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Motivation 3/6. Le carburant financier comme moteur de motivation

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Pour fidéliser leurs meilleurs commerciaux, certaines sociétés leur accordent des bonus exceptionnels ; d’autres revoient entièrement leur système de rémunération.

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Historiquement et structurellement, la vente est le domaine de prédilection de la rémunération variable. » Pour Étienne Basse, manager du pôle “commerce et distribution” de la Cegos, pas de doute : « Les commissions, primes et autres formes de bonus sont bel et bien l’un des premiers leviers de motivation chez les commerciaux. » Un avis que partage Jean-Pierre Magot, associé chez Ernst & Young et spécialiste des questions de rémunération : « Pour un vendeur, le variable reste le véritable moteur de la croissance. C’est, de loin, le mode de rétribution le plus proche de l’action commerciale. » Pourtant, quand on se lance dans un examen attentif des feuilles de paie, on constate que la donne a changé. Concrètement, la part du variable s’est, sinon effondrée, du moins nettement érodée depuis 2001. « Il faut y voir l’effet direct et immédiat des difficultés économiques », affirme Laurent Termignon, consultant chez Hewitt, cabinet-conseil en management et ressources humaines. Bien sûr, comme le souligne Philippe Perret, directeur exécutif de Michael Page, « les disparités sectorielles sont importantes ». Pour étayer ses propos, le porte-parole du cabinet de chasse de têtes et de recrutement livre ces quelques chiffres : « Les niveaux de rémunération sont à peu près constants dans les secteurs de la grande consommation et de la grande distribution, car la consommation des ménages s’est maintenue jusqu’à aujourd’hui. La baisse a été plus sensible dans l’industrie, mais elle reste modeste, car ce secteur était traditionnellement peu “consommateur” de variable. En revanche, les commerciaux de la high-tech, qui percevaient, bien souvent, la moitié de leur salaire sous forme de bonus, ont été touchés de plein fouet par la conjoncture. Dans ces entreprises, les salaires des commerciaux ont pu reculer de 30 à 40 %. »

Éviter les chutes trop brutales

Compte tenu de cet essoufflement du variable, comment parvenir à utiliser le carburant financier comme moteur de la motivation des vendeurs ? Ici, deux stratégies s’affrontent. D’un côté, il y a les entreprises qui, pour éviter les départs en chaîne, cherchent à empêcher tout déclin trop brutal des rémunérations. Mais attention : pragmatisme économique oblige, ces faveurs ne concerneront que les meilleurs éléments. « Certaines augmentent spontanément le salaire de base de leurs vendeurs émérites », observe Laurent Termignon. « D’autres préfèrent faire le dos rond et attendre que les commerciaux viennent vers elles. Mais après négociation, elles finissent par accepter de rehausser le fixe des collaborateurs les plus prometteurs. » À l’opposé de cette stratégie de fidélisation des as de la vente, certaines organisations se montrent intraitables sur les augmentations du fixe. Comme le souligne Laurent Termignon, « ce genre d’attitude est soutenue par un discours très cartésien, du type : “Quand les affaires sont bonnes, vous en profitez ; quand elles déclinent, vous êtes donc, logiquement, amenés à en assumer les conséquences.” » Toutefois, les experts mettent en garde les managers contre un excès de rigorisme. « Il est important de sécuriser, malgré tout, ses meilleurs équipiers », martèle le porte-parole de Hewitt. Pour satisfaire à ces deux nécessités quelque peu antinomiques – éviter toute hémorragie de forces vives mais adopter la rigueur budgétaire qui s’impose – un nombre croissant d’employeurs associent les bonus “classiques” à des bonus à moyen ou long termes. C’est la formule que préconise Jean-Pierre Magot (Ernst & Young) : « À côté des bonus annuels, on met en place des bonus à trois ans, qui permettent d’inscrire la performance des commerciaux dans la durée. Ainsi, il est plus aisé de leur faire accepter la règle du jeu, qui veut qu’en période de morosité, un vendeur voie ses revenus fléchir à court terme pour reprendre de la vigueur à long terme, les bonus à moyen terme permettant de modérer ces fluctuations. »

L’heure est à la complexité

Cette cohabitation des primes à court, moyen et long termes concourt à la complexité des “nouveaux” systèmes de rémunération des forces de vente. D’ailleurs – et tous les experts le notent – l’heure est à la sophistication des mécaniques salariales. « Auparavant, explique Étienne Basse (Cegos), l’indicateur clé de performance était le montant des commandes, sur lequel était indexé le variable. Mais aujourd’hui, dans bien des secteurs, les commerciaux s’occupent davantage de revente que de vente. Ils assument de nouvelles missions : merchandising, conseil, veille concurrentielle, etc. Autant de tâches qu’il est impossible d’évaluer sur des critères exclusivement quantitatifs ! » D’où l’émergence de paramètres qualitatifs dans les systèmes d’attribution de bonus. Autre tendance lourde : la recherche de cohérence entre rétribution et stratégie d’entreprise. « Les sociétés cherchent à faire coïncider les systèmes de rémunération avec leurs objectifs prioritaires », reprend Étienne Basse. Ainsi, une société qui cherche, en temps de crise, à recruter de nouveaux clients attribuera volontiers une prime exceptionnelle à ses meilleurs “chasseurs”. Et elle le fera d’autant plus aisément que les systèmes d’information autorisent, aujourd’hui, un suivi exhaustif et précis de l’action terrain. Enfin, la plupart des managers ont compris que la performance commerciale n’était pas le seul fait des vendeurs, mais qu’elle était, au contraire, largement soumise à des paramètres exogènes : marché, concurrence, produits, actions marketing, etc. Une prise de conscience qui a, elle aussi, influencé les feuilles de paie : celles-ci intègrent de plus en plus fréquemment une dimension collective. Et développent, incidemment, l’esprit d’équipe des collaborateurs. Un autre facteur de motivation...

À retenir

- Le variable reste un levier essentiel de motivation des commerciaux. En période de ralentissement économique, il faut donc éviter que leur rémunération ne s’effondre brutalement. - Pour motiver et fidéliser ses collaborateurs en dépit de ce contexte, il est possible d’associer des bonus classiques à des bonus à moyen ou long termes. - D’une façon générale, les systèmes de rémunération tendent, aujourd’hui, à se complexifier. Ils deviennent le reflet des stratégies d’entreprise.

 
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Stéfanie Moge-Masson

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