Dossier[Décryptage] Le secteur de l'énergie: des ventes sous haute tension?
L'énergie est un secteur hétérogène et dynamique qui offre d'intéressantes opportunités de vente. À condition toutefois pour les fournisseurs de s'armer de patience!
![[Décryptage] Le secteur de l'énergie: des ventes sous haute tension?](https://www.actionco.fr/Assets/Img/DOSSIER/2014/3/234657/Comment-vendre-aux-acteurs-energie--L.jpg)
Sommaire
- L'énergie, un secteur qui se réinvente
- Les évolutions du marché de l'énergie
- L'externalisation, une tendance forte dans l'énergie
- Les stratégies de développement des énergéticiens
- [Zoom] Dans l'énergie, des politiques achats matures et exigeants
- Une sélection drastique
- Un fonctionnement par cycles
- Développer un partenariat
- Ouverture sur l'international, expertise, proximité: les qualités des fournisseurs dans l'énergie
- Des fonctionnements complexes
- Expertise et proximité
- [Témoignage] Être commercial dans l'énergie
- [Pour aller plus loin] Les salons dédiés au secteur de l'énergie
1 L'énergie, un secteur qui se réinvente
En appelant de ses voeux une "grande entreprise franco-allemande pour la transition énergétique", lors de sa conférence de presse du 14 janvier 2014, François Hollande a remis sur le devant de la scène l'un des principaux enjeux de ces prochaines années. La façon dont la France souhaite négocier son tournant énergétique pour respecter son engagement de diviser ses émissions de gaz à effet de serre par quatre entre 1990 et 2050 va en effet peser sur l'avenir.
Si le secteur (électricité, nucléaire, pétrole, gaz, charbon, énergies renouvelables) doit se réinventer en permanence pour rester à la hauteur de ses nouveaux enjeux, la dernière évolution marquante en France a été l'ouverture du marché à la concurrence en 2007. "Cela a contribué à transformer en profondeur les métiers de l'énergie", souligne Céline Chanez, associée fondatrice d'Atlante & Cie, cabinet de conseil en stratégie opérationnelle dédié aux acteurs de l'énergie. Une évolution qui a, en effet, redessiné les règles, entraînant une multiplication du nombre d'acteurs (autour d'une vingtaine dans l'électricité).
Reste que, dans les faits, seule une minorité de consommateurs a changé d'opérateur. Les fournisseurs historiques continuent toujours de dominer le marché. En 2012, ils possédaient, selon le Médiateur national de l'énergie, 93% des parts de marché de l'électricité contre 7% pour les nouveaux entrants (89% vs 11% dans le secteur gazier). À cela s'ajoute que le transport et la distribution d'énergie n'ont pas subi cette évolution et restent très concentrés, demeurant pour l'essentiel entre les mains des gestionnaires de réseaux traditionnels, comme RTE pour le transport de l'électricité et ErDF pour sa distribution, toutes deux filiales d'EDF.
2 Les évolutions du marché de l'énergie
Autre caractéristique du marché actuel: l'innovation. Avec bien évidemment les énergies renouvelables, notamment le photovoltaïque, qui ont connu un fort développement à la fin des années 2000... Par ailleurs, des expérimentations sont également menées sur les réseaux intelligents. Il s'agit d'équipements intégrant les énergies alternatives aux réseaux électriques traditionnels, tout en permettant aux clients finaux de mieux contrôler leur consommation d'énergie. Un véritable levier de développement pour le secteur, tout comme l'efficacité énergétique, qui vise à améliorer la consommation des bâtiments.
Autre chantier qui nécessite de fortes ressources de R&D: l'exploitation du gaz de schiste, qui n'est pour le moment pas encore autorisé en France.
Ouverture du marché de l'énergie à la concurrence en France, développement des énergies renouvelable... L'énergie est un secteur d'activité en pleine évolution. Le point sur ses enjeux.
3 L'externalisation, une tendance forte dans l'énergie
Dans un contexte d'évolution permanente du secteur, "les acteurs de l'énergie privilégient l'externalisation de ce qui ne relève pas de leur coeur de métier, comme les fonctions support, comptabilité, RH, centres d'appel, etc.", détaille Céline Chanez, fondatrice et associée d'Atlante & Cie, cabinet de conseil en stratégie opérationnelle dédié aux acteurs de l'énergie.
4 Les stratégies de développement des énergéticiens
Allant pour certaines jusqu'à créer des directions de services partagés entre leurs différentes filiales, et cela avec un seul objectif: optimiser leurs coûts. Une logique qui les a aussi conduits à industrialiser leur processus, à regrouper leurs prestations dans des centres de services, notamment dans l'informatique, mais pas seulement.
Ainsi recentrés sur leur coeur de métier, les énergéticiens n'hésitent pas non plus, par ailleurs, à rechercher en interne de nouvelles compétences dont ils auraient besoin. D'où une stratégie de développement par croissance externe, notamment via le rachat de PME innovantes.
Pour faire face aux défis de leur secteur, les acteurs de l'énergie cherchent à se recentrer sur leur coeur de métier, et donc à externaliser les fonctions support. Principal objectif: optimiser leurs coûts.
5 [Zoom] Dans l'énergie, des politiques achats matures et exigeants
"Les directions achats des industriels de l'énergie sont aujourd'hui matures et structurées", observe Thierry Voisin, directeur groupe énergie, industrie et sciences de la vie d'Altran, société de conseil en innovation et ingénierie avancée. Pour conjuguer performance opérationnelle et réduction des coûts, elles apparaissent de plus en plus exigeantes avec leurs fournisseurs. Même si toutes ne le font pas encore, ou pas à la même vitesse, "elles ont tendance aujourd'hui à réduire leur panel et à multiplier les critères de sélection à l'entrée", a observé Benjamin Reynier, directeur de l'agence Énergie chez Extia, société de conseil en ingénierie, notamment spécialisée dans le secteur de l'énergie.
6 Une sélection drastique
Une exigence, sans doute un peu tempérée par la "transparence" dont elles font preuve pour recruter leurs fournisseurs: "Leur référencement est très ouvert et se fait sur des critères objectifs", constate Céline Chanez, fondactrice et associée d'Atlante & Cie.
Autre bonne nouvelle pour les fournisseurs, "la sélection en amont par le cahier des charges est drastique, mais une fois cette barrière passée, les acteurs de l'énergie négocient peu, car c'est un secteur qui a les moyens. On n'est pas comme avec certains autres clients dans la négociation de bouts de chandelle", relate Rémi Drouin, responsable du pôle développement et stratégie de Théâtre à la carte, fournisseur de formations par le théâtre. "Une fois qu'on est rentré dans le panel, une grosse partie du travail est faite, renchérit Emmanuel Turini, commercial au sein de GFI Informatique, fournisseur de services informatiques. Reste ensuite à développer son offre sur le long terme."
7 Un fonctionnement par cycles
Autre particularité des politiques de référencement dans ce secteur: elles s'effectuent dans le cadre de plans pluriannuels, autrement dit tous les trois à quatre ans. Dans ces conditions, il est plus difficile pour un fournisseur de se faire recruter en cours de cycle. D'où la nécessité, l'obligation même, de s'adapter à ces cycles longs.
"Chez nous, une dizaine de personnes travaillent six à huit mois pour se faire référencer chez les grands comptes de l'énergie les années où ils renouvellent leurs panels fournisseurs", explique le commercial de GFI Informatique, qui souligne que s'ancrer dans ce secteur et acquérir une bonne connaissance de ses clients prend du temps. "Tout fournisseur de ce domaine doit prendre son mal en patience...", conseille-t-il.
Reste l'option de passer par des voies détournées, c'est-à-dire d'agir hors des périodes de référencement, en sollicitant les directions opérationnelles. Ce qui implique de ne plus porter ses efforts sur la qualité des informations transmises dans une grille, mais en construisant un argumentaire vraiment spécifique. "Il s'agit de proposer une expertise différenciante et de porter un discours adapté, sur un sujet particulier répondant à leurs enjeux", insiste Céline Chanez (Atlante & Cie).
8 Développer un partenariat
Comme dans d'autres secteurs d'activité, les entreprises travaillent de plus en plus sur le modèle du partenariat avec leurs fournisseurs. "Contrairement à d'autres secteurs comme les services ou la grande distribution, leurs salariés sont rompus à la gestion de projets. Ils savent où ils vont. Les entreprises veulent être partie prenante dans la création du projet, au sein d'équipes mixtes incluant leurs chargés de projet et nos commerciaux", a observé Didier Bichon, vice-président Europe de SilkRoad, fournisseur de logiciels de gestion RH. Ce qui conduit d'ailleurs ces sociétés à réduire leur panel en vue d'augmenter la part de marché de chacun de leurs fournisseurs.
Mais cette tendance reste encore marginale selon Céline Chanez (Atlante & Cie), qui constate que "les entreprises, à plus forte raison en situation de leader, n'ont pas vraiment abandonné leur ancienne logique axée sur un rapport de force. Elles ne veulent pas se retrouver en situation de dépendance et favorisent la répartition de l'attribution des marchés entre plusieurs entreprises". Une logique qui cependant les rattrape et les contraint à changer... lentement, observe l'experte, notamment en instaurant de nouvelles clauses valorisant davantage le partenariat. "On tend vers cela, admet Emmanuel Turini (GFI Informatique). Elles partagent plus leurs objectifs qu'avant."
Devenir fournisseur pour le secteur de l'énergie nécessite de franchir la barrière de la sélection via un cahier des charges drastiques. Mais une fois intégré au panel fournisseurs, les opportunités sont nombreuses.
9 Ouverture sur l'international, expertise, proximité: les qualités des fournisseurs dans l'énergie
10 Des fonctionnements complexes
Une particularité du secteur est que les acteurs qui pèsent le plus lourd ont tous une dimension internationale. Ce qui oblige les fournisseurs à prendre en compte les différentes réglementations nationales (voire les lois régionales) pour que leurs offres soient conformes aux règles en vigueur dans chacun des pays où leurs clients souhaitent être présents. "Il faut être capable de proposer une offre qui s'utilise de la même manière partout, tout en tenant compte des spécificités locales, observe Didier Bichon, vice-président Europe de SilkRoad, fournisseur de logiciels de gestion RH. Autrement dit, miser non pas sur le local, ni sur le global, mais sur le "glocal"".
Par ailleurs, "il n'est pas envisageable que les commerciaux des fournisseurs ne parlent pas anglais", souligne Thierry Voisin (Altran). Et ce, même s'ils travaillent en France, parce que l'activité dans le secteur est très internationalisée et qu'ils peuvent être amenés à avoir des interlocuteurs dans les différentes filiales du client qu'ils visent.
Autre spécificité: la lenteur des processus de décision. "Plus encore dans les entreprises récemment privatisées que dans celles du secteur privé historique, remarque Rémi Drouin (Théâtre à la carte). Les démarches y sont encore chronophages, et les critères parfois politisés." Ce qui n'empêche pas ces sociétés d'exiger de la réactivité du côté de leurs fournisseurs...
11 Expertise et proximité
Outre la réactivité, les acteurs de l'énergie attendent également de l'expertise de la part de leurs fournisseurs. C'est la raison pour laquelle la société de conseil en ingénierie Extia a recruté il y a moins d'un an un directeur technique. Son rôle est à la fois d'apporter son expertise et d'être l'interlocuteur unique des grands groupes. "Cela nous permet de renforcer la qualité des process, de donner de la légitimité à nos offres, explique Benjamin Reynier, directeur de l'agence Énergie chez Extia. Et cela rassure les clients qui se sentent davantage accompagnés sur leurs enjeux." Et pour aller plus loin, ce directeur technique est notamment épaulé en interne par une acheteuse qui a aussi été recrutée récemment et "qui lui apporte sa connaissance des processus achats des entreprises".
Les acteurs de l'énergie attendent aussi une qualité d'exécution. "Après la vente: c'est là que tout commence", souligne Thierry Voisin (Altran), qui rappelle que l'idée n'est pas de faire du one shot mais de vendre un projet, c'est-à-dire chaque étape de la réalisation de celui-ci. D'où la nécessité pour le commercial d'être capable d'installer une relation sur la durée. Car il va de soi que construire une centrale nucléaire, une installation hydroélectrique est l'affaire de plusieurs mois, voire de plusieurs années, sans compter que le montant des sommes engagées implique une excellence dans la relation. Cela va d'ailleurs de pair avec d'autres exigences: proximité, flexibilité et confidentialité. Un trio incontournable pour conquérir les acteurs du secteur.
Présents à l'international, les acteurs de l'énergie exigent de leurs fournisseurs des offres adaptées aux contraintes des différents pays où ils sont présents. L'expertise est donc de mise, ainsi que la parfaite maîtrise de l'anglais.
12 [Témoignage] Être commercial dans l'énergie
L'effondrement des filières dites vertes et la concentration des acteurs dans la distribution d'énergie ont entraîné un tassement de l'emploi dans le secteur. En parallèle, le métier de vendeur évolue. "Au-delà des qualités purement commerciales (relationnel, autonomie, rigueur, écoute client), les employeurs sont de plus en plus demandeurs d'une compétence technique", note Jens Bicking, fondateur et gérant d'Elatos, cabinet de recrutement notamment spécialisé dans les métiers de l'énergie.
Et l'expert de constater que, en fonction des postes proposés, les entreprises emploient aussi bien des profils issus de BTS que d'écoles de commerce, du moment qu'ils sont capables d'apporter cette double compétence. Mais pas aux mêmes salaires... Un commercial issu de BTS commencera à 25000€ annuels quand un bac+5 pourra revendiquer 35000€ annuels, un salaire qui montera rapidement, surtout dans le secteur du pétrole. "Globalement, l'énergie est un secteur qui paie bien", explique Jens Bicking. Un directeur commercial dans l'énergie, quant à lui, a un salaire moyen compris entre 70000 et 150000€ annuels, voire davantage en fonction des dimensions du poste (hors primes et autres avantages). Un facteur d'attractivité pour le secteur.
"Je suis confiant pour les années à venir. Il y aura des opportunités, surtout dans l'efficacité énergétique, le stockage des déchets, les réseaux intelligents", conclut le spécialiste du recrutement.
Le point de vue de Jens Bicking, fondateur et gérant d'Elatos (cabinet de recrutement notamment spécialisé dans les métiers de l'énergie), sur les opportunités professionnelles pour les profils commerciaux dans le secteur de l'énergie.
13 [Pour aller plus loin] Les salons dédiés au secteur de l'énergie
Journées de la géothermie (géothermie) : Paris, 10-11 avril 2014
Keymica (chimie, pétrochimie, gaz) : Le Bourget, 21-22 mai 2014
ExpoBiogaz (gaz) : Paris, 3-5 juin 2014
World Nuclear Exhibition (nucléaire) : Le Bourget, 14-16 octobre 2014
Energaïa (énergies renouvelables) : Montpellier, décembre 2014
Bepositive (bâtiment et énergies renouvelables) : Lyon, 4-6 mars 2015
Interclima+elec (efficacité énergétique des bâtiments) : Villepinte, 2-6 novembre 2015
Découvrez les événements dédiés aux acteurs du marché de l'énergie.
Sur le même thème
Voir tous les articles Stratégie commerciale