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Multicanal : optez pour une distribution plurielle

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Entre vente directe, à distance et indirecte, le cœur des entreprises balance. Mais elles concilient souvent les trois, tout en spécialisant chaque canal.

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C’est en usant de plusieurs canaux que l’entreprise peut, le plus aisément, couvrir la totalité de son marché, lance Gérard Aubin, directeur à la Cegos, en charge des stratégies de commercialisation. Le plus aisément, c’est-à-dire avec le plus de chances de succès et sans investir des fortunes », précise l’expert. De fait, pour développer pleinement son volume d’affaires, l’entreprise doit toucher un maximum de clients. Or, aucun canal ne s’adresse à lui seul à la totalité du marché. » Seule une stratégie multicanal peut, dès lors, répondre à ce rêve d’omniprésence commerciale. De plus – autre atout de ce choix stratégique – le multicanal offre à l’entreprise les moyens de faire face aux aléas conjoncturels. « Certains réseaux s’en sortent plus ou moins bien selon les fluctuations du marché, observe Alain Régnault, directeur commercial de Fortis Assurances. Dans un contexte difficile, comme c’est le cas actuellement, les réseaux salariés prennent des parts de marché aux courtiers et agents. Mais, en temps de reprise, la situation a tendance à s’inverser. Ceci compense cela… »

Une meilleure “saturation” du marché

Mais il est primordial d’organiser la mise en concurrence des canaux, de les spécialiser en définissant le territoire prioritaire de chacun. « Cela permet d’augmenter leur performance commerciale, affirme Xavier Gazay, partner chez Accenture. En effet, chaque canal, voire chaque réseau, va pouvoir se concentrer sur une cible. Au final, l’entreprise obtiendra une meilleure “saturation” du marché. » En outre, poursuit l’expert, la spécialisation préserve l’image de marque : « Un canal spécialisé est toujours plus professionnel et plus crédible aux yeux du client final. » Et de citer les produits technologiques ou complexes, comme l’assurance vie. « Ce type de produit nécessite une expertise en analyse patrimoniale et la maîtrise de techniques de vente très spécifiques. En les réservant à leurs réseaux salariés, les compagnies s’assurent de maintenir un niveau satisfaisant de prestation. » C’est d’ailleurs l’option retenue par AGF : « Nos réseaux salariés sont spécialisés dans un métier : la santé, la gestion patrimoniale, la vie, etc., explique Nicolas Schimel, directeur commercial d’AGF Vie. Cela nous garantit un service optimal. » Même démarche chez Compaq : « Nos solutions complexes, qui nécessitent des formations et un agrément particuliers, ne sont distribuées que par des revendeurs spécialisés dans les produits à forte valeur ajoutée », témoigne Jean-Claude Ortiz, directeur du réseau commercial du constructeur informatique. La réussite de la stratégie multicanal repose donc sur la capacité de l’entreprise à délimiter le champ d’intervention de chaque groupe d’acteurs. Pour cela, aucune règle universelle, mais quelques principes valables en B to B. Selon Gérard Aubin, de la Cegos, « la vente directe convient bien aux grands et très grands comptes. Elle évite la “friture” générée par la présence d’intermédiaires entre l’entreprise et ses clients stratégiques. » C’est aussi l’avis de Jean-Claude Ortiz, de Compaq France : « Nous traitons les très grands comptes en direct, du moins lorsque leur demande concerne des solutions à forte valeur ajoutée. » Dans un tel schéma, les coûts salariaux supportés par le fournisseur sont amortis par l’importance des contrats.

La vente indirecte pour les PME et TPE

Si l’entreprise a tout intérêt à conserver la gestion de ses grands clients, elle doit se garder d’en faire autant pour les PME, a fortiori pour les TPE. « C’est le genre de public qu’il convient de toucher par l’intermédiaire de réseaux », assure le porte-parole de la Cegos. La vente indirecte permet de couvrir un secteur en profondeur, même si le public ciblé est dispersé géographiquement. « Au lieu d’un point de vente monomarque, l’entreprise s’offre une présence dans de nombreux réseaux multimarques. Elle adapte ainsi son offre aux diverses typologies de clientèle visées par chaque réseau : c’est le principe du trade marketing. » Autre argument de poids : la rémunération des revendeurs est indexée sur le business qu’ils génèrent, et l’entreprise “variabilise” donc ses coûts. Enfin, les distributeurs prennent en charge les postes coûteux : dégroupement des produits livrés, facturation et encaissement, recrutement et formation du personnel, communication à l’échelle locale, etc.

Vente à distance : une aide pour l’indirect

Reste à définir le périmètre d’intervention de la vente à distance, par téléphone, par catalogue ou encore sur Internet, réalisée avec ou sans intermédiaire, sociétés de télévente ou places de marché électroniques, par exemple. « Ici, le client réagit à une sollicitation active de l’entreprise », analyse l’expert de la Cegos. De fait, ce canal se nourrit d’actions de marketing direct : c’est parce qu’il a reçu une offre promotionnelle d’achat ou l’appel d’un call center que le prospect est devenu client. Un outil qui, outre la vente pure, vise un objectif d’enrichissement du fichier et de conquête de nouveaux clients. « Ce canal vient donc en appui des autres, conseille Gérard Aubin. Loin de concurrencer les réseaux indirects, qui l’accusent trop souvent de leur prendre des parts de marché, il leur apporte, au contraire, un surcroît de business. » Il appartient donc aux entreprises d’en faire la démonstration en usant d’outils de création de trafic, comme les bons de réduction, qui permettent aux revendeurs d’identifier l’origine de leurs clients. Dans ces conditions, si les réseaux indirects sont convaincus de l’apport des ventes à distance et si, de leur côté, les distributeurs indirects ont accès à une “liste noire” de grands comptes formant le domaine réservé des ventes directes, alors l’entreprise a jeté les bases d’une concurrence saine et stimulante entre canaux. Mais elle devra préserver un niveau acceptable de tensions intercanaux. « Elle joue ici un rôle décisif », conclut Gérard Aubin, qui délivre deux derniers conseils : « Primo, lorsque vous réalisez une vente en direct, détournez vers l’indirect le service après-vente et les ventes complémentaires. Secundo, faites en sorte que chaque canal ait intérêt, financièrement, à demeurer dans son champ d’action légitime. » Un revendeur sera moins tenté d’aller séduire un grand compte s’il sait que sa rémunération sera décevante au regard de l’effort fourni !

Témoignage

Jean-Claude Ortiz, directeur du réseau commercial de Compaq France « À chaque cible correspond un circuit de commercialisation » Chez Compaq, multicanal et multiréseau ne sont pas de vains mots ! Entre la vente directe et la vente indirecte, qui recouvrent elles-mêmes diverses réalités (distribution grand public, spécialisée ou non, distribution professionnelle, comprenant les grossistes, les grands revendeurs, les revendeurs à valeur ajoutée, etc.), la filiale hexagonale du constructeur informatique jongle avec les circuits de commercialisation. « Nous avons fait le choix de délimiter, du moins dans les grandes lignes, le champ d’intervention de chacun d’eux. » Premier critère : la nature du client. « En France, les PME achètent volontiers via le réseau des revendeurs de proximité. Nous touchons ces distributeurs par l’intermédiaire des grossistes. A contrario, nous vendons aux grands comptes par le biais des grands revendeurs spécialisés. » Une exception, toutefois : les très grandes entreprises, du moins lorsque leur demande concerne des solutions complexes. « Dans ce cas, nous vendons en direct. » Mais Compaq prend aussi en compte la nature même de l’offre. « Certains produits, dits “à distribution ouverte” sont accessibles à tous types de revendeurs. D’autres, plus complexes, sont réservés aux revendeurs spécialisés dans les solutions à valeur ajoutée. C’est un principe transparent, donc admis et respecté par tous. »

Témoignage

Alain Régnault, directeur commercial de Fortis Assurances « Le multicanal suppose l’existence d’une charte de bonne conduite » Chez Fortis Assurances cohabitent quatre canaux de commercialisation : un réseau salarié constitué de commerciaux intégrés, des courtiers indépendants et multimarques et des agents généraux indépendants, mais monomarques. Enfin, la compagnie a noué des partenariats avec la Caixa et certaines banques d’affaires. « La concurrence entre canaux ? Elle s’organise autour de quelques principes de base, comme la règle d’antériorité : un client“appartient” au canal qui l’a conquis. » Autre précepte respecté par tous : le maillage du territoire. « Le réseau salarié couvre plutôt les grandes agglomérations, tandis que les agents sont installés dans les villes moyennes. » Enfin, si les produits sont rigoureusement identiques, ils portent des noms différents selon les canaux. « Si un client appelle à propos de tel produit, nous savons quel canal l’a, originellement, démarché. »

Avis d’expert

Xavier Gazay, partner chez Accenture « Le client est avisé. Ne tentez pas de l’abuser ! » « Attention aux conséquences du multicanal ! Si elles n’y prennent pas garde, les entreprises peuvent se mettre à dos leurs clients finaux. » Pour Xavier Gazay, le multicanal est un excellent outil, qui doit toutefois être manié avec précaution. « En matière de politique tarifaire, par exemple, il faut veiller à ce que les distorsions ne soient pas trop criantes lorsque les produits sont commercialisés sous différentes marques. Le client est de plus en plus averti : lorsqu’une entreprise fait varier le prix de ses produits selon les canaux, elle s’expose à ce que le client s’en rende compte et la sanctionne. » Pour l’expert, afin d’éviter cet écueil, nombre d’entreprises spécialisent chacun de leurs canaux. « Le client s’y retrouve : il est mieux servi, et un canal concurrent ne peut lui faire la même offre à un meilleur prix ! »

Repères

- Un canal est un système de distribution homogène. Il existe trois grands canaux de distribution : la vente directe, la vente à distance et la vente indirecte. - Dans un schéma de vente directe, l’entreprise est en contact physique avec sa cible finale – entreprises ou consommateurs – et vend ses produits ou services sans aucun intermédiaire. - Dans le cas de la vente indirecte, l’entreprise commercialise son offre par l’intermédiaire de réseaux externes. - La vente à distance s’opère de façon directe, mais la cible finale est contactée par téléphone (télévente), courrier (mailing) ou Internet.

 
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Stéfanie Moge-Masson

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