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Géolocalisation : la Cour de cassation rappelle les limites

Publié par Amélie Moynot le | Mis à jour le
Géolocalisation : la Cour de cassation rappelle les limites

La Cour de cassation vient de rendre un arrêt condamnant un employeur ayant utilisé la géolocalisation pour contrôler un vendeur. Les explications de Michaël Amado, avocat au sein du cabinet Amado Avocats, spécialiste du droit du travail.

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Le 3 novembre 2011, la Cour de cassation confirmait un arrêt de la cour d'appel de Paris condamnant un employeur qui utilisait la géolocalisation pour contrôler le temps de travail de l’un de ses vendeurs...  Quelles sont les conséquences de cet arrêt ?
Cet arrêt a l’avantage de la clarté. Il fait la synthèse des obligations existantes. Il rappelle sur le sujet les principes légaux et la position de la Cnil. Selon l’article 1121-11 du code du travail, nul ne peut restreindre les libertés individuelles de façon injustifiée (c’est le critère de proportionnalité). Selon une délibération de la Cnil de mars 2006, la géolocalisation peut être mise en œuvre pour le suivi du temps de travail si ce suivi ne peut pas être effectué autrement. Cela n’est par ailleurs pas justifié si le salarié dispose d’une liberté dans l’organisation de son temps de travail. Enfin, le système ne peut pas être utilisé pour d’autres finalités que celles déclarées à la Cnil.

En pratique, est-ce qu’un directeur commercial a le droit d’installer un système de géolocalisation dans la flotte automobile de sa force de vente et à quelles fins peut-il le faire ?
Il en a le droit, à condition que cela soit proportionné au but recherché. Il n’en a pas le droit s’il peut contrôler leur temps de travail par d’autres moyens. Ainsi, un employeur peut utiliser la géolocalisation pour savoir où sont ses véhicules et allouer des moyens : envoyer ses technico-commerciaux à un endroit donné selon les besoins des clients. En revanche, du point de vue des textes, il est très délicat d’utiliser ce système pour compter le nombre de visites effectuées par un commercial. Surtout lorsque celui-ci réalise un compte rendu de visite signé par le client. En effet, on peut considérer ces comptes rendus comme des moyens de contrôle. Les juridictions pourraient alors estimer qu’il n’y a pas lieu d’équiper les véhicules avec de tels terminaux.

Quel que soit l’objectif poursuivi, quels sont les prérequis pour installer un tel système ?
À condition de respecter le critère de proportionnalité, la société dont dépend le directeur commercial doit faire une déclaration auprès de la Cnil. Par ailleurs, s’il existe un règlement intérieur dans l’entreprise, il conviendra de procéder à sa modification pour y intégrer les dispositions relatives au système de géolocalisation. L’employeur devra également en informer les instances représentatives du personnel : délégués du personnel et comité d’entreprise. À défaut de représentants du personnel, l’employeur devra directement en informer les salariés concernés. Si la loi ne précise alors pas la marche à suivre, il est cependant conseillé de garder la preuve écrite, signée par ces salariés, que cette information a bien été réalisée, par exemple dans le cadre d’un document écrit.

Rappel des faits
Il y a deux ans environ, un commercial de la société Moreau Incendie reproche à son employeur d'avoir calculé sa rémunération sur la base d'un système de géolocalisation installé dans son véhicule de fonction en 2006. Ses arguments : d'une part, son contrat de travail prévoit qu'il est libre d'organiser son temps de travail, d'autre part, son employeur avait déclaré d'autres finalités pour l'outil, à savoir l'amélioration de la production par l'analyse de ses déplacements et l'optimisation des tournées commerciales. Les deux parties s'opposent en justice et le 24 mars 2010, la cour d'appel de Paris condamne l'employeur, qui se pourvoit en cassation pour protester contre cette décision. Un pourvoi que vient donc de rejeter la haute juridiction, condamnant la société au paiement d'une somme de 2 500 € destinée à rembourser les frais d'avocat du vendeur.

 
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