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Quelle place pour les commerciaux face à l'intelligence artificielle ?

Publié par Aude David le | Mis à jour le
Jean Muller, vice-président adjoint des ventes et du développement de JCDecaux (gauche), et Olivier Novasque, fondateur et PDG de Sidetrade
Jean Muller, vice-président adjoint des ventes et du développement de JCDecaux (gauche), et Olivier Novasque, fondateur et PDG de Sidetrade

Si de nombreux départements des ventes craignent que les outils d'intelligence commerciale ne remplacent les commerciaux, ceux-ci peuvent au contraire aider le vendeur à exploiter au mieux son intelligence émotionnelle. Plusieurs intervenants du Salon Sales Intelligence ont expliqué comment.

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L'intelligence artificielle va-t-elle remplacer les commerciaux ? Certains se posent la question, alors que Facebook entraine des bots à négocier, et que de nombreux consommateurs préfèrent effectuer leurs achats sans recourir à un vendeur humain. Pourtant, nombreux sont les partisans de l'intelligence artificielle ou augmentée (la sémantique varie) à affirmer que les outils numériques vont au contraire permettre au commercial de talent d'exprimer son plein potentiel.

"L'intelligence émotionnelle est propre aux très bons commerciaux"

Selon Jean Muller, vice-président adjoint des ventes et du développement chez JCDecaux, "l'intelligence artificielle peut notamment enrichir la connaissance clients du commercial, afin de lui permettre de mieux segmenter sa clientèle et d'interagir au bon moment". En revanche, "l'intelligence émotionnelle est propre aux commerciaux, et même aux très bons commerciaux" : c'est à l'humain de jouer son rôle de conseiller, d'apporter des solutions personnalisées. "L'IA est comme le GPS du commercial, estime le cofondateur de la plateforme d'accélération des ventes Sidetrade, Olivier Novasque. Il peut être utile dans tout le funnel, aider à obtenir les meilleurs prospects, prédire quels clients vont partir ou au contraire ceux sur lesquels se focaliser. Mais au final, c'est tout de même le commercial qui conduit la voiture."

Réginald Thiébaut, directeur commercial France d'Eni

C'est ce qu'a expérimenté la filiale française du distributeur d'électricité d'origine italienne Eni. Longtemps, en vente directe aux grands comptes, les prospects étaient démarchés sans ciblage précis, ce qui se traduisait par une faible productivité et peu d'engagement des prospects. L'entreprise a donc mis en place un plan intégrant une palette d'outils : CRM ergonomique, outil de cartographie des prospects, comptes LinkedIn. Ils recourent également à l'intelligence augmenté, par exemple avec une solution de lead scoring prédictif, qui leur permet de mieux cibler leurs prospects, en identifiant notamment les caractéristiques de leurs clients idéaux pour rechercher ensuite des profils similaires. " Tout le monde sait que la data est le pétrole du XXIe siècle, mais le plus important est la smart data, celle qui permet de comprendre ses leads", juge Jean Muller.

Le risque est de penser que les outils vont tout faire

Pour que l'intelligence artificielle fonctionne, elle doit être nourrie avec les bonnes données, non seulement celles présentes dans le CRM, mais également celles externes au fichier client, note Olivier Novasque : "les données sur les transactions, les informations financières, celles du service réclamation, du marketing, les éventuels litiges..." et même les données externes à l'entreprise : ce que dit le client ou prospect sur les réseaux sociaux, s'il a assisté à la conférence d'un concurrent, s'il s'est connecté à un concurrent sur LinkedIn... Comprendre ses cibles est bien sûr un enjeu essentiel pour répondre à leurs attentes. C'est pour cela qu'Eni utilise un outil d'emails personnalisés, qui permet de voir quand la cible a ouvert et lu le message, les pièces jointes, les liens, et ainsi de savoir à quel moment entrer en contact direct avec la personne.

"Il n'y aura pas de remplacement du commercial par un robot"

Pour autant, juge Jean Muller, le risque est de "penser que les outils vont tout faire : le directeur commercial doit maîtriser les fondamentaux de l'intelligence commerciale". L'intelligence artificielle doit donc être utilisée en complémentarité du travail du commercial et non en remplacement : les projets d'intelligence artificielle n'allégerons donc pas la force de vente. Ce que confirme le directeur commercial d'Eni, Réginald Thiébaut : "Il n'y aura pas de remplacement du commercial par un robot. Le but de ces outils est de ne pas perdre de temps dans des actions qui ne servent à rien.". Mais ils peuvent en revanche améliorer améliorer l'image de la marque véhiculée par les commerciaux. Réginald Thiébaut note ainsi que les outils d'intelligence commerciale ont conféré à ses forces de vente une image plus professionnelle, en leur permettant de se démarquer de leurs concurrents, qui pour l'instant ne s'intéressent pas réellement à ce genre de technologies.

Le commercial est de moins en moins un loup solitaire

Jean Muller, de JCDecaux (gauche), et Olivier Novasque, de Sidetrade

"Les ventes sont de plus en plus complexes, analyse Jean Muller. D'un côté, les clients ne veulent plus forcément entrer en contact avec un commercial, et les solutions de sales automation vont de plus en plus se développer pour les ventes simples. A côté, il y a des ventes de plus en plus complexes, à haute valeur ajoutée, et celles-ci nécessitent l'intelligence humaine, avec des hommes et des femmes de haut niveau de talent et d'expertise. Les ventes très complexes font appel à l'intelligence collective, et rendent le métier de commercial de plus en plus inclusif : les ventes complexes ont besoin de beaucoup de compétences au sein de l'entreprise, le commercial est de moins en moins un loup solitaire". Ce qui implique que toute l'entreprise doive se transformer pour développer son esprit commercial.

"Quand les commerciaux conseillent l'outil à leurs pairs, c'est une réussite"

Quant au projet d'intelligence artificielle, le vice-président adjoint des ventes et du développement de JCDecaux et par ailleurs président des DCF souligne que la transformation doit être "menée par le directeur commercial, et non imposée par la direction financière ou la DSI". Chez Eni, Réginald Thiébaut explique que le déploiement d'outils d'intelligence commerciale ont permis une transformation de la fonction commerciale et une montée en compétence des commerciaux. Mais, là aussi, pour que le changement de culture soit mis en oeuvre efficacement, il ne doit pas être imposé mais être pleinement adopté par les commerciaux. "Nous faisons tester chaque outil par des commerciaux avant de les adopter définitivement, affirme le directeur commercial d'Eni. Quand les commerciaux le testent et le conseillent à leurs pairs, on peut considérer que c'est une réussite". L'enjeu est de taille pour toute l'entreprise : selon un rapport de McKinsey de juin 2017, les entreprises qui ont adopté l'IA tôt ont des marges de 5 à 15% plus élevées que leurs concurrents. Mais investir dans un projet d'intelligence artificielle coûte cher, "il faut donc convaincre la direction générale, explique Réginald Thiébaut, et trouver un ROI rapidement". Même s'il reconnait que déterminer le ROI est compliqué, car il est difficile "d'estimer si le commercial aurait remporté le deal même sans ces outils".


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