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Passer d’un grand groupe à une PME. L’aventure sourit aux plus audacieux

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Après plusieurs années passées dans de grandes organisations, bon nombre de dirigeants commerciaux lorgnent sur les sociétés de taille moyenne. Leur objectif : progresser, apprendre, être partie prenante de la réussite de “leur” entreprise.

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Quitter le grand groupe où l’on est confortablement installé pour aller “vivre l’aventure” dans une PME : quel manager commercial n’y a pas songé ? Pour bon nombre de directeurs et de managers “intermédiaires” – qu’ils soient responsables comptes clés, responsables de clientèle, directeurs des ventes, etc. –, ce type d’expérience constitue un tremplin. Et c’est la même chose pour les directeurs commerciaux, qui, en intégrant des sociétés de taille moyenne, peuvent espérer progresser et accéder, par exemple, à la direction générale. « En rejoignant une structure de taille modeste, on a, bien entendu, de bonnes chances de prendre de nouvelles responsabilités », explique Rami Kechteil, manager chez Mercuri Urval. C’est même, généralement, la condition sine qua non : en quittant son fauteuil de “middle manager” de grande organisation, on aspire à faire partie, immédiatement ou, du moins, à court terme, du comité de direction de la petite ou moyenne entreprise que l’on rejoint. Car, comme l’explique Rami Kechteil, « le contexte de la PME favorise la prise d’ascendant et de pouvoir ». Les rôles et les missions sont rarement figés, la promotion interne est reine. Entré chez Corolle, société de 180 salariés spécialisée dans la fabrication de poupées, en tant que chef des ventes, François Bruneau s’est ainsi vu confier de nouvelles responsabilités à l’occasion du départ du directeur commercial. « J’étais en poste depuis un an, relate-t-il. C’est tout naturellement que l’on m’a demandé de reprendre le flambeau. » Pour lui, l’atmosphère d’une PME se caractérise notamment par les « liens de proximité » qui unissent, le plus souvent, la hiérarchie et ses équipes. « On se connaît, on se fait confiance… C’est pourquoi, s’ils font leurs preuves, les gens peuvent évoluer davantage et, surtout, plus vite. »

Des rapports moins politiques

De fait, les structures indépendantes offrent à leurs équipes une plus grande lisibilité de leur avenir. « Les grands groupes sont mus par des faits extérieurs, qui échappent, le plus souvent, au contrôle des décideurs », observe Pascal de Longeville, directeur associé de la société EOS Conseil, spécialisée dans la gestion de carrière. Fusions, acquisitions, restructurations… Le parcours des cadres peut être parsemé d’embûches ou d’imprévus, qui leur imposent une part d’inconnu quant à leur évolution. « Les rapports sont bien moins politiques dans les petites que dans les grandes organisations », renchérit Pascal de Longeville. « À condition qu’il s’entende bien avec son patron, précise Rami Kechteil, le manager commercial de PME pourra agir et s’exprimer librement, loin de toute notion de “politiquement correct”. Dans ce type de structure, on valorise les vraies qualités de l’indi-vidu. » Un bémol, tout de même : attention aux PME familiales, où le président, omniprésent, a pour proches collaborateurs sa femme et ses enfants ! « L’élément extérieur sera alors perçu comme un intrus, et ses possibilités d’évolution peuvent être jugulées du fait de la mainmise de la famille sur l’entreprise, souligne le recruteur. D’une façon générale, pour être sûr de s’épanouir dans une organisation de petite taille, conseille ce dernier, il convient de bien observer qui détient le pouvoir. » En d’autres termes, chercher à comprendre à qui l’on a affaire, et dans quelle mesure cette personne est encline à la délégation. « Le candidat doit alors dialoguer avec son futur patron, lui poser un maximum de questions sur ses attentes et ses projets, estime Pascal de Longeville. Il doit être certain de partager les mêmes valeurs. » Et, pour glaner un maximum d’informations, pourquoi ne pas demander à rencontrer la personne que vous remplacerez ?

Polyvalence

Autre atout des PME : elles apprennent la polyvalence. Peu d’entre elles, par exemple, ont un directeur de la mobilité interne. « Certaines n’ont même pas de spécialiste des ressources humaines ! », lance Pascal de Longeville. Dans un tel contexte, le manager devra donc s’improviser recruteur, apprendre à fidéliser ses collaborateurs en leur offrant des perspectives d’évolution interne. De même, il devra s’initier au marketing, s’intéresser au merchandising, à l’informatique, à Internet, aux flottes automobiles, voire maîtriser quelques rudiments de finance, etc. « Pour aider leurs cadres, ces entreprises font souvent appel aux compétences de prestataires extérieurs », note Pascal de Longeville. Avantage pour les intéressés : ils gardent le choix de leurs partenaires et peuvent en changer quand ils veulent. Inconvénient : ils devront, malgré tout, improviser sur un certain nombre de points, plus ou moins stratégiques. « Le manager devra prendre ses responsabilités, faire preuve d’initiative, de débrouillardise, prendre de multiples décisions et les assumer, note Rami Kechteil. Pour quelqu’un qui a l’habitude de la sécurité et du confort, cette situation peut devenir vite stressante, voire insupportable. C’est d’ailleurs la première cause d’échec dans ce type de transition professionnelle. » Car, dans une PME plus qu’ailleurs, les décideurs sont jugés sur leurs résultats, sur leur contribution aux performances de l’entreprise. Dans cette logique de l’efficacité, la fin compte plus que les moyens.

Savez-vous changer une ampoule ?

En effet, la réussite du mariage tient à la personnalité des deux époux. « Aussi, avant de franchir le pas, le manager devra s’intro-specter », insiste Rami Kechteil. Et, pour cela, se poser la bonne question : “Suis-je de ceux qui s’épanouissent dans une atmosphère de petite boîte ?” Sachant que « les organisations de taille modeste sont idéales pour les personnes autonomes, polyvalentes, créatives, aventurières, ayant le goût du risque et l’envie de s’impliquer fortement dans leur mission. A contrario, les grands groupes sécurisent ceux qui ont besoin de points de repère, d’une hiérarchie très présente et de méthodes claires. » En bref, d’une caution, comme celle d’un groupe au nom célèbre, qui va, plus que la plupart des PME, susciter la fierté d’appartenance. Car les PME ont les inconvénients de leurs avantages : si les décisions y sont rapides, elles peuvent parfois être hâtives. « Les processus de décision sont brefs, et la plupart des mesures sont prises dans l’urgence, témoigne, chez Corolle, François Bruneau. Dans certains cas, nous manquons de recul et ne pouvons prendre réellement le temps de la réflexion. » De plus, si elles vous permettent d’accomplir des missions bien plus variées, les structures réduites peuvent aussi vous conduire à réaliser des tâches subalternes. « Il faut savoir changer une ampoule, même quand on est directeur général ! », plaisante Rami Kechteil. Enfin, la proximité dans les rapports humains peut conduire au “copinage” facile, mais aussi aux frictions. Et, dans un cercle restreint, la moindre inimitié peut tourner au cauchemar. « Partir dans une PME doit être un choix raisonné, conclut Pascal de Longeville. À trente-cinq ou quarante ans, quand il quitte une multinationale pour entrer dans une petite entreprise, le cadre a peu de chances de réintégrer, un jour, un grand groupe. Ces derniers privilégient souvent la promotion interne et, s’ils recrutent, ont tendance à puiser dans le vivier de leurs pairs. » À moins, toutefois, que vous n’ayez fait le pari d’accompagner votre PME dans sa croissance : petite entreprise deviendra grande !

Témoignage

Olivier Jouanne, directeur commercial de Dorotennis « Dans une PME, on réfléchit, on décide, on exécute… Et tout cela se fait vite et bien. » Olivier Jouanne a quitté le groupe Galeries Lafayette en avril 1997, afin de rejoindre la société Dorotennis, une PME de soixante-dix salariés, spécialisée dans le textile et la chaussure sportswear. À l''époque, il a été recruté au poste de directeur commercial de l''activité “chaussures”, avant que l''activité “textile” lui soit également confiée, deux ans plus tard. « La société est dirigée par le trio que je forme avec notre présidente et notre directeur financier, témoigne-t-il. J''ai donc l''opportunité de participer aux prises de décision les plus stratégiques, ce qui me passionne. » S''il confie avoir surtout été séduit, lors de son recrutement, par un « projet d''entreprise », le directeur commercial a découvert avec plaisir, la fluidité de la communication dans une petite structure : « Aux Galeries Lafayette, j''encadrais une cellule “achats” de cinq à six personnes. J''évoluais dans un microcosme. Aujourd''hui, je suis en contact avec tous les membres de l''entreprise. C''est très enrichissant. » Enfin, il s''avoue sensible à la grande réactivité de la PME : « Ici, pas de lourdeur administrative, pas d’interminables processus de décision et de validation des moindres projets. »

Avis d’expert

Rami Kechteil, manager chez Mercuri Urval « Pour séduire une PME, dites-vous entrepreneur. » « L’idée préconçue selon laquelle les PME jugent les candidats sur leur personnalité, et les grands groupes, sur les diplômes, a fait long feu ! Au contraire, bien des PME vont chercher leurs forces vives chez leurs concurrents : elles privilégient le critère de l’expérience et négligent d’évaluer le véritable potentiel de l’individu. » Alors, pour séduire, malgré tout, un patron de PME, Rami Kechteil conseille aux cadres de recentrer les entretiens non sur eux-mêmes, mais sur le projet de l’entreprise à laquelle ils ont affaire : « Ne parlez pas seulement de vous, conseille-t-il. Posez des questions sur la société, tentez de comprendre ses challenges, ses difficultés, ses atouts. Montrez à votre interlocuteur que vous vous intéressez d’ores et déjà à lui, et que vous pouvez l’aider à gagner son pari. Bref, élaborez, avec lui, un vrai plan d’action. »

À RETENIR _ Le contexte des PME est propice à l’évolution rapide des meilleurs cadres. _ Les managers y ont une lisibilité accrue de leur avenir : moins de perspectives de fusions, acquisitions, et autres restructurations. _ Attention, toutefois, aux PME familiales, qui peuvent entrevoir l’élément extérieur comme un perturbateur. _ L’atmosphère des PME convient aux profils autonomes, créatifs, polyvalents et ayant le goût du risque ; celles des grands groupes, aux personnes demandeuses de sécurité, de méthode et de structure hiérarchique.

 
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Stéfanie Moge-Masson

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