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Manager ses anciens collègues - Évitez deux écueils : copinage et autoritarisme

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Difficile de se retrouver à la tête de ses anciens collègues. Pour vous faire respecter, faites le deuil des relations trop familières et montrez-vous exemplaire.

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Les managers catapultés du jour au lendemain à la tête d’une équipe dont ils étaient les égaux et, parfois, les confidents, sont désemparés face à des collaborateurs qui n’acceptent pas facilement leur promotion ”, explique Claudine Giordano, consultante formatrice au CSP, cabinet de formation et de conseil. Directeur national des ventes de Zep Industries (produits de maintenance), Jacques Faliès connaît la promotion interne sur le bout des doigts, puisqu’il y entame sa vingtième année de carrière. Entré en 1982 comme VRP, il est, cinq ans plus tard, chargé de la formation et de l’animation d’une quinzaine de représentants, puis promu inspecteur, directeur régional puis national des ventes. “ Je manage aujourd’hui une équipe de 150 personnes, explique-t-il. Lorsque vous encadrez une équipe qui vous connaît, vous êtes d’autant plus obligé de faire vos preuves, de vous transcender. ”

Savoir déléguer et partager

La situation comporte tout de même quelques avantages. L’équipe se sent en terrain familier et connaît les qualités et les défauts de son manager. “ J’ai été sincèrement ravi d’apprendre la promotion de Jacques Faliès, témoigne Philippe Agostino, directeur régional des ventes de Zep Industries, qui occupait déjà cette fonction au moment où Jacques Faliès est devenu directeur national des ventes. Je connaissais ses qualités professionnelles et je savais qu’il tiendrait compte de mes problématiques, puisqu’il a exercé ma fonction. ” En général, le manager est immédiatement opérationnel, puisque familier des hommes et des pratiques de son entreprise. Mais la médaille a son revers. Le nouveau promu doit redoubler de prudence parce qu’il a un passé commun avec son équipe. Le cas le plus fréquemment rencontré ? Le directeur commercial incapable de déléguer. “ Il a souvent tendance à prendre son vendeur par la main et à l’emmener chez le client, explique Claudine Giordano. Être manager, c’est, la plupart du temps, faire faire et non plus tout faire soi-même. ” Deuxième écueil : la difficulté à imposer ses méthodes de travail par peur d’être mal jugé. Un seul remède : consulter son équipe dès sa prise de fonction, de préférence, en entretien individuel. “ Il est important, dans un premier temps, d’exposer vos méthodes de travail, vos objectifs puis d’expliquer à chacun ce que vous en attendez, poursuit Claudine Giordano. À vous, ensuite, de tenir vos promesses. ” D’ailleurs, si vous organisez des entretiens individuels, accordez le même temps à tous, même si vous avez plus d’affinités avec Paul qu’avec Jacques. Et c’est bien là que se situe la principale difficulté à laquelle se heurte le “nouveau-patron-de-ses-ex-collègues” : la peur de déplaire à une équipe dont il sait qu’elle l’attend au tournant… côté relationnel.

Éviter les pièges affectifs

Il faut, tout d’abord, bannir les relations de copinage. Facile à dire. Face à d’anciens collègues, on peut, par peur de déplaire, manquer d’autorité ou, tout simplement, être désapprouvé par jalousie. Claudine Giordano a ainsi coaché une jeune femme, qui, une fois promue chef de rayon, s’est trouvée confrontée à la jalousie de sa chef de file, plus âgée, et à celle de ses anciennes collègues. “ Je lui ai suggéré de crever l’abcès en entretien, mais de garder ses distances, pour éviter les pièges du dialogue affectif ”, explique Claudine Giordano. Pour Jacques Fossier, consultant à la Cégos, la situation est fréquente : “ Plus les gens vous étaient liés, plus c’est difficile. Il faut trouver un juste milieu entre laxisme et dureté. ” En clair, inutile de vous transformer en iceberg, il s’agit d’être ferme, sans verser dans l’autoritarisme. “ Vous pouvez conserver votre ancienne ligne de conduite, mais il faudra, de toute façon, faire le deuil de certains liens et distinguer les relations professionnelles des personnelles, conseille Claudine Giordano. Rien ne vous empêche de plaisanter avec votre collaborateur, mais vous ne pourrez plus être son confident, ne serait-ce que par solidarité vis-à-vis de votre direction. ” Bref, faites preuve de bon sens. Si vous avez toujours tutoyé vos collaborateurs, il serait déplacé de les vouvoyer sous prétexte que vous êtes leur supérieur. Un avis partagé par Jacques Faliès. “ L’important est de rester soi-même, tout en adoptant une certaine réserve, affirme-t-il. Chez nous, tout le monde se tutoie, et les promotions internes n’y changent rien. Bénéficier d’une promotion implique de changer de travail et de méthodes, mais surtout pas de comportement au quotidien. ” Enfin, posez-vous une seule question : pourquoi ai-je été choisi ? À moins d’avoir usurpé votre place, la réponse s’imposera d’elle-même.

Avis d’expert

Jean-Jacques Néré

, consultant et auteur d’un ouvrage sur le management* “ Gardez-vous de tout favoritisme et mettez votre tempérament de vendeur au placard ” “ Un manager nommé à la tête de son ancienne équipe est automatiquement confronté à des difficultés. ” Dans son dernier ouvrage, Jean-Jacques Néré aborde le sujet de la promotion interne. “ Ils tombent, en général, de haut. Ils pensent que le travail sera plus facile parce qu’ils connaissent leur équipe et la culture de l’entreprise. Or, en offrant des prérogatives au meilleur de l’équipe, la direction suscite automatiquement des jalousies. ” Pour le consultant, la seule solution passe par un travail sur soi. “ Il faut également se garder de toute partialité, poursuit-il. Un manager peut être tenté, face à ses pairs, de favoriser son ancienne équipe. C’est un vrai danger. ” Enfin, Jean-Jacques Néré insiste sur le rôle de manager, qui exclut celui de vendeur : “ Sa principale mission va désormais consister à organiser et à gérer le travail de ses collaborateurs, non de le faire à leur place. ” (*) Devenir manager, Éditions Démos, Collection Management/Ressources humaines. 2001. 28,81 euros (189 francs)

Témoignage

Yves Cadio

, directeur commercial du groupe Lease Plan France (gestion de parcs automobiles) “ Je m’efforce de montrer l’exemple ” “ J’ai très mal dormi la veille de ma première réunion ! ” Yves Cadio, 32 ans, directeur commercial du groupe Lease Plan France, est passé, en dix ans, d’ingénieur commercial à directeur commercial, après avoir été chef de produit marketing puis directeur des ventes. Il manage aujourd’hui 155 personnes, dont la plupart étaient déjà en poste avant sa promotion. “ Me retrouver à la tête de quatre directeurs de ventes m’a donné quelques sueurs froides. L’autre difficulté a été l’apprentissage d’une solitude parfois difficile à supporter. ” Pour faire face, Yves Cadio a choisi l’action. “ Je mise sur le travail et sur une organisation très structurée. La seule façon d’être reconnu, c’est d’être irréprochable.

À RETENIR - Devenir manager de ses anciens collègues comporte quelques avantages : les deux parties savent à quoi s’attendre. - Sachez déléguer. Prendre ses anciens collègues et commerciaux par la main pour conclure une ventes est l’errreur professionnelle à éviter. - Organisez des entretiens individuels avec chaque membre de votre équipe pour lui exposer vos objectifs et vos attentes. - Faites votre deuil du copinage. Soyez ferme sans autoritarisme.

 
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Caroline Thiévent

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