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Stratégie grands comptes 4/5. Managez vos commerciaux grands comptes comme des experts

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Être directeur grands comptes n’est pas chose simple : il faut faire preuve de capacités d’adaptation et de psychologie, savoir laisser de l’autonomie tout en coachant de près.

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Manager une équipe de commerciaux grands comptes est tout sauf simple. Tout d’abord parce que les ingénieurs comptes clés, le plus souvent des collaborateurs expérimentés, se sont forgé, au fil du temps, des personnalités. Ensuite parce qu’ils viennent d’horizons variés. Certains sont issus de formations techniques, d’autre du commercial, d’autres encore de la gestion. La pression sur les directeurs grands comptes est d’autant plus forte que leur équipe gère un volume d’affaires extrêmement important et que, par ailleurs, les commerciaux grands comptes constituent une denrée rare, très prisée sur le marché de l’emploi. « Si, au sein de la structure grands comptes, la dimension management n’est pas bien prise en compte, l’entreprise risque de perdre très vite ses meilleurs éléments, met en garde Dominique Soulier, directeur d’affaires chez Altédia Cogef. La sanction ne se fait généralement pas attendre ! »

Individualisation et reconnaissance

Néanmoins, le manager doit éviter de traiter ses commerciaux à haute valeur ajoutée comme des “divas”, afin de limiter, dans la mesure du possible, les jalousies et risques de démotivation des commerciaux issus du terrain. Le manager doit donc trouver le juste équilibre. « La première règle que le manager d’une équipe de commerciaux grands comptes doit suivre pour mener à bien sa mission est de faire preuve d’empathie afin de s’adapter à chacune des personnalités, explique Évelyne Platnic-Cohen, associée chez Consonance, société de formation et de conseil sur les problématiques grands comptes. Il lui faut à tout prix individualiser son approche managériale. » S’il doit manager au cas par cas, c’est aussi parce qu’en face de lui, les commerciaux font du sur-mesure, qu’aucun compte ne génère deux fois la même opération et que chaque affaire est unique. « Le directeur grands comptes doit permettre à chacun de développer son savoir-faire, ses talents et ses compétences », poursuit Jacques Inizan, directeur de Comanagement, société de conseil et de formation auprès des directions commerciales. Ce qui suppose qu’au préalable, il ait repéré les qualités originales de chacun. Ces collaborateurs d’exception seront d’autant plus motivés que l’entreprise saura les reconnaître. En leur accordant, sinon des traitements de faveur, du moins des signes de reconnaissance forts : participation à des groupes de réflexion, contacts rapprochés avec la direction du groupe. Les commerciaux comptes clés d’Écolab France, par exemple, sont fréquemment conviés à des salons, associés à des groupes de réflexion en interne (marketing, commercial, etc.), etc.

Perspectives d’avenir

La motivation des grands comptes passe également par un plan individuel de progression. Chez Écolab, l’offre de formation est très variée : langues, informatique, finance, négociation commerciale, etc. En offrant à ses collaborateurs clés la possibilité de se perfectionner, l’entreprise s’assure de leur motivation. À travers ces formations, elle leur offre également des perspectives d’avenir. « Les commerciaux grands comptes aspirent, lorsqu’ils ont acquis une certaine expérience, à manager, note Jacques Inizan. L’entreprise doit donc essayer, dans la mesure du possible, de les mettre sur cette voie. » Un principe d’évolution en interne qu’Écolab France a su appliquer. François Proudhon, directeur des ventes, est ainsi passé par la case “commercial grand comptes”. Autre illustration : aujourd’hui, l’équipe grands comptes de la division hôtellerie et restauration est chapeautée par un directeur grands comptes de 45 ans, qui dispose d’une expérience réussie au poste de commercial grands comptes.

Un management participatif

Ce besoin de suivi n’implique pas, pour autant, de multiplier les face-à-face. Les commerciaux grands comptes, sont, pour la plupart, épris de liberté. Évitez de leur infliger trop de contraintes. « Une réunion hebdomadaire ? Pour se dire quoi ? », tranche Évelyne Platnic-Cohen. Le directeur grands comptes doit plutôt suivre ses commerciaux à mi-distance. Un point mensuel semble approprié. Le manager et son commercial comptes clés y parleront stratégie et affineront les approches. Ils définiront un champ d’action précis pour chaque compte, ainsi que les objectifs quantitatifs et qualitatifs, feront un point sur l’avancement de l’objectif, les affaires en cours, etc. Idéalement, chaque compte devrait faire l’objet d’une fiche de stratégie, détaillant l’objectif, les moyens internes et externes et les étapes pour y parvenir. Mais rares sont les entreprises qui procèdent de façon organisée et systématique. Dans le cadre de ce pilotage des comptes, la visite accompagnée peut également être envisagée. Attention, toutefois, à ne pas s’imposer. Pour Évelyne Platnic-Cohen, « le manager doit le faire si le commercial grands comptes le demande. Il ne faut pas imposer un accompagnement de visite, plutôt être à l’écoute en cas de besoin. » Finalement, tout au long de l’année, le management d’un commercial grands comptes ressemble à s’y méprendre à du coaching. « Un management trop directif serait voué à l’échec, mieux vaut opter pour un management participatif », conseille le directeur de Comanagement. Une approche qui va, par exemple, influencer le mode de définition de l’objectif. « Le chef de file des commerciaux grands comptes doit opter pour un management participatif par objectifs », tranche Jacques Inizan. Autrement dit, le commercial propose un volume d’activité, ainsi qu’une série d’événements à valeur ajoutée, et le manager valide.

Être un “facilitateur”

Le vendeur grands comptes attend également beaucoup de son manager sur un autre terrain : celui-ci doit se conduire en “facilitateur”. Le directeur doit mettre de l’huile dans les rouages qui relient les services de l’entreprise susceptibles d’être sollicités par ses collaborateurs. Néopost a, par exemple, créé des cellules financière et administrative chargées d’accompagner les commerciaux grands comptes dans leurs négociations. « Nous avons également bâti une équipe d’ingénieurs technico-commerciaux, qui valide la faisabilité de l’ensemble des projets », ajoute Charles Dauman, directeur commercial de Néopost France. En fin de compte, la hiérarchie doit veiller à ce qu’à aucun moment les commerciaux grands comptes ne se sentent isolés dans leur mission. Pour consolider l’entrain et la motivation ou donner une direction au développement de l’activité des commerciaux grands comptes, le management peut également mettre sur pied des challenges, qui seront plus longs, et surtout davantage portés sur des critères qualitatifs que les challenges concoctés pour les forces de vente terrain. Preuve, une fois de plus, que tout, dans cette approche managériale, requiert le temps de la réflexion.

Témoignage

Charles Dauman, directeur commercial de Néopost France « Un commercial grands comptes doit pouvoir prendre des décisions face à un client » En France, Néopost, spécialiste de la gestion et du traitement du courrier, dispose d’une force de vente de 140 personnes, dont plus de 35 sont dédiées aux grands comptes. Charles Dauman veille à ce que les managers en charge des commerciaux grands comptes facilitent leur travail. « Notre système de délégation permet aux commerciaux d’être autonomes sur les questions de prix, de budget, de promotions, etc. » Le directeur d’agence grands comptes voit ses collaborateurs chaque mois en entretien individuel. Pour assurer leur motivation, Néopost organise des challenges évolutifs. « Notre challenge annuel, “Club champion”, repose sur des critères quantitatifs, mais il pourrait évoluer vers des éléments qualitatifs, comme la satisfaction clients, qui se mesurerait au travers d’enquêtes. »

Rémunération

Des salaires de seniors Parce que sa mission requiert de multiples compétences et engage l’entreprises sur le long terme, un commercial grands comptes perçoit une rémunération sensiblement supérieure à celle d’un commercial traditionnel. « Les salaires d’embauche oscillent entre 55 000 et 70 000 euros bruts par an », selon Philippe Cirier, du cabinet Opteaman. Un montant qui varie notamment d’un secteur d’activité à l’autre. Autre différence : « On compte 75 à 80 % de fixe pour un commercial comptes clés, contre 60 % environ pour un commercial traditionnel. » Le variable étant essentiellement indexé sur le chiffre d’affaires ou sur la marge dégagée. Un fixe élevé, parce que la mission du commercial grands comptes n’est pas tant de vendre que d’organiser en interne ses projets. Un avis que partage François Proudhon, directeur des ventes chez Écolab, pour qui « un commercial grands comptes n’est pas un “chasseur” ». C’est pourquoi le fixe pèse 70 % du total. Mais, comme toute règle, elle a ses exceptions : lors de la réorganisation de la structure grands comptes chez Néopost, il y a deux ans environ, un nouveau système de rémunération a été mis en place. « Nous sommes passés d’un système basé sur 20 % de fixe seulement à un système dans lequel le fixe représente 45 % de leur salaire total », explique Charles Dauman, directeur commercial de Néopost.

À retenir

Le directeur grands comptes doit individualiser son approche managériale avec ses collaborateurs. Il peut accorder des signes de reconnaissance forts : groupes de réflexion, participation à des salons, etc. L’entreprise proposera des formations, offrant ainsi la possibilité d’évoluer vers des postes de management. Une réunion mensuelle, orientée pilotage et stratégie des comptes, est préférable à un entretien hebdomadaire. Préférez le style participatif au style directif. Jouez le rôle de “facilitateur”, nouez des liens forts avec les services susceptibles d’intervenir dans les propositions clients de vos commerciaux.

 
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Anne-Françoise Rabaud

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