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Faut-il céder à la mode des enchères inversées ?

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Les enchères inversées via Internet tirent les prix vers le bas et réduisent les liens entre acheteurs et vendeurs. Faut-il faire le jeu de ce nouveau canal pour gagner de gros marchés ?

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Gérard Bouhanna, directeur commercial d'Oki Printing Solutions. Non car l'enchère inversée entache la relation commerciale

« Ce qui me gêne le plus dans le principe des enchères inversées est que toute l'importance donnée à la négociation disparaît au profit d'un mode de vente qui ne prône qu'une négociation tarifaire. » Pour Gérard Bouhanna, directeur commercial du fabricant d'imprimantes Oki Printing Solutions, la satisfaction que peut avoir un commercial à argumenter pour défendre son offre n'existe plus dans ce cadre. Il n'y a plus qu'un écran d'ordinateur devant lequel on enchérit. « Pourtant, chaque produit a une valeur en dessous de laquelle il n'est pas intéressant de travailler. Les enchères inversées sont difficilement compatibles avec le travail d'une force de vente terrain, dont le moral peut être atteint si elle constate que l'on “brade” des produits alors qu'on lui demande, dans le même temps, de défendre les marges en négociant ses contrats. Une vraie bonne négociation, même si elle est houleuse, est plus bénéfique dans la durée. » L'enchère inversée entacherait-elle donc la relation client ? Pour le directeur commercial d'Oki Printing Solutions, la réponse est évidente. « Ne pas se défendre devant le client pour décrocher une affaire implique qu'on ne se battra pas non plus pour le garder. Un face-à-face permet d'argumenter à chaud, en rebondissant sur les objections des interlocuteurs », indique Gérard Bouhanna, qui précise tout de même que la question se pose assez peu chez Oki. « Nous ciblons surtout les PME de 1 à 250 salariés. Il nous est donc possible de faire l'impasse sur les enchères inversées, surtout pratiquées par de très grands comptes internationaux. » Il y a trois ans, Oki avait tenté de répondre à une enchère inversée pour un grand compte de la distribution. Le fabricant l'a remporté car le gagnant initial s'est désisté au dernier moment. Oki a fourni ce client sans, malheureusement, parvenir à le fidéliser. Ainsi, même si aujourd'hui un prospect à fort potentiel, comme la SNCF par exemple, fonctionne par enchères inversées, l'industriel refuse d'y participer. « Cela ne sert à rien de dépenser notre énergie à faire valoir nos produits alors que le client nous remettra de toute façon en concurrence à la prochaine occasion, comme le fait tous les deux ans la SNCF. »

Arnaud Dubar, directeur général de Kyocera Mita. Oui si le coût total est pris en compte

D'abord sceptique, Arnaud Dubar est désormais plus enclin à jouer le jeu des enchères inversées. Il faut dire que le système initial ne prenait en compte que le coût des machines. « Or, le prix n'est pas la seule variable à considérer dans le cadre d'un achat d'imprimantes, observe le directeur commercial de Kyocera Mita. La maintenance, les consommables, etc. sont des facteurs qui surenchérissent le coût global de l'offre. » Les enchères étaient jusqu'alors quelque peu faussées par la seule mise en avant du prix. Le fabricant d'imprimantes a donc joué les précurseurs en suggérant la prise en compte du coût total d'impression. Et les enchères inversées auxquelles il répond assurent, depuis trois à quatre ans, une transparence complète. Le cahier des charges utilisé par Kyocera Mita offre, en outre, un système de pondération par critères. Le prix du matériel ne représente, par exemple, pas plus de 30 % du total. « Cela permet de faire barrage à certains constructeurs prêts à remporter des enchères à n'importe quel prix. Par ailleurs, dans notre secteur, les produits sont banalisés. Les niveaux de services sont donc mis dans la balance. Dans ce contexte, les enchères inversées trouvent toute leur justification », souligne Arnaud Dubar, qui ne manque pas de préciser qu'une affaire sur deux conclue par ses équipes l'est sous cette forme. Pour le directeur général, ce canal de vente n'enlève rien à la négociation commerciale. « De toute façon, nous travaillons en amont avec les clients. Nous avons alors tout loisir de les informer de nos offres. L'enchère inversée n'est pas le seul facteur de décision. » Si le commercial a bien effectué son travail, le cahier des charges doit être en lien avec ce que Kyocera Mita est capable d'offrir. « Il s'agit seulement d'une nouvelle règle du jeu. La concurrence reste la même. » Et quand le constructeur perd une affaire, il en analyse les conséquences : il a à sa disposition les critères d'achat référencés très précisément lors de l'enchère inversée. « Nous réalisons 70 % de notre chiffre d'affaires auprès des grands comptes. Or, ces derniers utilisent de plus en plus ce mode d'appel d'offres, qui devient incontournable. »

 
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Isabelle de Chauliac

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