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Mettre fin à une relation commerciale avec un client

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Les motifs de rupture d'une relation commerciale peuvent être de toute nature: changement de politique commerciale, risque d'insolvabilité, défaut ou retard de paiement... Tous ne sont pas juridiquement recevables. La rupture est fortement encadrée, qu'elle fasse ou non l'objet d'un contrat cadre.

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@ FOTOLIA/LD

1. Vérifier la nature juridique de la relation commerciale

Les relations commerciales peuvent consister en une succession de contrats à exécution instantanée, sans qu'ait été stipulée une obligation de poursuivre cette relation pendant une certaine durée. L'hypothèse vise notamment des ventes de biens, matérialisées par des commandes et des livraisons successives, sans que le vendeur 's'engage à satisfaire toute demande émanant du client. On parle alors de «relations commerciales établies» que l'on oppose généralement aux relations contractuelles formalisées dans un contrat-cadre, tel qu'un contrat-cadre de distribution, contenant le plus souvent l'obligation de fournir au client les prestations ou les marchandises convenues.

Un contrat cadre engage les deux parties pour la durée qu'il prévoit. Il ne faut toutefois pas confondre cette convention avec les conditions générales de vente ou de prestation de service, qui déterminent les conditions et les modalités de passation et d'exécution des commandes successives, sans obliger le vendeur ou le prestataire de service à satisfaire toute commande du client.

2. Respecter les modalités de rupture prévues par le contrat

Les contrats cadres qui peuvent être complexes, à l'instar des contrats de concessions exclusives, sont conclus soit pour une durée déterminée - par exemple cinq ans - soit pour une durée indéterminée. Il ne peut être mis fin à un contrat à durée déterminée avant l'échéance du terme convenu, hormis en cas de faute commise par le client. Cette faute, qui doit présenter une gravité suffisante, ne vous donnera toutefois la faculté de mettre fin à la relation contractuelle que si son incidence fait l'objet d'une clause de résiliation. A défaut d'une telle clause, seul un tribunal est habilité à prononcer la résiliation anticipée. Compte tenu de la lourdeur d'une telle procédure, mieux vaut donc être prévoyant.

Un contrat à durée indéterminée prévoit en principe les modalités de sa dénonciation, laquelle peut intervenir à tout moment, sous réserve du respect d'un préavis et du formalisme, imposés par la clause de dénonciation. Là encore, il est conseillé de prévoir une clause de résiliation anticipée pour faute qui permettra, si nécessaire, de rompre la relation sans avoir à respecter le préavis de dénonciation.

Attention: l'article L. 442-6 du code de commerce, tel qu'il est appliqué par les tribunaux, génère une insécurité juridique, car la durée du préavis contractuellement prévue peut être jugée insuffisante au regard de l'ancienneté de la relation commerciale. Il ne faut donc pas se borner à appliquer la clause de dénonciation telle qu'elle figure dans le contrat.

3. Rompre sans brutalité des relations commerciales établies

La rupture brutale d'une relation commerciale établie engage la responsabilité de celui qui en est l'auteur. Cette règle s'impose aux partenaires commerciaux tant en l'absence de contrat cadre qu'en présence d'un tel contrat.

Une relation commerciale est dite établie dès lors qu'elle présente une ancienneté suffisante. En pratique, compte tenu d'une jurisprudence flottante, la prudence requiert de considérer comme «établie» toute relation supérieure à 12 mois, dès lors qu'elle présente une certaine consistance en termes de volume. Mais il s'agit là d'une simple recommandation pratique.

Pour n'être pas jugée brutale la rupture doit être formalisée par une lettre recommandée avec accusé de réception, le client devant bénéficier d'un préavis tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée par des accords interprofessionnels. A ce jour, de tels accords n'ont été conclus que dans les secteurs du bricolage, du pétrole, de l'imprimerie et de la distribution automobile. A défaut des arrêtés du ministre chargé de l'Economie peuvent pour chaque catégorie de produits, fixer un délai minimal de préavis. En pratique, ces délais résultent essentiellement de la jurisprudence des tribunaux.

La durée du préavis telle que retenue par les juges est assez variable. Elle est généralement d'au moins 6 mois pour des relations n'excédant pas 5 ans, mais peut être portée à 12, voire 18 mois pour des relations plus longues. Il n'existe pas de méthode de calcul infaillible.

C'est l'esprit de la loi qui doit guider la démarche. L'objectif pour l'entreprise est de permettre à son client de se retourner. La structure du marché ou la spécificité des produits ou des services sont autant de paramètres à prendre en compte pour calculer au plus juste un délai de préavis acceptable. La loi prévoit des délais spécifiques pour la fourniture de produits sous marque de distributeur et lorsque la rupture de la relation commerciale résulte d'une mise en concurrence par enchères à distance. En tout état de cause, la faute du client ou un cas de force majeure permettent de se soustraire à l'exigence du préavis.

A savoir
Les modalités pratiques

Compte tenu des incidences juridiques, la décision de rupture doit préalablement faire l'objet d'une analyse des risques intégrant la durée de la relation, le volume du chiffre d'affaires réalisé avec le client, sa faculté à trouver un nouveau fournisseur et bien sûr ses propres impératifs commerciaux.
- La négociation
La cessation de relations commerciales, qu'elles s'inscrivent ou non dans le cadre d'une relation contractuelle, peut toujours faire l'objet d'un accord avec le client. C'est, du reste, en présence d'un contrat à durée déterminée et en l'absence de faute de la part du client, le seul moyen de rompre par anticipation la relation.
- Formalisme et préavis
Rompre ces relations avec un client n'est pas un acte anodin. Il nécessite, comme nous l'avons vu, le respect d'un formalisme. La lettre recommandée est, à ce titre, incontournable. Rien n'empêche, au demeurant, d'anticiper, en informant son client de manière moins formelle, que la cessation de la relation commerciale est à l'étude. Le préavis est également un élément-clé de la démarche, puisque l'on rappelle qu'il ne suffit plus désormais de se référer au contenu du contrat, s'il existe.
- La situation du client
A défaut d'accord avec son client, le fournisseur peut et parfois doit faire preuve d'une certaine souplesse en instaurant une progressivité dans la rupture, en allongeant le délai de préavis initialement convenu, ou encore en accordant à son client tout autre facilité de nature à diminuer l'impact de la rupture du contrat sur sa propre activité. Il faut également anticiper sur les conséquences de la rupture, notamment en termes de stock, de restitution de matériel, de confidentialité, d'exclusivité et, le cas échéant, d'indemnités de rupture.

 
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Jean-Marie Maître Léger

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