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Paris/province : l’alternance plutôt qu’un aller sans retour

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Hier, on faisait ses “classes” à Paris. Puis, un jour, on se laissait séduire par la vie en province. Les cadres mettaient leur expérience à profit dans une structure, séduite par le parcours de ces candidats parisiens. Si cela est toujours en partie vrai, en revanche, d’autres motivations sont apparues. Partir en province n’est plus une fin en soi.

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Les cadres qui, après s’être fait la main en région parisienne, intègrent une entreprise basée en province sont encore souvent motivés par l’attrait d’une qualité de vie meilleure, ou par un “retour au pays”. Monique Lhuilier, qui dirige deux cabinets de recrutement basés à Vannes et Lorient (Morbihan), le vérifie au cours des entretiens qu’elle réalise. Un sentiment que partage Anne Hiribarrondo, consultante à l’Apec de Poitiers : « Très clairement, la motivation des candidats parisiens pour des postes en province relève du confort de vie, le plus souvent d’ailleurs pour leur famille plutôt que pour eux-mêmes. » Si la volonté de privilégier le confort de vie prédomine encore dans l’esprit des candidats à l’installation en province, ils sont toutefois de plus en plus nombreux à être attirés par les conditions d’embauche et de travail. « Pour séduire les cadres, les entreprises basées en province peuvent proposer des compensations, en terme de rémunération, de responsabilités, d’autonomie ou de considération en intégrant le directeur commercial dans la stratégie de l’entreprise », énumère Florian Mantione, président du cabinet de recrutement Florian Mantione Institute. Saisir les opportunités “S’expatrier” en province peut donc tout simplement répondre au désir de gérer au mieux sa carrière, de saisir les opportunités, qu’elles soient en province ou à Paris. Pour Florian Mantione, c’est d’ailleurs aujourd’hui le seul argument qui vaille. « Même si les gens l’expriment encore de la sorte, la séparation Paris/province est dépassée, d’autant plus avec la montée en puissance de la mondialisation et d’Internet. Le candidat doit penser carrière et opportunités, et raisonner entreprise et non situation géographique. » La prépondérance de ce critère de localisation Paris/province s’estompe d’autant plus pour les managers commerciaux qu’un directeur commercial basé à Paris passe, dans la plupart des cas, trois jours par semaine en province et inversement. Un candidat peut bien entendu planifier sa carrière à l’avance, mais il doit en fin de compte se laisser guider par ses rencontres, être réactif et rester attentif aux opportunités qui se présentent à Paris et en région parisienne, mais aussi en province, dans les DOM-TOM et même à l’étranger. « Il ne doit pas considérer qu’il part en province, mais plutôt qu’il intègre telle ou telle entreprise, basée en province, insiste Florian Mantione. Certes, la localisation de l’entreprise est l’un des critères de choix du job, mais elle ne doit pas conditionner la décision de postuler. » Toute la question est ensuite de gérer les contraintes, notamment sur le plan familial – enfants, conjoint –, qui peuvent, sinon freiner, du moins orienter les démarches. Confort de vie de l’ensemble de la famille ou gestion de carrière : ces deux arguments font bouger les cadres. En revanche, il est un argument aujourd’hui totalement obsolète : celui qui tend à assimiler la vie professionnelle en province à un avant-goût de retraite. « Il ne faut en aucun cas envisager la province comme la possibilité de se planquer ! », affirme Florian Mantione. Les candidats à l’installation en province qui raisonnent de la sorte doivent s’attendre à des déconvenues. Les cadres “SDF” La province n’est plus un havre de paix, tant et si bien que si, hier, les cadres s’installaient définitivement en province après avoir travaillé dix ou quinze ans en région parisienne, on constate aujourd’hui qu’ils n’hésitent plus à partir et à revenir pour éventuellement repartir à nouveau. Un candidat qui a passé cinq ans dans une entreprise basée en province n’effraie nullement un recruteur parisien. L’aller sans retour d’hier a fait place à une réelle alternance. « Je rencontre un nombre croissant de cadres de 40-45 ans qui, après avoir passé un certain temps en province, retournent travailler à Paris », observe Anne Hiribarrondo. Dans ce cas-là, il arrive que la famille ne suive pas. Ces cadres passent la semaine à Paris et rentrent chez eux le week-end. On les surnomme “cadres SDF”, chez eux uniquement les samedi, dimanche et jours fériés. « Le risque, pour l’entreprise qui emploie ce type de collaborateurs, poursuit la consultante de l’Apec, est de ne pas pouvoir compter sur eux à 100 %. » Ces cadres “SDF” ont, assez logiquement, plus de difficultés que les autres à développer un sentiment d’identité et d’appartenance à l’entreprise. Mais souvent cette situation ne dure qu’un temps. « Ils font ce va-et-vient deux à trois ans, guère plus, et gèrent de Paris leur retour en province. Un style de vie choisi ou non, que favorisent les transports, l’aménagement des postes de travail ainsi que l’apport des nouvelles technologies de communication », conclut Anne Hiribarrondo.

À bas les idées reçues ! En quittant Paris pour la province, j’ai augmenté mon salaire de 20 %. » Richard Ouaknine, directeur des ventes de Delta protection Sud En octobre dernier, Richard Ouaknine – 38 ans, marié, un enfant – a quitté Paris et la société Xerox pour s’installer à Montpellier, où il occupe chez Delta protection Sud, PME spécialisée dans la fabrication et l’installation de matériel de sécurité, le poste de directeur des ventes. « Un choix qui repose à 70 % sur des motifs professionnels et à 30 % sur des raisons personnelles. Mon ancien employeur envisageait une réorganisation qui ne me convenait pas, j’ai cherché des opportunités, j’ai saisi celle qui me convenait. » Richard Ouaknine n’en est pas à son coup d’essai des transferts Paris/province. Après un début de carrière dans les assurances à Paris, il est muté à Toulouse, puis fait un détour par Monaco avant de revenir sur la capitale. Les recruteurs sont-ils réticents vis-à-vis des candidats provinciaux ? Il assure que non. « Pour un poste de manager commercial, ce qui compte, c’est la croissance du chiffre entre la prise de fonction et le départ, l’effectif et l’activité gérés. Peu importe l’endroit où l’on a mené à bien cette mission. » Pour Richard Ouaknine, la scission Paris/province n’a plus lieu d’être : « En province, il existe de belles PME-PMI qui ont les moyens de payer très correctement leurs collaborateurs et de leur donner une vraie marge de manœuvre. » L’idée, couramment répandue, selon laquelle il faut être moins gourmand lorsque l’on s’installe en Province est bel et bien dépassée !

« Les prétendants à un poste en province doivent être patients. » Monique Lhuilier, directrice du cabinet Monique Lhuilier, basé à Vannes et Lorient, spécialisé dans le recrutement et les bilans de compétences « Les candidats à l’installation en province doivent se mobiliser un à deux ans en avance, se faire connaître, réactiver leurs réseaux s’ils ont des attaches, mener une véritable stratégie de veille d’opportunités. Certains profitent de leur passage dans la région pendant leurs vacances pour poser des jalons, prendre des contacts. Au sein du cabinet, nous leur proposons de rencontrer des chefs d’entreprises avec qui nous sommes en contact permanent, même s’ils n’ont pas de postes à pourvoir. Les entreprises qui recrutent un directeur commercial ont une préférence pour les candidats de 30 à 40 ans, titulaires d’un diplôme d’école de commerce. Au-delà de 45 ans, la démarche est plus problématique. Les entreprises attendent des candidats parisiens une grande réactivité, un sens critique développé, une résistance au stress et une capacité à être vite opérationnels. Le risque pour ces ex-Parisiens est de vouloir bousculer trop vite les procédures et l’organisation. »

 
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Anne-Françoise Rabaud

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