ChatGPT : quel usage pour les commerciaux ?
Tout le monde parle de ChatGPT. Mais quelles opportunités offre cette révolution technologique aux commerciaux ? Si les usages sont multiples, attention à certaines limites.
Je m'abonneDepuis quelques mois, ChatGPT, développé par la société OpenAI, est dans tous les débats. Cette intelligence artificielle générative, capable de produire des textes longs et argumentés, répond à presque toutes les questions écrites des internautes. Après la troisième version, rendue publique fin 2022, GPT4 a été mis en ligne en mars avec une puissance potentiellement mille fois supérieure.
A sa suite, Google et Amazon s'apprêtent à lancer leurs propres IA génératives. Les usages professionnels sont déjà nombreux mais quid des commerciaux ?
Ider Oudad d'IoD Solutions recommande de mener une réflexion globale sur l'organisation de ses données et de l'IA. "Les capacités de ChatGPT entrent en ligne de compte mais ce ne sont pas les seules, assure-t-il. Je vois souvent plus de valeur ajoutée, vu la maturité actuelle des commerciaux, sur des outils plus basiques, dont on peut mieux mesurer le retour sur investissement. »
De nombreux usages...
Pour Xavier Paulik de Get Quanty, le premier usage est très prosaïque. « ChatGPT écrit très bien. Or les équipes commerciales ont parfois un problème de qualité de rédaction », estime-t-il. Avec la correction automatique des textes, « on tolèrera moins l'à-peu-près, la qualité d'écriture sera tirée vers le haut, permettant d'engager plus de conversations sans trop investir de temps », poursuit-il.
Le deuxième consiste à se familiariser avec un secteur mal maîtrisé en demandant au chatbot des synthèses. En revanche, attention : « Une question imprécise apporte une réponse imprécise ».
Pour des applications plus fines, cela se corse. En effet, l'outil n'a pas accès à des données personnalisées. On peut lui en fournir certaines mais c'est complexe et chronophage. De nombreux éditeurs comme Salesforce lancent donc des applications intégrant ChatGPT. Get Quanty a lancé une extension à sa plateforme. Sur le profil LinkedIn d'un prospect, elle affiche automatiquement un résumé de la page et des idées de messages personnalisés. En analysant les données du CRM et celles disponibles sur internet, l'outil peut synthétiser les connaissances sur un client, y compris en podcast à l'avenir, suggérer des e-mails en adaptant le discours commercial à la fois au produit et à la cible. A partir d'une offre commerciale, il peut aussi déterminer qui pourrait être intéressé et pourquoi.
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Arnaud Bellamy de SpringFive note que l'intégration de Chat GPT sur Slack permet de « résumer des conversations sur une opportunité de vente, recouper les informations avec le CRM » et aider à préparer les rendez-vous. De façon indirecte, la capacité de l'assistant virtuel à écrire du code informatique donne une réactivité plus forte aux équipes informatiques pour faire évoluer le CRM.
Ider Oudad explique qu'il est désormais possible d'interagir directement sur WhatsApp avec l'IA. Il voit arriver une personnalisation accrue, notamment en BtoB, à moindre coût. Désormais, un commercial pourrait enregistrer une vidéo de présentation générique, dont le discours serait ensuite personnalisé automatiquement en fonction des destinataires. Il trouve aussi un intérêt dans l'administration des ventes, la rédaction des contrats. Pour lui, le futur, "c'est une IA embarquée, sans couture, sans se rendre compte qu'on s'en sert ».
...et des limites
Pour l'expert, le piège principal est de croire que c'est une baguette magique. Outre une complexité d'installation, il met en garde contre les risques de manque de confidentialité. « Le fait que les grands éditeurs leur fassent déjà confiance pour monter des offres en commun laisse penser qu'ils ont des assurances sur la sécurité des données », estime Arnaud Bellamy. Xavier Paulik indique que des alternatives françaises et européennes se développent mais seront probablement plus chères.
Si les applications sont réelles en amont du cycle commercial, en aval, c'est plus limité. « Le closing reposera encore plus sur la confiance, l'humain, le ressenti émotionnel. L'IA se base sur les probabilités et les statistiques. Plus on va vers une relation individuelle, moins il y a d'intérêt », analyse Ider Oudad.
Par ailleurs, « ChatGPT commet des erreurs mais le dit rarement, avertit Xavier Paulik. Un contrôle est essentiel. » D'autant que ses connaissances s'arrêtent en 2021. Pour lui, pas question d'automatiser la rédaction et l'envoi de mails de prospection. L'outil propose plusieurs versions aux vendeurs « mais c'est à eux de décider », prévient-il.
Si Chat GPT est accessible gratuitement, avec une version pro plus rapide à 20 euros par mois, « le vrai coût pour l'entreprise inclut le coût de formation des collaborateurs à ces outils, ainsi que l'intégration. Pour un euro dans l'outil, il y a dix euros de temps passé », assure Xavier Paulik.
L'expert pense aussi que ChatGPT risque, dans une certaine mesure, de concurrencer des experts, en rendant les connaissances accessibles à des profils moins expérimentés, et en réalisant un travail un peu moins bon mais bien moins cher. « Que va-t-on choisir : augmenter les compétences des gens ou se baser sur celles de l'IA ? Le rôle des experts peut être amené à se transformer », s'interroge-t-il.
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Redéfinir les compétences à acquérir
Pour Xavier Paulik, l'IA implique un questionnement général sur les compétences nécessaires, puisqu'elle fournit d'énormes connaissances et permet de passer de l'information à la compréhension.
Le métier de commercial ne sera pas supplanté par l'IA mais bouleversé. Certains postes moins qualifiés devront être complètement réaménagés. « Une start-up fait appeler par une IA les secrétaires de dirigeants pour vérifier leurs coordonnées, ce qui est aujourd'hui une partie du travail des business development representatives, illustre Xavier Paulik. Les tâches à moindre valeur ajoutée disparaîtront ».
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En revanche, de nouvelles tâches, voire de nouveaux métiers vont émerger. Par exemple la supervision et le pilotage d'outils d'automatisation. Pour lui, les transformations iront peut-être plus loin qu'on ne l'imagine. Ainsi, la traduction en temps réel peut créer une intimité nouvelle avec les clients étrangers.
D'après Ider Oudad, la question, "c'est comment je me sers de l'automatisation pour me concentrer sur les tâches à plus forte valeur ajoutée ? Même si les interactions deviennent vraiment personnalisées, tout le monde fera pareil." Le commercial doit donc surprendre, aller plus loin, et trouver des accroches qu'une IA n'aurait pas pu avoir, avec par exemple des anecdotes très ciblées.
Surtout, il faudra que les commerciaux comprennent comment ChatGPT fonctionne, "sinon on va au-devant de déconvenues, prévient-il. Qu'ils comprennent la notion d'apprentissage, pour indiquer à l'outil ce qu'il fait bien ou pas. Et que cela repose sur une notion de probabilité. L'outil ne donne pas la vérité absolue », conclut-il.