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Droit. Démission : ce que vous pouvez négocier

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Au-delà de ce qu'imposent la loi et le droit social, la rupture d'un contrat de travail peut donner lieu à des négociations, sur le préavis notamment.

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Simple démission, licenciement pour motif économique ou personnel : on ne quitte pas une entreprise comme on sort d'un moulin. Le droit social est là, qui régit d'une main de fer la fin d'un contrat de travail et veille à ce que les droits des uns et des autres soient respectés. Un droit qui impose sa loi, mais qui laisse aussi aux deux parties une porte ouverte à la négociation. « D'où l'intérêt, observe maître Emmanuelle Sapène, avocate spécialisée en droit social au cabinet Péchenard et Associés, d'entretenir de bonnes relations avec son employeur. »

Le premier point de négociation possible porte sur le préavis, dont la durée, pour un cadre, est traditionnellement de trois mois. En cas de démission, l'objectif du salarié est, généralement, de partir dans les plus courts délais ; départ soumis au bon vouloir de l'employeur, qui peut écourter le préavis, voire même dispenser le salarié de son exécution. Toutefois, observe maître Emmanuelle Sapène, « certains employeurs mettent un point d'honneur à appliquer la loi à la lettre et font pratiquer le préavis dans sa totalité ». S'il va à l'encontre de cette décision, « le collaborateur s'expose à des poursuites prud'homales par son ex-employeur, souligne l'avocate. Il peut alors être condamné à payer le préavis. Un cas rare, mais qui s'est déjà vu ! » Tout est donc affaire de contexte et de personnes. En cas de dispense par l'employeur, le salarié continue à percevoir les salaires et avantages qu'il aurait reçus s'il avait accompli son travail pendant la durée du préavis.

Du cas par cas

Lorsque l'employeur dispense le salarié de son préavis, se pose alors la question des avantages en nature, principalement pour les cadres et les managers de la fonction commerciale. « Jusqu'à la date de la rupture effective du contrat, le salarié peut refuser de restituer le véhicule de fonction qui a été mis à sa disposition pour un usage professionnel et personnel », indique maître Pauline Perrin-Jeol dans son ouvrage intitulé Le guide du salarié averti (Éditions Marabout, 2002). À ce sujet, maître Kathleen Harson, avocate collaboratrice en droit social chez Bersay et Associés, rappelle qu'un arrêt de la Cour de cassation de mars 2000 refuse à l'employeur le droit de reprendre une voiture de fonction à usage mixte pour la durée du préavis. Au-delà de cette réglementation, il arrive que le salarié rachète son véhicule de fonction, son ordinateur portable ou encore son téléphone cellulaire, en accord avec son employeur. Des transactions qui se négocient au cas par cas.

Il en va de même pour les indemnités que le salarié peut-être amené à percevoir à la suite d'une rupture de contrat avec son entreprise : il y a ce qu'impose la loi et le champ laissé à la négociation. Ainsi, dans le cas d'une démission comme d'un licenciement pour cause réelle et sérieuse, le salarié a droit à une indemnité compensatoire de congés payés, au paiement de son préavis (qu'il l'effectue ou qu'il en soit dispensé), ainsi qu'aux indemnités légales prévues par la convention collective applicable. « En cas de licenciement pour faute grave, nuance maître Kathleen Harson (Bersay et Associés), le salarié a seulement droit à l'indemnité de congés payés. »

Négociation de l'indemnité

Au-delà de ces dispositions légales, les deux parties peuvent être amenées à négocier une indemnité dans le cadre d'une transaction faisant suite à un licenciement et portant sur les conséquences financières de la rupture du contrat de travail. « Dans le cas d'un licenciement, explique maître Kathleen Harson, la rupture du contrat de travail peut aboutir, après rapprochement des parties, à la conclusion d'une transaction, qui doit donner lieu à des concessions réciproques. À titre d'exemple, en contrepartie d'une indemnité transactionnelle, le salarié peut renoncer à engager une action judiciaire pour contester le bien-fondé de son licenciement. » La négociation du montant de l'indemnité transactionnelle dépend, quant à elle, de plusieurs facteurs : l'ancienneté du salarié, sa rémunération, la nature de ses fonctions ou encore les sommes qu'il pourrait obtenir si son licenciement était jugé sans cause réelle et sérieuse par la juridiction prud'homale. « Les indemnités transactionnelles sont véritablement négociables », reconnaît maître Kathleen Harson. Le contrat de travail d'un manager commercial peut également contenir une clause de non-concurrence, qui interdit au salarié d'exercer une activité professionnelle concurrente de celle de son employeur après son départ de l'entreprise. Pour être licite, il suffisait, jusqu'à très récemment, que cette clause soit indispensable à la protection des intérêts de l'entreprise, limitée dans le temps et l'espace, et qu'elle tienne compte des spécificités de l'emploi du salarié.

Or, depuis un arrêt en date du 10 juillet 2002 (rendu par la Chambre sociale de la Cour de cassation et confirmé par un arrêt en date du 7 janvier 2003), la clause doit également comporter une contrepartie financière. Et c'est là que le bât blesse, car la plupart des contrats de travail omettent ce paramètre financier. « Le salarié ne devrait donc pas se voir appliquer la clause de non-concurrence, sauf à pouvoir réclamer des dommages et intérêts à son employeur », indique la représentante du cabinet Bersay et Associés. Il ne devrait pas davantage avoir de comptes à rendre une fois qu'il a quitté l'entreprise, si ce n'est de respecter un devoir de loyauté et de discrétion vis-à-vis de son ancien employeur.

Plus rarement, le salarié peut bénéficier de stock-options. Autrement dit, il dispose de la faculté de souscrire des actions de la société à un certain prix, fixé le jour où l'option est consentie. Pour ce faire, les bénéficiaires disposent d'un certain délai pour lever l'option. Si le salarié quitte l'entreprise avant de l'avoir levée, il perd son droit. « Un arrêt de la cour d'appel de Versailles en date du 28 juin 2002, précise maître Kathleen Harson, stipule que, dans le cas d'un licenciement abusif, le salarié peut prétendre à des dommages et intérêts en invoquant la perte d'une chance de réaliser une plus-value. » « Plus de 80 % des litiges que les juridictions sociales sont amenées à connaître concernent la rupture du contrat de travail et, plus généralement, le licenciement, souligne maître Pauline Perrin-Jeol. C'est là que s'exacerbent les rapports de force ou que se dénouent les tensions. » Pour ne pas en arriver à ce stade, un seul credo : la négociation dans un esprit de compromis.

À retenir

- Le salarié peut demander à son employeur de le dispenser de son préavis – en général, de trois mois pour un cadre. - Il peut néanmoins continuer de bénéficier d'avantages en nature (voiture de fonction, par exemple), pendant la durée de son préavis. - Le rachat des avantages en nature résulte d'une négociation au cas par cas entre les deux parties. - Les indemnités dépendent de la nature de la rupture du contrat.

 
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Anne-Françoise Rabaud

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