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Réseaux d’influence. Faire des affaires sans en avoir l’air

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Les clubs et autres cercles réunissent des personnes liées par une passion. Mais ils sont surtout des lieux d’échanges professionnels et de business.

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Lundi matin, 9 heures. En arrivant à la hâte à son bureau, un directeur commercial trouve... vingt-deux messages consciencieusement notés par son assistante : “Merci de rappeler Monsieur A” ; “Madame B a cherché à vous joindre”, etc. La liste est longue, et le temps manque, impossible de rappeler tout le monde. Alors, son regard s’arrête sur l’un des petits mots collés sur l’écran de son PC : “Madame C, de telle association, a cherché à vous joindre.” Le sort en est jeté : Madame C est bel et bien la seule personne à qui notre cadre survolté accordera quelques minutes de son précieux emploi du temps. Pourquoi a-t-elle bénéficié d’une telle faveur ? Tout simplement parce qu’elle avait pris la peine de se faire recommander par une organisation familière de notre manager. Parce qu’elle appartenait au sérail, l’inconnue est, en quelque sorte, sortie de son anonymat. “ Lorsqu’une personne me contacte de la part d’une de mes connaissances, je prends la communication ou je note que je dois la rappeler ”, témoigne Patrick Perrin, directeur général de Bose France. Très attaché à ce qu’il appelle son réseau, ce dernier a cherché à l’enrichir en adhérant, il y a un an, au Wine & Business Club, qui rassemble 1 400 dirigeants amateurs d’œnologie. “ Ce qui m’a séduit ? L’ambiance, conviviale et amicale, et la qualité des contacts, confie-t-il. Une part non négligeable du business s’opère par relations. Or, être membre d’un tel club, c’est avoir la possibilité de rencontrer, dans un contexte valorisant et informel, un plateau particulièrement riche de dirigeants. ” “ La vente est avant tout une affaire de confiance ! ”, s’exclame Eric Ebstein, directeur général de Sfan, un laboratoire vétérinaire, et membre des Dirigeants commerciaux de France (DCF), qui réunissent quelque 2 500 membres aux quatre coins de l’Hexagone. Président des DCF de l’Orne, cet ancien commercial de terrain consacre beaucoup de temps à l’association : “ Dans le contexte d’un club ou d’un réseau, les barrières tombent vite, pour laisser place aux conseils et aux récits d’expériences. Des cartes de visite s’échangent et des contrats se signent. ”

Le mariage du cigare et du business

De fait, comme le souligne Alain Marty, président du Wine & Business Club et auteur d’un ouvrage sur les réseaux d’influence, “ la plupart des clubs sont des lieux d’échanges et de business. Mieux : les clubs dont la vocation n’a pas de lien avec les affaires sont ceux où l’on en fait le plus ! ” Ainsi, de très nombreux clubs liés à un sport, un art de vivre, ou encore à des valeurs éthiques, sont aussi des lieux privilégiés d’échanges entre hommes d’affaires unis par une même passion. Sous le couvert d’un goût commun pour les cigares, le polo ou le tir aux pigeons, on se retrouve pour parler cinq minutes de cigares, de polo ou de tir aux pigeons, et disserter de longues heures sur ses futurs contrats. Ce n’est un secret pour personne, la franc-maçonnerie a beau se définir comme un “ordre initiatique fondé sur la fraternité” et concourant au “perfectionnement moral de l’Humanité”, elle est aussi le théâtre d’innombrables tractations qui, au corps défendant des frères les plus purs, ont parfois versé dans l’affairisme et l’illégalité. Si le cas est bien entendu extrême et isolé, il n’en reste pas moins vrai qu’au sein des clubs, réseaux et autres cercles, loisirs et business font excellent ménage. C’est pourquoi la plupart des organisations cherchent à se donner un visage convivial et décontracté, multipliant petits déjeuners, déjeuners, dîners, visites et déplacements informels. “ Si les moments festifs ne sont pas une fin en soi, reconnaît Daniel Bigeard, président des Dirigeants commerciaux de France (DCF), ils créent du lien, jouent un rôle d’accélérateur de relations professionnelles. ” “ Depuis cet été, nous proposons des sorties culturelles ou ludiques à nos adhérents ”, explique, de son côté, Bénédicte Michon, déléguée générale d’Ethic, mouvement patronal rassemblant des entreprises indépendantes de taille humaine. Bien entendu, la vocation de l’association est, elle, très sérieuse. Par des prises de position régulières dans les médias et un travail d’influence mené auprès des pouvoirs publics, Ethic défend les intérêts des petites et moyennes entreprises, et peut même être amené à plaider la cause de l’une d’entre elles. Cependant, la puissance de l’association tient avant tout au nombre, au prestige et à la solidarité de ses membres. Cette solidarité est nourrie par le ciment du réseau, un ciment humain entretenu par les rendez-vous réguliers de l’organisation.

Dix rendez-vous par an

“ Mais pour bénéficier de l’effet réseau, encore faut-il en être partie prenante ”, note Alain Marty. Par conséquent, il est stérile de se forcer à faire partie d’un club. Rien ne sert d’être membre du Club des croqueurs de chocolat si l’on n’aime pas le chocolat ! Un avis que partage Bettina Soulez, auteur d’un ouvrage intitulé Cultivez votre réseau professionnel *, pour qui “ le bon club est celui où l’on se rend avec plaisir ”. Participer fréquemment aux réunions d’un club, c’est lui apporter sa contribution et se donner les chances de recevoir quelque chose en retour. Fermement attachés à la notion d’interactivité, la plupart des clubs cherchent d’ailleurs à se débarrasser de leurs membres inactifs. “ Lorsque nous remarquons qu’une personne néglige les rendez-vous que nous lui proposons, nous la poussons à démissionner ”, souligne Colette Cornu, trésorière de l’Unilever Club, qui regroupe 220 ex-cadres du groupe. Pour Alain Marty, “ il faut assister à dix rencontres par an pour pouvoir espérer un bénéfice réel d’un réseau ”. À ce prix, le cercle peut alors rendre à ses membres un véritable service. “ Les DCF offrent à leurs adhérents une opportunité pour rencontrer leurs concurrents et, plus encore, pour comprendre la façon dont ces derniers les perçoivent ”, note Daniel Bigeard. De même, un réseau bien fourni permet de se faire connaître : “ La recette est bien connue des professionnels qui n’ont pas le droit de pratiquer de publicité, comme les avocats, les experts comptables, etc. ”, observe Bettina Soulez. Enfin, rien de tel pour trouver un nouvel employeur. “ Lorsque l’un des nôtres recherche un emploi, il a 220 personnes à qui téléphoner avec une chance importante d’être écouté attentivement ”, insiste Colette Cornu, de l’Unilever Club. Enfin, l’effet club fonctionne à plein dans l’enseignement supérieur : d’HEC à Sciences-Po en passant par Dauphine ou l’Ipag, nombre de grandes écoles possèdent des réseaux d’anciens denses et extrêmement performants. Outre l’utilité de l’annuaire, qui peut faire figure de véritable Who’s who ? du business, elles exploitent et entretiennent la fibre affective de leurs anciens étudiants. Quel manager n’a pas, un jour, souri en voyant arriver sur son bureau le CV d’un de ses pairs ? _ Cultivez votre réseau professionnel !, de Bettina Soulez, Éditions d’Organisation, janvier 2000.

Avis d’expert

Alain Marty, président du Wine & Business Club “ Privilégiez les clubs liés à votre profession ” Clubs de diplômés ou de sport, cercles de réflexion... Auteur de l’ouvrage Réseaux d’influence * et président d’un club d’hommes d’affaires amateurs de vin, Alain Marty croit fermement à leur utilité professionnelle, à condition que l’on se donne la peine de donner avant de recevoir. “ Il faut éviter de multiplier les adhésions, argumente-t-il. À trop se disperser, on n’est plus crédible. Et surtout, rien se sert de verser sa cotisation si on ne participe pas activement à la vie du club. Pour tirer des bénéfices d’un réseau, il faut lui consacrer du temps. ” Et donc choisir les bons clubs, en fonction de “ ses goûts, de ce que l’on est et de ce que l’on veut devenir ”. Enfin, “ privilégiez les clubs liés à votre profession, conseille Alain Marty. Vérifiez, grâce à l’annuaire, que vous ressemblez à la plupart des membres, et analysez la personnalité du dirigeant. Le dynamisme d’une organisation tient aussi à celui de son animateur. ” * Réseaux d’influence, d’Alain Marty, Ramsay, dernière édition : mars 2001.

Nec plus ultra

Quelques exemples de clubs • L’Institut de l’entreprise organise colloques et réflexions sur les entreprises et leur environnement. www.idep.asso.fr • L’Association nationale du marketing diffuse les techniques et l’esprit du “marketing à la française”. www.adetem.org • L’Association progrès du management entend améliorer la performance des entreprises en améliorant celle de leurs dirigeants. www.apmnet.net • Le Centre des jeunes dirigeants d’entreprises défend l’engagement individuel au service de l’entreprise. www.cjd.net • Les Dirigeants commerciaux de France œuvre pour valoriser la performance commerciale. www.dcf-fr.com

A retenir

_ Le réseau formel, ou club, permet de rencontrer des personnes unies par une même passion, mais aussi de faire du business ou même de trouver un emploi. _ Pour tirer des bénéfices d’un réseau, il faut lui apporter : il convient donc d’être actif dans les clubs auxquels on adhère. _ Choisissez vos clubs avec pragmatisme et sincérité, en fonction de votre profil et de vos goûts.

 
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Stéfanie Moge-Masson

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