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Les pros de la tuile se disputent les toits de France

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Ils possèdent à eux deux les trois quarts du marché français de la tuile et de la brique en terre cuite. Imerys à l'Est, Terreal sur la côte atlantique. Pour fidéliser sur son terrain et partir à la chasse sur le territoire de l'autre, tous les moyens sont bons.

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« Notre position de leader nous pousse à nous remettre sans arrêt en cause », affi rme Jean-Noël Robelin, directeur commercial de la branche toiture d'Imerys. « Nous dépensons beaucoup d'énergie pour être un challenger très sérieux pour Imerys », renchérit Patrick Destang, directeur commercial et marketing de Terreal. Sur le marché de la tuile, Imerys et Terreal se partagent l'essentiel des ventes. L'avantage est à Imerys, qui détient une part de marché globale de 42 %, avec une prédominance à l'est de la diagonale Le Havre-Nice. Terreal s'octroie, lui, 35 % du marché et est très présent côté Atlantique. Mais c'est région par région que l'affrontement se joue. « Il n'existe pas de tuile nationale, insiste Patrick Destang. Chaque région a sa propre couleur, sa propre forme, ses propres besoins. » Ainsi, selon l'implantation de leurs usines, nos deux acteurs ont chacun des zones historiques d'infl uence où leur part de marché est très forte. Imerys détient, ainsi, plus de 50 % du marché dans l'Est (Meurthe-et- Moselle, Franche-Comté, par exemple). Terreal, lui, est leader en Haute et Basse-Normandie, en Languedoc- Roussillon et en Pays-de-la-Loire.

Structure commerciale : fusionner pour dominer le marché

Les deux protagonistes majeurs de la tuile ont suivi la même stratégie de concentration. « La fusion, en 1999, a apporté une grande souplesse dans notre organisation commerciale », analyse Jean-Noël Robelin. La nouvelle entité, créée à partir de cinq marques indépendantes, fait, dès l'origine, le choix de séparer toiture et structure en deux directions commerciales distinctes. « Il s'agit de deux marchés bien spécifiques, avec des niveaux de maturité différents », observe Pierre-Yves Avy, directeur commercial d'Imerys Structure. En 2001, Terreal naît à son tour de la fusion de trois marques. « Elle a permis d'optimiser nos forces commerciales », détaille Patrick Destang. La nouvelle entité opte pour une seule direction commerciale fédérant toiture et structure. « Cette direction unique a renforcé l'action commerciale et permis une communication plus fluide. Les directeurs régionaux des ventes chapotent l'ensemble de nos activités, plaçant ici un délégué commercial en toiture, là un autre en structure », poursuit Patrick Destang. Une structure commerciale logique quand on sait que Terreal réalise 75 % de son chiffre d'affaires en toiture. Imerys ne souhaite pas, de son côté, révéler la part respective de ses activités structure et toiture. Sa force de vente est toutefois plus importante pour la toiture (avec six régions commerciales, contre cinq en structure), ce qui laisserait présager l'avantage de ce secteur. Imerys et Terreal fonctionnent tous deux selon un système de distribution indirecte. Concernant la taille de leurs forces de vente, l'avantage est à Imerys, qui déploie deux fois plus de vendeurs que Terreal, avec 120 commerciaux, contre 60 pour son challenger. Leurs missions : le référencement des produits chez les revendeurs – des négociants de matériaux de construction – ainsi que la prospection et la fi délisation des prescripteurs que sont les couvreurs, les constructeurs de maisons individuelles et les architectes. Les deux structures pyramidales se ressemblent beaucoup, bien que celle d'Imerys soit plus massive, avec onze régions commerciales comptant sept à dix responsables de secteur. De son côté, Terreal compte deux directions de zones (France Nord et France Sud) et six directions régionales comprenant chacune des équipes de huit à douze vendeurs.

Couvreurs et négociants : garantir la fidélité avant tout

Sur leurs zones historiques d'infl uence, les combattants n'ont qu'un credo : fi déliser à outrance pour éviter les départs à la concurrence. Les clients des fabricants de tuiles sont de trois types : les architectes, les négociants de matériaux et les couvreurs. Terreal a choisi de miser avant tout sur ces derniers. « Ce sont eux qui détiennent le plus de pouvoir de décision sur le choix des matériaux », note Patrick Destang. Chez l'industriel, 60 % du temps de travail des commerciaux est donc consacré aux visites chez les couvreurs et les constructeurs de maisons individuelles. Les délégués commerciaux de Terreal consacrent ainsi aux couvreurs 600 visites par an, sur le millier qu'ils effectuent en tout. « Ils sont le plus souvent seuls, mais effectuent parfois des “tournées duo” avec les commerciaux des négoces », explique Patrick Destang. Les délégués commerciaux du challenger bénéficient, en outre, de campagnes de marketing direct. « Avec la marque Terreal, nous avons poussé le marketing direct », explique Patrick Destang. En 2005, le fabricant recense ainsi une dizaine d'opérations de marketing direct à l'échelle nationale. L'énergie allouée à la prospection est tout aussi grande pour les commerciaux d'Imerys, qui visent dans les mêmes proportions (60 % de leur agenda) les prescripteurs. Le reste de leur emploi du temps est consacré aux négociants. Côté structure, Imerys va sur les chantiers, invitant clients et prospects. « Nous touchons ainsi les entreprises de pose », indique Pierre- Yves Avy. L'industriel a même créé, en 2003, un “club poseurs” regroupant 350 maçons. Chez Terreal, il n'existe pas de club, mais des relations particulières avec les couvreurs les plus fi dèles. « La fréquence des visites sur le terrain est plus grande ; nous échangeons avec eux des informations sur le marché local, nous les formons et organisons pour eux des visites d'usine et des moments plus ludiques (voyages, sports, etc.) », met en avant Patrick Destang. Les deux protagonistes regorgent d'ingéniosité pour séduire les prescripteurs. Terreal a créé des formations interactives sur CD-Rom destinées aux couvreurs. Son challenger a, lui, refait sa documentation (fi ches et ouvrages) au début des années 2000 pour les architectes et les négociants. « Elle constitue un avantage concurrentiel, précise Patrick Destang. Les architectes ne posent jamais le produit ; nos ouvrages sont donc fondamentaux pour leur faire découvrir nos gammes. » Imerys Structure procède de la même façon en développant de la documentation pour chaque typologie de clients architectes. « Nous prévoyons cette année de leur créer un CD-Rom de préconisations, poursuit Pierre-Yves Avy. Il est difficile de fidéliser les prescripteurs. Par ce biais, nous les fidélisons donc plus à un matériau qu'à une marque. »

Conquête : élargir le marché pour progresser

Face à un marché où chaque protagoniste défend bec et ongles son territoire, il faut aller chercher la croissance ailleurs. « Notre salut viendra de la conquête de nouveaux marchés, ne cache pas Jean-Noël Robelin (Imerys). Le potentiel du marché français de la toiture est de 138 millions de mètres carrés. Nous n'en couvrons que 57 millions, d'où une large perspective de développement. » Un potentiel dont Terreal est conscient. Ainsi, selon les zones, la prospection représente 10 % à 40 % du temps de travail de ses commerciaux. « Dans une région où Imerys détient 80 % de parts de marché, aucun revendeur ne poussera spontanément la marque Terreal. Il nous faut donc choisir des négociants influents dans le secteur ciblé car ils deviendront des points d'appui, précise Patrick Destang. D'autre part, nous essayons de convaincre les couvreurs directement. C'est un travail de longue haleine. Il faut jouer sur le produit, mais aussi sur l'affectif ! Une fois les couvreurs convaincus, le commercial conseille aux négociants de travailler avec eux. » Une action qu'Imerys qualifie de lobbying auprès des prescripteurs influents. Ici encore, l'affrontement entre les deux industriels est direct. Et pour doubler les chances d'être référencé chez les négociants, Terreal joue les apporteurs d'affaires pour les couvreurs. « Dans une zone de conquête, nous identifions le couvreur influent et faisons tout pour qu'il soit notre client afin d'encourager les distributeurs à nous référencer », confie Patrick Destang. Sur son activité structure, Imerys s'attaque surtout au Sud et à l'Ouest de la France, chasse gardée de Terreal. « Fin 2005, nous avons étoffé nos forces commerciales dans cette région avec l'embauche de quatre personnes s'ajoutant au seul commercial présent jusqu'alors », précise Pierre- Yves Avy. Les deux fabricants ne craignent donc pas d'innover, aussi bien concernant leurs produits que le travail de leur force de vente. Et le directeur commercial de Terreal de conclure : « Nous innovons sans cesse en marketing direct comme en outils de fidélisation, et c'est la somme de toutes ces micro-innovations qui fait la différence avec notre concurrent. Notre organisation est unique et difficilement copiable. »

Terreal

Chiffres d'affaires 2005 : 385 millions d'euros, dont 75 % consacrés à la couverture. Le chiffre d'affaires a progressé de 28 % entre 2000 et 2005. Effectif : 2 300 personnes au total. En France, 1 700 personnes, dont 60 commerciaux.

Imerys TC

(entité juridique réunissant Toiture et Structure) Chiffres d'affaires 2005 : 450 millions d'euros. Le chiffre d'affaires a progressé de 28 % entre 2000 et 2005. Effectif : 1 796 collaborateurs, dont 120 commerciaux.

 
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Isabelle de Chauliac

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