«Je veille à rester au contact de la clientèle sur le terrain !»
Chargé de commercialiser des «mètres carrés» aux 1 400 entreprises présentes sur le marché international de Rungis, Alain Perrier privilégie le contact humain avec ses clients, seul moyen, selon lui, d'assurer un bon suivi des dossiers.
Je m'abonneLUNDI 5 FEVRIER
«Je ne me lasse jamais du ballet qui anime le marché au matin»
C'est un incessant va-et-vient de camions et d'hommes qui, depuis le milieu de la nuit, déchargent des palettes de poissons, viandes, fruits, légumes, fleurs... Rungis, le plus grand marché au monde de produits frais, s'active déjà depuis de longues heures lorsqu'Alain Perrier, directeur commercial de la Semmaris, la société d'exploitation du marché, arrive à son bureau, vers 8h30. Situé au 6e étage d'une large tour, celui-ci surplombe les 232 ha que gère la Semmaris. «Mon regard se porte alors immanquablement sur ce ballet hallucinant de 8 000 semi-remorques qui traversent quotidiennement Rungis», explique-t-il. Face à lui, se dressent les 200 bâtiments qu'il est chargé de louer, soit 800 000 m2 qui lui ont permis de réaliser un GA de 75,8 MEuros en 2005. Aujourd'hui, Alain Perrier doit rencontrer un client qui cherche à s'agrandir. «Ce dernier, un important grossiste, loue déjà 3 000 m2 et souhaite disposer de 1 000 m2 supplémentaires. Dans sa zone, je ne peux lui proposer qu'un lot de 1 700 m2, pas moins. A moi de le convaincre!» Si la majorité de ses clients sont des grossistes et distributeurs en produits frais, l'une de ses missions consiste à étendre sa clientèle à d'autres secteurs. «Notre objectif est de faciliter la vie des personnes qui travaillent sur ce site en leur apportant de nouveaux services. Nous trouverons ainsi un nouveau gisement de croissance», assure le directeur commercial, qui compte aussi des clients dans la restauration, la banque, la location automobile et même au ministère de l'Intérieur qui a un commissariat sur le site!
MARDI 6 FEVRIER
«J'ai mes clients tous les jours sous la main»
«Je ne suis pas un accro des réunions, assure Alain Perrier. Quand un problème se pose, je le règle immédiatement sans attendre une réunion.» Pourtant, chaque mardi midi pendant 15 minutes, il réunit son équipe de quatre commerciaux pour faire le point sur les dossiers aboutis. «C'est une façon de créer une culture du succès qui n'existait pas vraiment lors de mon arrivée il y a huit ans. Les vendeurs en profitent pour parler de leurs dossiers. Mais cette réunion me permet surtout de préparer celle du mercredi avec le comité de direction», précise-t-il. Une fois terminée, il prolonge son rendez-vous avec ses commerciaux dans l'un des restaurants dont la Semmaris est propriétaire. A peine les plats commandés, Alain Perrier se fait accoster. Le restaurateur envisage de créer un espace plus convivial. Là, sur les couverts et les assiettes, le plan du nouveau restaurant qu'un architecte a dessiné est étalé. Pas de répit pour le directeur commercial qui finira par donner un rendez vous plus conventionnel au restaurateur pressé... Après ce déjeuner agité, Alain Perrier remonte dans son Scénic pour retourner à son bureau. A cette heure, Rungis est désert. C'est donc un moment privilégié pour rencontrer quelques clients. «Il faut aller à leur rencontre pour assurer ce que l'on pourrait appeler le SAV.» Pas besoin de réunions formelles, la prise de contact est immédiate, comme aujourd'hui avec ce gestionnaire d'une plate forme. Ce dernier lui expose des problèmes liés à des infiltrations d'eau... «C'est un point tout bête qui pourrait très bien ne pas être de mon ressort. Pourtant, si ce détail n'est pas réglé, ou si l'information ne m'est pas remontée, il se peut que ce ne soit pas convenablement traité et mécontente le client qui pourrait signer son prochain bail ailleurs.»
MERCREDI 7 FEVRIER
«Je passe la journée en réunion»
La journée débute par le Comité des affectations, à 8 h 30. C'est le grand rendez-vous hebdomadaire du directeur commercial. S'y trouvent le président de la Semmaris, le directeur financier et son adjoint, le directeur des investissements, le directeur du service maintenance, le secrétaire général, les services carte d'accès, le directeur marketing, ainsi que des responsables de secteurs chargés de maintenir une présence de la Semmaris dans tous les points de Rungis: soit, 15 personnes. C'est lors de cette rencontre qu'est décidé quelle surface sera attribuée à quelle société. «Nous faisons le point sur les prix, la disponibilité des surfaces, la nature des contrats...» explique le directeur commercial.
A 11 heures, s'enchaîne une autre réunion: le comité de direction, qui regroupe le président de la société, le dg, le secrétaire général, les responsables financiers, des investissements, de la maintenance, du marketing et du commercial. La réunion a cette fois pour but de parler de stratégie de la Semmaris et des dossiers à fort enjeu. Celle-ci se termine la plupart du temps dans la salle à manger de la direction pour un déjeuner commun. Au 11e étage, elle bénéficie d'une immense verrière et surplombe magnifiquement le site.
JEUDI 8 FEVRIER
«Je veux garder un contact direct avec les prospects»
Bien que le taux d'occupation des entrepôts soit très bon (95%), Alain Perrier reste très réactif et cherche constamment de nouveaux locataires. Ces derniers représentent 10% à 15% des sociétés présentes sur Rungis (1 400 au total). Ce matin, il va «vendre» le marché auprès de l'agence de développement économique du Valde-Marne. Cinquante chefs d'entreprises sont présents pour écouter le directeur commercial. «Je vante les vertus d'être présent sur une zone industrielle aux portes de Paris, desservie par un axe routier intense. Et j'insiste sur le fait que Rungis leur permettra de développer leurs ventes, car l'ensemble des acteurs de leur métier est présent sur place», argumente-t-il. En 2005, en effet, le volume d'affaires réalisé sur Rungis a représenté 7,1 milliards d'euros.
De retour à son bureau, Alain Perrier traite le courrier et les demandes d'informations par mail. «J'essaie d'être réactif. Si bien qu'une demande d'information via notre site Internet trouve obligatoirement une réponse dans la journée, si ce n'est dans l'heure!» Alain Perrier aime avoir un contact direct avec ses clients. Il n'a donc pas hésité à mettre son numéro de ligne directe sur les panneaux publicitaires des axes routiers en bordure de Paris. «Les clients sont agréablement surpris de m'avoir rapidement au téléphone. Avec eux, je tente de qualifier au maximum leurs besoins avant de repasser l'affaire à mes commerciaux», précise-t-il. Afin de coller aux besoins, chaque vendeur est spécialisé dans un secteur. «Les desiderata de surface et d'aménagement d'un entrepôt frigorifique ne sont pas les mêmes s'il s'agit d'un grossiste en poisson ou en fleur!»
Parcours
Après des études à l'Institut commercial de Nancy option marketing, Alain Perrier rejoint la direction immobilière des AGF où il s'occupe de la location de bureaux. Deux ans plus tard, il intègre le groupe Unibail. Il est chargé de la commercialisation des boutiques dans les centres commerciaux, puis s'occupe d'un département étude marketing, avant de prendre la direction d'un centre commercial dans le département de l'Ain. C'est en 1998 qu'il rejoint la Semmaris, au poste de directeur adjoint du service commercial, avant d'être nommé directeur commercial, deux ans plus tard. Cette année, il prépare un master en management immobilier à l'Essec.
Le carnet d'Alain Perrier
Une bonne table
La victoire suprême du coeur 41, rue des Bourdonnais Paris ler, 01 40 41 93 95 «Un restaurant végétarien, dont le propriétaire vient choisir ses produits à Rungis!»
Un disque
La sonate au clair de lune de Beethoven «Depuis 40 ans, j'essaie d'apprendre ce morceau, alors que je n'ai jamais pris de cours de piano!»
Un livre
L'absurde et la grâce de Jean-Yves Leloup aux Editions Albin Michel. «Ce livre dégage une vision très optimiste des choses qui me sert dans aussi bien dans me vie professionnelle que privée».
Un film
Dounia, «le dernier film de la réalisatrice libanaise Jocelyne Saab, une histoire d'amour avec en filigrane le problème de l'excision en Egypte».
VENDREDI 9 FEVRIER
«Je fais visiter Rungis!»
Le geste est précis, direct, sans hésitation et suffisamment fort pour parvenir à casser en deux le crâne du veau. L'homme, presque machinalement, en retire la cervelle avec soin. Alain Perrier est content de l'effet produit sur le groupe de clients et prospects qu'il a convié ce matin dès 6 heures pour une visite de 2h30. Avec les espadons, les thons énormes suspendus par la queue, les carcasses de viandes empalés sur des crochets acérés, les gibiers de toutes sortes, les montagnes de fleurs... Rungis à lui tout seul est un argument commercial! Si la visite n'est pas systématique à chaque contrat, elle permet de faire découvrir la vie de cet espace professionnel, «Je ne loue pas que des mètres carrés. Si j'abordais les dossiers de cette façon-là, je ne pourrais pas justifier le coût du loyer! Ce dernier est toujours perçu comme une dépense. Mon but est de leur faire comprendre qu'à Rungis ils auront accès à quelque chose qui n'existe nulle part ailleurs!» C'est l'esprit de ce marché qu'Alain Perrier vend tous les jours.