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Pédagogie : Former les seniors aux nouvelles technologies

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Pour convertir les vendeurs chevronnés à l’informatique, une seule recette : les impliquer en amont, suivre de près leurs premiers pas et valider leurs acquis.

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La souris vaincra-t-elle définitivement la gomme et le crayon ? C’est la question que se posent encore certains managers commerciaux, à la tête de forces de vente seniors réfractaires à l’usage de leur ordinateur portable. « Ce que l’on constate aujourd’hui – à l’heure où l’informatisation des forces de vente est largement engagée –, ce n’est pas tant un blocage lié à l’outil informatique qu’une réticence due à son application dans la fonction commerciale », observe Étienne Falise, directeur général de Carthago, société de conseil en développement commercial. Car, certes, les commerciaux seniors ne sont pas nés avec une souris dans la main, « mais la plupart d’entre eux possèdent un ordinateur familial dont ils maîtrisent relativement bien le maniement », souligne Jean Jeanty, consultant en négociation, management et métiers du téléphone chez Demos. Ce n’est donc pas là que le bât blesse. « Non, ce qui dérange vraiment les vendeurs chevronnés, c’est la crainte d’être surveillés – via des outils de reporting – mais aussi de devoir partager la totalité de leurs contacts, et donc d’avoir à partager, en quelque sorte, leur fonds de commerce », précise le porte-parole de Carthago. Pour espérer convertir les commerciaux seniors à l’informatique, une règle de base : les convaincre que ces outils vont leur permettre de gagner du temps et les aider à développer leur activité au quotidien. « Le collaborateur doit y voir immédiatement son intérêt », poursuit l’expert. Et les arguments ultraconcrets à avancer ne manquent pas : saisie automatique des notes de frais, calcul de la marge et même du commissionnement, organisation des déplacements, possibilité de consulter ses commandes en cours ou encore de détecter une baisse de chiffre d’affaires sur un segment de produits, etc.

Par groupes de travail

Seconde règle d’or : allier la théorie à la pratique. « Il est impératif d’impliquer les commerciaux seniors dans ce projet, et cela très en amont, avant que la solution retenue par l’entreprise ne soit finalisée », souligne Jean Jeanty. L’idée de base ? Identifier, au sein de la population concernée, des porte-parole chargés de faire remonter du terrain les remarques générales, mais aussi de tester le logiciel en question. Nicolas Saint Cast, directeur marketing de Devoteam parle, lui, de leaders d’opinion et de témoins de référence. « Ce sont, en quelque sorte, les personnalités qui comptent dans l’équipe, explique-t-il. Les premiers sont extravertis et ne mâchent pas leurs mots ; les seconds sont plus discrets, mais ce sont vers eux que les commerciaux se tournent pour avoir des conseils. » Ce groupe de travail participe ensuite à un atelier baptisé “Attentes, refus, craintes”, durant lequel sont exposées, sans retenue, toutes les appréhensions mais aussi les perspectives des vendeurs chevronnés. S’ensuit une phase de test très opérationnelle, dont la durée varie en fonction de la complexité de la solution. Éric Répérant, directeur du pôle formation de CAA, penche pour une application “longue durée” de l’outil informatique. « Un trimestre est la durée idéale », indique-t-il. D’un point de vue pratique, le groupe de travail peut, dans ce cas, être composé de collaborateurs issus d’une même équipe ou d’une même zone géographique. La mission de ce minilaboratoire ? S’approprier l’outil et tester, de façon très opérationnelle, toutes les applications du logiciel afin de voir si elles sont en phase avec les pratiques commerciales de l’entreprise et les attentes des vendeurs seniors. Dans le cas contraire, des réajustements peuvent être envisagés.

Formation et suivi sur le terrain

Reste à déployer l’application. Là encore, l’équipe test joue un rôle clé. À elle de porter la bonne parole auprès des équipes terrain lors de séminaires ou de réunions régionales organisés autour de ce thème. Le but ? Désacraliser l’outil informatique et son utilisation. « Ici, ce sont les opérationnels qui parlent aux opérationnels », souligne Éric Répérant (CAA). Informés, les vendeurs chevronnés sont ensuite formés. Les spécialistes conseillent de confier cette mission à des consultants extérieurs ou à des formateurs internes. « L’équipe informatique maison risque, en effet, d’avoir une approche trop technique de l’outil et d’effrayer les commerciaux », observe Jean Jeanty (Demos). Les membres du groupe de travail peuvent soutenir les formateurs en réalisant des démonstrations sous la forme de jeux de rôles ou de simulations, ou en apportant, tout simplement, leur vision pragmatique de l’outil. La durée de la formation dépend, là encore, de la complexité de l’application déployée. « Dans tous les cas, une utilisation immédiate de l’outil sur le terrain doit suivre, soutient le porte-parole de Demos. L’informatique, c’est comme les langues étrangères, il faut la pratiquer pour progresser. » Enfin, pour éviter que les équipes, lâchées en pleine nature, leur ordinateur portable en bandoulière, ne paniquent au moindre problème, un suivi doit être mis en place. Une hotline téléphonique, pilotée par les formateurs, peut, dans un premier temps, régler à distance des problèmes de navigation ou de connexion. Un système de tutorat – les tuteurs étant des référents processus ou encore des commerciaux juniors adeptes du micro – peut ensuite être installé sur une plus longue période. Le manager commercial doit, de son côté, valider très régulièrement les acquis de ses troupes, en suivant de près des indicateurs mis en place par l’équipe informatique. « Il s’agit de vérifier que les commerciaux seniors s’approprient correctement l’outil et qu’ils ne se contentent pas de consulter leur intranet, mais qu’ils y saisissent également des données, conclut Nicolas Saint Cast. C’est, en effet, la condition du succès. »

Témoignage

Antoine Mathieu, directeur commercial de DMS, filiale du groupe Total spécialisée dans le fuel domestique et les lubrifiants « La peur d’être marginalisés » L’informatisation des commerciaux seniors : un sujet qu’Antoine Mathieu connaît bien, pour l’avoir abordé très concrètement, début 2003, au sein d’une autre filiale du groupe Total, dont il chapeautait (jusqu’à cet été) la force de vente de 30 personnes. « Les chefs des ventes, comme les commerciaux, possédaient une voiture, un téléphone, un fichier clients et c’est tout, relate-t-il. Avant de partir en rendez-vous, ils appelaient leur assistante afin de vérifier l’état des commandes ou le niveau moyen de marge généré par tel ou tel compte. » Une méthode “à l’ancienne” qui semblait convenir à tous, et surtout aux seniors, adeptes depuis toujours de la gomme et du crayon. « Quand nous avons parlé informatisation, la principale crainte des commerciaux chevronnés était de ne pas maîtriser ces nouveaux outils et d’être jugés à cause de cela. » Le manager a opté pour une conversion en douceur, préférant, dans un premier temps, les équiper d’une seule messagerie et des logiciels de base (Word, Excel, etc.). « Pour les plus réfractaires, il a fallu revenir sur des basiques comme le maniement du clavier et de la souris avant de les former à l’utilisation d’une messagerie, d’un traitement de texte et d’un tableur. »

À retenir

- Certains commerciaux seniors sont encore réfractaires à l’outil informatique car ils craignent d’être surveillés et refusent de partager leurs contacts clients. - Il faut leur démontrer que l’informatique va les aider dans leur activité au quotidien (calcul des marges, saisie des notes de frais, etc.) - Les commerciaux seniors doivent être impliqués très en amont, grâce à la mise en place de groupes de travail opérationnels. - Les formations seront assurées par des formateurs internes ou externes, et non par l’équipe informatique. - Il est conseillé de mettre en place un suivi, sous la forme d’une hotline ou d’un système de tutorat.

 
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Emmanuelle Sampers

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