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Former les managers au management

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Souvent promus au poste de chef de vente ou de responsable régional parce qu’excellents vendeurs, les managers intermédiaires n’ont pas forcément les bagages nécessaires pour êtreles managers-coachs que les entreprises attendent... Un remède s’impose : la formation.

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Même si l’enquête de la Cegos sur l’efficacité des forces de vente fait régulièrement ressortir une forte demande des commerciaux pour être davantage encadrés, accompagnés et formés par leurs managers, les formateurs s’accordent à dire qu’il y a un net progrès : on forme plus et mieux qu’hier le middle management au “savoir manager”, notamment dans les grandes entreprises et dans les secteurs ultra-concurrentiels de la grande consommation, de la banque-assurance, de la pharmacie ou de l’informatique. “Les entreprises se sont rendues compte, avec la crise du début des années 90, qu’il fallait des équipes commerciales mieux formées, mieux encadrées et davantage motivées pour faire la différence... Dans ce contexte, le rôle de l’encadrement intermédiaire devait évoluer et intégrer une responsabilité plus forte, d’une part, d’animation des vendeurs, et d’autre part, d’amélioration de leurs compétences. Pour y parvenir, elles ont accepté d’investir en formation managériale pour leurs chefs de vente et autres responsables régionaux”, observe Marc Corcos, directeur de clientèle au cabinet CAA. Former les managers pour doper l’efficacité de leurs équipes Le management en effet n’est pas une qualité “innée” mais bien un ensemble complexe de techniques et de comportements que l’on peut acquérir et consolider par la formation. “Certains pourraient penser que le management s’apprend sur le tas. C’est faux, d’autant que les encadrants commerciaux sont accaparés au quotidien par une multitude de tâches autres que celles du management : interface avec le marketing, travail administratif, règlement des situations critiques, etc. Ils sont donc sans cesse distraits de leur rôle de manager auquel ils consacrent souvent moins de 20 % de leur temps... Pour aider efficacement leurs équipes à progresser, ils doivent donc être eux-mêmes aidés à devenir de vrais pilotes du changement : pour cela il faut leur donner le temps de se former et de pouvoir ensuite mettre en œuvre sur le terrain les “bonnes pratiques managériales”, constate Denis Plénier, consultant chez Mercuri International. “Une formation qui ne doit pas, bien sûr, se résumer à une formation coup de poing de trois jours au moment de la prise de poste où tous les aspects du rôle de manager (la motivation, l’animation d’équipe, le pilotage, le recrutement, la conduite de réunion, l’assertivité) sont abordés. Ce type de formation rassure les entreprises mais se révèle finalement assez peu efficace par manque de suivi”, ajoute Valérie N’Gom, consultante à la Cegos. La formation : simple boîte à outils ou école du changement ? Qu’il faille sérieusement former le middle management à assumer son rôle d’encadrement semble donc aujourd’hui acquis dans un bon nombre d’entreprises. Former, d’accord : mais à quoi ? On constate actuellement une forte demande des entreprises pour tout ce qui est motivation et animation d’équipe. Sans doute parce que c’est à la mode et parce que c’est dans ce domaine que les encadrants osent le plus facilement avouer leurs faiblesses, en invoquant par exemple une équipe difficile, hétérogène, etc. La demande est nettement moins forte sur le thème du recrutement : pourtant les problèmes de motivation sont souvent liés à des erreurs de recrutement... Et peu de managers intermédiaires savent correctement définir un profil de poste ou de candidat. Dès lors, lorsqu’ils participent au processus de recrutement des vendeurs, ils pratiquent un recrutement au “feeling”, très peu rigoureux et qui peut se révéler désastreux... Les lacunes sont également importantes au niveau du pilotage et de la maîtrise des tableaux de bord, notamment des ratios de productivité commerciale, un aspect pourtant crucial du management. “Les demandes de formation en la matière sont encore trop rares... alors qu’il s’agit des fondations du métier de manager commercial”, indique Valérie N’Gom. Pour Marc Corcos, de CAA, les entreprises devraient plutôt concevoir le contenu de la formation de leurs cadres intermédiaires en sortant des schémas classiques qui découpent le rôle de manager en une série de techniques. “On ne forme pas un manager en accumulant des couches de savoir-faire déconnectées les unes des autres. La formation du middle management doit, selon moi, privilégier deux grandes orientations : le management rapproché et le manager formateur de ses équipes.” Former les cadres à être plus “près” de leurs vendeurs, c’est l’ambition des stages de management rapproché. Pratiquer des évaluations de compétences, mettre en œuvre des plans d’action avec chaque vendeur, les accompagner en clientèle, faire des debriefings des visites clients, effectuer des points intermédiaires hebdomadaires ou mensuels, pratiquer des entretiens qui développent la confiance en soi, le sens de l’effort, le goût de la réussite chez ses vendeurs, faire des remarques ou critiques qui favorisent la prise de conscience positive d’insuffisances ou de manques, encourager, féliciter : ce sont tous ces comportements qui sont enseignés aux cadres. “Le management, c’est un ensemble de grands principes que tout le monde connaît : élaborer des plans d’actions, contrôler, déléguer... mais c’est surtout une façon d’être au quotidien qui débouche sur des relations constructives et harmonieuses avec son équipe : c’est cela le management rapproché”, insiste Marc Corcos. Faire du middle management un relais du changement dans l’entreprise passe aussi par sa transformation en “manager formateur” responsable de l’amélioration des compétences de ses équipes, et capable de former ses troupes en salle comme sur le terrain pour accélérer la montée en puissance des nouveaux et perfectionner les vendeurs confirmés. Un idéal encore trop rarement atteint, comme le confirme Denis Plénier de Mercuri : “Trop d’encadrants commerciaux fonctionnent encore au pur pilotage par les résultats : il faut les amener à pratiquer un pilotage beaucoup plus en profondeur qui passe par le renforcement du potentiel de leurs vendeurs.” Une évolution indispensable à une époque où le rôle d’un manager ne se limite plus à la prise de décision et au contrôle mais aussi à l’aide à son personnel. “Aujourd’hui, il ne s’agit plus de collaborateurs aux ordres du chef, mais de chefs au service de leurs collaborateurs... pour les rendre meilleurs, plus professionnels, plus motivés et obtenir les résultats escomptés”, insiste Yves Blanchard, pdg de CAA. Comment rendre le middle management “coach et formateur“ ? Pour modifier en profondeur le style de management de leurs encadrants, les entreprises ne peuvent clairement pas se contenter d’un message incantatoire de la direction sur le devoir des cadres à accompagner et former leurs collaborateurs, ni de sessions ponctuelles de formation de quelques heures à quelques jours à la prise de poste. Marc Corcos : “Des séries de stages d’un jour ou deux étalées sur plusieurs mois à raison d’un stage tous les mois ou toutes les six semaines me paraît un bon compromis pour ancrer les bons automatismes et faire évoluer les comportements tout en n’empiétant pas excessivement sur le temps de travail du middle management.” Au-delà du rythme et de la durée de la formation, se pose la question cruciale du suivi : comment faire pour que les “bonnes pratiques” soient mises en œuvre sur le terrain ? Plusieurs solutions sont possibles. De la “bible” qui fixe les règles managériales de l’entreprise et à laquelle chacun peut constamment se référer en cas de doute ou de difficulté au coaching individualisé des encadrants. Mais de tels outils, dont l’utilité est avérée, n’existent encore le plus souvent que dans des entreprises très matures qui ont mesuré toute l’importance du middle management comme levier d’efficacité et de changement. Pour Denis Plénier, “les entreprises réservent trop souvent le coaching au top management, parce qu’elles estiment que c’est trop coûteux. Pourtant, on peut compléter avantageusement une formation en salle par des séances de coaching sur une journée, parfaitement adaptées aux besoins des encadrants intermédiaires.” Il peut s’agir par exemple d’un coaching sur les entretiens d’activité – un formateur assiste à trois ou quatre entretiens conduits par le chef de vente puis en assure le débriefing – ou sur la conduite de réunion. Poursuivre la formation des managers sur leur lieu de travail, au cœur de leurs problématiques quotidiennes, c’est certainement l’une des voies de la réussite. “Même si le coaching individuel est cher, le retour sur investissement est bien plus probant et plus rapide que celui de sessions de formation en salle”, témoigne Valérie N’Gom. Encore faut-il que la direction, et singulièrement la direction commerciale, en soit convaincue... Seule une équipe dirigeante fortement impliquée dans l’amélioration des pratiques managériales au sein de l’entreprise peut faire bouger les choses. “À chaque fois que l’on a affaire à un directeur commercial exigeant et soucieux de faire progresser son middle management, nous n’éprouvons aucune difficulté à le convaincre d’accorder un soin tout particulier au contenu et au suivi de la formation de ses collaborateurs”, estime Denis Plénier. Les intéressés eux-mêmes – chefs de vente et directeurs régionaux – ont aussi un rôle à jouer : ils osent encore trop rarement reconnaître leurs difficultés ! “Super vendeurs” habitués au succès et aux louanges, ils répugnent à admettre la faiblesse de leur bagage managérial. À eux également d’être demandeurs.

“J’ai souhaité instaurer un style de management plus rigoureux, moins subjectif, où les chefs de vente s’impliquent au plus près dans le recrutement, le pilotage et l’accompagnement terrain de leurs inspecteurs.“ Pascal Auxoux, directeur national des ventes de Stihl. Chacun des quatre chefs de vente régionaux, spécialiste de la motoculture de plaisance, encadre une dizaine d’inspecteurs commerciaux. Ils bénéficient depuis quelques années d’une formation au management. L’équipe commerciale de Stihl utilise une méthode d’attaque du marché basée sur des “plates-formes“ clients, incluant une analyse de l’historique de la relation commerciale, des fixations d’objectifs et des reportings hebdomadaires : les chefs de vente ont été formés pour effectuer un pilotage très rapproché de leurs équipes dans ce cadre-là. “Ils procèdent à un diagnostic, avant après, des plates-formes élaborées par les vendeurs à travers des entretiens d’activité réguliers. Ils les accompagnent également sur le terrain pendant 3 ou 4 jours tous les deux mois. Cela les conduit à être pointus dans l’analyse des compétences de leurs équipes, bref, à pratiquer un management plus exigeant et constructif.“

Formation : les cinq règles d’or 1. Une nécessité : un directeur commercial réellement convaincu du levier d’efficacité que représente un middle management bien formé. 2. La formation doit être étalée dans le temps et surtout pas réduite à une session “coup de poing” à l’occasion de la prise de poste. 3. Au-delà de l’apprentissage de telle ou telle technique (conduite de réunion, etc.), le contenu doit contribuer à faire du middle management des managers rigoureux, exigeants et impliqués dans la montée en compétence de leurs équipes. 4. Un suivi doit être mis en place, sous une forme ou une autre, pour que la formation ne soit pas un simple coup d’épée dans l’eau : de la rédaction d’un “book” référentiel au coaching individualisé des managers. 5. Les middle managers doivent aussi se montrer les acteurs de leur formation : à eux d’être davantage demandeurs et moteurs en la matière.

“Les thèmes abordés couvrent les différentes facettes de leur métier, de la façon de conduire un entretien avec un vendeur à la construction de plans d’action en passant par la conduite de réunions ou les visites conjointes avec les vendeurs sur le terrain.” Nicolas Bronner est directeur régional des ventes chez Berner. Il chapeaute la moitié nord et est de l’Hexagone et encadre 9 chefs de vente patrons de 12 à 14 vendeurs. Depuis 3 ans, il les aide à perfectionner leur “savoir-manager“ en les réunissant 3 à 4 fois par an, pour une journée de formation et d’échanges d’expériences. Les chefs de vente préparent la réunion à l’avance grâce à un questionnaire conçu par Nicolas Bronner, puis, le jour de la formation, chacun fait part de sa façon de faire. “Mon rôle personnel consiste à élaborer le concept de la journée, à orienter les débats, à reformuler les idées. Mais ce sont les chefs de vente qui sont les vrais acteurs de la journée : en fait, ils se forment les uns les autres en s’échangeant leurs best practices sur le thème du jour.“ Un compte-rendu écrit est diffusé à chacun : véritable mode d’emploi managérial sur la question traitée, il reprend les bonnes pratiques mises en évidence lors de la journée passée ensemble.

 
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V. G.

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