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Recouvrer ses créances commerciales

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Malgré les nombreuses réformes législatives réduisant les délais de paiement, le recouvrement des créances commerciales reste un épineux problème. Le processus sera d'autant moins long et incertain qu'il reposera sur une base contractuelle clairement définie et que son suivi sera régulier.

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@ PAUL FLEET / FOTOLIA

1. Disposer d'une base contractuelle solide

La créance est la contrepartie d'une prestation ou d'une vente, dont l'efficacité juridique est subordonnée à la clarté de l'accord intervenu et à la formalisation de l'opération contractuelle. Toutefois, il ne suffit malheureusement pas d'exécuter parfaitement ses obligations pour obtenir sans délai la contrepartie financière convenue. Avant toute chose, le créancier doit disposer de conditions générales de vente (CGV) ou de prestation de service exposant clairement les conditions financières de la transaction. A ce titre, outre les dispositions usuellement mentionnées dans les CGV, il est toujours préférable, lorsque le contexte le permet, de prévoir des clauses incitant le client à un prompt règlement. Il peut s'agir des clauses d'escomptes pour paiement anticipé, ou encore d'une clause pénale sanctionnant par un forfait de dommages et intérêts un règlement tardif. Ce forfait s'ajoute alors aux classiques intérêts de retard rendus obligatoires par l'article L. 441-6 du code de commerce. On peut également intégrer une clause imputant au client des frais de dossier liés à la gestion du recouvrement amiable. Une clause de compensation automatique permettra en outre de compenser les créances sur toutes les dettes du débiteur. Enfin, dans les contrats de vente, les conditions générales incluront une clause de réserve de propriété.

Il est toutefois inutile de disposer de conditions générales efficacement rédigées si ces dernières n'ont pas été signées par le client. A défaut de signature, le créancier ne pourra pas s'en prévaloir. De même, les différentes étapes d'exécution de la prestation ou de la vente devront être soigneusement actées dans les documents idoines. La préconstitution des preuves écrites est l'une des conditions sine qua non du recouvrement, tant amiable que judiciaire. A minima, ces documents comprennent le bon de commande régularisé par un client clairement identifié, notamment par son numéro RCS, un bon de livraison, là encore signé par le débiteur et la facture correspondante.

2. Mettre en place une procédure de recouvrement amiable

L'efficacité du recouvrement est également subordonnée à la constance et à la rapidité du processus de relance. Si une première relance orale permet généralement de gérer sans conflit les simples débiteurs retardataires, il est en revanche inutile de les multiplier sans succès. En tout état de cause, le processus doit être adapté à l'importance de la créance, afin que les coûts de recouvrement restent dans des limites acceptables.

Généralement, le créancier adresse à son débiteur une à deux relances écrites, qui peuvent rappeler les sanctions encourues en cas de règlement tardif. Il ne doit pas s'écouler trop de temps entre ces deux relances, car la volonté affichée du créancier d'obtenir le règlement des sommes qui lui sont dues est une donnée psychologique non négligeable. De même, il est inutile de tarder pour adresser aux débiteurs récalcitrants la fameuse mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception. Cette dernière n'est désormais plus nécessaire pour faire courir les intérêts de retard. L'article L. 441-6 dispose en effet que les pénalités de retard sont exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture. Elle conserve toutefois son effet comminatoire.

On peut encore, toujours dans une optique de règlement amiable, demander à son avocat d'adresser au débiteur une mise en demeure plus formelle avant assignation.

3. Engager une procédure judiciaire

La procédure de référé-paiement offre aux créanciers un outil judiciaire efficace pour obtenir le titre exécutoire nécessaire à la mise en oeuvre des procédures d'exécution forcée. Cette procédure permet en effet dans un délai généralement compris entre 15 jours et deux mois, d'obtenir du président du tribunal de commerce compétent une décision judiciaire immédiatement exécutoire, y compris en cas d'appel. Cette procédure n'est toutefois ouverte que si la créance concernée ne fait pas l'objet, quant à son existence ou à son étendue, d'une contestation sérieuse de la part du débiteur.

Il existe également une procédure d'injonction de payer, dont la mise en oeuvre est relativement aisée puisqu'il n'est pas nécessaire de recourir à l'assignation notifiée par un huissier de justice. La demande est en effet formée par simple requête - un formulaire préimprimé est disponible - que l'on dépose ou adresse au greffe du tribunal compétent. Le juge du lieu où demeure le débiteur, qui se prononce sans audience, délivre au créancier une décision qui doit être ensuite signifiée par huissier de justice au débiteur. Cependant, cette procédure présente certains désavantages. Le débiteur a la faculté de faire opposition par lettre recommandée ou déclaration au greffe dans un délai d'un mois suivant la date à laquelle la décision lui a été signifiée. L'opposition du débiteur prive l'ordonnance d'injonction de payer de son efficacité et transforme une démarche jusque-là simplifiée en une procédure ordinaire pouvant s'étaler sur plusieurs mois. Les débiteurs de mauvaise foi peuvent en conséquence aisément retarder le règlement de leurs dettes.

4. Prendre des mesures conservatoires

L'obtention d'une décision judiciaire ne met pas le créancier à l'abri de l'insolvabilité du débiteur. Avant toute action, il est du reste nécessaire de s'assurer que le débiteur ne fait pas l'objet d'une procédure collective - auquel cas il est impératif de procéder à la déclaration de sa créance entre les mains du mandataire désigné. Outre les mécanismes conventionnels couramment pratiqués tels que la clause de réserve de propriété ou la clause de compensation, d'autres, plus lourds, peuvent être envisagés pour les opérations donnant naissance à des créances d'un montant important. Le recours au cautionnement d'un tiers - notamment du dirigeant de l'entreprise débitrice - reste le mécanisme le plus accessible, même s'il suppose la conclusion d'un contrat relativement formaliste.

L'expert Jean-Marie Léger, avocat associé du cabinet Avens.

L'expert Jean-Marie Léger, avocat associé du cabinet Avens.

Par ailleurs, à défaut d'avoir prévu une garantie contractuelle, la loi du 9 juillet 1991 permet aux créanciers, dans certaines hypothèses, de prendre des mesures conservatoires à l'encontre d'un débiteur qui ne s'exécute pas. Ces dispositions sont autorisées par un juge (l'autorisation d'un juge n'est pas nécessaire si la créance résulte du défaut de paiement d'une lettre de change acceptée, d'un billet à ordre, d'un chèque ou d'un loyer impayé d'un bail immobilier) dans le cadre d'une procédure sur requête qui reste ignorée du débiteur le temps nécessaire à la réalisation de la mesure autorisée. Elles peuvent notamment consister en une saisie conservatoire de biens mobiliers, une saisie conservatoire de créance ou des sûretés judiciaires sur des biens immobiliers.

 
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Jean-Marie Maître Léger

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