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Le trésor du comité d’entreprise

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Pressé, exigeant, très professionnel : l’élu du comité d’entreprise est un consommateur souvent difficile à conquérir, mais très fidèle. Les entreprises ne s’y trompent pas, elles qui sont de plus en plus nombreuses à se positionner sur ce segment de clientèle. Une mine d’or à condition de savoir la prospecter.

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En 50 ans, les comités d’entreprise ont acquis non seulement leur légitimité juridique au sein de l’entreprise et auprès des salariés, mais aussi une force financière considérable, qui dépasse de très loin les activités traditionnelles comme l’arbre de Noël. Et force est de constater que de plus en plus d’entreprises redoublent d’efforts pour séduire cette clientèle nombreuse. La France compte près de 38 000 comités d’entreprise et assimilés, dont plus de 33 000 dans le secteur privé concurrentiel. Ce marché est évalué à 54 milliards de francs par an. Cette somme regroupe à la fois le budget de fonctionnement – plus d’une dizaine de milliards de francs – et celui consacré aux activités sociales et culturelles, représentant en moyenne 1 % de la masse salariale brute de l’entreprise. Concrètement, un salarié sur deux est concerné par un CE. Soit plus de dix millions de personnes. “À regarder ces chiffres, on comprend vite pourquoi le CE constitue une cible de plus en plus convoitée”, remarque André Dormoy, directeur commercial de Cep-Exposium qui organise chaque année à Paris le salon Ecoprise dédié aux comités d’entreprise. “Le CE est non seulement une cible finale, mais aussi un prescripteur auprès des salariés qui, du coup, génère un second marché pour les entreprises qui le prospectent.”À ce titre et à bien d’autres égards, le comité d’entreprise est un client bien particulier. Élu, le représentant du CE est avant tout “un militant de bonne volonté amené à cette fonction par le vote de ses pairs. Dans son travail de tous les jours, il n’est généralement pas formé à l’achat, ce n’est pas un professionnel”, poursuit André Dormoy. Élu, il doit également répondre de ses actes devant ses électeurs. “Il prend un risque quand il achète”, affirme Claire Mourin, commissaire générale du salon Carrefour des CE. Il aime donc rencontrer son interlocuteur, plusieurs fois si nécessaire, avant de conclure la vente. Des forces de vente dédiées Ce comportement soulève une question relativement stratégique : faut-il constituer une force de vente dédiée à la clientèle CE ? “Oui”, répond fermement Philippe Goudemant, pdg de La Documentation directe, qui édite des mailings groupés à destination notamment des CE. “Une entreprise ne peut pas prétendre prospecter et toucher cette clientèle sans une réflexion préalable sur ses attentes et la mise en place d’une équipe de commerciaux sachant parfaitement les traiter.” Dans les faits, les entreprises s’engagent généralement sur cette voie. Gueydon, le quatrième grossiste en jouets d’Europe, a fait ce choix, quelque peu influencé par ailleurs par l’histoire de la société créée en 1875. “La société Gueydon a développé le marché des CE dès leur apparition, dans les années 50. Puis quand les détaillants et les grandes surfaces se sont multipliés, nous avons différencié nos forces de vente par segment de clientèle, avec une équipe exclusive pour les CE”, explique Alain Chamard, directeur des ventes de Bigabox, la filiale orientée vers les CE de Gueydon. Aujourd’hui, ils sont une vingtaine de commerciaux à prospecter les CE sur le terrain et dans les salons. Les salons pour la visibilité Les salons sont aussi des rendez-vous majeurs pour qui veut se rendre visible auprès des élus des comités d’entreprise. “Tous les exposants recherchent quelque chose de différent en fonction de leur taille et de leur notoriété, analyse Claire Morin, du Carrefour des CE. Pour l’un, ce sera des contacts de qualité, l’autre en fera une de ses grosses opérations de prospection de l’année, un troisième n’y verra qu’une simple opération de relations publiques. Mais pour tous, c’est un moment privilégié qui correspond bien au comportement des élus des CE, toujours très affectifs et relationnels dans la vente.” Les marques les plus connues, et en premier lieu celles du secteur tourisme-sports-loisirs (premier poste de dépenses des CE avec près de 50 % des budgets en moyenne), reviennent année après année sur les salons parisiens et provinciaux. “Tous les ans, nous invitons nos clients CE à nous rejoindre sur l’un ou l’autre des salons auxquels nous participons, c’est vraiment incontournable pour nous”, indique Patrick Le Bouill, le directeur commercial du Parc Astérix. Le parc réalise 40 % de son chiffre d’affaires total grâce aux comités d’entreprise. “Nous réalisons beaucoup de premiers contacts sur les salons”, explique Yvette Foubert, responsable des points d’accueil Paris Étoile et Opéra de la Macif Île-de-France. “On ne vend généralement pas, mais on note scrupuleusement les coordonnées et les disponibilités de nos interlocuteurs que nous transmettons ensuite à chaque responsable de point d’accueil pour qu’ils les rappellent.” Long est le cycle de vente En moyenne, le cycle de vente avec un CE s’avère long. À la Macif, il n’est pas rare que la vente d’un contrat d’assurance, élaboré sur mesure pour le CE, ne soit pas conclue avant le troisième rendez-vous. “Après avoir prospecté par téléphone pour obtenir un rendez-vous, on rencontre une première fois le secrétaire du CE pour lui présenter nos solutions, puis on peut revenir une deuxième fois, cette fois-ci en séance plénière devant tout le CE. C’est une situation très particulière, où l’on doit pouvoir répondre aux préoccupations de chacun en fonction de sa mission”, détaille Yvette Foubert.La longueur du cycle de vente oblige les entreprises à informer les CE très en amont. Qu’il s’agisse de bons-cadeaux distribués par le CE à l’occasion de la fête des Mères ou de la mise en circulation d’un catalogue auprès des services de l’entreprise pour une prise de commandes groupées, les commerciaux doivent s’y prendre à l’avance. “En février, nous envoyons nos propositions de forfaits élaborés sur mesure, à partir de nos fichiers clients qualifiés au cours de ces dix dernières années de collaboration régulière avec les CE”, précise Patrick Le Bouill.Comme pour toute clientèle, le recours à des fichiers qualifiés s’avère essentiel. Engagée sur cette voie à l’aveugle en 1994 lorsqu’elle a créé sa société de vente directe de lingerie féminine, Charlott’, Véronique Garnodier dispose aujourd’hui d’un fichier client très bien renseigné sur les CE des entreprises de moins de 100 personnes, moins saturés d’information que les autres, qui lui permettent d’organiser des expositions-ventes. “Les conseillères apposent une affiche d’information une dizaine de jours auparavant, en s’acquittant parfois d’un droit d’entrée ou d’un pourcentage sur les ventes réclamées par le CE.” Aisée à mettre en œuvre lorsque l’on dispose déjà d’un fichier bien fourni, cette solution peut se remplacer par le recours à des outils de marketing groupés élaborés par un tiers. La Documentation directe propose ainsi de véhiculer l’image et les produits des entreprises à travers un catalogue conçu comme un magazine, diffusé quatre fois par an. “Nous éditons également, selon la même fréquence, des mailings groupés sur petit format qui vont être sources de contacts ultérieurs pour les commerciaux, toujours grâce aux cartes-réponses”, explique Philippe Goudemant. “S’ils exploitent correctement ces contacts, ils sont assurés de gagner un client pour longtemps.” L’élu du CE dispose de peu de temps : il sera fidèle et bon payeur pour celui qui saura le satisfaire.

“Les actions commerciales de Décathlon à l’adresse des CE sont régionalisées au maximum pour jouer la proximité. Nous privilégions donc les salons qui permettent vraiment de rencontrer les élus, ou encore les invitations à des ouvertures de magasin qui sont des actions bien vues des CE.” Patricia Deudon, responsable clientèle entreprise région Paris-Est et région Centre de Décathlon Direct Pour remédier au manque chronique d’interlocuteur privilégié des comités d’entreprise, Décathlon a créé il y a quatre ans un service de vente à distance de chèques-cadeaux et de produits, organisé en huit régions dirigées chacune par un responsable clientèle. “Outre les salons et les ouvertures de magasin, nous touchons les CE par le biais de mailings, de bus mailings et également de fax mailings. Nous leur proposons des chèques-cadeaux à offrir aux salariés, valables dans nos 210 magasins, ainsi qu’un catalogue de produits pour les arbres de Noël par exemple.” La branche entreprise de Décathlon réalise 20 à 25 % de son chiffre d’affaires par le biais des comités d’entreprise.

“Les comités d’entreprise constituent une clientèle très exigeante sur un marché ultraconcurrentiel, il faut donc être très précis sur l’offre et ne pas les décevoir.” Patrick Planchard, directeur du service groupe de Nouvelles Frontières Les comités d’entreprise représentent l’essentiel de la clientèle du service groupe qui sélectionne un certain nombre de produits adaptés : essentiellement du moyen courrier, sous forme de circuit dense avec peu de temps libre et une prise en charge complète. “Le cycle de vente au CE est assez long, il s’étale sur deux mois en moyenne. Il faut souvent deux rendez-vous de présentation, dont un parfois en commission plénière devant tous les élus, avant de concrétiser au troisième.” Pour Nouvelles Frontières, le téléphone est l’outil de prospection le plus efficace. “Mais il faut aussi assurer une présence régulière sur les salons pour être visible.”

“Nous sommes à l’origine de la création des premiers fonds de solidarité, c’est donc logiquement que nous avons commencé à travailler avec les CE lorsqu’ils ont été institués en 1945.” Christine Billet, responsable de marché économie sociale au Crédit Mutuel Île-de-France Le Crédit Mutuel dispose d’une force de vente constituée de chargés d’affaires dédiés au marché de l’économie sociale, à laquelle les comités d’entreprise sont rattachés. La banque met l’accent sur la fidélisation des clients acquis. “Les élus du CE veulent bénéficier d’un suivi régulier et ont besoin de conseils et d’une assistance pour toutes leurs opérations.” La fidélisation, comme la conquête de nouveaux clients, se fait essentiellement par un contact le plus direct possible. “Pour démarcher des prospects, nous privilégions toujours l’accroche directe par le téléphone à partir de fichiers qualifiés, plutôt que le mailing par exemple. Nous sommes aussi présents sur certains salons consacrés aux comités d’entreprise, et lors de permanences sur les sites des entreprises.”

Quatre règles pour bien vendre aux CE - Fréquenter les salons qui leur sont destinés. L’élu du CE privilégie le contact et le relationnel et engage souvent de ce fait une relation affective. Les salons constituent un moment privilégié pour mettre en œuvre cette relation. - Recourir aux mailings groupés édités à partir de fichiers très bien renseignés pour ne pas être noyé dans la masse d’informations que le CE reçoit quotidiennement. Ne pas hésiter à tester différents éditeurs. - Constituer une force de vente dédiée aux CE, sachant identifier leurs besoins spécifiques et exploiter les outils commerciaux adaptés. - Prévoir des cycles de vente longs. Le face-à-face passe souvent par une rencontre en séance plénière devant tous les élus du CE et les retours de commande sur catalogue peuvent se faire plusieurs mois après la date de mise en circulation.

 
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M.-P. Vega

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