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Dossier 2 : L’enquête, le principal outil pour mesurer la satisfaction

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Avant de se lancer dans la rédaction d’un questionnaire, il faut bien réfléchir à ses enjeux internes et externes.

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Christian Barbaray a créé il y a dix ans Init Satisfaction, un cabinet spécialisé dans la mesure de la satisfaction client. Sa première recommandation à ses clients, quelle que soit leur activité, est de considérer avec attention comment une enquête auprès de leurs acheteurs est perçue par leurs équipes. « Une telle action touche l’ensemble des services de l’entreprise, du commercial à la direction générale, car ses résultats impactent directement le management », assure-t-il. Management, le mot est lâché. L’enquête de satisfaction client est donc anxiogène pour les collaborateurs. Il faut alors communiquer sur le thème de l’amélioration de la performance collective et faire comprendre aux commerciaux qu’il existe pour eux une opportunité d’obtenir les moyens d’aller dans le sens de ce que veulent leurs clients… « C’est pourquoi la conception de cette enquête, outre un éventuel consultant spécialiste de la relation client, doit être menée par un groupe de travail composé des collaborateurs des services commerciaux, marketing produit, client, et logistique », précise Éric Foucher, p-dg du groupe de marketing services Safig. Son but est de répondre aux interrogations suivantes : Quelles questions sont pertinentes ? Quand et par quels moyens puis-je prendre contact avec mon client ? En B to C, la cible d’une enquête de satisfaction est le client final. Ou plutôt un échantillon représentatif de la clientèle. « Pour une enquête nationale, une centaine d’interviews suffisent. Mais dès qu’il s’agit de juger la performance d’agences locales ou d’un réseau, la taille de l’échantillon explose. Il faut alors compter sur au moins 400 à 500 réponses pour une bonne représentativité », prévient Christian Barbaray. En B to B, en revanche, il existe rarement de décideur unique chez le client. Le processus d’achat est souvent plus complexe, donc l’étude aussi. Il faut interroger plusieurs personnes dans la même entreprise, celles dont l’opinion peut influencer vos ventes : achats ou finances, direction générale, techniciens et utilisateurs…

Détecter les attentes des acheteurs

Pour connaître ces prescripteurs, le processus de vente de vos produits doit être retracé. Une étape obligatoire en B to C. Il faut examiner le parcours de votre client, du premier contact avec le produit jusqu’au service après-vente. L’idée ? Connaître les attentes des acheteurs en termes de satisfaction. « Il ne s’agit pas de déterminer les critères qui intéressent l’entreprise, mais bel et bien ceux qui vont influer sur leurs sentiments à votre égard », souligne Christian Barbaray. Une fois la liste établie, sa pertinence peut être testée auprès d’un échantillon restreint de consommateurs. Un tri est alors nécessaire, car interroger sur plus d’une trentaine de critères est inutile. Mieux vaut se concentrer sur quelques éléments vraiment déterminants. Pour détecter la satisfaction, deux méthodes existent. La première est le calcul de l’importance “déclarée” des critères de satisfaction. L’acheteur a-t-il peu ou beaucoup d’égards par rapport à l’accueil dans votre centre de contacts, à la façon dont votre SAV prend ses rendez-vous, etc. ? Chaque point de l’enquête est alors divisé en deux questions : une sur la satisfaction proprement dite, l’autre sur l’importance accordée à ce point précis. « Cette approche fonctionne très bien en B to B. Les clients sont en effet capables de rationaliser la façon dont ils achètent, note Christian Barbaray. En B to C, c’est moins vrai. » Car ils surestiment souvent l’importance dans leur choix des critères objectifs (prix, temps, etc.), alors qu’ils sous-estiment l’aspect immatériel de la prestation (service, design, image, etc.). D’où l’utilité d’une seconde méthode, celle de l’importance “calculée”, plus complexe à mettre en œuvre. Pour y parvenir, on décompose la façon dont s’établit la satisfaction client après enquête. Cela suppose un travail d’analyse statistique pour déterminer les éléments qui pèsent le plus lourd dans le sentiment général du consommateur . Reste à régler les aspects pratiques de votre enquête. Le moment le plus approprié se situe peu de temps après l’achat. « Pour les entreprises dépendant d’un réseau de distribution indirect, il existe rarement de fichier client, remarque Christian Barbaray. Par conséquent, l’unique solution est de mener des entretiens en face-à-face en sortie de caisse. » Elle présente l’avantage d’obtenir des réactions “fraîches”, donc précises. Mais cela coûte cher, plus que par téléphone. « Le câblo-opérateur UPC, par exemple, contacte via son centre d’appels tous les nouveaux clients dans les jours qui suivent l’installation du décodeur pour connaître la façon dont s’est déroulée l’intervention du technicien », note Éric Foucher. Une autre manière de mener cette enquête est d’envoyer un questionnaire. Les moyens sont nombreux : courrier classique, e-mail ou page Internet dédiée. « Via Internet, elle a longtemps souffert du manque de représentativité de la population des internautes. Aujourd’hui, cela devient un canal intéressant », souligne Marc Dumayet, directeur du département Statilogie chez Soft Computing. L’e-mail concilie souplesse et réactivité. « À nos clients VADistes, nous proposons d’envoyer un courrier électronique automatique à leurs clients deux jours après leur première commande », explique Éric Foucher.

Optimiser le taux de retour

Peu importe le média utilisé tant que les informations sont récupérées. Le nerf de la guerre en matière de questionnaire “auto-administré” – le client le remplit lui-même au lieu de répondre à un interviewer –, c’est le taux de retour. En soignant la mise en page, il peut déjà être multiplié. Ainsi, avec des cases préimprimées à cocher, on obtient de meilleures remontées qu’en demandant aux acheteurs d’écrire les réponses… Par cette pratique, on peut traiter les questionnaires par lecture optique et donc gagner du temps. « Inclure une lettre signée du p-dg, par exemple, valorise le client et l’encourage à répondre », ajoute Christian Barbaray. De même s’il existe une possibilité de recevoir un cadeau. En B to B, les taux de retour naviguent entre 10 % et 20 %, alors qu’en B to C, en fonction de l’importance de votre produit, ils se situent en moyenne entre 30 % et 50 %. Une fois reçus et analysés, les résultats d’une enquête ne sont pas destinés à dormir dans un tiroir. Car le plus important, c’est de suivre l’évolution de la satisfaction client dans le temps. « Les enquêtes n’ont d’intérêt que si elles entraînent une amélioration, confirme Marc Dumayet. Ou si elles sont utilisées comme un point de comparaison avec la concurrence. Chaque enseigne est en effet plus ou moins performante sur un, deux ou trois critères. » Il ne reste donc plus qu’à trouver le rythme auquel vous allez renouveler votre enquête devenue baromètre de satisfaction. Une enquête annuelle est recommandée par l’ensemble des experts interrogés. Avec éventuellement des mini-enquêtes tous les trimestres pour tester quelques points bien précis.

Ce qu’il faut savoir pour effectuer au mieux une enquête de satisfaction

Combien de temps prévoir ? La préparation du questionnaire prend quelques semaines. Inutile de chercher à gagner du temps sur ce point, mieux vaut être certain de la pertinence des questions. L’administration de l’enquête proprement dite va durer ensuite entre deux semaines – pour les interviews téléphoniques ou en face-à-face et les questionnaires envoyés par e-mail – et un mois, si vous choisissez la voie postale. Enfin, le traitement des résultats et leur analyse s’effectuent pendant environ deux semaines. Quelle taille ? De 4 à 6 pages pour un questionnaire auto-administré, environ un quart d’heure pour une interview téléphonique ou en face-à-face. Soit l’équivalent d’une trentaine de questions. Au-delà, vous prenez le risque d’avoir un taux de retour exécrable, ou d’obtenir des réponses évasives. Combien ça coûte ? De 15 000 à 30 000 euros pour une enquête nationale. Mais dès qu’il s’agit de faire suffisamment de mesures pour avoir des résultats exploitables point de vente par point de vente, les tarifs s’envolent.

La CFAO interroge ses clients dans vingt pays

Pour son activité de distribution automobile, la CFAO a mis en place pour la première fois une gigantesque étude de satisfaction client. Les concessions automobiles de la CFAO, filiale du groupe Pinault-Printemps-Redoute, distribuent sur le continent africain et dans six DOM-TOM les modèles de Renault, PSA, Toyota, Chevrolet, Honda, Ford et Huyndai. « Ces constructeurs sont très demandeurs d’informations qualitatives et quantitatives en provenance du terrain », souligne Éric Pichon, directeur qualité du réseau automobile de la CFAO. Le réseau était déjà engagé dans un processus de mesure interne de la qualité, par le biais d’enquêtes d’auto-évaluation de chaque filiale recoupées par des évaluations menées par le siège. Mais, il y a deux ans, la CFAO s’est lancée dans la réalisation de sa première enquête de satisfaction client. « Après une première réflexion, à la fin 2003, nous avons fait un appel d’offres auprès d’une dizaine de sociétés d’études en satisfaction client, relate Éric Pichon. Avec une contrainte de taille : l’enquête devait être effectuée par téléphone, la distribution du courrier n’étant pas des plus fiables en Afrique. » Le prestataire retenu, Init Satisfaction, a commencé à travailler sur le questionnaire début 2004 avec Éric Pichon et une dizaine de responsables issus de tous les services de l’entreprise. Après avoir récupéré les fichiers clients de toutes les filiales, les entretiens téléphoniques ont eu lieu en deux temps, avant et après les vacances d’été 2004. Ils étaient menés depuis la France. Comme pour toute entreprise ayant un réseau de distribution, il a fallu constituer un échantillon de taille : « Nous avons appelé 5 000 personnes pour arriver à 2 139 questionnaires complets. L’objectif était d’avoir une cinquantaine de réponses de clients par petite concession et une centaine pour les plus importantes », détaille Éric Pichon.

Des résultats surprenants

À l’issue de l’enquête, limitée à 21 questions, le constat était simple : les interviews étaient trop longues. « Elles duraient souvent plus d’un quart d’heure, déplore le directeur qualité. Avec le recul, dix minutes semble être l’idéal. » L’étude s’est concentrée sur 20 pays au lieu de 29, pour des raisons pratiques. La masse des données à traiter et la difficulté à coordonner une enquête sur un terrain aussi vaste empêchent pour le moment la CFAO d’instituer un baromètre régulier. A priori, le prochain questionnaire n’aura pas lieu avant 2006. D’ici là, les conclusions de la première vague d’enquête apportent déjà leur lot de surprises. « Par rapport à la façon dont s’établit la satisfaction globale de nos clients, certains critères se sont révélés beaucoup plus importants que prévu », explique Éric Pichon. Toutes les concessions ne rappellent pas forcément un client une fois l’achat effectué, par exemple. Et celles qui le font ne laissent pas forcément passer le même temps entre la livraison du véhicule et la reprise de contact. « Or ce critère a visiblement un impact très fort sur la satisfaction des clients. Ceux qui ont été recontactés moins d’un mois après l’achat présentent un indice moyen de satisfaction de 9 900, contre 7 200 pour ceux appelés plus d’un mois après, et 4 600 pour ceux qui ne l’ont jamais été », expose Éric Pichon. Le suivi des ventes a donc été formalisé quinze jours après la livraison d’un véhicule. Mais, au-delà des conclusions globales, c’est au cas par cas que le bilan est le plus intéressant. « D’une filiale à l’autre, les résultats varient énormément », remarque Éric Pichon. L’indice de satisfaction par concession va de 2 600 pour les moins performantes à 7 800 pour les meilleures ! « Init Satisfaction nous a livré pour chaque point de vente une liste de cinq critères d’insatisfaction à améliorer, sur lesquels nous allons nous concentrer. » Objectif : s’inspirer de ce qui fonctionne bien dans les meilleures concessions pour l’appliquer aux filiales les moins bien notées. Une sorte de benchmarking interne.

Repères

Présente en Afrique depuis la fin du XIXe siècle, la CFAO partage aujourd’hui son activité entre la distribution pharmaceutique et automobile en Afrique et dans les DOM-TOM. La branche automobile pèse 50 % de son chiffre d’affaires, qui s’est élevéà 1,8 milliard d’euros en 2004. L’entreprise emploie plus de 10 000 collaborateurs, en majorité en Afrique du Nord et en Afrique subsaharienne anglophone.

 
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Adrien Guilleminot

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