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Le capital-risque en prend moins…

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Après les faillites de start-up et la déprime sur les valeurs de la nouvelle économie, le secteur du capital-risque se repositionne. Les jeunes pousses sont de moins en moins nombreuses à trouver des financements. Mais lorsqu’elles y parviennent, elles décrochent des sommes plus importantes qu’en début d’année.

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Un projet de site web, l’ébauche d’un business-plan et le tour était joué : presque n’importe quel créateur de start-up pouvait lever plusieurs millions de francs d’un clic magique ! C’était il y a quelques mois à peine, avant le minikrach d’avril sur les valeurs high tech, autant dire des années lumière dans le monde de la nouvelle économie… Aujourd’hui, la situation est bien différente. L’argent ne coule plus à flots. Pour preuve, les chiffres de l’étude trimestrielle du Benchmark Group qui montrent une forte érosion des montants investis dans les start-up internet au troisième trimestre 2000. 1,28 milliard de francs a été levé pour seulement 25 opérations, contre 2,2 milliards au deuxième trimestre ! Encore faut-il noter que ce chiffre ne reflète pas totalement la réalité puisqu’il intègre la levée de fonds record de 364 millions réalisée par l’éditeur Imediation. Assurément donc, le moral des investisseurs n’est plus au beau fixe. Après la tempête, les business-angels cherchent avant tout à protéger leurs arrières en évitant de miser sur des sociétés au modèle économique trop novateur ou d’une rentabilité trop lente. Résultat : tous les fonds d’investissement ont durci leurs critères de financement. Fabrice Henry, président du directoire d’Angel Invest, un fonds regroupant des capital-risqueurs, reconnaît que « l’on est entré dans un processus de méfiance de la part des investisseurs, qui demandent aujourd’hui une rentabilité plus rapide qu’il y a six mois ». En clair, les jeunes pousses ne peuvent plus s’offrir le luxe de dire qu’elles seront profitables dans cinq ans. « Le retour sur investissement doit être réalisable dans un délai de un à trois ans, affirme Philippe Gervais, directeur de participation du fonds d’investissement Acess2Net. Un bon projet est un projet qui a peu de besoins en capitaux et qui permet une rentabilité rapide. » L’écrémage parmi les start-up est donc sévère. Actuellement, de moins en moins de sociétés réussissent à lever des fonds. En revanche, lorsqu’elles parviennent à gagner la confiance des investisseurs, elles décrochent plus d’argent qu’auparavant. Les montants moyens par levée de fonds sont ainsi en forte hausse, en moyenne 50 millions de francs au troisième trimestre contre 37 au deuxième. Cela montre aussi que les capitaux n’ont pas disparu depuis avril dernier. « Les fonds d’investissement privilégient des tours de financement plus gros, parce qu’il est important de se concentrer sur des sociétés prometteuses, explique Xavier Schallbaum, directeur associé d’Apollo Invest, un regroupement de capital-risqueurs. Chacun a encore sa chance… Pourvu qu’il vienne avec un dossier en béton ! »

“Beaucoup d’argent cherche à s’investir, mais dans des start-up qui font du business rémunérateur.” Philippe Gervais, directeur de participation chez Access2Net Access2Net est l’une des dernières-nées parmi les sociétés de levée de fonds. Créée en février par la web agency Fi System, elle a financé des start-up aussi différentes que FilmFestival (contenu), SellingVision (technologie basée sur l’ASP pour les forces de vente) ou Msat (société traditionnelle développant une activité web). Comme toutes les sociétés de levée de fonds, Access2Net souhaite aujourd’hui réduire le nombre de ses investissements et augmenter le montant moyen de ses participations, qui devrait passer de 3,5 millions de francs à près de 7 millions. « Ce n’est pas à cause du minikrach d’avril, explique Philippe Gervais, directeur de participation. Au début, nous faisions du co-investissement, maintenant nous souhaitons avoir un rôle de “lead” dans la société, pour y être actif. » Par ailleurs, augmenter le montant de ses financements dans des sociétés mieux choisies permet d’accroître le retour sur investissement. « C’est une logique inhérente au capital-risque, rappelle Philippe Gervais. Un bon projet est un projet où il y a peu de besoins en capitaux et un retour rapide. » Des exigences accrues qui ne remettent pas en cause le développement du e-commerce : « Les bons projets qui font du chiffre trouvent encore et trouveront toujours des investisseurs. »

“On ne se contente pas d’apporter du cash. Les entrepreneurs actionnaires de notre fonds de capital-risque font bénéficier de leur expérience.” Xavier Schallbaum, directeur associé d’Apollo Invest Comme son nom l’indique, Apollo Invest veut faire décoller les start-up. La société de capital-risque regroupe plusieurs entrepreneurs français parmi les plus prestigieux (Gilles Pelisson, ancien d’Eurodisney ; André Levy Lang, ancien de Paribas, etc.) qui ont investi à titre personnel. Leur idée ? Non seulement prendre des participations dans des start-up mais aussi « jouer un rôle qualitatif, comme l’explique Xavier Schallbaum, directeur associé. On ne se contente pas d’apporter du cash, les entrepreneurs font bénéficier ces jeunes sociétés de leur expérience. » Par exemple, l’un des membres d’Apollo Invest, ancien responsable chez Majorette (le fabricant de jouets), siège au conseil d’administration d’abcool, un site de vente en ligne de jouets. Au-delà de ces services stratégiques, les jeunes pousses trouvent aussi de l’argent chez Apollo Invest. « Au début, nous prenions des participations aux environs de 300 000 euros, aujourd’hui les montants moyens se situent entre 1 et 2 millions d’euros », reconnaît Xavier Schallbaum. Pourquoi ? « Nous privilégions les start-up réellement intéressantes, celles dont nous sommes certains qu’elles seront profitables. Nous finançons donc moins de start-up, mais nous les finançons plus largement. »

“Aujourd’hui, les critères sont plus stricts et c’est tant mieux. Les investisseurs regardent la capacité de la société à générer des profits à une échéance comprise entre un et trois ans.” Fabrice Henry, président du directoire d’Angel Invest Créée au début de l’année, Angel Invest est une société regroupant une centaine de business-angels. « Notre vocation est de faire du capital d’amorçage et des premiers tours », explique Fabrice Henry, le président du directoire. D’emblée, il précise également que la société ne veut pas financer des centaines de start-up, mais se concentrer sur une quinzaine au maximum. « Nous souhaitons nous positionner de manière réfléchie, avec des investissements moyens s’élevant à 5 millions de francs. » Une stratégie plutôt prudente donc, qui s’explique en partie par le changement de climat intervenu ces derniers mois : « Il y a six mois, les investissements se réalisaient sur trois coups de fil. Aujourd’hui, les critères sont plus stricts et c’est tant mieux. Les investisseurs regardent la capacité de la société à générer des profits dans une échéance comprise entre un et trois ans et ils s’assurent, avant d’investir, que la start-up sera capable de faire un deuxième tour de table sans problème. » Néanmoins, Fabrice Henry relativise : si le secteur est en crise du point de vue boursier, internet est un phénomène durable. « Nous recevons toujours autant de dossiers et, pour tout dire, les projets sont meilleurs qu’avant. » Sans doute un effet bénéfique de la déprime. La plus grande difficulté à lever des fonds a probablement découragé les start-up les moins sérieuses, et encouragé les autres à peaufiner leur business-plan.

Repères en chiffres 1,28milliard de francs a été levé par les start-up internet au troisième trimestre 2000, un chiffre en nette baisse. les capital-risqueurs au premier semestre ont été consacrées au seed (financement de l’idée), 41 % au premier tour de table (mise sur le marché) et 49 % au deuxième tour (développement), selon une étude de Chausson Finance. 364 millions de francs : c’est la somme record levée en septembre par Imediation, un éditeur de logiciels d’e-commerce.

 
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Frédéric Thibaud

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