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François Gruau, directeur du business development d'Atos Origin France. Pour décrocher ce contrat, nous avons fait rêver notre client

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Atos Origin a gagné son pari. La SSII a eu l'audace de ne pas répondre scrupuleusement à l'appel d'offres de Bouygues Télécom concernant ses serveurs vocaux. Elle est ainsi parvenue à vendre un programme au budget trois à quatre fois supérieur à l'estimation initiale de l'opérateur téléphonique.

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En juillet dernier, nous avons scellé avec Bouygues Télécom, l'un de nos grands comptes “historiques”, un contrat de plusieurs millions d'euros portant sur la refonte complète de ses serveurs vocaux devenus obsolètes. Un dossier que j'ai supervisé en tant que directeur commercial et avant-vente des activités télécoms (depuis François Gruau a été promu directeur du business development, NDLR). L'objectif de l'opérateur téléphonique était de faire migrer une trentaine d'applications vocales à la disposition de ses clients, comme le 630 qui délivre des informations relatives à la consommation et permet de procéder aux rechargements prépayés, vers une solution tenant compte des avancées technologiques. Fin octobre 2004, Bouygues Télécom a lancé son appel d'offres. L'opérateur avait parfaitement identifié sa problématique et suggérait, en partie, la réponse à y apporter: celle-ci devait reposer sur une technologie “dans la continuité” de celle existante. En outre, la société souhaitait limiter l'investissement. Il était également demandé au prestataire de soumettre une seconde solution faisant appel à une technologie alternative. Dès les premiers jours, nous avons – logiquement – constitué une équipe d'experts dans le domaine des serveurs vocaux. Puis, très vite, au cours de nos échanges avec notre client, nous avons eu l'intuition que nous devions soumettre une proposition plus ambitieuse capable de garantir une vraie pérennisation de l'offre. Un projet à même de prendre en compte l'évolution à venir du système d'information de Bouygues Télécom. À ce stade, nous avons engagé un vrai pari: celui de ne pas répondre strictement à la demande. Et de rechercher les points de différenciation possibles avec la concurrence et d'identifier les sources de valeur. Nous avons décidé, en nous appuyant sur différents partenaires parmi lesquels Genesys et HP, de présenter deux offres alternatives reposant toutes deux sur la technologie très moderne et de pointe du “Voice XML”. La première, plus douce, constituait un palier, tandis que la seconde impliquait un vrai “big bang” technologique. Ainsi formalisée, notre proposition commerciale faisait de ce contrat le plus grand déploiement européen de serveurs vocaux en technologie “Voice XML” soit plus de 5000 connexions en simultané.

Une équipe pluridisciplinaire

Pour concevoir un tel projet, nous avons renforcé notre équipe, en ajoutant aux experts en télécom, des spécialistes en système d'information. Fin novembre 2004, nous disposions d'une équipe de cinq collaborateurs pluridisciplinaires. Les “pièces rajoutées” apportant avec elles la dose de “poil à gratter” utile pour imaginer une solution ambitieuse. Le projet a alors pris une autre dimension. Nous devions sortir du cadre tout en veillant à ne pas être hors sujet. Les quatre semaines qui ont suivi ont été extrêmement denses. Fin décembre 2004, nous remettions, comme quatre autres concurrents, notre proposition commerciale. Mais nous étions parmi les seuls à avoir dépassé le cadre initialement donné par l'opérateur en optant pour une réponse vraiment alternative. Initialement, la décision devait tomber fin mars 2005. Mais finalement, à cette date, Bouygues Télécom a choisi de n'arrêter qu'une short-list de deux prestataires, dont nous faisions partie. Devant la diversité des projets, l'opérateur a décidé de s'accorder davantage de temps de réflexion: la décision a été reportée à fin juin. Entre-temps, les “workshop” se sont succédé. D'abord techniques, ils portaient vers la fin sur des aspects plus contractuels: négociation des modalités financières bien entendu, mais aussi droit de propriété intellectuelle, responsabilité, pénalités, etc.

Réussir à les convaincre d'investir

Dès nos premiers contacts avec les représentants de Bouygues Télécom, et notamment les personnes de la direction des services informatiques (DSI), nous les avons sentis enthousiastes. Avec cette solution, nous avions le sentiment que nous les “faisions rêver”. Mais il fallait aller plus loin en les aidant à convaincre à leur tour les décideurs en interne et notamment les services maîtrise d'ouvrage et finance. Principal point d'achoppement, en effet, le montant de l'investissement. Notre projet reposant sur des technologies particulièrement modernes demandait un investissement trois à quatre fois supérieur au budget prévu pour une solution “dans la continuité”. Durant ces six mois, nous nous sommes attelés à expliquer tous azimuts, à répondre à leurs questions. Notre objectif était simple: leur donner toutes les informations nécessaires pour qu'ils puissent calculer et recalculer le ROI (retour sur investissement). Nous savions que le coût plus élevé de notre proposition serait gommé par les économies ultérieures. Finalement, ils ont été convaincus puisque le 1er juillet 2005, après une nuit à peaufiner le contrat, nous avons signé. La technologie a séduit, mais toute l'équipe d'Atos Origin a joué un rôle très important: nous avions confiance en nous, l'équipe était fière de l'innovation qu'elle proposait et fière de sa réponse. Ça donne des ailes…

Atos et Bouygues Télécom: une longue histoire

Atos, société de conseil et d'intégration de systèmes informatique (SSII), est implantée dans 40 pays. Le groupe réalise un chiffre d'affaires de 5,3 milliards d'euros et emploie 46?600 salariés. En France, Atos a, lui, atteint 1,4 milliard d'euros de chiffre d'affaires en 2004 et compte 12500 salariés. Cette entreprise et Bouygues Télécom ont une véritable histoire commune, ce qui fait de l'opérateur l'un des grands comptes d'Atos. Les premiers contrats signés entre eux remontent à 1997. Depuis, ils se sont multipliés: développement et intégration du portail de services “sixième sens” de l'opérateur (2001); conception du kiosque de services à reconnaissance vocale (2003); gestion du parc bureautique de Bouygues Télécom (2005),

L'anecdote de vente

En marge d'une séance de négociation, le responsable des achats de Bouygues Télécom m'a proposé un petit jeu: j'ai noté à quel niveau j'estimais mes chances de gagner l'affaire. Il a, de son côté, essayé de deviner quel chiffre j'avais écrit, mais chacun a gardé son papier et son secret. Après la signature du contrat, nous avons regardé nos billets respectifs?: j'avais évalué mes chances de gagner à 95 %, tandis qu'il pensait que j'allais les estimer à 65 %. Ce que je ne savais pas, et qu'il m'a alors avoué, c'est que nous avions, à quatre ou cinq reprises, failli perdre l'affaire, confirmant que pendant tous ces mois, nous marchions véritablement sur un fil. Mais finalement, notre ambition a payé.

 
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Propos recueillis par Anne-Françoise Rabaud

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