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Stressé ? Vous… Vous avez dit... stressé ?

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Le stress entraîne une diminution de la productivité, une démotivation et, à terme, une augmentation du turn over. Sans aller jusqu’à instaurer la “sieste de la mi-journée”, comment réduire les causes et donc l’impact du stress chez vos collaborateurs ?

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Si l’un de vos collaborateurs est de plus en plus impulsif voire agressif, s’il se plaint d’insomnie, augmente sensiblement sa consommation de cigarettes ou d’autres substances nocives, bégaie, est sujet à des trous de mémoire, commet de plus en plus d’erreurs, est confronté à une difficulté croissante à prendre des décisions et à se concentrer, s’il a tendance à couper la parole à ses interlocuteurs… et qu’au final la qualité de son travail en pâtit, alors il y a des risques pour que ce collaborateur soit, passagèrement ou non, stressé. Le stress étant, selon Dominique Steiler, professeur et responsable de la cellule développement personnel à l’ESC Grenoble, « la réponse, physiologique, comportementale ou mentale d’un individu face à un déséquilibre entre une demande extérieure et sa capacité à y faire face ». Et, chiffres à l’appui, force est de constater que les commerciaux sont loin d’être épargnés par ce phénomène. « Selon une étude très récente menée en France par les services médicaux du travail, les commerciaux seraient particulièrement menacés : 35 % d’entre eux souffrent d’un syndrome anxiodépressif, 8 % sont soumis à un état dépressif souvent sévère et leur santé se dégrade plus rapidement que celle de la population témoin. Portrait-robot du commercial surmené : marié, 40 ans, 49 heures de travail par semaine avec, en moyenne, une nuit et quatre repas hors de chez lui (par semaine), 51 000 kilomètres par an. Mais tous les commerciaux ne sont pas aussi exposés. L’étude révèle que le niveau de stress est moindre chez ceux qui jouissent d’une liberté de décision, bénéficient d’un soutien de leur hiérarchie, estiment avoir un bon contact avec la clientèle et considèrent que leur situation est stable », peut-on lire dans un ouvrage intitulé Le stress, un bien un mal *. Un signal d’alarme à ne pas négliger Le stress, parce qu’il a des conséquences sur la santé des personnes et sur leur performance au travail, ne doit pas être pris à la légère. « Le manager doit le percevoir comme un véritable signal d’alarme indiquant que quelque chose ne va pas. Il doit savoir le déceler chez ses collaborateurs et le voir comme l’occasion d’améliorer un processus de travail, une démarche », insiste Bernard Plateau, consultant en management et ressources humaines, intervenant au Cnof et l’IFG (centres de formation) dans le cadre de stages sur le stress. Premier conseil : tout manager qui se penche sur le stress, ses raisons, ses impacts et qui cherche des solutions, doit le faire avec humilité. « Certaines techniques de management sont “stressogènes”. La hiérarchie doit accepter l’idée qu’elle peut être l’une des causes du stress qu’elle constate auprès des membres de son équipe », explique Gian Laurens, sociopsychologue du cabinet Claudine Heslouin Consultants et animateur de stages au Cnof. Une fois ce vice de réflexion écarté, le manager doit établir un diagnostic « clairvoyant, fonctionnel et respectueux des personnes », poursuit Gian Laurens. À ce stade, l’aide d’une personne de l’extérieur peut se révéler très utile. Il s’agit en fait d’identifier les “stresseurs”, les facteurs qui, au quotidien, génèrent du stress. Et, en la matière, le manager commercial n’a que l’embarras du choix ! Des comportements“stressogènes” En premier, arrivent les problèmes relationnels. Bernard Plateau estime qu’ « environ 70 % des stagiaires qui participent aux modules sur le stress en font état ». Problème relationnel avec la hiérarchie, ou bien, dans le cas du commercial, avec les clients : les entreprises peuvent, dans ce cas, proposer des formations sur l’affirmation de soi, sur la façon de communiquer, d’appréhender son image, de gérer les critiques, d’identifier les situations les plus stressantes. Plusieurs techniques sont en général proposées par les cabinets de formation, telles que la “positivation” (se repasser mentalement des situations stressantes vécues en essayant de se débarrasser de la charge négative qu’elles ont suscitée), l’assertivité (développer l’affirmation de soi), la relaxation, la visualisation (se projeter sur une action future en l’optimisant), etc. « Il est essentiel qu’un commercial sache s’adapter à la personnalité de son client. Si ce dernier fonctionne sur le mode intuitif, il doit être conscient qu’une présentation trop détaillée, trop rigide ne va pas le passionner », illustre Dominique Steiler. Il en va de même dans la relation que le commercial entretient avec son supérieur hiérarchique. Pour parer à cette cause de stress, il est souhaitable que le manager réduise ses comportements “stressogènes”. « Cela s’apprend », insiste Gian Laurens. Autre cause de stress, les horaires décousus et surchargés (49 heures en moyenne par semaine pour le “commercial type” stressé), qui engendrent une dépense d’énergie inutile. Pour corriger ce phénomène, l’entreprise peut, dans un premier temps, proposer une formation sur la gestion du temps. « Cela peut, en définitive, résoudre pas mal de problèmes liés au stress », affirme Bernard Plateau. Il s’agit de donner au collaborateur les moyens d’identifier rapidement les priorités, de gérer les urgences, etc. Mais ne vous faites pas trop d’illusion, cela risque de ne pas tout régler. Il faut, en général, s’attaquer aux causes plus profondes : l’organisation. L’effet Internet et tutti quanti Parmi les stresseurs liés à l’organisation, les surcharges procédurières ou encore les répétitions arrivent en tête. « Je me souviens d’entreprises dans lesquelles, pour perpétuer les traditions, tout le monde passait des heures à remplir des documents dont la plupart n’étaient pas exploités », raconte Gian Laurens. Mais l’organisation touche souvent à la culture même de l’entreprise, ce qui implique que, pour que l’action soit bénéfique, elle doit être initiée par la direction générale ou du moins par la direction commerciale. Plus étonnant, mais également observé par les spécialistes, l’inactivité ou la routine sont à mettre dans la liste des stresseurs. Hormis le cas d’une “mise au placard”, la hiérarchie doit repérer les failles dans la définition du poste ainsi que les leviers de motivation de ce collaborateur afin de les réactiver. La crainte de l’obsolescence est une autre cause du stress, de plus en plus fréquente avec l’accélération de l’introduction des nouvelles technologies. « Acquérir les connaissances essentielles en informatique requiert, par exemple, beaucoup d’énergie. Or, elles sont très vite obsolètes ce qui génère un doute profond. Qui plus est, comme il n’y a généralement pas de réponse satisfaisante aux problèmes de réactualisation des compétences, chaque commercial bricole sa solution plus ou moins bancale avec la crainte d’être démasqué, ce qui engendre une tension psychologique supplémentaire », constate Gian Laurens. L’arrivée d’Internet et de la messagerie électronique a amplifié le phénomène. Comment ne pas être stressé lorsque, chaque matin, plusieurs dizaines de messages vous attendent ? Certaines entreprises ont trouvé la parade en mettant en place des systèmes de filtrage. D’une manière plus générale, face à cet afflux de nouvelles technologies et face aux craintes qu’elles entraînent, une solution s’impose : il faut communiquer et former. Lors de l’informatisation de sa force de vente, le groupe Lafarge a ainsi mis l’accent sur la communication autour du projet, la formation des commerciaux. Et Philippe Gruat, directeur marketing du groupe d’ajouter : « Nous avons reconnu l’existence d’une période de rodage. » Si elle semble nécessaire, cette manière de désamorcer, dès le début, tout risque de tension et de stress est loin d’être appliquée dans toutes les entreprises. Vive le sport ! Autre cause de stress ? Vous ! Et oui, « la promiscuité de quelqu’un de très stressé peut avoir des effets contagieux », explique Bernard Plateau. Alors, avis aux managers : prenez garde de gérer votre stress et ne pas le communiquer. Concrètement ? Prohibez le mot “urgent”, les formules du genre “Je veux ce dossier pour hier”, qui ne font qu’ajouter inutilement à la confusion et constituent un terreau idéal de stress. « Je conseille aux managers de faire preuve de moins de nervosité dans leurs attitudes, d’écouter beaucoup et d’utiliser un outil simple : la reformulation pour s’assurer que le collaborateur est bien sur la même longueur d’onde. Et je suis convaincu des bienfaits de la planification, qui permet d’éviter les hésitations et les faux pas, bien souvent sources de stress », témoigne Gian Laurens. Si après avoir tout essayé, des “poches de stress” vous résistent, pourquoi ne pas soumettre au comité d’entreprise l’idée d’organiser des conférences sur le lien qui existe entre l’alimentation et le stress, ou encore sur les bienfaits du sport ? Les entreprises les plus privilégiées pourront même envisager la salle de sport et de musculation. L’important étant de permettre à ses collaborateurs de se défouler sur un punching-ball, de décharger leurs énergies négatives. « Mais attention, relève Gian Laurens, de ne pas faire comme cette entreprise japonaise qui s’était dotée d’une salle de sport mais n’accordait à ses salariés le droit d’y aller que quelques minutes par jour et d’après un planning strict. Au final, les collaborateurs étaient encore plus stressés. » Pour sa part, il propose une autre solution aux commerciaux : « Profitez des moments que vous passez dans votre voiture, non pas pour vous défouler sur l’accélérateur, mais pour pousser des grands cris : c’est un moyen extrêmement efficace d’évacuer le stress. » Une solution particulièrement bien adaptée à la fonction et peu coûteuse. Maintenant, à vous de trouver les mots justes pour convaincre des bienfaits de cette méthode et, le plus sérieusement du monde, cinquante commerciaux aguerris… *Le stress, un bien et un mal, par Paula Ceccaldi, Agnès Diricq et Clémentine Bagieu, collection Phare aux Éditions Hachette - 125 pages - septembre 2000 - 58 francs (8,84 euros).

« L’objectif du programme de développement personnel “Entreprendre de soi” est d’apprendre aux collaborateurs à mieux se connaître, à anticiper les crises… » Colette Blaize, chargée de l’exécution interne chez Bull Campus « Créé initialement en 1996, par et pour la division recherche et développement de Bull, le programme de formation “Entreprise de soi” a, depuis, été étendu à l’ensemble de l’entreprise », explique Colette Blaize, qui en fut à l’origine. Le module sur la gestion du stress débute par une matinée de travail au cours de laquelle Dominique Steiler, animateur, reçoit individuellement les participants, ce qui lui permet de mesurer le taux de stress de chacun. Durant la deuxième journée, il leur explique ce que sont le stress et les “stresseurs”. Chaque stagiaire identifie les siens puis détermine, avec l’animateur, un plan d’action, pour pouvoir agir sur ces facteurs. « Il est évidemment très difficile de mesurer le retour sur investissement (chaque module coûte 3 000 francs par personne environ), explique Colette Blaize. Ce je peux dire, c’est que les participants sont à la fin du module très satisfaits. » Un point qui sera bientôt approfondi puisque ce programme fait actuellement l’objet d’une thèse de doctorat en sociologie.

Observatoire médical du stress chez Renault Fin 1998, Renault a mis en place un observatoire médical du stress dans le but de « qualifier le niveau de stress de ses salariés, d’en optimiser la détection à travers la médecine du travail, de recueillir des données objectives sur le stress, et de donner aux personnes en difficulté des outils individuels ». Cet observatoire, mis en place avec l’IFAS, Institut français de l’anxiété et du stress, s’est fixé pour objectif de collecter, par le biais d’interviews individuelles, des données concernant environ 20 000 salariés volontaires. Seules les données collectives seront transmises, en priorité, au comité central d’entreprise. Quelques mois après le lancement de cet observatoire, les données partielles (sur 4 000 salariés environ) avaient fait ressortir un taux de personnes “affectées par un état probablement dépressif” de 5,8 % (moyenne nationale comprise entre 9 et 13.5 %), et un taux d’anxiété de 17 %, équivalent à la moyenne nationale. Les résultats sont attendus pour cette année.

 
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Anne-Françoise Rabaud

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