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Défaillances et retards de paiement minent les résultats. L’offre croissante des prestataires du renseignement commercial vise les crédits managers, ces nouveaux spécialistes de la prévention du risque client, chargés de collaborer avec les forces de vente. Un enjeu majeur.

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Si sa marge est de 10 %, une entreprise devra réaliser 100 000 francs de chiffre d’affaires supplémentaires pour récupérer 10 000 francs d’impayés. Et si elle est de 3 %, le chiffre d’affaires supplémentaire atteindra 300 000 francs ! Pas besoin d’un long discours pour prouver que le bon usage des renseignements commerciaux revêt une dimension capitale. Or, les défaillances d’entreprises restent encore élevées en France : près de 26 000 ont été enregistrées au cours du premier semestre 1999. C’est le chiffre le plus élevé des pays européens et largement. En moins de dix ans, 500 000 sociétés françaises ont ainsi déposé leur bilan. Et si le troisième trimestre 1999 marque un recul des défaillances de 11,9 % par rapport à la même période de 1998 selon l’observatoire Dun & Bradstreet, les sociétés de plus de 50 salariés voient leur nombre de défaillances croître de 24 %. Beaucoup de secteurs affichent une baisse, mais le rythme de celle-ci se ralentit. Hormis ces risques liés aux défaillances de leurs clients, les entreprises doivent aussi faire face à leurs (mauvais) comportements de paiement. Même si, selon Dun & Bradstreet, la France améliore de deux jours ses performances par rapport à 1996, la moyenne des jours de retards de paiement reste en 1998 de 15 jours, contre 11 en Allemagne, mais 17 en Belgique et en Italie. L’utilisation des informations et renseignements commerciaux est donc devenue un enjeu crucial pour aider les entreprises à prendre des décisions éclairées. Beaucoup d’entre elles l’ont compris si l’on s’en réfère à l’étude réalisée par la société Precredit, le magazine Fonction Crédit et l’AFDCC (Association française des crédits managers et conseils). Près de six sociétés interrogées sur dix consultent les bases de données d’informations légales (cf. encadré). Plus de quatre sur dix font appel aux services de sociétés de renseignements commerciaux et d’investigation. Prévention rime avec prospection Ces bases de données sont consultées quotidiennement, voire plusieurs fois par jour dans 26 % des cas. Ces informations sont souvent utilisées pour des opérations de prospection. Ce sont les directions commerciales qui les consultent alors, dans le cadre de la veille concurrentielle et de la qualification de prospects. “Les utilisateurs de notre CD-Rom Market 2, qui permet de faire des comparaisons avec son propre fichier client s’il est renseigné en numéros Siren et Siret, sont des directions commerciales et marketing, confirme Marc Thévenin, chef de produit chez Kompass. Environ 10 % sont des services achats. La plupart des consultations sont réalisées dans un but de prospection.” Les supports se sont diversifiés. Après le Minitel, destiné à des consultations plus ponctuelles, l’arrivée des CD-Roms a généralisé et enrichi cet accès à l’information. Doté d’un module de cartographie développé en partenariat avec ADDE, Market 2 permet par exemple au commercial de choisir les entreprises à prospecter sur le parcours de ses visites. Dans son CD-Rom Vektor, ORT propose 24 critères de sélection (le chiffre d’affaires, le nombre de salariés, le niveau de risque de défaillance, etc.) pour orienter les recherches. Le commercial pourra donc sélectionner uniquement les entreprises présentant un risque de défaillance faible ou moyen. Et demander la mise sous surveillance des entreprises de son choix : il sera alerté par e-mail ou télécopie. La nouvelle version 5.0 du CD-Rom d’analyse financière CD Risk de Dun & Bradstreet (550 000 bilans, mise à jour par internet entre deux millésimes) prend en compte l’euro, intègre des tableaux d’analyse en anglais, permet d’afficher des organigrammes, intègre des annexes immobilisations, provisions, autorise la saisie et l’affichage des commentaires de l’utilisateur, etc. Des services de pointe à la carte Ces grands fournisseurs développent également leurs sites internet avec des accès libres à certaines bases de données (accès à 20 millions d’entreprises sur le site de Dun & Bradstreet, informations sur 1,5 million d’entreprises, informations sectorielles et par fonction, appels d’offres, rapports annuels des entreprises, etc. sur le nouveau web des entreprises de Kompass) et à des services à la carte pour les abonnés (comme l’offre Entreprises dédiée aux professionnels d’ORT qui permet d’apprécier les risques clients ou de consulter des analyses financières). Sur son nouveau site, Coface Scrl regroupe des informations sur plus de 4 millions d’entreprises françaises. Il se structure autour de deux espaces majeurs et de rubriques annexes. L’espace Liberté propose un accès libre et une consultation immédiate à des données comme les rapports économiques et financiers, bilans, scores, décideurs, actionnaires, filiales, articles de presse, événements officiels, études sectorielles et stratégies. L’espace Privilège est un extranet pour les clients abonnés. Au sommaire : un accès aux analyses de solvabilité, un moteur de recherche phonétique sur les entreprises avec des plans d’accès, un mode de communication interactif pour les recouvrements de créances (échange de dossiers, commande de prestations en ligne, etc.). Autres services : les renseignements à la carte et l’enrichissement des bases de données internes. Dun & Bradstreet propose ainsi d’analyser à la demande les fichiers de prospection, de valider les Siren et Siret existants et aide à définir les solutions idéales en fonction des besoins. En prime, la société s’engage sur le résultat final d’identification après une phase test obligatoire. Cette garantie, personnalisée pour chaque fichier transmis, porte sur le nombre d’enregistrements éligibles (exemple : 70 % du nombre d’enregistrements éligibles) ou sur la qualité de chaque enregistrement éligible (exemple : qualification de 90 % du montant total des encours). ORT mobilise en permanence 250 personnes pour répondre aux demandes ponctuelles et particulières de ses clients : vérification des informations détenues, collecte de renseignements complémentaires, etc. Des spécialistes qui se réorganisent Enfin, certains prestataires vont jusqu’à s’allier avec de grands éditeurs informatiques pour développer de nouvelles solutions logicielles d’aide à la décision. Pour prévenir le risque client, Dun & Brastreet vient ainsi de signer des accords de partenariat avec SAP et SAS Institute. SAP, fournisseur de solutions commerciales pour l’entreprise, intègre dorénavant dans son produit SAP R/3 les données de Dun & Bradstreet. “Une entreprise qui est équipée de SAP aura la possibilité d’accéder à l’intégralité de notre base à partir de cet outil, explique Blandine Vignon, directrice de la communication chez Dun & Bradstreet. C’est un développement qui intéresse de nombreux services dans l’entreprise : marketing, commercial, achat.” D & B pour SAP R/3 comprend deux volets : une solution Clients et une solution Fournisseurs. Avec SAS Institute, spécialiste du datawarehouse et de l’aide à la décision, il s’agit de lancer une solution destinée à optimiser la problématique “achats” dans les entreprises. Tous ces acteurs du renseignement tendent ainsi à devenir multiproduits et multiservices. Coface Scrl regroupe depuis le 1er octobre 1999 les activités des sociétés Scrl, Sogead, Piguet, Sprec et Bottin, activités organisées en métiers. Objectif : proposer une gamme de produits et de services encore plus large et innovante pour répondre aux attentes de gestion du cycle de vente (gestion de prospects, prévention du risque client, gestion des créances). La Coface annonce avoir engagé un vaste projet pour se doter d’une plate-forme mondiale de marketing direct, d’information commerciale, de gestion et de recouvrement de créances. Nouvel interlocuteur : le crédit manager Mais ces services plus complets, plus sophistiqués sont davantage destinés aux fonctions du crédit manager, ce chef d’orchestre dans l’entreprise, qui veillera à la bonne circulation de l’information et à établir des contacts réguliers avec les vendeurs, la logistique, le juridique et l’administration des ventes. “Le poste de crédit manager a été créé en 1997 chez Lotto France, explique Dominique Casside, crédit manager chez ce fabricant de chaussures et d’habillement sportifs. L’objectif étant de faire baisser les délais de paiement et les impayés. Je centralise dorénavant les données sur les clients et prospects, et demande les extraits K bis, le numéro de Siren. Les représentants interrogent le client lors de leur rendez-vous. Je réalise des enquêtes commerciales plus poussées quand il s’agit de grosses affaires.” Cette fonction, qui fait le lien entre les services financiers et commerciaux dans l’entreprise, tend à se développer. Depuis quelques années, un nouveau métier de crédit manager indépendant est même en train de naître pour les PME qui n’ont pas les moyens de recruter en interne. Pour agir, ces spécialistes utilisent toutes les techniques mises à leur disposition : assurance-crédit, affacturage, achat de renseignements commerciaux ou informations issues de l’entreprise cliente. En dressant une typologie de la clientèle, ils pourront réorienter l’activité commerciale vers les clients de meilleure qualité. Le vendeur devra, de son côté, intégrer dans sa négociation les délais et les modalités de règlements. Il complétera aussi l’analyse financière du crédit manager grâce aux informations qu’il a recueilli sur le terrain. “Nous sommes les gestionnaires d’informations, indique Guy Maguer, responsable crédit et risque clients chez Capic, fabricant de matériel de cuisson pour les collectivités (cf. témoignage). Nous avons accès aux renseignements de la comptabilité, aux impayés, aux bilans, aux différentes sources de renseignements commerciaux. À nous de distiller ces informations aux vendeurs et de les éduquer pour qu’eux-mêmes nous informent quand ils ont connaissance d’un litige.” Associée à la prévention des risques, sensibilisée aux modalités de paiement, la fonction commerciale peut se concentrer sur le cœur de son métier : la prospection de nouveaux clients déjà qualifiés et la négociation commerciale.

“Auparavant, nous avions souscrit une assurance crédit. Les commerciaux voyaient d’un mauvais œil cet agent extérieur intervenir dans leurs affaires. Aujourd’hui, je gère l’information, je négocie les conditions de règlement.” Guy Maguer, responsable crédit et risque clients de Capic Société de 140 personnes, implantée à Quimper, Capic fabrique du matériel de cuisson pour collectivités et s’adresse principalement à un réseau de revendeurs installateurs. Progressivement, l’entreprise a fait évoluer la fonction de comptabilité classique vers un poste de gestion client en partenariat avec les forces de vente. “Les commerciaux me donnent systématiquement leur liste de prospects. Lorsqu’ils partent en tournée, je leur donne des informations que j’ai récoltées, notamment avec la base d’ORT. Lorsqu’un client demande un tarif, j’interviens pour demander son numéro de Siret. Le but est que les commerciaux et moi-même soyons des partenaires face au risque client.”

“L’utilisation est centralisée au marketing. Quand les commerciaux ont besoin d’identifier un prospect, de connaître son secteur d’activité ou la taille de l’entreprise, ils en font la demande.” Coralie Chêne, chargée d’études marketing de MCI Worldcom Opérateur de télécommunications pour les entreprises, MCI Worldcom offre aux PME, grands comptes et grandes entreprises internationales des services de téléphonie et d’internet. Depuis peu, l’entreprise utilise pour étudier ses marchés et évaluer ses zones de prospection le CD-Rom Market 2 de Kompass. “Ce qui intéresse surtout les commerciaux, c’est d’avoir un contact pertinent dans l’entreprise, puis des indications sur les données financières et les services. L’atout principal du CD-Rom ? Sa facilité d’utilisation. Mais les commerciaux ont également accès à notre BDD marketing qui regroupe sensiblement les mêmes critères et que nous complétons avec d’autres fichiers.”

“Nous avons décidé de mettre en place une véritable politique d’éducation de la force de vente sur la notion d’encours, de commandes non livrées et non facturées, d’échéances en cours d’encaissement, etc.” Luc Molly, directeur financier de Harman PME de 18 salariés, Harman distribue des produits hi-fi dans les GMS et circuits de distribution spécialisés. En 1996, 20 % du CA est lié à des paiements excédant 60 jours ; certains mauvais payeurs continuent à être livrés. L’assurance crédit ne joue plus son rôle, faute de suivi des dossiers en interne. Sensibilisés, les commerciaux reçoivent un pourcentage sur les performances de la balance âgée (classement des créances par âge). “L’assureur crédit a accès aux factures impayées de tous ses clients. Il a autant d’intérêt que nous à être réglé et peut devenir un vrai partenaire. Nous avons externalisé les relances chez un cabinet de recouvrement. Cela nous permet d’avoir des remontées sur les litiges et d’être alertés sur les dérapages.”

Ce qu’il faut retenir -Près de 26 000 défaillances durant le 1er semestre 1999, 500 000 en dix ans. Et une entreprise hexagonale sur quatre paie avec plus de 15 jours de retard. -Le renseignement commercial s’appuie sur la production d’information de l’Insee, du Journal Officiel et de l’Inpi. Les grands fournisseurs de BDD s’y appuient pour construire leurs bases avant de les enrichir d’autres sources et de leurs enquêtes qui donnent lieu à des avis de solvabilité, des rapports, des scores de risques. Les changements de capitaux, les ventes, cessions ou liquidations sont consignés dans les Journaux Officiels : Bulletin des annonces légales obligatoires (Balo) pour les sociétés cotées, le Bodacc. L’Inpi gère le Registre national du commerce et des sociétés (modifications, radiations, comptes et bilans des sociétés françaises). -Le crédit manager et les commerciaux doivent se comporter en partenaires face au risque client : association dans la prévention, sensibilisation des équipes commerciales aux modalités de paiement.

 
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Catherine Petit

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