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La convention des forces de vente est-elle “has been” ?

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Événement Parce qu'elle symbolise un temps fort, qu'elle diffuse des messages et reste motivante, la grand-messe a toujours la cote. Toutefois, conjoncture oblige, les entreprises n'hésitent plus à faire évoluer la formule…

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Une convention annuelle capable de marquer les esprits coûte entre 300 000 e t 500 000 euros (pour 300 commerciaux pendant deux jours). Un montant qui, à l'heure des restrictions budgétaires, peut en dissuader plus d'un. “Quel retour sur investissement me garantissez-vous ?” La question est désormais sur toutes les lèvres. Car, même rondement menée et coûteuse, un tel rendez-vous n'assure pas, loin s'en faut, une année commerciale en fanfare. Pour atténuer les hésitations des directions commerciales, les professionnels de l'événement d'entreprise ont cherché des parades. Début 2004, l'Anaé, l'Association nationale des agences conseil en événement, et le cabinet spécialiste de l'évaluation en communication, Occurrence, ont créé le premier outil d'évaluation de ce genre d'opérations : le Bilan d'impact événementiel. En début d'année, c'était au tour de l'agence Carré Bleu Marine (groupe DDB) de lancer son offre “Event Scoring”. La promesse : permettre aux annonceurs d'évaluer les événements réalisés par leur agence. Mais, sur un sujet aussi subjectif que l'impact d'un événement, la démonstration n'est pas simple. Et la grand-messe commerciale reste plus que jamais en ligne de mire des directions financières. Nouveaux modes de communication À cette “attaque” est venue s'ajouter une seconde salve : l'arrivée des technologies de l'information et de la communication (TIC). Celles-ci ont apporté dans leur sillage de nouveaux modes de travail : e-mail, vidéoconférences, réunions multimédias à distance… « À la fin des années quatrevingt- dix, j'ai cru – et je ne suis pas le seul – que l'heure de la mort de la réunion classique était bel et bien arrivée, se souvient Christophe Larenduche, directeur général de l'agence conseil en événement Sagarmatha. Puis nous nous sommes rendu compte que la technologie n'était pas toujours au point, que toutes les forces de vente n'étaient pas équipées. Mais aussi que les ordinateurs n'étaient pas toujours assez puissants pour supporter les programmes… Nous avons assez vite réalisé que la communication à distance ne constituait pas une véritable menace pour les conventions. » Nouvelles technologies et conventions sont plutôt apparues comme complémentaires. E-mails, réunions à distance…, sous l'effet croissant des nouvelles technologies, le métier de commercial – déjà solitaire – a doucement glissé vers un peu plus de “déshumanisation”. « Le Web constitue un excellent outil pour diffuser l'information, mais certainement pas l'émotion ! », tranche Vincent Dumont, directeur général de l'agence d'événement Chaïkana, pour qui la réunion physique des forces de vente demeure donc un temps fort de l'année destiné à pallier cette carence “d'humain”. De plus en plus d'adeptes La convention des forces de vente internes n'est donc pas morte. Elle aurait même, selon la dernière enquête Bedouk-Coach Omnium, de plus en plus d'adeptes. Ainsi, 32 % des entreprises déclarent organiser un tel événement, alors qu'elles n'étaient que 23,5 % en 2000. Le contact virtuel est encore bien loin de supplanter ces rendez- vous en “live” qui permettent aux membres d'une même famille commerciale de se rencontrer et d'échanger. Mais si la convention est plébiscitée, c'est aussi en raison des nouvelles règles du marché. « Les forces de vente évoluent dans un monde qui va de plus en plus vite, analyse Jean-Marc Danna, directeur général stratégie et création de l'agence Carré Bleu Marine. Elles peuvent apprendre du jour au lendemain que leur société est rachetée ou qu'elle fait l'objet d'une fusion. Elles ont donc besoin d'être rassurées sur l'avenir de leur entreprise. » Et les réunir est encore ce qu'on peut imaginer de mieux. Ajoutez à cela l'allégement du “middle-management” et un marché de plus en plus concurrentiel et l'on comprend pourquoi la convention demeure le rendezvous incontournable de l'année commerciale pour nombre de vendeurs. « C'est un rassemblement auquel nous tenons beaucoup », confirme Jean- Jacques Bordet, directeur commercial de Pitney Bowes, spécialiste de la gestion de documents qui organise une convention chaque année. La dernière en date s'est tenue en février dernier à Deauville. Les 180 commerciaux du groupe ont ainsi pu découvrir les grands axes stratégiques de l'entreprise et ce qu'elle attend d'eux précisément. « Ce qui compte aujourd'hui dans la plénière, observe Jean-Marc Danna, c'est de présenter les objectifs pour l'année à venir et les moyens mis en oeuvre par la société pour les atteindre. » Un schéma suivi par Jean- Jacques Bordet. Après avoir expliqué l'axe stratégique majeur pour 2006, qui consiste à “faire de la vente conseil”, le directeur commercial de Pitney Bowes, a présenté les outils marketing mis au point pour atteindre cet objectif, ainsi que les challenges programmés sur l'année. « J'ai pu transmettre le même message à tous en direct. C'est très important, souligne- t-il. Pour les commerciaux seuls sur leur secteur géographique, ce grand jour est un moment d'échanges avec leurs collègues et leur hiérarchie. » « Ils ont besoin de sentir qu'ils font physiquement partie d'un tout », analyse Cyril Giorgini, président de l'agence Auditoire. Et Jean- Marc Danna (Carré Bleu Marine) de renchérir : « Ils veulent être confortés à l'idée qu'ils ne sont pas seuls sur le terrain et que leur management les soutient. » L'impression finalement d'être pris en compte, comme le souligne Franck Manfredini, commercial chez Xerox pour la Normandie. « Ce jour-là, les responsables commerciaux et les dirigeants me saluent et discutent avec moi. C'est une véritable reconnaissance. » Animations et détente Une valorisation qui passe aussi par la mise en scène de la convention et son côté festif. En effet, les participants veulent se détendre, et de préférence dans un cadre agréable. Hôtel de luxe, escapade sur le littoral… Même si les directions commerciales disposent de budgets serrés, elles sont encore nombreuses à marquer le coup. C'est le cas de DHL Express, qui réunit tous les ans ses 400 commerciaux terrain et télévendeurs. La dernière édition de ce rendez-vous annuel avait lieu à l'hôtel Hermitage de La Baule. Au programme, une journée de travail avec comme grand témoin le navigateur Laurent Bourgnon et une journée de détente. « Nous les recevons dans un bel endroit propice au partage de moments sympathiques », souligne Carole Teissedre, responsable communication marketing de DHL Express. Et Cyril Giorgini (Auditoire) de confirmer : « Si, d'une manière générale, la durée des conventions a diminué, passant de trois ou quatre jours à un ou deux jours, en revanche le traitement des participants a gagné en qualité. » Côté plénière, la tendance est de projeter des réalisations “maison” – des films ou des micros-trottoirs donnant la parole aux commerciaux – ou de faire participer des intervenants extérieurs. Pour son avant-dernier rassemblement, Xerox avait confié les rênes de sa plénière à l'humoriste Anthony Kavanagh. « Il ponctuait chaque présentation de produit par un petit sketch, commente Lydia Toledano, chef du département communication et publicité de Xerox France. C'était très drôle ! » Jouer sur le vécu Certaines entreprises qui avaient délaissé les conventions au profit de réunions à distance organisent à nouveau de belles manifestations visant à réunir leurs forces de vente. « C'est le cas notamment de Peugeot, souligne Cyril Giorgini (Auditoire). Après avoir eu recours pendant plusieurs années à la télétransmission pour lancer ses produits auprès de son réseau, le constructeur automobile a décidé de renouer cette année avec la convention traditionnelle. » C'est également le cas de la société spécialisée dans les solutions de communication à distance Genesys Conferencing. Dans le passé, elle organisait des réunions par pays. Depuis maintenant trois ans, elle réunit ses 150 commerciaux européens pendant trois jours. Au programme : plénières, jeux de groupes version team building, réunions et dîners de gala. « Notre principale motivation,note Michel Lecina, p-dg de Genesys Conferencing Europe, était de transmettre à tout le monde et simultanément les mêmes informations concernant les choix stratégiques de l'entreprise. Mais ce n'est pas le seul bénéfice de ce rendez-vous : les participants en repartent gonflés à bloc. » Ce que confirme Clément Guillemain,responsable grands comptes chez Genesys Conferencing : « Le “kick-off” permet de mieux connaître les collègues européens avec lesquels on peut être en contact en Web conférence. Par ailleurs, en faisant venir et témoigner des “top managers US” à la tribune, la direction nous fait clairement comprendre qu'elle nous fait confiance au point de délivrer des messages stratégiques. » Et le p-dg de Genesys Conferencing de poursuivre : « Les outils et solutions de téléconférence jouent aujourd'hui un rôle essentiel. Ce n'est pas moi qui vais prétendre le contraire. » Mais, selon lui, la téléconférence ne peut pas remplacer toutes les réunions. « Et le “kick-off” annuel est, chez nous, entré dans les moeurs. Les commerciaux y tiennent et nous aussi : à chaque fois, l'équipe de direction en revient avec des idées et des pistes de réflexion pour alimenter et amender les projets et dossiers en cours et à venir. » Tous ces efforts, au dire des organisateurs, paient. « C'est un moment fort qui me “survitamine”, confirme Pascal Jalil, commercial chez Pitney Bowes. J'en ressors avec le sourire et l'envie de bien faire. » Motivés, les commerciaux repartent également avec, entre les mains, des outils concrets – des nouveaux produits, des argumentaires de vente – pour réussir leurs visites en clientèle et auprès de leurs prospects. La convention est l'occasion, en effet, de jouer sur deux tableaux à la fois : l'information et le vécu. Des objectifs et des moyens qui évoluent au fil du temps. Et si hier, la part belle était faite à l'information, essentiellement descendante, aujourd'hui le vécu prend de plus en plus d'importance. « Le rendez-vous annuel favorise la création d'émotions. Pour cela, il est évident qu'on y introduit plus de scénographie et plus de mise en scène. » La convention fait aussi, de plus en plus, la part belle aux temps informels, à l'exploitation de films réalisés sur le terrain, aux ateliers de travail en petit comité, au vote électronique, etc. Selon Cyril Giorgini (Auditoire), « les effets positifs d'un tel rendez-vous sur le moral et la productivité des commerciaux perdurent au moins un trimestre. » Des road shows régionaux Si la traditionnelle grand-messe a donc de beaux jours devant elle, certaines entreprises n'hésitent pas à faire évoluer la formule. « On a vu naître un véritable intérêt pour les réunions en province », observe Christophe Larenduche (Sagarmatha). Ce que confirme le porte-parole de Chaïkana, Vincent Dumont : « Il y a un vrai sujet de débat au sein des comités de direction pour savoir s'il faut maintenir la convention nationale ou bien opter pour un road show régional. » Très clairement, ce dernier permet de réaliser des économies. « L'un de mes clients du secteur de la grande distribution, un adepte de la première heure des conventions force de vente, a décidé, l'an dernier et pour la première fois, de remplacer le rassemblement annuel national par une série de conventions régionales, relate Vincent Dumont. La raison est simple : les chiffres du dernier trimestre étant mauvais, le budget convention a été réduit. » Cette version régionale permet aussi de s'adapter à la culture “locale”, d'être plus proche des participants. Une différence toutefois avec sa grande soeur nationale : « Dans le cadre des conventions régionales, on a tendance à créer des rendez-vous très informatifs axés sur le contenu », note Vincent Dumont. La créativité de la mise en scène passe souvent en second plan. L'objectif est finalement moins de galvaniser que d'informer et d'échanger. C'est la formule qu'a choisie l'assureur Gan Prévoyance, qui organise ce type d'événement. En 1998, la société a opéré un revirement stratégique. Pour faire passer ces changements auprès du terrain, la direction commerciale, emmenée par Alain Starzynski, directeur commercial et marketing, a décidé d'aller à la rencontre des régions. Objectif premier : prendre la parole, expliquer les orientations stratégiques du groupe et tisser des liens forts. Ce rendez-vous a lieu chaque année en septembre : le tour de France dure onze jours consécutifs, dans onze villes différentes. « Le choix de cette formule, analyse Alain Starzynski, s'est fait en partie à cause de la taille du réseau. » En province, Gan Prévoyance organise des groupes de 130 ou 140 personnes. « Si nous réunissions nos 1 500 collaborateurs, nous ne pourrions pas être dans le débat et l'échange. Nous serions contraints de faire une démonstration de force et de puissance. C'est bien, mais ça ne saurait être suffisant. » Par ailleurs, le coût serait pharaonique. « Sans compter que nous aurions du mal à marquer tous les ans les esprits ! Finalement, je préfère partir à la rencontre du terrain plutôt que l'inverse. Dans cette formule, il est au coeur du dispositif. » On est très proche de ce que les agences appellent la convention en “cascading”. Il s'agit d'organiser un rendezvous national avec les cadres au cours duquel sont réalisées des vidéos. Celles-ci sont montées sous forme de “kits de démultiplication” qui constituent le fil rouge des conventions régionales des forces de vente terrain. « L'entreprise a ainsi l'assurance de divulguer le même message à l'ensemble des collaborateurs, mais évite les coûts de déplacement », analyse Christophe Larenduche (Sagarmatha). Des rendez-vous moins fréquents Autre tendance : « Les conventions tendent à s'espacer dans le temps, observe Christophe Larenduche. Une entreprise qui réunissait ses vendeurs deux fois par an, par exemple, institue désormais un seul rassemblement annuel. » Une évolution qui touche, selon Mark Watkins, p-dg de Coach Omnium et auteur de l'étude sur le tourisme d'affaires 2005/2006 menée pour le compte de Bedouk, l'univers de l'événementiel au sens plus large. « Il y a eu, en 2005, moins de réunions professionnelles que les années passées. » Ricard, par exemple, réunit ses 600 commerciaux terrain, ainsi qu'une cinquantaine de cadres du siège, en convention nationale tous les trois ans seulement. Elle se déroule sur trois jours et demi. La dernière, qui a eu lieu en Pologne, avait pour thème la “Ricard attitude”. « Vu le format assez long de la réunion, nous pouvons, audelà des messages stratégiques que nous faisons passer, être très interactifs, prévoir du temps pour l'échange de bonnes pratiques, travailler le sentiment d'appartenance et même des aspects plus comportementaux », argumente Guillaume Girard-Reydet, directeur commercial de Ricard France. Et, pour lui, il n'est pas question de modifier la formule. « Nous n'envisageons pas, non plus, d'augmenter la périodicité. Ce n'est pas une question d'économie. Nous risquerions de nous épuiser, d'être moins créatifs. » Et le porte-parole de la marque de boisson anisée de conclure : « La convention est, pour moi, un point de départ. Le retour sur le terrain doit être en phase avec elle. Nous veillons donc à ce que les animations ocales et régionales prennent le relais des messages délivrés. Cet événement ne doit surtout pas compenser des lacunes dans l'animation de la force de vente au quotidien. » Enfin, pour réduire les coûts tout en la maintenant, les agences ont une autre astuce : « Il nous arrive d'adosser la convention force de vente à celle de l'entreprise, rapporte Vincent Dumont (Chaïkana). De réunir le premier jour les commerciaux et le second l'ensemble des collaborateurs. La société réalise, de fait, des économies substantielles sur le coût de location de la salle, du matériel, etc. » S'en passer… Et puis, il y a les entités qui, rompant avec la tradition, ont décidé de faire une croix sur la grand-messe. C'est le cas de Loxam, spécialiste de la location et de la vente de matériel et d'outillage, ou encore de Würth France, qui possède l'une des plus imposantes forces de vente de l'Hexagone. « Compte tenu de sa taille – elle totalise pas moins de 2 300 commerciaux –, il est quasiment impossible de réunir l'ensemble des salariés en convention nationale annuelle », confie Christian Herter, directeur de la communication de Würth, coordinateur des événements. Alors, pour compenser et faire passer les messages auprès des équipes terrain, la société s'appuie fortement sur son middle-management. Les équipes d'encadrement se retrouvent à l'occasion de fréquents rendez-vous mensuels et semestriels. À elles ensuite de transmettre les messages sur le terrain. Chacune des sept divisions commerciales compte entre 200 et 500 vendeurs terrain. Mais là non plus, pas de convention ! « Il est probable que nous en tirerions un certain bénéfice. Mais se pose toujours la question du retour sur investissement », note Christian Herter. Quant au besoin de rompre avec la solitude du commercial ? Würth a sa parade : « Nous organisons deux fois par an une semaine de la vente, qui donne la possibilité à un commercial de “tourner”, durant plusieurs jours, avec un collaborateur issu d'un tout autre service (administratif, production, etc.). C'est un moyen efficace de tisser des liens, de développer le sentiment d'appartenance au groupe. » Alors, faut-il organiser une convention des forces de vente ? Les arguments fusent dans les deux camps… Un seul “contre” est imparable. « Si l'objectif de la direction commerciale se résume à : “Bilan, Objectifs, Faut y'aller les p'tits gars !”, mieux vaut s'en abstenir, met en garde Olivier Denis-Massé, de l'agence Euro RSCG 4D. Pour une convention d'une vraie efficacité, il faut bien davantage. Cela passe par la présentation de nouveaux produits, d'une organisation différente, une mise en place de nouveaux outils de travail ou bien encore une nouvelle approche commerciale. » Et Vincent Dumont (Chaïkana) de conclure à propos de ces rendez-vous : « Il n'y a rien de pire que de se réunir et de ne rien avoir à dire ! »

L'avis de Jean-Claude Rouchy, psychanalyste, président de Transition, organisme spécialisé dans l'analyse de groupe « La notion de groupe est essentielle pour garantir l'esprit d'entreprise »

« Le groupe est primordial, il permet à l'individu de s'identifier à une entité, de développer le sentiment d'appartenance, affirme Jean-Claude Rouchy, psychanalyste. Or, en France, on prend en compte l'individu et la notion de groupe est sousvalorisée. » Les commerciaux éloignés du siège et isolés peuvent en souffrir. « On peut même, à terme, voir des vendeurs s'identifier plus à leurs clients qu'ils côtoient tous les jours qu'à leur propre entreprise, observe Jean-Claude Rouchy. Les conventions annuelles sont alors perçues, par la société, comme un moyen de réaffirmer ce lien indispensable avec les forces de vente. » Et l'expert d'ajouter : « Ce type de rassemblement présente un vrai côté rituel, presque religieux, du processus d'identification. L'entreprise peut, à cette occasion, fédérer les participants autour d'elle et de ses valeurs. L'effet “foule” génère des émotions… C'est un moyen de fédérer, mais ça ne peut pas être le seul. La hiérarchie doit avoir le souci de faire vivre cette appartenance au quotidien. C'est primordial ! »

L'avis de Richard Attias, président de Publicis Events « En France, les conventions sont plus “sages” qu'ailleurs »

« D'un pays à l'autre, l'approche de la convention forces de vente s'est considérablement normalisée, au point qu'aujourd'hui, il n'y a pas de grandes différences. Du moins sur le fond et les objectifs recherchés. » Ce constat est celui de Richard Attias, président de Publicis Events, agence spécialisée dans l'organisation d'événements. « Quel que soit le pays où l'on se trouve, le fil rouge est le même. Ce qui change relève plus de la forme et de différences culturelles. Aux États- Unis, par exemple, les entreprises n'hésitent pas à faire des shows qui rassemblent plusieurs milliers de personnes. Culturellement, les Américains attachent plus d'importance que nous à la dynamique de groupe et à l'autocongratulation. Outre- Atlantique, c'est essentiel de se dire et de se répéter qu'on est les meilleurs ! Aux États-Unis toujours, on trouve toujours un “héros” sur scène qui est là pour galvaniser le public. En France, c'est de moins en moins fréquent. Les directions craignent de plus en plus que le héros soit assimilé à paillettes, strass et facilité. Elles sont friandes de messages plus intellectuels. » Autre différence de forme toujours, les conventions à la française sont parfois un peu sages au regard de ce qui se fait ailleurs. « Dans l'Hexagone, les lieux qui offrent de grandes capacités d'accueil ressemblent souvent à des halls d'exposition. En Allemagne et aux États-Unis, ce sont plutôt des hôtels, qui offrent davantage de créativité, de magie, voire de folie de la part des metteurs en scène. »

L'avis de Jean marc Danna - Directeur général stratégie et création de l'agence Carré Bleu marine « Il faut réinventer la convention »

Les conventions d'entreprises sont loin de satisfaire les attentes des cadres. Ce constat est celui d'une récente enquête Carré Bleu Marine/OpinionWay réalisée auprès de 1 186 cadres français. « Ou, plus exactement, les participants sont globalement satisfaits, mais peu enthousiastes », souligne Jean-Marc Danna. Seulement 6 % se déclarent tout à fait satisfaits. Le contenu ? « Plus d'un participant sur deux le juge incomplet ou non adapté. » La forme ? « Ces événements ne sont pas assez innovants pour captiver leurs publics et ne participent pas à créer une image positive de l'entreprise. » Ainsi, après une convention, seulement 16 % pensent que leur entreprise est dynamique. Finalement, ce rendez-vous ne jouerait pas le rôle-moteur espéré dans la fierté d'appartenance à l'entreprise. Dommage. Surtout quand on connaît les sommes qui sont investies. Jean-Marc Danna identifie plusieurs pistes de progrès : « Il est essentiel de bien préparer la convention en amont avec les commerciaux. De leur faire étudier les dossiers d'actualité afin de faire remonter les idées du terrain. Ce travail, pourquoi pas filmé, peut ensuite servir de fil conducteur à la plénière. Et, en plus d'expliquer la stratégie de l'entreprise, la direction doit se fixer des objectifs clairs et ne pas se limiter à une communication “top-down”. Ce rassemblement doit aussi faire évoluer le comportement des vendeurs. »

Ce qu'en pensent les commerciaux

Franck Manfredini, commercial pour la région Normandie chez Xerox « C'est l'unique occasion de rencontrer mes collègues »

Pour rien au monde, Franck Manfredini, commercial chez Xerox, ne raterait la convention forces de vente organisée chaque année par le groupe. Sur les routes normandes cinq jours sur sept, c'est pour lui l'occasion unique dans l'année de rencontrer ses collègues de la France entière. « Comme je ne dépends pas d'une agence, je suis encore plus isolé que certains de mes collègues. Mes seuls contacts en interne se résument à un rendez-vous hebdomadaire téléphonique avec mon n+1 et à des réunions trimestrielles régionales. » De ce jour J, le commercial attend donc des informations précises relatives à la stratégie du groupe. « Tout se passe à Paris. En étant en région, je me sens parfois un peu en dehors des décisions prises au siège. » Informé, rassuré sur l'avenir de l'entreprise, détendu après une soirée de gala festive et muni de sa mallette contenant le kit complet (plan de lancement, argumentaires, visuels) du nouveau produit lancé durant la plénière, Franck Manfredini repart regonflé à bloc. « J'ai ma feuille de route en poche, je sais où je vais, confie-t-il. Et en général, je suis plus productif en clientèle les semaines suivant la convention. »

Vincent Catroux, conseiller en prévoyance chez Gan Prévoyance « Pas besoin de grand-messe pour réaliser que nous appartenons à un groupe »

« Les rencontres régionales qui ont lieu une fois par an sont très attendues, assure Vincent Catroux, conseiller chez Gan Prévoyance. À cette occasion, je découvre les résultats de ma région ainsi que des informations sur le plan stratégique. » Ces réunions rassemblent environ 140 personnes. « Ce sont des rendez-vous informatifs basés sur l'échange, ce que ne permettrait pas une grand-messe réunissant les 1 500 conseillers. C'est le seul moment de l'année où je peux rencontrer des collègues basés à l'autre bout de ma région. » Quid, en l'absence d'une convention nationale, de l'identification et du sentiment d'appartenance à l'entreprise ? « Au Gan, les rapports avec l'encadrement ont beaucoup évolué. Aujourd'hui, les directeurs de région sont plus proches de notre quotidien et plus à notre écoute. La communication est permanente, le management participatif. Nous n'avons pas besoin de ces rendez-vous en grande pompe pour réaliser que nous appartenons à une entité. » Et Vincent Catroux d'ajouter : « Certains d'entre nous percevraient d'un mauvais oeil que la direction dépense des fortunes pour l'organisation d'une grande réunion pompeuse ! »

 
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Par Anne-Françoise Rabaud et Emmanuelle Sampers

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