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« L’informatisation des commerciaux : une priorité en phase d’acquisition de clients »

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Manager, responsable du secteur gestion de la relation client chez KPMG Consulting, Frédéric Doumenc est un spécialiste de l’informatisation des forces de vente. Depuis plusieurs années, il observe et accompagne ces projets dans les plus grandes entreprises françaises. S’il constate une plus grande maturité de ce marché, il remarque aussi que le taux d’échec reste plus important que pour les autres types de projets informatiques.

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Les commerciaux français sont-ils enfin équipés de logiciels de gestion d’affaires ? Frédéric Doumenc : Ce marché est assurément arrivé à maturité, je le constate depuis environ un an. Autrement dit, les entreprises qui doivent opérer des choix informatiques préfèrent en effet équiper leurs équipes commerciales plutôt que le back office avec des outils du type ERP (enterprise ressource planning). Ceci dit, cette tendance est à nuancer fortement selon le segment de marché. Les grands comptes ont ainsi tous au moins entendu parler d’automatisation des forces de vente, surtout au niveau des directions opérationnelles (informatique et commerciale), un peu moins au niveau des directions générales. Ces grandes entreprises sont donc sensibilisées à la problématique de l’informatique commerciale. Et lorsqu’elles ne sont pas équipées, ces sociétés ont au minimum déjà lancé un projet et fait le choix d’un outil. La situation n’est-elle pas la même dans les PME ? Non, pas du tout ! On en est même encore très loin. La demande des petites ou moyennes entreprises reste limitée. Il faut dire que l’offre est peu adaptée à ces PME, car le ticket d’entrée demeure élevé. Ces entreprises ont donc minoritairement équipé leurs commerciaux de solutions informatiques, et les investis-sements en la matière sont encore concentrés sur le back office avec des logiciels pour la production, la bureautique, la comptabilité. On note cependant, même dans les PME, une prise de conscience progressive de l’intérêt d’un outil d’informatisation spécifique aux vendeurs. Comment expliquez-vous cette prise de conscience ? C’est très simple : les entreprises perçoivent enfin le client comme leur principale source de revenus, elles ont compris qu’elles doivent recruter et fidéliser. Elles n’ont plus le choix : c’est l’environnement très concurrentiel dans lequel elles évoluent qui leur impose cela. Or, pour réussir à mieux recruter et fidéliser, à être plus productives, elles doivent nécessairement se doter d’outils informatiques dont c’est précisément la raison d’être. Cela signifie-t-il aussi que, pour être efficace, un projet d’informatisation des forces de vente doit prendre place dans un projet plus large de gestion de la relation client ? Une chose est certaine : l’infor-matisation des commerciaux doit absolument être précédée d’une réflexion stratégique sur le client. Bien trop souvent, les entreprises veulent informatiser pour informatiser, sans savoir pourquoi. C’est absurde. Avant de vouloir équiper ses commerciaux, il faut se poser des questions essentielles : qui sont mes clients clés ? Comment puis-je réorganiser ma force de vente en fonction de cibles de clientèle ?, etc. C’est indispensable pour assurer la réussite du projet. Une entreprise qui souhaite développer un projet de gestion de la relation client doit-elle commencer par informatiser sa force de vente ? Pas forcément. Lorsqu’elle a mené sa réflexion stratégique sur le client, elle doit pouvoir déterminer sa priorité. Si elle souhaite avant toute chose recruter de nouveaux clients, alors elle devra effectivement commencer par informatiser ses commerciaux. C’est évident, il n’y a pas d’autre moyen d’acquérir de nouveaux clients. En revanche, si son objectif premier est de fidéliser, alors peut-être vaudra-t-il mieux qu’elle se dote d’un centre d’appels ou qu’elle mette en place un vrai service client. En tout cas, il ne faut pas vouloir tout déployer en même temps. Il est important de “phaser” son projet de gestion de la relation client. L’informatisation des forces de vente n’est qu’une brique de ce type de projet et n’est prioritaire que si l’entreprise est en phase d’acquisition de clients. Malgré cette prise de conscience, on a le sentiment, lorsque l’on rencontre des chefs d’entreprise ou des directeurs commerciaux, que des réticences persistent en matière d’informatisation des forces de vente…Oui, c’est très juste. Les réticences sont paradoxalement très importantes et je pense qu’il y en aura toujours. La solution informatique est souvent vue et ressentie par les commerciaux comme un moyen de “flicage”, de contrôle des processus. Résultat : le taux de réussite des projets de SFA est nettement inférieur à celui de tout autre projet informatique. On estime ainsi que deux tiers des projets aboutissent à un échec, ce qui est considérable. Il arrive même que des entreprises investissent des dizaines de millions de francs dans des outils tota-lement inutiles ! C’est pourquoi nombre d’entreprises hésitent à s’équiper. Je crois qu’il y a une seule solution pour faire de ce genre de projet une réussite : c’est de montrer directement aux directeurs commerciaux et à leurs équipes les bénéfices qu’ils peuvent retirer de tels projets, à savoir un meilleur suivi des ventes et une rémunération qui augmentera avec le volume d’affaires réalisé. Que pensez-vous des offres d’informatisation des forces de vente en mode ASP ? Constituent-elles, selon vous, une bonne opportunité pour les PME ? Aujourd’hui, l’offre ASP n’est pas mûre et permet seulement d’automatiser des tâches commerciales de base. Ces solutions n’apportent pas tout ce qu’un outil classique peut apporter, c’est évident. Cela dit, c’est un marché très prometteur pour ces prochaines années, qui devrait commencer à décoller en 2002 ou 2003. Je crois que, pour l’heure, le marché des PME, qui a été visé par les prestataires ASP, est “sec” : comme je vous le disais, ces entreprises ne sont pas encore entrées dans un processus d’automatisation des forces de vente. D’ailleurs, pour l’heure, les ASP ciblent plutôt les petites entités de grosses structures qui ont besoin d’applications et qui ont des capacités à se connecter à Internet. Les PME qui se sont équipées en ASP sont donc soit des filiales de grands groupes, soit des entreprises très sensibilisées, qui évoluent dans le milieu du high-tech. Je crois cependant que, dans deux ans, les ASP offriront aux moyennes entreprises un excellent moyen d’informatiser leurs commerciaux. Mais il faudra qu’elles aient vraiment compris l’importance de ce type de projet et que l’offre se soit étoffée.

Quelques chiffres Comme l’explique Frédéric Doumenc dans l’entretien qu’il nous a accordé, nombre d’entreprises sont encore réticentes à informatiser leurs forces de vente. Tous les secteurs de l’économie ne sont pas concernés de la même manière, comme permet de le constater une étude IDC. Ainsi, le secteur des services est très largement équipé pour gérer sa relation client, puisqu’il représente à lui seul 75 % de l’activité des éditeurs. À titre de comparaison, l’industrie ne représente que 25 % des logiciels CRM. Une disparité qui provient du fait que ce secteur a d’abord massivement investi dans des outils de gestion du back office et de la chaîne de production. À l’inverse, il est évident que les services, dont le recrutement et la fidélisation des clients sont essentiels dans un contexte hyper concurrentiel, ont un besoin crucial d’outils informatiques pour le front office. Il suffit, pour vaincre les réticences, d’observer les gains que procure une informatisation des forces de vente réussie. Un ouvrage (La fin du paradoxe informatique, Éditions d’Organisation) estime ainsi qu’avec une solution logicielle, le temps qu’un commercial passe avec les clients augmente de 26 %, celui perdu, notamment en recherche d’informations, diminue de 60%, et le temps nécessaire à l’élaboration des offres commerciales, et particulièrement des devis complexes, diminue de 20 %.

 
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Propos recueillis par Frédéric Thibaud

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