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Pour rebondir à 50 ans, passez par la case “missions

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On a beau nous rebattre les oreilles de la reprise économique et de ses vertus, retrouver un emploi à 50 ans demeure un cap difficile. Il y a pourtant des démarches à privilégier pour se tirer de ce mauvais pas, des pièges à éviter, des idées reçues à balayer…

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50 ans, c'est l'âge où surgissent les vieux démons”, raconte Olivier Spire qui a décidé de combattre ces préjugés en créant, il y a trois ans et demi, Hommes et Missions, un cabinet spécialisé dans le recrutement des quinquagénaires. Un positionnement judicieux, puisqu'environ 60 000 de ces “quinquadres”, comme les appelle Olivier Spire, sont à la recherche d'une activité professionnelle dans l'Hexagone. Et malgré la reprise économique, inutile de se laisser bercer par de douces illusions : rechercher un emploi n'est pas une partie de plaisir. Pourtant, les choses bougent. Et l'expérience ainsi que l'autonomie de ces cadres ne laissent pas les entreprises insensibles. Pour preuve, le chiffre d'affaires du cabinet Hommes et Missions est passé de 2 MF lors de sa première année d'activité à 15 prévu pour l'année 2000. Aujourd'hui, le cabinet travaille à un rythme de 250 recrutements par an.

Leurs atouts

Pour expliquer la motivation des quelque 150 ou 200 grandes entreprises qui font appel à Hommes et Missions, Olivier Spire martèle que “les 50 ans disposent de nombreux atouts” : ils font preuve, selon une récente enquête du cabinet, d'une forte volonté de travailler, ils sont géographiquement plus flexibles que leurs cadets, ils s'intègrent “merveilleusement bien”, sont souples par rapport à la rémunération et flexibles quant à la nature du contrat de travail. Les 500 missions de recrutement conduites par le cabinet depuis sa création se sont soldées dans un cas sur deux par la signature d'un CDI. Alors, CDI ou CDD ? “Peu importe, ce qui compte, c'est que le job soit intéressant”, tranche Olivier Spire.

Le deuil du CDI

C'est le premier déclic à avoir : faire le deuil du CDI et envisager l'avenir, non pas en activité durable mais à travers une succession de missions, peut en effet faire gagner beaucoup de temps. Et pourquoi ne pas réaliser plusieurs activités de front ? Gérard Fournier, directeur général de Boyden Interim Executive, une agence d'intérim parisienne spécialisée dans la transition des cadres supérieurs, est formel : “Les cadres seniors sont souvent amenés à conduire plusieurs missions successivement ou de front : du conseil, des cours, des missions en entreprise, etc.” D'abord et avant tout parce que les CDI ne courent pas les rues. Bon nombre d'entreprises qui ont un œil rivé sur la pyramide des âges préfèrent encore à ces cadres seniors des cadres plus jeunes. Ensuite parce que le métier de consultant n'a rien à voir avec celui de manager et que, seul, le réseau amical ne peut alimenter une réelle activité. “Hors de l'entreprise, ils perdent le statut et la reconnaissance qu'ils détenaient, ils redeviennent madame ou monsieur Lambda, constate Gérard Fournier. Il est difficile pour un seul homme de faire de la prospection et de mener des missions.” Pascal de Longeville, du cabinet d'outplacement EOS, est du même avis : “Cela peut être une voie de passage, mais tout le monde n'a pas vocation à faire du conseil. Il faut un fort charisme, une bonne dose d'empathie, avoir acquis une notoriété, etc.” Enfin, créer ou reprendre une affaire est un projet financièrement lourd et il peut arriver qu'un manager de haut vol ait du mal à s'adapter à une structure plus modeste.

Le règne des missions

Alors, quand aucun CDI ne pointe le bout de son nez, quand le métier de conseil ne convient pas et que reprendre une affaire n'est pas envisageable, il faut accepter de passer par des missions. Aborder cette nouvelle tranche de vie sans fausse honte mais aussi avec une certaine dose d'humilité : “Même si elles sont précaires, les missions permettent de remettre le pied à l'étrier”, assure Martine Personnier-Puig (lire ci-dessus), qui est passée par là. “Face aux changements, aux diversifications, aux restructurations, les sociétés ont besoin de managers compétents, expérimentés, pour une durée limitée”, explique Gérard Fournier, qui met en contact des entreprises et des cadres de plus de 50 ans pour des missions de 6 mois au minimum. Là aussi, la croissance du chiffre d'affaires de Boyden Interim Executive confirme qu'il y a bel et bien un marché pour ces cadres. Le cabinet qui a réalisé en 1999 un CA de 6,4 MF table sur 12 à 15 millions cette année.

Compétences actives

Les entreprises qui font appel à l'intérim viennent avec de nouveaux objectifs, des désirs de restructuration auxquels le candidat doit pouvoir immédiatement répondre. Alors, plus encore que pour un CDI, le marché de ces missions courtes s'appuie sur les compétences. Le profil recruté est même en général volontairement surdimensionné par rapport à la mission. Le cabinet sélectionne donc les cadres sur leurs “compétences actives”, celles dont ils peuvent se prévaloir immédiatement. Un ex-directeur commercial qui n'a pas été exposé dans des groupes internationaux, mais qui au contraire a évolué dans des entreprises statiques, qui n'a pas conduit d'actions dynamiques, ni démontré sa rapidité de réflexion et d'action, celui-là, “nous n'avons pas de missions à lui proposer”, tranche Gérard Fournier. Cette prépondérance du parcours passé rappelle aussi qu'il est inutile, ou du moins très difficile, de changer de secteur d'activité. Perçu comme un spécialiste de haute voltige, le cadre de plus de 50 ans est recruté pour certaines de ses compétences et non pas pour l'ensemble de son pedigree. Cet intérêt pour une partie seulement de son parcours n'est pas sans conséquence sur la rémunération. Les cadres doivent souvent faire des concessions, en moyenne entre 5 à 20 % de moins. De toute évidence, il existe bien un terrain, ou plutôt des terrains, sur lesquels les cadres de plus de 50 ans et les entreprises peuvent s'entendre. Le président d'Hommes et Missions qui vient de lancer Senior Industrie, une société de conseil dans le secteur de l'ingénierie faisant appel à des cadres de plus de 50 ans, est un convaincu de la première heure : “La demande des entreprises est forte.” Alors, à quand une Senior dédiée à la fonction commerciale ?

“L'avantage qu'il y a à enchaîner les missions, c'est que l'on peut dire les choses en toute liberté sans penser à sa carrière future. Et puis on touche sans cesse à de nouveaux domaines : c'est un vecteur de progrès et d'enrichissement.” Thierry Hohn, 56 ans, effectue depuis 4 ans des missions ponctuelles en entreprise. Après avoir occupé des fonctions de directeur de région, de gérant de société, de directeur commercial, etc., Thierry Hohn a pris contact avec Boyden Interim Executive. Sa première mission a consisté à remplacer “au pied levé le directeur commercial dans un domaine que je ne connaissais pas du tout“. Actuellement, il est chef de projet dans une holding qui souhaite rapprocher deux de ses entités.

“À 50 ans, on n'attend pas après vous ! Alors il faut être humble et même si une mission courte paraît précaire, il faut y aller, parce que c'est l'occasion de renouer des contacts. Et puis, il faut savoir faire des concessions sur le salaire, le statut, etc.“ Martine Personnier-Puig, 56 ans, est directrice de l'activité de services à la SAF, Soudure Autogène Française. Après 27 ans passés dans une multinationale à diverses fonctions, au service marketing puis à la direction d'une business unit, Martine Personnier-Puig a quitté en 1993 cette entreprise, à la suite d'une restructuration. Elle a alors 49 ans. Une clause de non-concurrence l'oblige à se réorienter. Elle se lance d'abord dans le conseil, “une expérience très intéressante, mais frustrante : je suis une opérationnelle et il me manquait le côté management“. Puis à 52 ans, elle décroche par l'intermédiaire d'Hommes et Missions un CDD d'un an à la SAF pour une mission d'étude et de développement. Au bout de 6 mois, la SAF lui a proposé un CDI.

 
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A-F. R.

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