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La guerre du feu va-t-elle toucher les particuliers?

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Le n° 1 français des extincteurs, Sicli, mise sur les ventes annexes de services pour sa croissance. L'un de ses challengers, Isogard, compte, lui, sur un décollage du marché résidentiel, son coeur de cible, pour combler son retard.

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- Si l'on a coutume de dire qu'en matière commerciale le premier arrivé essuie les plâtres, Sicli (l'acronyme pour «Secours immédiat contre l'incendie») semble préférer un tout autre adage: «le premier arrivé est le premier servi»! Cette société fut la première à industrialiser la fabrication des extincteurs portatifs, dès 1918. Résultat: elle revendique aujourd'hui 40% de part de marché, ce qui fait d'elle le leader français. Derrière Sicli, une multitude de sociétés de petite et moyenne taille essaient tant bien que mal de se faire une place. A l'image d'Isogard, qui se crédite de 5% de part de marché. Son point commun avec Sicli? Elle appartient, comme le leader, à un grand groupe international, alors que les autres acteurs sont, pour la plupart, des PME familiales. Isogard a ainsi été rachetée après une faillite, en février 2002, par la société américaine Tyco Fire & Security, elle-même filiale du groupe Tyco (11,5 milliards de dollars de chiffre d'affaires en 2005). Quant à Sicli, elle a cessé d'être une entreprise familiale dès les années 1970 pour passer tour à tour dans le giron de plusieurs sociétés. Finalement, elle rejoint en 2003 le groupe américain UTC, dont la maison mère, UTC Fire & Security, a réalisé 4,5 milliards de dollars de chiffre d'affaires en 2005. Sur le sol français, ce sont donc deux grands groupes mondiaux qui s'affrontent à travers Sicli et Isogard.

Michel Dardenne, dg de Sicli

«Notre croissance est assurée par une politique d'acquisitions très dynamique.»

Stratégie client: B to B contre B to C

Si les deux sociétés ont opté pour un modèle de vente 100% directe, leurs cibles sont différentes et correspondent à leur histoire. Sicli vise depuis toujours l'univers des entreprises, alors qu'Isogard est plutôt orienté vers le marché des particuliers, lequel représente les deux tiers de son chiffre d'affaires. Du côté de Sicli, rien n'est fait pour pousser les ventes sur ce marché, qui représente moins d'1% de son chiffre d'affaires. «Nous n'avons pas de force commerciale spécifique sur le segment des particuliers. Nous nous contentons juste de répondre à la demande», explique Michel Dardenne, directeur général de Sicli. Une segmentation qu'Isogard, lui, applique avec ses vendeurs, car les demandes des particuliers sont spécifiques et ne ressemblent en rien à celles des entreprises. Toutefois, la société limite la segmentation en rassemblant la cible des petits commerces et des professionnels indépendants avec celle des particuliers. Ce sont, en tout, 180 technico-commerciaux qui abordent ce marché. Mais avec un panier moyen autour de 200 euros, l'univers résidentiel est cependant peu rentable. C'est la raison pour laquelle Sicli ne souhaite en aucune façon y consacrer du temps et de l'énergie. A moins que la situation ne change. Pour le moment, le marché des extincteurs est essentiellement porté par des mesures législatives. Et contrairement aux entreprises, les particuliers ne sont pas obligés par la loi de s'équiper en extincteurs. En tout cas pour le moment... Car après que le législateur a adopté, en novembre 2005, la proposition de loi visant à équiper toutes les maisons de détecteurs d'incendie, il se pourrait bien que, dans un deuxième temps, les députés se penchent sur les moyens d'éteindre les feux signalés par ces mêmes détecteurs... En attendant cette possible explosion du marché des particuliers, Isogard a pris le parti de ne dégager aucun budget pour des opérations de marketing sur ce segment de marché. L'entreprise préfère utiliser le carnet d'adresses de ses clients, en partant du fait qu'ils sont motivés pour s'équiper en extincteurs alors qu'aucune loi ne les y oblige. Et qu'ils peuvent donc recommander des membres de leur entourage qu'ils auront sensibilisé à cet aspect sécuritaire du foyer. «Nos commerciaux prospectent généralement autour des connaissances de leurs clients, ce qui leur permet d'être beaucoup plus efficaces», témoigne Nicolas Bret, directeur général d'Isogard. Mais la difficulté de ce marché force le challenger à s'ouvrir à d'autres stratégies de vente. Ainsi, la société teste aujourd'hui sa présence et mène des opérations commando dans des supermarchés, afin d'être plus visible auprès du grand public. Preuve de cette nouvelle volonté, la création, en janvier, du poste de responsable de développement des ventes. Cette personne est chargée d'étudier, de tester et de mettre en place différentes stratégies de vente. L'une des pistes de réflexion pourrait être de transformer les 32 agences servant actuellement de sièges locaux en points d'accueil clientèle.

Sicli

Chiffre d'affaires 2006: 200 millions d'euros
Effectif France: 2 000
Population commerciale: 450
Nombre d'agences: 24
Part de marché en France: 40%

Face à la difficulté d'appréhender le marché résidentiel, Isogard ne serait-elle pas tentée de remettre en question son modèle français de vente 100% directe? D'autant que la filiale allemande du groupe Tyco aborde ce marché via un réseau de distributeurs. «Nous n'avons pas de tabou, ce qui nous permet d'explorer toutes les voies pour accroître notre stratégie commerciale, assure Nicolas Bret. Mais il n'y a aucune volonté de la maison mère d'imposer un modèle unique. En l'occurrence celui de l'Allemagne. En France, le marché évolue vers toujours plus de services et de maintenance. Le commercial peut, le cas échéant, vendre de la valeur ajoutée», juge le directeur général. Car sur le marché des extincteurs, la croissance se situe essentiellement dans les services annexes. La question n'est pas tant de fournir un extincteur que de permettre à un client d'éteindre un feu en sachant utiliser correctement le matériel qu'il vient d'acheter. Et sur ce point, les pistes de business sont très clairement situées sur le marché des entreprises. Alors que la formation est comprise dans la vente d'extincteurs pour un particulier, il n'en est pas de même pour les entreprises. C'est précisément là-dessus que se rencontrent les deux sociétés. Et notamment sur le marché des PME où Sicli tire l'essentiel de ses revenus (80% du chiffre d'affaires contre 20% pour les grands comptes).

Nicolas Bret, dg d'Isogard

«Nos commerciaux prospectent l'entourage de leurs clients.»

Isogard, elle, ne peut se permettre de faire l'impasse sur la prospection car elle doit se contenter d'une croissance organique qui passe inévitablement par des opérations de prospection classiques, à savoir qualification de fichiers par téléphone, mailing... Les commerciaux B to B du challenger assurent donc la totalité de la vente, tant pour le matériel que pour les services. Mais tout comme son concurrent, le fait d'appartenir à un grand groupe lui permet de s'appuyer sur sa maison mère et de surfer sur une stratégie de cross selling. Tyco est, en effet, spécialisé dans la protection incendie. Ainsi, les commerciaux qui vendent du matériel de détection et des alarmes incendie sont très bien placés pour évoquer le métier de l'une des filiales du groupe. Une complémentarité qui s'opère d'autant plus facilement que Nicolas Bret est à la fois le directeur général d'Isogard et directeur général adjoint de Tyco!

Isogard

Chiffre d'affaires 2006: 31 millions d'euros
Effectif France: 400
Population commerciale: 300
Nombre d'agences: 32
Part de marché en France: 5%

Développement commercial: prospection contre croissance externe

En matière de développement commercial, les deux acteurs ont des politiques très différentes. Sicli, par exemple, ne prospecte pas ou très peu, pour trouver de nouveaux clients car elle s'est lancée ces dernières années dans une importante politique de croissance externe. Entre 1999 et 2002, le leader du marché a ainsi racheté 63 sociétés et depuis, trois à quatre entreprises tombent, chaque année, sous sa coupe. Avec à chaque fois autant de clients! Le seul domaine sur lequel la société prospecte est celui de la vente de services. «Notre stratégie est basée sur l'augmentation du nombre de produits et de services au sein de notre base clients installés. Défait, nos commerciaux sont dès lors très orientés vers le suivi de la clientèle.» Une stratégie qui a obligé Sicli à équiper les vendeurs dès 2002 et les technico-commerciaux entre 2004 et 2006 d'un PDA, stockant la totalité de l'historique de chaque client. «Nous étions sur une base clients beaucoup trop importante pour qu'un commercial puisse gérer au mieux chaque dossier sans cet outil. Désormais, tous les clients font l'objet d'un suivi rigoureux», explique Michel Dardenne. Un point essentiel dans la stratégie de Sicli, car c'est à partir de cette base clients que le commercial va essayer de vendre le reste de la gamme (formation, kit de secours, signalisation de sécurité...). D'ailleurs, les vendeurs recrutés actuellement ont davantage le profil de chasseur que celui d'éleveur. Pour autant, si le leader mise sur les ventes annexes de services, il n'en gère toutefois pas la totalité. Ainsi c'est une autre filiale d'UTC, Cofisec (20 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2005), qui s'occupe de la formation et de la vente. Toutefois, les commerciaux de Sicli sont chargés de qualifier la demande et de répondre aux premières questions avant de passer le relais aux 20 vendeurs de Cotisée. Une passation de dossier qui se fait sans problème, car le personnel des deux sociétés se trouve dans les mêmes locaux.

 
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Laurent Bailliard

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