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Les commerciaux, stars de la nouvelle économie (2) : Recruter la perle rare

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Une bonne dose d’autonomie, une forte capacité à se remettre en question et à évoluer avec l’entreprise, l’habitude d’être sur le pont… Voilà ce qu’attendent les start-up de leurs futurs commerciaux.

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Recruter aujourd’hui des collaborateurs, et plus particulièrement des commerciaux, dans le secteur de la nouvelle économie n’est pas une partie de plaisir. D’abord parce que les start-up sont le plus souvent acculées à recruter dans la précipitation. Ensuite parce que le manque de candidatures crée un “appel d’air”. Mais les prétendants aux postes n’ont pas toujours la fibre, ils sont parfois opportunistes et ont le plus souvent besoin d’être rassurés. Ils sont en fait pris entre deux feux : d’un côté, ils entendent monter des start-up un chant qui ressemble à celui des sirènes. De l’autre, ils se méfient, avancent prudemment, quelque peu échaudés par les derniers soubresauts du secteur, et notamment la mésaventure de boo.com. Thierry Chevalier, directeur commercial de One Net Services.com, une société qui vend des prestations de service orienté B to B, témoigne de la difficulté à recruter : “ On a eu du mal à trouver des candidats. Même ceux qui étaient attirés s’interrogeaient. Ils se posaient par exemple beaucoup de questions sur le financement de la société. ” Anne-Tania Desmettre, pdg d’Eraware, spécialisée dans l’accompagnement commercial des start-up, observe de son côté que “ de nombreux candidats sont prêts à sortir d’un secteur pour venir dans celui de la nouvelle économie. C’est un véritable phénomène de mode, c’est pourquoi il faut être vigilant. ”Presse ou internet, même combat !Sur le mode de recrutement, on n’observe pas – étrangement – de grande différence avec ce qui se pratique dans l’économie traditionnelle. Les sociétés font aussi bien appel aux outils traditionnels de recrutement (presse, chasseur de têtes, réseau personnel, etc.) qu’aux nouvelles technologies et notamment aux sites internet. Et obtiennent des résultats finalement assez semblables. L’idée selon laquelle les sociétés du net ne recruteraient que par le net est donc erronée. Illustration chez One Net Services.com où les recrutements se sont faits à la fois par la voie traditionnelle de la presse et par le biais d’internet. Au final, ces deux supports ont fait match nul ! “ Mais, reconnaît Thierry Chevalier, internet est plus réactif. En revanche, on n’a pas de courrier manuscrit, on ne peut donc pas faire de pré-analyse graphologique. ” Antoine Fauvel, directeur commercial de Versata, reconnaît pour sa part qu’en matière de recrutement il n’a pas été spécialement original : “ J’ai fait appel à mes relations professionnelles et personnelles, ce qui m’a permis d’être rapide et de ne pas me tromper. Je n’avais pas envie d’un turn over de 30 %. Ce n’est pas viable dans une petite structure comme la nôtre. J’ai donc bâti un socle et je l’ai consolidé en m’appuyant en partie sur un réseau de cabinet. Il faut savoir se faire aider. ” Mais il apporte aussitôt un bémol : “ Les cabinets manquent parfois de réactivité, ne savent pas “vendre” les start-up aux candidats lorsque celles-ci ne sont pas cotées. ” La capacité à évoluer sur le profil du commercial recherché, en revanche, le secteur de la nouvelle économie a bel et bien généré son propre moule. Au-delà du diplôme, la capacité à évoluer est l’une des principales caractéristiques attendues chez un candidat. “ Le propre d’une start-up est d’être amenée à progresser, pour suivre son marché et du fait de son organisation. Les collaborateurs doivent donc être capable de la suivre ”, explique Thierry Chevalier. Ce qui serait rédhibitoire pour un commercial, poursuit Anne-Tania Desmettre d’Eraware, “ c’est qu’il s’approprie un territoire commercial, qu’il ne soit pas capable d’évoluer au fur et à mesure que la force commerciale s’étoffe, s’organise, que les zones se modifient ”. Le commercial, version start-up, doit par ailleurs être capable de mettre la main à la pâte. Un candidat qui n’aurait évolué, au cours de ses expériences professionnelles passées, que dans des organisations très structurées, très cloisonnées, très hiérarchisées, aura du mal à convaincre un futur employeur qu’il va s’adapter. Dans le même ordre d’idées, les commerciaux doivent être autonomes. Comme le rappelle Antoine Fauvel, de la société Versata, ceux qui ont besoin d’être “flagellés” pour avancer n’ont pas leur place dans le secteur des nouvelles technologies, pour la simple et bonne raison “ qu’on n’a pas le temps ” ! Les candidats peuvent aussi remiser au placard leurs certitudes et leurs fiertés : dans le monde des start-up, il faut savoir se remettre en question, bien plus que lorsque l’on change d’employeur dans un secteur dit traditionnel, parce que la règle du jeu et les repères ne sont pas les mêmes.Défricheur et développeurL’âge est également un critère majeur. Dans le secteur des start-up, un senior est âgé d’une trentaine d’année, quant aux juniors, ils sortent à peine des écoles et des universités. Dans un domaine où, plus encore qu’ailleurs, “ time is money ”, où il faut très vite faire son trou et ses preuves, les premiers sont recherchés pour leur connaissance des ficelles du secteur, leurs expériences qui font d’eux des gens capables de réagir vite, de gagner du temps et donc des affaires. Les juniors sont, eux, recherchés pour leur capacité à s’investir massivement, à apporter de la vivacité. Inutile de préciser que la connaissance du secteur de la nouvelle économie et l’intérêt que le candidat porte aux nouvelles technologies sont également vérifiés de près par les recruteurs. La formation initiale, si elle est loin d’arriver en tête des critères de sélection, est néanmoins en général de bac + 2 à bac + 4. Au-delà de ces critères, il y a un autre élément qui joue : selon que l’entreprise recrute pour son lancement ou pour son développement, elle ne recherchera pas les mêmes candidats. “ Au début, il faut des défricheurs, des créatifs, ensuite il faut des développeurs. C’est en général le profil que nous recherchons pour la création du poste de directeur commercial ”, raconte Anne-Tania Desmettre. Et pour ce poste-là, Eraware évite en général les candidatures de managers qui ont toujours évolué dans de grands groupes très structurés… Élémentaire !Le temps et l’argent…Ce portrait-robot varie ensuite au gré du futur employeur. En la matière, Anne-Tania Desmettre, qui est amenée à recruter pour le compte de start-up, identifie trois types de pdg. Il y a ceux qui adorent leur entreprise, qui sont très humains, très tournés vers leur équipe. “ Ceux-là analysent les départs de collaborateurs comme des échecs personnels. Alors il faut recruter des collaborateurs loyaux, dont on sait qu’ils seront fidèles, des candidats qui ont envie de se construire et de se réaliser à travers l’entreprise. ” Il y a ceux qui veulent contrôler au maximum leur équipe, qui ne veulent pas recruter de meilleurs qu’eux. “ Ceux-là, on leur présente en général un candidat mouton et un requin… Au final, ils choisissent toujours le mouton… ”, raconte la pdg d’Eraware. Et puis il y a les autres, ceux qui ne veulent pas passer trop de temps à manager. “ À ceux-là nous proposons des profils de commerciaux particulièrement indépendants, autonomes et qui ne cherchent pas de reconnaissance… parce qu’avec ce type de pdg, ils n’en auront pas ! ”Ce portrait ne serait pas tout à fait complet si on n’évoquait pas la capacité des candidats à s’investir massivement, notamment en temps, pour une contrepartie pécuniaire qui n’est pas toujours à la hauteur, du moins dès le début. Si travailler dans une start-up n’est pas un sacerdoce, postuler requiert quand même d’être de nature optimiste et un peu joueur…

Antoine Fauvel (Versata) “ Dans le secteur de la nouvelle économie, le commercial doit être pro-actif et indépendant. Il doit aussi être conscient qu’il n’est pas là pour faire un coup, ça peut être très pervers ! ”La société Versata est spécialisée dans l’édition, la commercialisation et le support de solutions de développement, ainsi que dans le déploiement et la maintenance d’applications e-business. “ Dans une structure comme la nôtre, il faut une population hétérogène, des gens avertis qui permettent de raccourcir les procédures, de gagner du temps et des profils de juniors qui apportent de la vivacité ”, raconte Antoine Fauvel, directeur commercial de Versata France. Il a donc recruté des “seniors” de 35 à 40 ans qui connaissent le terrain sur lequel évolue l’entreprise. “ De bons commerciaux qui savent que la technique est un moyen, pas une fin en soi, des gens qui s’adaptent aux exigences d’une jeune pousse, qui savent être sur le pont quand il le faut, qui sont flexibles et qui savent se remettre en question. Lorsque l’on entre dans une start-up, on perd ses repères. ”

Start-up : la poule aux œufs d’or ? Comment et combien sont payés les commerciaux dans le secteur de la nouvelle économie ? Faut-il croire, comme on l’entend dire ça et là, que derrière chaque collaborateur de start-up se cache un millionnaire en puissance ? te : Vrai ou faux ? Le secteur de la nouvelle économie peut-il à juste titre être considéré comme la “poule aux œufs d’or” du moment ? Dans le milieu, la question fait bondir. “ Les gens se font beaucoup d’idées au sujet de la rémunération dans le secteur de la nouvelle économie ! ”, tranche François Vincent-Genod, DAF de Cyberdeck. “ Côté rémunération, il n’y a pas de règles ! ” assure Antoine Fauvel, directeur commercial de Versata. Il poursuit : “ C’est vrai que les start-up sont actuellement confrontées à un manque de compétences ce qui crée un appel de candidats très fort. Mais il ne faut pas oublier que les trois quarts d’entre elles vont se planter ! ” Et c’est vrai que le secteur de la nouvelle économie demeure unterrain très instable. Un terrain sur lequel on voit de tout, le pire comme le meilleur. “ C’est une hérésie de prétendre devenir millionnaire parce que l’on entre dans une start-up. Il faut aussi investir, être patient… ” Et le représentant de Versata de citer son exemple : “ L’an dernier, j’étais intéressé au chiffre d’affaires, je n’ai rien touché. Cette année ce n’est pas le cas… ”De fortes variationsLa rémunération des commerciaux – partie fixe et partie variable confondues – ne se distingue en effet pas de manière systématique de ce que l’on rencontre dans le secteur de l’économie traditionnelle. Aucune étude ne s’est encore penchée sur le sujet, mais on constate sur le terrain de fortes disparités. “ Un bon commercial gagne aussi bien sa vie dans une société performante de l’économie traditionnelle que chez nous ” assure François Vincent Genod, de Cyberdeck. Dans cette start-up “ qui pratique un ancien métier avec les nouvelles technologies ”, les commerciaux ont un fixe et une partie variable majorée par pallier atteint, indexée sur le chiffre d’affaire encaissé. Chez One Net Services.com, la rémunération fixe des commerciaux varie, selon les profils et les expériences, entre 140 et 200 KF. On est loin du million... Chez Versata, le recrutement de juniors “+”, disposant déjà d’une première expérience acquise chez un éditeur de préférence, se fait actuellement autour de 400 KF. Un niveau très largement réévalué par rapport à ce qui se pratiquait l’an dernier. L’entreprise recrutait alors autour de 250 KF. Une différence que le directeur commercial, Antoine Fauvel, explique par la maturité que l’entreprise a acquise : “ L’an dernier, le facteur rémunération intervenait dans le choix des candidats. Cette année, je recrute plus librement. ” Entre-temps, l’entreprise a conforté ses fondations. Le temps du défrichage a fait place au développement. Le premier constat qui s’impose, c’est que d’une start-up à une autre, en fonction du profil et de l’expérience acquise, le salaire des commerciaux, fixe et variable confondus, varie du simple au double. Seconde observation, les niveaux de rémunération constatés sont finalement assez proches de ce que l’on peut observer dans le secteur de l’économie traditionnelle, et l’écart est conforme à celui qui existe entre le statut de chef de secteur et d’ingénieur commercial par exemple. Attirer et fidéliser Ce sont en fait les systèmes de participation qui viennent se greffer sur la partie fixe + variable qui font toute la différence. Ou plus précisément qui peuvent la faire si l’entreprise se porte bien. En la matière, les start-up ont le choix entre les stock-options, les bons de souscription pour action (BSA), les bons de création d’entreprise (BCE)... On entend beaucoup parler des stock-options. Pourtant, la formule n’est pas des plus adaptées à la nouvelle économie. Pour des raisons fiscales d’une part. Et puis il faut cinq ans pour exercer ses droits sur des stock-options. “ Cinq ans, c’est beaucoup trop long ”, explique François Vincent-Genod, de Cyberdeck. Alors, les entreprises réservent les stock-options aux dirigeants, aux collaborateurs dont on sait qu’ils s’investissent à long terme dans l’entreprise. Les BSA ont, quant à eux, l’inconvénient de perdurer même quand le salarié a quitté l’entreprise. Impossible dans ces conditions de fidéliser ses collaborateurs. Plus souples, les BCE remportent la mise : chaque entreprise détermine à sa guise les conditions d’attribution et d’exercice. Elle peut les indexer sur des objectifs, individuels ou collectifs. Elle peut aussi jouer sur la fidélisation de ses collaborateurs en indexant une partie de ces BCE sur l’ancienneté. La société Cyberdeck a opté pour cette double attribution. “ L’attribution de BCE permet d’attirer des collaborateurs de qualité et au salarié d’atteindre un niveau de rémunération qu’il n’atteindrait pas autrement... si du moins l’entreprise se porte bien. Il ne faut pas oublier que beaucoup vont disparaître en cours de route... ” Seul bémol aux BCE, leur mise en place se fait sous certaines conditions ayant trait à l’ancienneté de l’entreprise, la composition du capital, etc.Le métier est durAlors, poule aux œufs d’or ou pas ? Tout dépend de quoi l’on parle. Si la comparaison se limite à la rémunération de base (fixe + variable), l’image est décalée. En revanche, la référence au gallinacé doré prend toute sa dimension lorsque l’on évoque la rémunération globale, bons et stock-options compris. Les revenus d’un collaborateur de Cyberdeck, générés par les BCE, peuvent être “ très significatifs par rapport à ses revenus annuels ”, reconnaît son porte-parole. Mais les perspectives de gains ne doivent pas masquer les difficultés et les risques. D’une part, le versement des droits liés aux bons et autres stock-options est conditionné par la bonne santé de l’entreprise, par sa capacité à augmenter la valeur de son titre. Une condition qui, par les temps qui courent, doit être prise au sérieux. Ceux qui n’auront pas misé sur le bon cheval risquent d’être déçus. D’autre part, être commercial dans le secteur de la nouvelle économie n’est pas spécialement “confortable”. “ Le métier est dur ”, insiste Anne-Tania Desmettre, pdg d’Eraware qui accompagne le développement de start-up. Et puis, même si les bons permettent d’exercer des droits rapidement, il n’en demeure pas moins qu’il faut un minimum de patience pour espérer décrocher le jackpot. À cela s’ajoute le fait que le côté “on-est-tous-embarqué-dans-la-même-aventure, on-aplanit-la-hiérarchie-et-on-décide-tout-ensemble” peut à terme en lasser plus d’un. Mais voilà, c’est la rançon de la gloire ! Alors, ceux qui sont un peu joueurs et prêts à rentrer dans le “moule” peuvent se mettre sur la ligne de départ

Thierry Chevalier (One Net Services.com) “ Dans l’ancienne économie, seuls les cadres supérieurs bénéficient de bons de souscription ou de stock-options. Et encore, dans les grands groupes. ”One Net Services.com propose à ses commerciaux, selon les expériences, un fixe de 144 à 200 KF, auquel s’ajoute un pourcentage de la marge brute sur les affaires signées non plafonné. Le prestataire de service orienté B to B propose également à l’ensemble de ses 36 collaborateurs des bons de souscription pour la création d’entreprise (BSPCE). “ Ça permet d’impliquer, de motiver et de fidéliser les collaborateurs ” explique Thierry Chevalier, directeur commercial. La première attribution a été limitée à 50 % du fixe, soit entre 70 et 100 KF/an pour la force de vente .

F.-V. Genod, DAF (Cyberdeck) “ Il y a beaucoup de fantasmes autour de l’argent facile dans la nouvelle économie. Mais, hors BCE, notre système de rémunération est tout à fait conforme à ce qui se pratique sur le marché. ”L’entreprise a mis sur pied un système de bons de création d’entreprise (BCE) qui concerne l’ensemble des 40 collaborateurs. L’attribution se fait sur deux niveaux : une partie est indexée sur des objectifs individuels fixés au semestre, une autre, qui vise à fidéliser les collaborateurs, est “exerçable” au bout de 3 ans.

 
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Anne-Françoise Rabaud

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