Recherche
Magazine Action Commerciale
S'abonner à la newsletter S'abonner au magazine

« L'IA élargit les possibles...tant que l'humain garde le contrôle », Frédéric Kingue Johnson (Contentsquare)

Publié par Aude David le - mis à jour à
Frédéric Kingue Johnson - Contentsquare
© Aude DAVID - ActionCo
Frédéric Kingue Johnson - Contentsquare

Licorne française spécialisée dans l'Experience Analytics, Contentsquare gère de nombreux défis, notamment liée à sa croissance fulgurante. Recrutement des forces commerciales, apports (et limites) de l'intelligence artificielle, rôle du manager commercial...son directeur général, Frédéric Kingue Johnson, en témoignait lors du HubSpot Sales Tech Summit 2025.

Je m'abonne
  • Imprimer

21e salarié à être embauché par Contentsquare, plateforme d'Experience Analytics basée sur l'IA, Frédéric Kingue Johnson est aujourd'hui le directeur général France et Europe du Sud de cette licorne française, aux 2 000 salariés et 15 bureaux dans le monde. Créée en 2008, l'entreprise enregistrait en 2017 un chiffre d'affaires dépassant les neuf millions de dollars. Les levées de fonds se succèdent, atteignant les 600 millions de dollars (587 millions d'euros) en 2022.

Des chiffres vertigineux, mais qui n'empêchent pas les difficultés, assure Frédéric Kingue Johnson, lors d'une conférence du HubSpot Sales Tech Summit à Paris le 28 janvier. Des complexités qui sont aussi excitantes, et portées en premier lieu par la vente. L'accompagnement d'une telle croissance exige tout d'abord des recrutements de commerciaux. Pour le directeur général, « curiosité, adaptabilité, coachabilité et résilience » restent les compétences indispensables aux commerciaux.

Selon lui, certaines qualités importent plus ou moins suivant les trois phases de développement de Contentsquare, « ce qui change la façon de recruter des commerciaux ». Première étape, celle de la start-up, l'entreprise cherche « des Sales Artists, un peu foufous, qui n'ont peur de rien, ce n'est pas grave s'ils ne sont pas très structurés ». Au stade suivant de scale-up, l'accélération du développement requiert des profils « plus rigoureux, chasseurs, avec une capacité à travailler en équipe. Structurés mais pas trop, car ils ont besoin d'agilité ». Enfin, la phase de consolidation, avec l'atteinte du statut de grosse PME. Les commerciaux y ont alors un rôle de « Trusted Advisor, et font de la vente de valeur. Le travail avec l'écosystème interne et externe est important ».

Si le DG essaye de privilégier l'adaptabilité, il reconnaît que c'est impossible pour certaines personnes. « Je le comprends, mais malheureusement elles ne sont plus adaptées à la structure ». Parfois, la formation ou le changement de poste suffisent, parfois le départ est inéluctable.

IA : potentiels et déconvenues

L'adaptation concerne aussi l'appréhension des nouvelles technologies. Après l'arrivée de l'intelligence artificielle générative, la direction commerciale a lancé six agents d'IA aux divers usages : lecture de rapports financiers pour élaborer des discours commerciaux, lecture d'articles de presse, visionnage de vidéos pour extraire un contenu pertinent, etc.

Aude DAVID - ActionCo

Frédéric Kingue Johnson, DG Europe du Sud de Contentsquare, au Hubspot Tech Sales Summit

Frédéric Kingue Johnson raconte que « lors du kick off, tous les commerciaux étaient excités, mais seuls deux agents ont été utilisés ». Il a compris que l'adoption était liée à la capacité d'accompagnement du management. Qu'il était nécessaire de construire « des guidelines très claires, adaptées aux attentes et aux objectifs ». Inutile de demander à son équipe de tester toutes les possibilités de l'outil ex nihilo. En revanche, elle doit apprendre à l'utiliser avec discernement. Il est ainsi arrivé que l'agent IA analyse le mauvais rapport financier, aboutissant à des résultats illogiques, et que les commerciaux ne détectent pas l'erreur du fait qu'ils n'avaient pas ouvert le rapport.

Il y eut d'autres mésaventures, comme la fois où un commercial a réalisé, pour son plan de compte et à l'aide de l'intelligence artificielle, « un mapping incroyable, je n'en avais jamais vu d'aussi clair et précis. Nous étions tous confiants sur la maîtrise des interlocuteurs ». En cours de route, le commercial réalise avoir oublié une business unit dans son mapping, erreur que l'IA n'a pas détectée non plus, car elle a considéré cet élément comme peu stratégique. En réalité, « cette BU avait une telle influence sur les autres que cet oubli pouvait faire capoter le projet ». Ce qui fut le cas. Le commercial, confiant dans les résultats de l'IA, n'avait pas ou peu creusé le sujet auprès de partenaires. Résultat, le deal ne s'est pas fait. « L'IA est très utile pour le mapping, mais ne peut pas remplacer la discussion avec les acteurs de l'écosystème visé », en conclut le DG.

En revanche, l'intelligence artificielle permet des gains de productivité, un « élargissement du champ des possibles », une meilleure gestion des pipelines et des forecasts, avec une approche plus rationnelle... tant que l'humain garde le contrôle.

Le rôle du leader commercial

La place de plus en plus prépondérante d'outils technologiques a, de l'avis de Frédéric Kingue Johnson, fait évoluer le rôle des décideurs commerciaux au sein de l'entreprise. « Il y a dix ou quinze ans, les directeurs commerciaux n'étaient pas forcément consultés pour le choix d'outils. Aujourd'hui, le poids de la Sales Tech change la donne. Chez Contentsquare, ils endossent le rôle d'influenceur et de prescripteur, rôle qui peut être encore plus important dans une start-up ».

D'autres relations évoluent également : « avant, il y avait une dichotomie entre le marketing et le commerce. Aujourd'hui, ils forment un bon duo. Les KPI sont plus alignés ». Il cite aussi le RevOps (Revenue Operations), qui n'existait quasiment pas il y a quelques années, et occupe désormais un rôle de prescripteur et d'harmonisation des équipes. « La tech permet aux leaders commerciaux d'aborder de nouveaux sujets, ne se limitant plus au seul forecast. Nos idées sont écoutées, c'est agréable », assure-t-il.

Face au développement de ces nouvelles technologies, les leaders commerciaux doivent savoir accompagner leurs équipes, « réinventer la posture commerciale face à l'IA et pour cela revenir aux basiques. L'intelligence émotionnelle est clé, cela n'a pas changé ». Or, l'intelligence artificielle ne peut, contrairement au commercial, entretenir un lien avec les clients, les rencontrer, partager un repas d'affaires avec eux... « Le couple tech/humain, c'est la clé, il faut trouver le bon équilibre. L'adoption de l'IA doit faire grandir les équipes commerciales, l'humain », conclut Frédéric Kingue Johnson.

 
Je m'abonne

NEWSLETTER | Abonnez-vous pour recevoir nos meilleurs articles

La rédaction vous recommande

Retour haut de page