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Vente indirecte 4/5. Reporting : incitez votre réseau à plus de transparence

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Entre un fournisseur et ses clients finaux, le réseau peut parfois faire écran. Patience et marketing relationnel vous aideront à accéder aux données stratégiques.

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L’un des principaux inconvénients de la distribution indirecte est d’introduire un filtre plus ou moins perméable entre le fournisseur et ses clients finaux. Comme le souligne Patrick Gendry, directeur général de l’agence de marketing relationnel Safari, « le réseau de revendeurs peut faire écran entre l’entreprise et sa cible ». S’il n’y prête pas attention, il n’a aucune information sur ce qui se passe après la commande : Qui achète ses produits ? Pour quelles raisons ? Quelles sont les attentes de ces clients ? Quels sont leurs motifs de satisfaction et d’insatisfaction ?, etc. La situation est pire encore quand l’industriel est séparé de son réseau de revendeurs par un grossiste, qui constitue un maillon de plus entre l’entreprise et ses clients. « Dans ce cas, observe Patrick Gendry, le fournisseur, s’il ne fait rien pour y remédier, ne connaît ni ses clients finaux, ni même ses distributeurs ! » C’est le cas de figure sur lequel a planché l’agence Everest, pour le compte de Pirelli Câbles, spécialiste des câbles électriques. « L’entreprise distribue ses produits aux électriciens, par le biais de grossistes, indique Hervé Fuks. Pour mieux connaître cette cible et nouer avec elle un lien de proximité, nous avons mis sur pied un club, le Pirelli Club International, dont les membres ont accès à une offre de services “plus” (magazine dédié, informations produits, etc.). Cela nous permet, incidemment, de collecter un grand nombre de données pertinentes sur ce qu’ils sont, font, ce qu’ils vendent, et même sur leurs loisirs. »

Qui sont les clients de vos clients ?

Car, plus que jamais, l’information est un facteur-clé de succès et les entreprises mettent tout en œuvre pour inciter leurs distributeurs à la transparence. Quel produit a acheté tel client, à quelle date, quel est son niveau de satisfaction, quelles ont été ses éventuelles suggestions, voire réclamations, etc. Autant de questions cruciales pour les entreprises car, comme l’explique le porte-parole de Safari, « la connaissance de la clientèle finale sert à mieux la fidéliser ». Autre intérêt de ces données : elles permettent de développer des actions de marketing direct à destination des clients et prospects. Et c’est bien là que le bât blesse. « Si les revendeurs se montrent aussi frileux dans leurs “prêts” d’informations, c’est qu’ils redoutent que leurs fournisseurs ne cherchent à les court-circuiter », analyse Hervé Fuks, directeur associé de l’agence Everest. Une crainte d’autant plus réelle que certaines sociétés réalisent une partie de leurs ventes en direct… Premier niveau d’informations recherchées : les indicateurs de performance commerciale que sont les courbes mensuelles de vente, les taux de marge, etc. Bref, tout ce qui concerne le sell out, autrement dit la revente. « La plupart des challenges que nous ficelons pour des réseaux externes intègrent, aujourd’hui, cette notion de revente, note Patrick Gendry. Ce sont des concours à double détente : les patrons de points de vente sont motivés sur leurs commandes et les commerciaux de ces mêmes points de vente le sont sur la revente. » Au passage, la société organisatrice incite ses revendeurs à un reporting régulier de ses performances. « La plupart du temps, nous nous basons sur ces données déclaratives, confie le dirigeant de Safari, que nous corroborons à l’aide des chiffres du sell in (des commandes, ndlr). » Malgré ces recoupements, Patrick Gendry estime à environ 20 % le taux d’imprécision de ces chiffres. Lorsque l’entreprise s’adresse à un réseau captif, elle est en droit de lui demander encore plus de transparence. Ainsi, à l’occasion d’un challenge de vente réalisé pour le lancement de la nouvelle Micra, le constructeur automobile Nissan a réalisé un tirage au sort quotidien parmi les commerciaux ayant réalisé au moins une vente du modèle dans la journée. L’astuce ? « Pour participer, les vendeurs devaient transmettre leurs commandes par fax, explique Marie-France Pangaud, directrice commerciale de Safari. Pour le constructeur, ces documents étaient une mine d’informations : ils contenaient les coordonnées des clients, les options choisies, et permettaient de suivre en détail l’évolution des ventes. »

Le fichier au cœur de l’information

On l’aura compris : obtenir des informations fiables et régulières d’un réseau indépendant suppose de construire avec lui une relation de confiance. Un échange qui, lorsqu’il s’inscrit sur le long terme, peut permettre au fournisseur de partager avec son réseau bien d’autres secrets… C’est ce qu’a su faire une marque de cosmétique présente dans un réseau de parfumeries sélectives. « Nous sommes aujourd’hui en mesure de monter des journées d’animation dans les points de vente, en présence d’une commerciale de l’entreprise et d’une vendeuse nommée “ambassadrice” de la marque au sein de la boutique », explique Patrick Gendry (Safari). Lors de telles journées, sont invitées les clientes du revendeur – ce dernier “ouvre” donc, pour l’occasion, son fichier à un fournisseur privilégié – et celles de la marque, qui dispose d’une base de données de clientes ayant rempli puis renvoyé un questionnaire “in pack” lors d’un achat. Pour la griffe, le bénéfice d’une telle initiative est inestimable : non seulement, elle crée du trafic vers ses meilleurs points de vente, mais elle collecte, au contact de ses consommatrices, quantité d’informations précieuses dont elle fera bon usage. Le nec plus ultra étant d’accéder au fichier de ses distributeurs. « C’est le rêve de la plupart de nos clients », sourit Hervé Fuks (Everest). Mais voilà : ce rêve reste extrêmement difficile à concrétiser. « Ouvrir son fichier, c’est dévoiler ce que l’on a de plus précieux », renchérit Olivier Guéret, responsable du pôle marketing relationnel du Public Système. Un idéal auquel beaucoup travaillent et peu parviennent. Et qui nécessite, dans tous les cas, des années de collaboration, une bonne dose de confiance et une pincée d’astuce. C’est une telle relation qu’a bâtie, au fil des ans, le fabricant de chaudières et radiateurs Saunier Duval, avec ses 1 700 dépositaires partenaires : pour l’essentiel, des installateurs plombiers-chauffagistes. « Aujourd’hui, nos échanges d’informations sont fluides et récurrents, témoigne Marie-France Pangaud, de Safari. Chaque mois, nous organisons une campagne de phoning qui nous permet de recueillir leur sentiment sur un produit, de cerner les éventuelles difficultés qu’ils ont pu rencontrer dans une opération, etc. » Aujourd’hui, la société veut aller plus loin : elle s’apprête à exploiter les fichiers de ses partenaires pour déployer des actions de marketing direct à destination des clients finaux. La source de l’information ? « Les cartes de garantie, répond la directrice commerciale de Safari. Elles sont remplies par les installateurs, puis transmises à Saunier-Duval. » Certes, cette vaste collecte prendra du temps. Mais son bénéfice devrait être à la hauteur de l’investissement.

Témoignage

Stéphane Montaignac, responsable du développement des ventes indirectes chez Ricoh France « Un tel partenariat demande du temps et de la confiance » Ricoh France a bien du mal à obtenir de ses revendeurs des données clients et prospects. L’entreprise, spécialisée dans la vente de systèmes d’impression, réalise en effet 70 % de ses ventes en direct. « Notre réseau craint que nous n’utilisions ces données pour notre compte, regrette Stéphane Montaignac. Pourtant, c’est tout le contraire : notre objectif est d’agir sur la demande pour drainer du trafic vers nos revendeurs. » Mais l’entreprise ne désarme pas : pour parvenir à cet objectif, elle a développé, avec chaque revendeur partenaire de sa marque, un business plan personnalisé intégrant des actions de marketing direct. « Nous mettons à leur disposition, sur notre site Web, des matrices leur permettant de développer des mailings sur leurs propres fichiers. Et demain, nous irons encore plus loin : notre centre d’appels intégré va, par exemple, leur proposer, moyennant un prix ultra-compétitif, de mener pour eux des opérations de détection de projets. Nous avançons pas à pas, il nous faudra du temps. »

À retenir - Le réseau répugne à nourrir ses fournisseurs en informations. L’entreprise devra mettre en place une relation de partenariat gagnant-gagnant. - Premier niveau d’information stratégique : les chiffres-clés de revente et la connaissance des clients finaux. Pour les obtenir, certains fournisseurs se contentent de données déclaratives communiquées par la force de vente du réseau ; d’autres demandent les bons de commande des clients finaux. - Second niveau d’information : les fichiers clients. Pour les obtenir, il est nécessaire de bâtir, durablement, une relation de confiance avec ses revendeurs.

 
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Stéfanie Moge-Masson

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