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Yves Mouriès, p-dg d’Aigle : L’artisan d’une spectaculaire envolée

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Des ventes en hausse de 50 % depuis trois ans, un réseau de magasins en plein essor : Aigle a pris son envol. Désormais, entouré de ses équipes, son p-dg travaille à consolider ces acquis.

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Action Commerciale— Aigle a connu une forte croissance de son chiffre d’affaires, passant de 81,5 millions d’euros (534,6 millions de francs) en 1997, à 119,5 millions d’euros (783,9 millions de francs) en 2000. Comment êtes-vous parvenus à cette performance ?

Yves Mouriès

— Nous avons investi dans le développement de notre réseau de succursales : nous possédons aujourd’hui seize magasins en propre, dont trois à l’étranger, à Londres et Düsseldorf. Cet effort, important en termes financiers, puisqu’un magasin coûte en moyenne 750 000 euros (4,9 millions de francs), nous a permis de renforcer la notoriété de notre marque et de faire connaître nos produits et notre concept de magasin. Donc de développer notre réseau de revendeurs.

Comment se structure ce réseau ?

Il compte désormais 33 concessions à l’enseigne Aigle, 15 corners de grands magasins et quelque 3 000 points de vente multimarques, parmi lesquels des points de vente “nature” (jardineries, distribution rurale, etc.), des spécialistes (magasins de sport, d’équitation, de nautisme, chausseurs, habilleurs, etc.) et enfin des grands comptes (VPC et centrales d’achats). Chez ces indépendants multimarques, nous avons également cherché à favoriser l’implantation de corners : nous en dénombrons 200 à l’heure actuelle.

Avez-vous l’intention de réduire ce portefeuille de clients, ce qui vous permettrait d’intensifier vos relations commerciales avec chacun d’entre eux ?

En effet, notre cible est extrêmement atomisée. C’est pourquoi nous avons décidé de réduire notre portefeuille de clients de 3 000 à 2 000 comptes environ. Notre objectif est de travailler mieux, avec moins de points de vente. Pour ce faire, nous avons mis en place une stratégie de distribution sélective, avec un système de minima d’ouverture de compte, de minima de commandes, etc. Ce chantier est d’autant plus crucial, à nos yeux, que nous avons acquis, en décembre 1999, Line 7 (marque de chaussures de randonnée, ndlr), présente chez plus de 1 000 clients. Nous avons donc hérité d’une multitude de nouveaux clients de taille modeste, chausseurs et magasins de sport.

Quels bénéfices avez-vous retiré de cette acquisition ?

La fusion des gammes de produits Aigle et Line 7 nous a permis d’étoffer considérablement notre portefeuille de produits, et d’asseoir nos positions sur le segment de marché de la chaussure de randonnée technique, les ex-produits Line 7 étant désormais cobrandés “Line 7 d’Aigle”. Mais cette fusion a également offert à notre force de vente – qui est la même pour Aigle et Line 7 d’Aigle – la possibilité d’entrer chez certains revendeurs spécialistes de la montagne, comme les magasins de sport des stations de sports d’hiver.

Quels sont vos objectifs prioritaires, maintenant que votre réseau de succursales a atteint sa vitesse de croisière ?

En effet, notre réseau en propre est, désormais, pratiquement établi : nous envisageons seulement d’ouvrir boutique à Toulouse, Paris et, bien entendu, à l’étranger. Mais, surtout, nous souhaitons nous implanter dans de nouvelles villes par le biais de concessions. Ces boutiques Aigle, propriété de commerçants indépendants et ne vendant que des produits de la marque, disposent de l’exclusivité de l’enseigne dans leur ville, et ne nous versent, en échange, ni droit d’entrée ni royalties. Sur l’exercice 2000, nos concessions – au nombre de vingt-huit – pesaient quelque 7 % du chiffre d’affaires, quand nos succursales en représentaient près du quart. Depuis, nous avons ouvert sept nouvelles concessions. Mais il nous reste beaucoup de chemin à parcourir.

Vous avez souhaité structurer votre force de vente par types de clientèle et de potentiel de chiffre d’affaires. Pour quelles raisons ?

En effet, les concessions et corners de grands magasins, les succursales et enfin, les indépendants multimarques, sont visités par trois forces de vente distinctes, chacune étant chapeautée par un responsable commercial. Nous pensons que la démarche commerciale diffère fondamentalement selon le type de public auquel on a affaire. Plus que d’un discours commercial, les concessions ont besoin de conseils, de suivi et d’une véritable assistance en matière, notamment, de merchandising, de référencement, d’informatique, etc. D’ailleurs, lorsque les concessions étaient confiées à la même force de vente que les autres points de vente, les représentants avaient tendance à passer beaucoup de temps avec elles – une concession représente un chiffre d’affaires annuel de plusieurs millions de francs – au détriment des “petits” clients.

Précisément, quelles sont, selon vous, les qualités d’un bon vendeur ?

Un bon commercial fait son chiffre, atteint ses objectifs, mais toujours dans l’optique du client. Concrètement, il conseillera le revendeur dans ses achats, l’orientera vers les produits qui correspondent le mieux au positionnement de sa boutique, à la demande de sa clientèle. En résumé, il agira dans le souci d’aider son client à faire son métier de commerçant, et ne considérera qu’une vente n’est réussie que quand le produit s’est bien revendu auprès de la clientèle finale. D’où l’importance des outils d’aide à la vente que sont le matériel de PLV, les corners, bref, le merchandising.

Poussez-vous la démarche jusqu’à communiquer en direct avec le consommateur final afin de générer du trafic dans les points de vente ?

Nous réalisons d’ores et déjà des mailings sur le fichier des concessions, qui comprend quelque 100 000 adresses, afin d’expédier notre catalogue saisonnier aux clients de ces boutiques. Mais nous venons de faire appel à l’agence Eccla, afin de monter des opérations de marketing direct sur la base de notre fichier consommateurs, que nous allons enrichir et qualifier à cet effet. Concrètement, nous allons former nos concessionnaires afin qu’ils incitent leur clientèle à remplir un questionnaire qui sera mis à sa disposition, sur le lieu de vente. Grâce à ces données, nous serons en mesure de créer des cartes de fidélité avec, à la clé, des bons d’achat, des propositions de services (réservation de produits, retouches gratuites, etc.), et même des offres couplées avec des magazines.

Vous êtes connus et reconnus pour vos bottes en caoutchouc, et votre activité est donc, par essence, saisonnière. Comment parvenez-vous à compenser ce phénomène ?

Nous réalisons aujourd’hui 45 % de nos ventes annuelles au cours du premier semestre. Il y a quelques années, la saison printemps-été pesait bien moins lourd, sur la globalité de notre chiffre. Mais, depuis, nous avons développé des gammes estivales – vêtements et chaussures de loisirs, de randonnée ou de nautisme – et donné à nos commerciaux des objectifs semestriels. Ce qui nous a permis de lisser notre activité sur les douze mois de l’année.

Quelles autres orientations avez-vous prises concernant le système de rémunération de vos représentants ?

Nous avons pratiquement abandonné les commissions au profit d’un système de primes sur objectifs. Ceux-ci sont de deux ordres : quantitatifs, c’est-à-dire liés au montant des commandes de présaison, et qualitatifs, c’est-à-dire liés aux ouvertures de comptes, de corners, etc. Ce système nous a permis de favoriser les prises d’ordre précoces plutôt que la facturation, et de mieux fidéliser nos collaborateurs.

Aigle a décidé de suspendre toute participation aux salons professionnels français. Pourquoi une telle mesure ?

Étant donné l’étendue de notre offre, qui intéresse les professionnels du jardinage comme ceux du nautisme, les boutiques d’équitation mais aussi les habilleurs sportswear, nous étions amenés à participer à une multiplicité de salons tout au long de l’année. Notre participation aux seuls salons français nous coûtait plus de 300 000 euros (2 millions de francs environ) par an. Or, compte tenu de la visibilité que nous avons acquise grâce à notre réseau, nous pouvons aujourd’hui nous passer de ce média. Nous avons préféré investir dans l’action commerciale, et privilégier, d’une part, les grandes manifestations hexagonales grand public, qui nous semblent incontournables en terme de notoriété, et, d’autre part, les salons professionnels étrangers, qui restent, à nos yeux, la meilleure façon d’aborder un nouveau marché extérieur.

Parcours

4 entreprises en 30 ans _ 1972 Après avoir étudié le droit des affaires, Yves Mouriès entre au service “sociétés” de Fidal, cabinet spécialisé dans le conseil juridique et fiscal, où il passe quatre années. _ 1976 Il intègre le groupe Phocéenne de Métallurgie en tant que directeur de filiale. _ 1980 Il devient p-dg de Mobydick, marque de vêtements de mer. _ 1989 Prend la présidence d’Aigle.

Aigle

Une gamme exhaustive dans l’équipement “nature” Marque d’équipement de la personne ancrée dans l’univers de l’outdoor et de l’aventure, Aigle a affiché, en 2000, un chiffre d’affaires de 119,5 millions d’euros (784 millions de francs), en croissance de 8,5 %, et un résultat net part du groupe de 3,4 millions d’euros (22,3 millions de francs). Au cours du premier trimestre 2001, les ventes se sont établies à 34,4 millions d’euros (225,7 millions de francs), en hausse de 8,2 % par rapport au premier trimestre 2000. Aigle s’adresse aux amateurs d’activités sportives dites “de nature” : randonnée, nautisme, chasse, pêche, équitation. Connue pour ses fameuses bottes, qui représentent aujourd’hui 26 % de son activité, l’entreprise a considérablement étoffé son offre, et commercialise des vêtements de loisirs (45 % du chiffre d’affaires), des chaussures (25 % du chiffre), et même des accessoires, développés sous licence : montres, lunettes, sacs, bagages, chaussettes. Distribuée dans ses boutiques propres, dans ses concessions et chez de nombreux détaillants indépendants, la griffe possède seize succursales, dont trois à l’étranger (Londres et Düsseldorf). Elle est aussi présente dans un réseau de trente-cinq concessions exclusives (propriété de commerçants indépendants), ainsi que dans 3 000 points de vente multimarques : grands magasins (Printemps, Galeries Lafayette, Bon Marché, Samaritaine, BHV), enseignes sport (Decathlon, Go Sport, Le Vieux Campeur, Intersport, Sport 2000, TDS, Sport Leader, Citadium, Andaska), VPC (La Redoute, Camif) et distribution “loisirs nature” (Gamm Vert, Point Vert, Truffaut). En outre, l’entreprise réalise 47 % de ses ventes à l’export : Allemagne, Grande-Bretagne, Belgique, Suisse, Portugal et Japon.

 
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Propos recueillis par Stéfanie Moge-Masson

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