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Compétences 3/6. Des vendeurs capables de parler marketing

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Bien cerner les besoins du client, collecter des données sur le terrain et accompagner les actions de marketing direct : les “vendeurs marketeurs” développent leur valeur ajoutée.

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Le marketing pour les “non-marketeurs” est véritablement dans l’air du temps, surtout depuis deux ans », reconnaît Yvelise Lebon, senior manager, responsable du pôle marketing de la Cégos, société de formation et de conseil en management. Si le secteur de la grande consommation est, aujourd’hui, très mature en matière de marketing appliqué à la vente terrain, notamment grâce aux écoles de vente intégrées, la tendance se propage également au B to B. Les services, mais aussi l’industrie, sont gagnés par ce mouvement. « Pour s’en convaincre, il suffit d’observer les profils de commerciaux qui sont recherchés : les entreprises recrutent de plus en plus des diplômés de niveau bac + 4 qui maîtrisent déjà cette culture », remarque Yvelise Lebon. Témoin de ce mouvement : les stages de formation au marketing destinés aux commerciaux connaissent un succès croissant. La raison qui pousse les entreprises à sensibiliser leurs commerciaux au marketing est, somme toute, relativement simple : elles ont un besoin accru de commerciaux capables d’anticiper les attentes et les besoins de leurs clients. On est, ici, au cœur de la culture marketing. Cette approche est d’autant plus indispensable que les circuits de distribution sont centralisés. « Lorsque le commercial ne peut plus jouer sur le prix, alors, toute sa valeur ajoutée réside dans sa capacité à mieux connaître ses clients et à satisfaire leurs attentes, en leur proposant, par exemple, des services annexes », explique Yvelise Lebon. Ce que confirme Laurent Penhouët, directeur commercial du réseau indirect de LeasePlan, gestionnaire de flottes automobiles : « Plus le marché va se structurer, plus la concurrence va se concentrer, plus l’approche marketing sera primordiale. »

Sur la voie du marketing

D’autres éléments, ayant trait à l’entreprise et à son marché, peuvent inciter une direction commerciale à raisonner “marketing”. « Une entreprise qui travaille avec des clients aux profils très hétérogènes a tout intérêt à appliquer les préceptes du marketing dans l’acte commercial », précise Thierry Meiers, directeur de la division organisation commerciale chez Bernard Julhiet Consulting. C’est également le cas lorsque les produits ou services commercialisés constituent un élément vital pour votre client. Ou encore lorsque votre entreprise s’inscrit dans une stratégie de différenciation, notamment en proposant des services complémentaires. « Lorsque l’entreprise évolue sur un marché ouvert à l’innovation, les commerciaux ont intérêt à adopter une approche commerciale imprégnée de marketing », explique Thierry Meiers. La force de vente se donne, en effet, les moyens de répondre à chaque profil de client en développant une offre spécifique, délaissant ainsi une approche axée exclusivement sur les prix. « Le commercial qui possède une solide culture marketing va au-delà des besoins primaires de son client. Il doit donc être rompu aux méthodes d’analyse des besoins », indique Thierry Meiers. Il est capable de percer les mystères du marché, de comprendre la logique d’évolution de ses clients, de cerner leurs besoins exprimés et non exprimés. Pour cela, il doit obtenir de son client, en multipliant les questions et en gagnant sa confiance, des informations auxquelles la concurrence ne pourra avoir accès.

Favoriser la coopération

Adopter une approche marketing, c’est aussi demander à ses commerciaux d’inscrire leur action dans le temps, leur faire abandonner la notion de vente à court terme au profit d’une vente à moyen terme. L’introduction de ces notions est d’autant plus aisée que les luttes intestines entre les services marketing et commercial ont pris fin. Il est, de fait, important de sensibiliser ses équipes commerciales au marketing, et inversement, en expliquant les contraintes et les attentes de chacun. « Pourquoi ne pas faire participer le service marketing aux réunions commerciales ?, suggère Laurent Penhouët. Les commerciaux sont, par essence, individualistes. Il est donc primordial qu’ils apprennent à travailler en chœur avec le service marketing. » De leur côté, les équipes marketing doivent adresser à la force de vente des demandes justifiées et raisonnables. N’hésitez pas à leur faire prendre conscience de l’ampleur des moyens à mettre en œuvre pour satisfaire leur requêtes.

Faire vivre la base de données

Cette collaboration est d’autant plus importante qu’elle va déboucher sur la création d’une base de données, point de départ d’une démarche marketing appliquée à la vente. Pour l’alimenter, le commercial a pour mission de faire remonter toute information ayant trait à la structure du client, à son organisation interne, à son positionnement sur le marché, à ses concurrents et à ceux de son client, etc. Pour Laurent Penhouët, « le commercial doit, plus que jamais, faire vivre la base de données, et le rôle de l’entreprise est, ici, de formaliser cette démarche ». Cette veille commerciale permet au service marketing de diffuser des informations analysées sur les clients et leur environnement. C’est un moyen, par exemple, de mieux évaluer le potentiel d’un client, qui peut se mesurer en chiffre d’affaires, mais pas seulement. « Un client prestigieux peut avoir une valeur stratégique en termes d’image », précise Yvelise Lebon. En fonction de cette valeur, le commercial pourra déterminer, avec son manager, la façon d’aborder chaque client – téléphone, visite, e-mail –, ainsi que la fréquence des contacts.

Assurer un relais efficace

Le commercial qui possède cette culture marketing assure, par ailleurs, un bien meilleur relais pour les actions de marketing menées sur le point de vente ou visant le client utilisateur. En B to C, ces actions vont porter sur le trade marketing, le merchandising ou l’aménagement de la surface de vente. Le vendeur peut également s’inscrire dans une démarche de géomarketing. Le commercial d’un fournisseur de la grande distribution va, ainsi, compiler les données du magasin relatives à ses ventes, sa zone de chalandise, ses clients, etc. avec la base de données marketing de son entreprise. « Le géomarketing permet d’identifier très précisément les sources de développement, explique Serge Cogitore, responsable de l’activité grande distribution à la Cégos. Au commercial, ensuite, de proposer et de mettre sur pied les actions de marketing direct ad hoc. » En B to B, le commercial va, par exemple, accompagner des actions promotionnelles. Bien entendu, cette approche ne peut être adoptée et pérennisée que si elle est portée par la direction commerciale. « Aucun professeur n’aura autant d’impact que le manager lui même », insiste Thierry Meiers. Un message qui peut-être véhiculé à l’occasion des séminaires, puis relayé au cours des réunions commerciales. La direction commerciale peut également envisager une formation. De l’avis des professionnels, les stages doivent se dérouler en intra, s’appuyer sur des cas parlants et ne pas dépasser quatre jours. « À cette occasion, il est intéressant d’impliquer le service marketing, par le biais d’interventions courtes », note le représentant de Bernard Julhiet Consulting. Un apprentissage qui pourra être complété par du coaching sur le terrain. Mais le manager doit garder à l’esprit que la formation n’est que l’un des instruments à sa disposition.

Avis d’expert

Frank Azimont, directeur de l’unité pédagogique et de recherche marchés et innovations à l’EM Lyon « À l’EM Lyon, tout futur négociateur suit des cours de marketing » À l’EM Lyon, les étudiants construisent leur propre cursus en optant pour divers électifs. « Pour une orientation négociation et vente, le marketing est incontournable », explique Frank Azimont, responsable des cours de marketing et de négociation. Les étudiants abordent les processus d’achat, les méthodes de promotion et de stimulation de la demande dans les cours de marketing d’affaires, d’ECR (efficient consumer response) et de category management. « Les futurs négociateurs doivent être à même de présenter une étude marketing à leurs clients, d’analyser un panel et les spécificités d’une offre par rapport au marché et à la concurrence, illustre Frank Azimont. Ils doivent également être capable de recommander, à un acheteur-distributeur, un prix de vente consommateur et de le justifier, de parler de la manière d’exposer un produit dans un rayon, de relayer des opérations de promotion et d’en tirer des conclusions, de bâtir des indicateurs de performances des opérations de promotion. »

Témoignage

Jean-Michel Segard, directeur commercial du groupe Millet, fabricant de fenêtres et portes en bois, aluminium et PVC « Grâce aux données du terrain, le service marketing fournit des études comparatives » Le groupe Millet dispose d’une force de vente de huit commerciaux intégrés et de seize commerciaux externes. Entré dans la société en juin 2002, Jean-Michel Segard a, dès le mois de septembre, lancé une vaste campagne de sensibilisation à la veille concurrentielle. Le départ de cette démarche marketing a été donné au cours d’un séminaire. « Au-delà des explications fournies, nous avons organisé un challenge commercial. Objectif : les encourager à remonter tout type d’informations sur la concurrence, les prix pratiqués, les catalogues, les opérations commerciales, etc. » Opération réussie, selon Jean-Michel Segard : « L’habitude est désormais prise et le processus bien enclenché. Les données sur la concurrence sont transmises à la cellule marketing. Les commerciaux ont compris qu’il y allait de leur intérêt. » Ces études permettent aux commerciaux de sortir de la démarche du moins-disant, de développer un autre discours que celui du prix, en privilégiant la qualité.

À retenir

- Clients diversifiés, marché centralisé, produits à valeur ajoutée, etc. sont autant d’éléments qui poussent les entreprises sur les chemins du marketing. - Pour convertir vos commerciaux au marketing, sachez porter haut et fort le message, lors des séminaires et des réunions commerciales. - Encouragez les services marketing et commerciaux à travailler main dans la main. - Incitez votre force de vente à faire de la veille concurrentielle. - Donnez-lui les moyens de relayer les actions de marketing sur le terrain.

 
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Anne-Françoise Rabaud

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