d’Orange. Face à la baisse de la demande, le 12 cherche à réduire ses coûts : il teste actuellement un centre d’appels totalement automatisé, en Bretagne. • Le 3211, lancé par Intra Call Center, filiale du groupe finlandais Fonecta, est un service de renseignements téléphoniques lancé en France, en juin dernier. En appelant ce guichet unique, l’utilisateur peut demander un renseignement sur la France, l’international (plus de vingt pays) et obtenir un service d’annuaire inversé. Pour les professionnels, le référencement est gratuit : les seuls revenus du 3211 proviennent des utilisateurs. • Le 3217, du groupe Iliad, également propriétaire du serveur Minitel 3617 Annu, est un nouveau service de renseignements téléphoniques proposant l’annuaire inversé ainsi qu’un annuaire traditionnel grand public.

 
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Stéfanie Moge-Masson

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