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Nous avons vendu le supercalculateur le plus puissant d'Europe

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Bull a réussi un coup de maître?: vendre au CEA le calculateur le plus puissant d'Europe. Hélène Bringer, responsable commerciale grands comptes, évoque cette transaction, signe du renouveau du groupe.

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Pour attaquer le marché des calculateurs informatiques destinés au monde scientifique, il était vital de décrocher un très gros client qui nous permette de gagner en crédibilité sur ce marché où nous n'étions pas du tout présents. Je dois dire qu'en signant en décembre 2004 avec le Commissariat à l'énergie atomique (CEA) un contrat de plusieurs dizaines de millions d'euros, nous ne pouvions rêver mieux. La machine, que nous livrons actuellement à la Direction des applications militaires du CEA, est tout simplement le supercalculateur le plus puissant d'Europe. Elle va permettre de réaliser les simulations informatiques indispensables pour garantir le maintien opérationnel des armes nucléaires au sein de l'armée française. Pour en arriver là, nous avons travaillé très en amont avec nos futurs clients. En effet, sur un tel marché, vous ne pouvez pas débarquer chez un prospect en lui proposant votre produit sans qu'il ait été fortement impliqué dans sa conception?: chaque supercalculateur est unique. À la mi-2003, nos ingénieurs avaient mis au point une technologie dont nous savions, pour avoir consulté des ingénieurs du CEA mais aussi de grandes universités, qu'elle pouvait convenir au marché des calculateurs scientifiques. À ce stade, l'équipe commerciale ne pouvait vendre une technologie sans disposer d'une machine opérationnelle pour convaincre les ingénieurs qui sont, dans ce type de négociation, les vrais décideurs. La direction de Bull a donc pris le pari d'investir dans une machine de démonstration. Nous avons ainsi pu répondre à l'appel d'offres lancé par le CEA en 2004. Il s'agissait de remplacer leur calculateur par une machine dix fois plus puissante. Le timing nous était favorable, car nous avions alors une proposition capable de rivaliser avec des concurrents comme HP, qui équipait jusque-là le CEA, Dell ou IBM qui participaient à l'appel d'offres.

Adapter l'offre au budget

Nous nous sommes alors engagés dans une tractation particulière, puisque le CEA a lancé un appel d'offres sur performance. Cette procédure, souvent utilisée pour les marchés publics, implique que tous les postulants bénéficient des mêmes informations et soient entendus dans les mêmes conditions. De plus, le CEA rend son budget public. Il n'est pas question de le négocier. C'est donc aux fournisseurs de faire une proposition qui rentre dans l'enveloppe budgétaire. Mon rôle a consisté à motiver nos équipes techniques pour qu'elles réalisent des prodiges quotidiens rendant compatible notre offre avec le budget défini. Autre difficulté?: nous avons très peu rencontré nos interlocuteurs, puisque les phases de dialogue sont très encadrées. Nous avons eu trois grands oraux durant lesquels ma valeur ajoutée était de décrypter les attitudes, les réflexions de nos interlocuteurs pour guider ensuite les équipes techniques. C'est très subjectif. Mais étant donné que nous ne pouvions pas nous parler en dehors de ces consultations, je devais prêter la plus grande importance au moindre détail pour essayer de définir nos points forts et faibles. Au final, je pense que nous avons remporté le marché parce que nous avons su prendre la décision stratégique de proposer un produit “ouvert” qui assure au CEA que les applications seront toujours utilisables, même s'il change de fournisseur lors du prochain appel d'offres dans quatre ans. Mais, aussi parce nos meilleurs techniciens ou le directeur général de la recherche et développement de Bull sont venus à chaque oral, ce que ne pouvaient pas forcément faire nos concurrents en déplaçant de “grosses pointures” de leur siège en Amérique. Pour Bull, les répercussions de ce contrat sont énormes. Nous sommes désormais reconnus comme un fournisseur crédible par le monde scientifique qui nous invite maintenant à tous les appels d'offres. Preuve que l'audace et beaucoup de travail sont payants.

Bull revient aux affaires

“Back in business?!” La nouvelle signature de Bull, concepteur de solutions informatiques B to B, qui accompagne un logo relooké, annonce très clairement la couleur : l'ancienne société publique qui a traversé de nombreuses crises et qui est, depuis cette année, entièrement aux mains d'actionnaires privés, a pour ambition de faire parler d'elle sur le terrain commercial. Avec un chiffre d'affaires de 1,139 milliard d'euros en 2004 et un bénéfice net de 10,8 millions d'euros, le groupe semble effectivement en ordre de marche pour se montrer à nouveau conquérant. Aujourd'hui, Bull emploie 7?500 personnes dans le monde entier. Et s'il réalise encore près de la moitié de son chiffre d'affaires en France, il compte se développer à l'international, et notamment en Europe, qui représente déjà 39 % de son activité.

L'anecdote de vente

«?Le fait que vous soyez une entreprise française va vous obliger à être deux fois meilleurs que les autres?», m'a dit en substance un interlocuteur du CEA avant le début de la négociation pour souligner le fait que cet organisme ne pouvait prendre le risque de prêter le flanc à d'éventuelles critiques portant sur du “favoritisme national”. Un challenge supplémentaire qui donne tout son sens à notre victoire puisque, de toute l'histoire de Bull, c'est la première fois que le CEA nous passe commande.

 
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Propos recueillis par Ludovic Bischoff

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