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Apprenez le lobbying à vos commerciaux

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Bien loin des stéréotypes qui l'assimilent à de la corruption, le lobbying commercial vise essentiellement à influencer et à créer de la proximité avec vos interlocuteurs. Enseigner cette technique à vos commerciaux leur permettra d'adopter un nouveau style de vente.

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@ FOTOLIA - LAURENT HAMELS

Le6 juillet 2005 marque une nouvelle défaite de la France face à sa rivale de toujours, l'Angleterre. Il ne s'agit pas d'un affrontement militaire, mais sportif et commercial. Alors que toute la France était mobilisée pour accueillir les Jeux olympiques en 201 2, on apprend, ce 6 juillet, que c'est finalement Londres qui est choisie. A l'époque, toute la France s'émeut de cette décision. Pourtant les AngloSaxons n'ont fait que mettre en pratique ce qu'ils maîtrisent parfaitement : le lobbying ! L'analyse de cet échec des Français peut tout à fait servir d'exemple à un commercial, puisque le Comité olympique français s'est tout simplement trompé de cible. Au lieu de convaincre et de séduire les 100 décideurs du Comité international olympique, les responsables français ont cherché à recueillir l'adhésion de tous les Français. Or, ils n'étaient pas décisionnaires. Au final, les Anglais, avec un taux d'adhésion de la population moindre que celui des Français, ont remporté l'organisation des JO. Ils ont, en effet, su utiliser les bons leviers de lobbying sur une population très ciblée.

Mal perçu en France, le lobbying est pourtant un outil que tout vendeur devrait maîtriser. Attention, lorsque l'on parle de lobbying commercial, personne ne parle de dessous de table, de pots de-vin ou de corruption. Le lobbying, dans sa conception anglo-saxonne, se matérialise par une communication d'influence au travers d'un énorme travail relationnel et d'une connaissance parfaite des personnes à cibler.

La première chose à faire est donc de bien identifier la cible de votre action de lobbying. Il ne s'agit pas forcément de miser sur votre contact habituel chez votre client. Ce dernier n'est peut-être pas le mieux placé pour faire avancer votre dossier. En revanche, il peut vous permettre de bien comprendre l'organisation de votre futur client. Vous devez en effet savoir qui décide, qui est influent, qui est ami avec qui, etc. Une fois en possession de ces éléments, vous devez connaître le maximum de choses sur cette personne : ses hobbies, le sport qu'elle pratique, ses études, ses réseaux professionnels... Autant d'éléments qui faciliteront la création de liens avec elle et aussi peut-être la mise en relation grâce à une personne de votre entourage.

Entretenir son réseau

Car, incontestablement, le lobbyiste est un homme de réseau. Ce qui veut dire qu'il dispose d'un important carnet d'adresses. Mais celles-ci doivent pouvoir être un jour «activées» afin de se rapprocher d'une tierce personne. Ainsi, il est important de consacrer du temps à faire vivre votre réseau relationnel. Par exemple, demandez à vos vendeurs d'appeler régulièrement leurs contacts pour prendre de leurs nouvelles, sans chercher à leur vendre quoi que ce soit. Les cercles d'affaires et les clubs professionnels constituent une bonne solution pour faire des rencontres. La cotisation (entre 500 et 1 000 euros en moyenne par an) doit être payée par la direction commerciale afin de permettre à certains de vos commerciaux d'y rencontrer du monde. Les réseaux sociaux en ligne (Viadeo, LinkedIn...) étoffent également son réseau. A condition de rencontrer physiquement et régulièrement ceux qui vont se révéler intéressants pour vos affaires.

Enfin, un bon lobbyiste doit surveiller les entreprises ou les organismes publics qu'il souhaite démarcher. Un travail de veille qui passe par la presse et Internet. Il se tient au courant des informations officielles, mais surtout des rumeurs afin de montrer à son interlocuteur qu'il suit le dossier. En effet, on ne peut pas faire croire à un prospect que l'on est proche de ses préoccupations si l'on ignore ce qu'il vit (réorganisation interne, évolution des technologies sur son marché, etc.).

Convaincre grâce au «Position Paper»

Face à sa cible, le commercial lobbyiste doit ensuite s'adapter à son interlocuteur et utiliser un langage approprié. Vous apprenez que votre interlocuteur est issu d'une école d'ingénieur ? Un discours technique est donc possible. En revanche, s'il a suivi une formation plus littéraire, vous risquez de le perdre avec des informations ultra-techniques. trop souvent, les commerciaux se cachent derrière des arguments techniques ou un discours stéréotypé qu'ils rabâchent. Or, le parcours de votre interlocuteur vous permet de trouver les bons arguments pour l'influencer et le convaincre.

Dans cette communication d'influence, il est un document essentiel pour le commercial et que les AngloSaxons désignent sous le

terme de «Position Paper». Il synthétise l'essentiel de votre argumentation. Un des points importants de ce document, qui sera laissé au client au terme du rendez-vous, est qu'il réfute les arguments de la partie adverse. nombre d'entreprises ont peur de mettre les pieds dans le plat en évoquant l'argumentation de leurs concurrents. Il est pourtant essentiel de la connaître et de l'aborder si l'on veut la contrer. Il n'est pas rare que, grâce à un bon «Position Paper», le prospect n'aille même pas se renseigner auprès de vos concurrents. tout est devant ses yeux. non seulement cela lui facilite le travail, mais en plus cela lui fournit des éléments indispensables pour convaincre sa hiérarchie que votre proposition est la meilleure. Le document doit mettre en évidence l'impact de votre solution sur sa société (gain ou perte d'emplois, gains fiscaux, incidence sur les fournisseurs, etc.) ou sur ses clients. Il doit, au final, influencer la prise de décision de ce prospect.

Enfin, en privilégiant la relation humaine pour vendre, cela signifie très clairement qu'un bon lobbyiste ne peut pas et surtout ne doit pas vendre à chaque visite. Conséquence immédiate : il n'est pas possible d'exiger de lui les mêmes résultats à court terme que de n'importe quel commercial. Son action n'est efficace que sur le long terme. Sa rémunération doit donc prendre en compte ses actions et pas uniquement ses ventes. Dans le cas contraire, il n'aura pas envie de se déplacer le soir et parfois le week-end dans des cercles de rencontre et dans des manifestations professionnelles. Souvent, on confie ce travail de proximité avec les clients ou les prospects aux commerciaux seniors. Malheureusement, ils n'ont pas toujours le temps, ni l'énergie d'accomplir ces missions... De même, les cercles professionnels sont souvent réservés aux managers, mais ont-ils réellement le temps de traiter les contacts qu'ils nouent dans ces clubs ? Alors pourquoi ne pas mettre vos commerciaux juniors sur le coup ? Un travail de lobbying n'est pas réservé uniquement aux commerciaux chevronnés. Pensez-y, si vous souhaitez inculquer cette culture de lobbying au sein de votre force de vente.

L'expert

Bruno Gosselin, directeur de l'Institut européen du lobbying, également professeur à l'Essec, à HEC et à l'ENA.

 
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Laurent Bailliard

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