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[Tribune] Emploi : bonne nouvelle, le choc générationnel n'aura pas lieu

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[Tribune] Emploi : bonne nouvelle, le choc générationnel n'aura pas lieu

Entre grande démission et désengagement, il est facile de faire porter aux jeunes générations la responsabilité de cette situation que connaissent les entreprises. Face aux difficultés croissantes et durables pour attirer les talents, on a tendance à prendre en référence la fameuse génération Z, en la pointant du doigt ou en cherchant à l'imiter.

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À chaque époque, l'entreprise se fourvoie en singeant celles et ceux qu'elle souhaite attirer. " Faire jeune" a toujours été une obsession des recruteurs et aussi la source de leur discrédit.

Pourtant l'enjeu n'a jamais été de faire jeune, ce qui revient à se travestir – sauf bien sûr si votre moyenne d'âge est inférieure à 30 ans, le véritable défi est de faire sens, au nom de la culture de son entreprise.

Mais qu'en est-il vraiment ?

Plus une culture est forte, moins elle a besoin de copier les tendances dans l'ère du temps.

L'accélération du changement des modes de vie en entreprise post-Covid est tel que la notion même de générations et son lot de dérivés " choc de générations, conflit de générations... " n'a plus aucun sens. Les grandes attentes fondamentales vis-à-vis du travail se nivellent par l'arrivée en masse des Z sur le marché du travail (génération Z, née entre 1994 et 2010). Leurs codes deviennent références face aux notions de qualité de vie, d'équilibre pro/perso, d'engagements sociétaux et environnementaux, d'exemplarité, de leadership...

La révolution du travail en cours repose avant tout sur " la révolution du non " ; désormais chacun se positionne dans le rejet de ce qu'il n'aime pas.

Hier l'entreprise était un monde de compromis, aujourd'hui les attitudes se radicalisent, portées par la montée en puissance de l'individualisme.

Jeunes et séniors ont tendance à se radicaliser de la même manière, les premiers par convictions, les seconds par dépits, mais le résultat est le même : une fragilité du corps social avec des "vieux" qui comprennent de plus en plus l'attitude des jeunes (normal c'est la génération de leurs enfants).

Hier le digital expliquait en partie le choc entre générations, aujourd'hui le monde fluide (lire les travaux du sociologue Zygmunt Bauman qui anticipaient avec justesse le monde d'aujourd'hui) relie toutes les parties prenantes.

En revanche la dégradation discontinue depuis 40 ans du niveau scolaire (lire " La fabrique du crétin " tomes 1 & 2 de Jean-Paul Brighelli) confronte le monde professionnel à un enjeu majeur pour lequel les séniors ont un rôle essentiel à jouer.

On a substitué l'égalité des chances à une utopique égalitaire, qui, du coup, entraîne un nivellement par le bas

En 40 ans, le niveau de réflexion et d'analyse est inversement proportionnel au taux de réussite du bac ; le sas des études dites supérieures ne peut plus corriger les lacunes en culture générale et les difficultés à conceptualiser ; de fait l'entreprise devient dans les premières années de vie professionnelle le lieu d'initiation intergénérationnel qui décloisonne et ouvre les esprits.

C'est pourquoi, il n'est plus possible d'attendre d'une nouvelle recrue une rentabilité immédiate sans l'avoir préalablement acculturée.

L'entreprise apprenante et éducative est en marche.

Cette réalité est un big bang pour les directions générales et les managers qui ont été formatés (pour ne pas dire dressés) à la culture du court terme " inhumain " du toujours plus, tout de suite.

Manager en guidant par l'engagement culturel et le sens donné à l'action est un impératif pour agréger des talents utiles dans un collectif animé par le même maillot.

La transmission devient le premier item d'attractivité et de fidélisation, encore faut-il savoir quoi transmettre et comment.

Le niveau d'harmonie managériale dans la plupart des grandes entreprises est tellement faible que l'on assiste depuis deux ans à une explosion des départs dans les 6/12 mois qui suivent le recrutement.

L'enjeu culturel est une réponse à l'individualisme grandissant qui touche toutes les générations ; dans les 10 ans à venir les derniers dinosaures qui ont tout donné à leur travail, certains passants même toute leur vie dans une seule entreprise, auront quitté le monde professionnel ; avec eux, une idée révolue de la réalisation de soi par le travail va disparaître submergée par l'idée qu'il y a une vraie vie à côté du travail.

Dès lors comment l'entreprise va évoluer face aux solutions hybrides qui émergent ?

Pour ne pas perdre le cap et risquer de disparaître, le modernisme de la culture d'entreprise est la seule boussole utile pour s'orienter et continuer à faire durablement communauté.

Au moment où le metaverse promet le pire et le meilleur pour l'humanité, l'entreprise doit veiller à protéger " ses Humains " des pièges du virtuel en restant parfaitement réelle et authentique pour chacun d'entre eux.

Une chose est sûre, le choc entre génération n'aura pas lieu, remplacé par celui-ci entre le virtuel et le réel. Un choc de culture et vie.

Pour en savoir plus

Pitelet Didier : Après 16 ans passés chez Publicis à la tête de plusieurs entreprises de conseil et de communication, a fondé en 2006 Onthemoon puis a lancé en 2019, une nouvelle adresse, La Maison avec Henoch Consulting, MoonPress et StudioMP2 dédiées à tous les enjeux de culture d'entreprise et de change management. Il a publié en mars 2016 aux éditions Eyrolles " Le Pari de la Culture, petit éloge de la culture d'entreprise ", et en janvier 2020, " La Révolution du Non ! ".




 
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