Trouvez votre place au sein du comité de direction
Votre directeur général vous annonce votre accession au comité de direction. Intégrer cette assemblée vous garantit d'influer sur la politique de l'entreprise. Mais cette responsabilité nouvelle va aussi vous exposer aux yeux de vos pairs. Il est donc important de préparer minutieusement votre entrée au «co dir».
Je m'abonneIl vous a annoncé la nouvelle en vous tapant sur l'épaule chaleureusement. Il vous a dit combien il était content de votre entrée prochaine au comité de direction. Désormais, c'est officiel, vous faites partie des quelques heureux élus appelés à siéger à l'instance suprême de la société, que les initiés appellent le «co dir». Mais l'euphorie de l'annonce passée, reste l'angoisse de l'inconnu! Qu'attend-on de vous au sein de cette assemblée de VIP? Quelle attitude devezvous avoir pour faire bonne impression? Bref, comment vous préparer à ce grand rendez-vous qui marque un tournant dans votre carrière? Premier conseil, prenez rapidement rendezvous avec votre supérieur pour préparer avec lui votre entrée au «co dir», en étant conscient d'une chose: vous n'avez pas été parachuté là par hasard. «La dimension de cooptation est toujours présente dans la nomination d'un manager au comité de direction. Il est rare que quelqu 'un y soit imposé» , assure Sylvie Roussillon, professeur à l'EM Lyon et coordinatrice de l'ouvrage Comités exécutifs, voyage au coeur de la dirigeance
Acquérir une vision globale de la société
Cette volonté de l'entreprise de favoriser l'accession des managers au comité de direction est très utile, car «le directeur commercial a souvent une attitude «courttermiste», visant à la simple réalisation de ses objectifs. Il dispose d'une vision partielle des problématiques de l'entreprise, remarque Sylvie Roussillon de l'EM Lyon. Les fonctions de directeur financier ou de directeur des ressources humaines, plus transversales, préparent sans doute mieux au comité de direction.» Pour acquérir cet état d'esprit, ayez une démarche dynamique à l'image de Lionel Jacquet, directeur commercial de Future Télécoms, un opérateur de téléphonie virtuelle B to B, qui a intégré il y a neuf mois le comité de direction. «Je manque de moments de réflexion, car mon quotidien professionnel est très chargé. Alors, j'essaie de m'accorder une heure par semaine pour prendre du recul et réfléchir à des sujets qui dépassent ma simple fonction pour enrichir mes interventions au comité de direction.» Tout ce qui vous aidera, de près ou de loin, à raisonner sur la globalité de l'entreprise est bon à prendre. «Pourquoi ne pas adhérer à un groupe ou à une association de dirigeants, suggère Sylvie Roussillon. Les réseaux et autres clubs professionnels offrent une grande diversité de modèles de management et vous permettront de côtoyer d'autres managers de haut niveau et de vous enrichir à leurs côtés.» Pour asseoir votre position, envisagez aussi une formation: bâtir une carrière dans la fonction commerciale ne vous aura sans doute pas éclairé sur les questions juridiques ou financières. Listez vos différentes casquettes: ressources humaines, marketing, financière, juridique. Formez-vous là où vous avez des lacunes. «Chaque membre du comité de direction est tenu de comprendre l'ensemble des sujets traités», insiste Yvelise Lebon (Cegos). Un coach peut aussi vous aider pendant cette période d'adaptation, notamment sur le comportement à adopter en comité de direction et votre changement de posture vis-à-vis de vos pairs et de vos collaborateurs. «Mon arrivée a provoqué un choc au sein du comité car l'ancien directeur commercial, depuis longtemps dans la place, était très apprécié, avoue Pierre Grandjean, directeur commercial de Samas, fabricant de mobilier de bureau. J'ai donc bénéficié du soutien d'un coach professionnel. Il me fallait identifier les éléments qui me permettraient d'avoir l'adhésion de mes pairs et de mes collaborateurs. J'ai, par exemple, analysé les traits de ma personnalité sur lesquels capitaliser...»
Une aide précieuse car, que vous veniez d'intégrer l'entreprise ou que vous soyez dans les murs depuis plusieurs années, vous devez faire vos preuves au sein du «co dir». «J'étais responsable des ventes et ma nomination au poste de directeur commercial m'a donné accès au comité de direction, confie Emmanuel Foreau, directeur commercial du loueur de longue durée DCS Fleet. Dès le départ, j'ai exprimé clairement mes objectifs et exposé la mise en place de plans visant la rentabilité globale de l'entreprise. Je ne me restreignais plus à la simple direction commerciale.»
A retenir
«Co dir» élargi ou restreint?
Il existe deux sortes de comités de direction. Le premier, appelé «comité de direction élargi», compte souvent une bonne vingtaine de personnes. Aux principaux dirigeants de l'entreprise, s'ajoutent les grands patrons de régions ainsi que les dirigeants d'usines et autres collaborateurs opérationnels. Il s'agit plus d'un lieu de partage de l'information où chacun est responsable de sa fonction et apporte le point de vue de son entité. Le «comité de direction restreint» compte, lui, cinq à huit personnes toul au plus. Autour du président et du directeur général, le DRH, le DAF, le directeur commercial et marketing et le directeur des services informatiques forment un groupe chargé de prendre les décisions stratégiques pour l'avenir de l'entreprise.
Emmanuel Foreau, directeur commercial chez DCS Fleet
«Au «co dir, j'ai compris les enjeux majeurs de l'entreprise.»
Passer de la vente à l'écoute
Ces préparatifs accomplis, il vous reste à affronter le jour J. Vous avez bien sûr préparé l'ordre du jour. Les membres d'un comité de direction reçoivent en général une semaine à dix jours à l'avance les éléments nécessaires à la préparation de la réunion. Ecoutez. Posez des questions. Et n'intervenez qu'en ayant bien tous les éléments en main. «Ne vous fixez pas d'interdit, mais avant de prendre la parole, validez intérieurement votre bonne compréhension du sujet», conseille Yvelise Lebon. Pour JeanFrançois Bresse, directeur général de Dynargie, cabinet spécialisé dans l'accompagnement humain du changement, vous aurez à passer de la vente à l'écoute. «Les autres membres du comité attendent de vous une compréhension de leurs problématiques. Vous deviendrez ainsi un des leurs.» Les qualités requises pour y parvenir: faire preuve d'empathie tout en restant à votre place. «Ayez à l'esprit de toujours exposer la voix du client, conseille PierreFrançois Bresse. Présentez les belles affaires, évoquez les litiges, informez vos pairs sur les nouveaux clients et leurs besoins.» Soyez naturel et enthousiaste, «deux qualités souvent attendues chez un directeur commercial, poursuit l'expert de Dynargie. Veillez néanmoins à ne pas vous ériger en «moine guerrier» du commerce et à ne prêcher que pour votre paroisse». Sachez vous faire valoir en prenant la parole à bon escient, en exposant vos objectifs tout en posant des questions à vos pairs. Si le «co dir» est un organe collégial, c'est aussi un lieu de concurrence au sein duquel chacun des membres cherche à s'affirmer. Vous devez y trouver votre place rapidement, mais avec diplomatie. C'est là que vous allez déployer tout votre talent de conviction qui vous a tant servi en tant que premier commercial de la société!
Avis de Philippe Desgraupes, directeur et fondateur du cabinet de coaching Desgraupes Conseil
«Pour être à l'aise au co dir, choisissez bien votre place autour de la table»
Selon les messages que vous avez à transmettre et en fonction des interlocuteurs que vous devez convaincre pendant le co dir, choisissez de façon judicieuse votre place. «Vous aurez sans doute besoin, selon les circonstances, de vous mettre à côté ou en face d'un de vos pairs. Sachez que votre position géographique autour de la table générera des comportements différents», explique Philippe Desgraupes. Le dirigeant du cabinet Desgraupes Conseil a ainsi coaché un manager dans le secteur du BTP ayant du mal à trouver sa place dans la salle du comité de direction. «Il cherchait toujours l'endroit le plus éloigné d'un des membres, qui avait trop d'influence sur lui. J'ai dessiné avec lui le plan de table du comité de direction et analysé où il se sentait le plus à l'aise. Il lui fallait prendre un peu de distance vis-à-vis de ce «mentor» qui le paralysait tout en se plaçant de manière à bien percevoir ses réactions lors des réunions...» Une place stratégique, donc, ni trop près, ni trop loin de cette personne si importante aux yeux de ce manager, que le coach a permis de formaliser. Philippe Desgraupes conseille aussi d'éviter de s'asseoir à côté du président, même si vous êtes numéro 2 du comité. Car vous ne pourrez pas observer correctement ses réactions. «Enfin, quand vous souhaitez convaincre votre auditoire, levez-vous pour être mieux vu. Celui qui est debout prend le pouvoir!»